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Vers le milieu du détroit de Magellatl ] fur la
cote d’une île fituée v is -à -v is la baie Defcordes
.ou baie verte , on a vu des fauvages entièrement
mids, armés de flèches d’un bois fort dur , qu’ils
ianeoient vigoureufement avec la main. La pointe
avoit la forme d’un harpon. Comme elle n’étoit
fixée au bout du bois qu’avec des boyaux de chiens
marins., elle reftoit dans le corps de ceux qui en
étoient frappés, & on ne l’en retiroit qu’avec b.eau-
houp de peine. Dès que .ces fauvages eurent ap-
perçu les chaloupés du vice-amiral Defcordes , ils
•defcendirent de leurs canots fur le rivage, & jet-
■ terent une fl grande quantité de pierres, que les *
Hollandois n’ofèrent approcher. Cette crainte inf-
pira de la confiance à leurs adverfaires ; ceux-ci,
fie rembarquant, auflitôt s’approchèrent des. chaloupes
en jettant de grands cris. Une décharge
de moufqueterie en. tua quatre ou cinq : touts les
.autres effrayés regagnèrent la terré, ôc arrachèrent
dès jeunes arbres, pour s’en faire des armes ofïen-
fiives ou défenfives.
M e r d ü S u j>;
, Dans les îles aufirales, Lemaire vit d’abord,
en 16 16 , à celle qu’il nomma île fans fond , la
jnaflùe Ample, une efpèce de malle garnie par le
bout de bouts de branches , ou d’épines , ôc la
fronde ; point d’arc & de flèches. Ceux de l’île
des Cocos portoient de gros .bâtons d’un bois très
dur dont l’extrémité étoit tranchante : la pierre
eft la feule ; arme de jet qu’on leur vit alors. A
l ’île. St.- Jean , vers la nouvelle Guinée , les fau-
vages , un peu moins barbares, avoient, avec les
pierres ,1a maffue ôc la fronde, la zagaie ôc le fabre.
Aux îles de Dïfappointement , le commodore
JByron t r o u v a e n ( 1760 , les habitans armés, de
pierres ôc. de , piques longues de fieize pieds au
moins. En 1767 , les habitants des îles Charlotte,
armés d’arcs,& de flèches, attaquèrent avec.beau-
çoup d’ordre Ôc. de courage le canot du capitaine
Carteret. Le maître qui le commandoit fut percé
de trois1 coups de flèches dont il mourut. Les arcs
de ces fauvages ont environ fix pieds de long ,
les - flèches quatre pieds.. Suivant le-rapport du
maître - anglois , ils tiroient .par pelotons , fans
interruption j avec autant d’ordre que les troupes
européennes : mais , le capitaine foupçonna qu’il
exagéroit fon récit, pour couvrir fia faute. Ceux
qui l’ayoient accompagné l’accusèrent d’avoir provoqué
&:offenfé les infulaires, qui l’av.oicnt reçu
avec- foutes les marques de la confiance ôc de.
l’amitié.
/ Les armes des Tahitiens font les pierres , . la
maffue-, le bâton long de fix ou. fept pieds , d’un
bois très...dur , une efpèce de. pique, ou javeline
de même bois , qu’ils,lancent avec adreffe. Ils ont
suffi la.cuiraffe-, le bouclier , le cafque. auquel, ils
donnent environ quatre pieds, ôc demi. de haut.
Le capitaine Wallis jugea par les bleffures qu’il
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vit à quelques-uns d’entr’eux , que leurs ennemis
employoient les pierres lamaflùe ôc. au très armes
obtufes, -Ils çonnoiffent l’arc & la flèche ; mais
ils n’en font ufage que dans leurs jeux, ôc ne
s’exercent qu’à jetter le trait le plus loin qu’ils
peuvent , fuivant le tir parabolique ; au contraire
de la javeline qu’ils lancent dire élement. Ils l’arment
d’un os de raie , au défaut de fer qu’ils n’ont pas.
C ’eft la nature feule qui guérit leurs plaies. L à ,
un fang pur & la tempérance ferment promptement
les plus grandes bleffures : il fuffit d’aider ce baume ,
le plus falutaire de touts, en tenant propre la plaie.
On pourrojt croire que le beau ciel de cette île
contribue principalement à ces guérifons, ôc que
nos médicaments compliqués font néceffaires en
Europe. S’il m’efi: permis d’augurer des grandes
chofes par les médiocres, je dois penfer que ce
fieroit une erreur. Le traitement tahitien m’a réuffi
complètement à Paris fur un garçon boulanger
qui s’étoit coupé le poignet dans toute fa. largeur.
Un chirurgien , qu’il confulta , lui propofa des
onguents, ôc lui demanda pour le guérir au moins
trois mois. Cet homme vivoit de fon travail, ÔC
n’avoit ni allez de temps , ni affez d’argent. Je
lui dis de laver fa plaie deux fois le jour avec de
l’eau tiède, ôc d’y .tenir une compreffe trempée
dans la même eau, ôc changée dès qu’elle feroit
près de fe sécher. Mais, comme je m’apperçus
qu’il fe défioit d’un remède fi Ample ; je feignis ,
pour trânquilifer fon imagination allarmée , d’y
joindre une eau meryeilleufe pour les bleffures,
& je ne mis en effet qu’une cuillerée d’eau-de-
vie dans une pinte d’eau. Huit jours après la plaie
étoit aufii belle qu’on pouvoit la defirer j déjà
fermée à moitié , & dans quinze jours il fut en
état de. reprendre fon travail.
Une-javeline d’un bois dur, pointue par les deux
bouts , longue d’environ huit à treize pieds de
long , une efpèce de hache faite de talc, de bafalfe,
ou d’os , dont le tranchant eft fort aigu , font les
armes en ufage à la nouvelle Zélande : la hache
y eft nommée patoupatou , ôc s’attache à la cein-,
ture. Les habitans s’exercent à les manier, contre
un poteau planté en terre , comme les anciens
Romains. Le combattant s’avance avec une efpqce
de füreur, en agitant & ferrant fortement fa javeline
qu’il lance de toutes fes forces. Lorfqu’il .en
frappe fon adverfàire ; il court à lui , tenant 'le
patoupatou, ôc lui frappe la tête à coups redoublés.
D ’après .cette manière de combattre les officiers
du capitaine Çook conjeélurerent que ces infulaires
ne faifoient point de quartier. Ils fe fervent
aulfi d?un bâton d’environ cinq pieds de long, qui
porte une feule pointe., ou. plufieurs comme une
hallebarde : quelquefois l’autre extrémité eft large ,
ôc fgite. comme une pale, de rame. Ils ont encore
un autre bâton pointu par un bóut , ôc large ôc
tranchant à l’autre bout comme une hache : celui-ci
. eft plus court d?enyiron .un pied. Les pointes .de
leurs jay.elines fout faites d’os de pojflon, ôc barbe-
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lëes. H y en a auffi d’un bois pefiant Ôc dur, celles-ci 1
font quelquefois garnies de morceaux pointus de
coquilles brifées : on les enfonce dans le bois, ,
& on les affermit dans la fente avec delà réfine. '
Celles d’os font fouvent fermées par l’aiguillon à i
délits de foie, que l’efpèce de raie , nommée paf- !
tenague, porte fur le milieu de la queue. A celui-ci
on en attache plufieurs autres plus petites , qui
forment les barbes : ces pointes font enduites d’une
réfine dure, qui prend le p oli, ôc les fait entrer !
plus avant dans la bleffure. Dans la partie mérir ,
dionale de l’île , cette lance ou javeline a quatre
branchesytdont chacune porte un os pointu, &
barbelé ; au nord elle n’en a qu’une , ôc le feu eft .
fait d’une efpèce de canne ou d’un jonc très droit,
& très léger : il eft de plufieurs pièces qui entrent
les unes dans les autres, ôc font attachées enfemble.
Les bleffures faites par ces lances font très dan-
gereufes. On ne peut pas les retirer fans déchirer ,
la plaie, ou fans y laiffer les pointes d’os ou les
coquilles qui forment les barbes. Les Zélandois
manient ces javelines, ainfi que leurs autres armes,
avec tant de force ôc d’agilité, que, l e l’aveu des
Anglois, ceux-ci n’auroient pu leur oppofer avec
avantage, que des fufils. La fro'nde ôc l’arc leur
font inconnus : ils n’employent d’autres armes de
jet que la pierre, ôc le javelot ; mais ils n’en font
ufage que pour défendre leurs forts,
La main fuffit pour lancer la javeline à huit ou
dix toifes : mais , pour la jetter à une diftance
double, ces infulaires ont inventé un inftrument
que les Anglois nommèrent bâton à je tte r . C ’eft
un morceau de bpis dur, & rougeâtre , uni 6c très
bien poli , d’environ deux pouces de large, d’un
demi-pouce d’épaiffeur , ôc de trois pieds de long.
A l’une de fes extrémités, il porte un petit bouton ;
a l’autre, une pièce qui le traverfe à angle droit.
Le bouton entre dans un petit trou pratiqué au
fut de la lance , près- de la pointe , mais duquel
il fort aifément, lorfqu’on pouffe Y arme en avant.
La lance -étant placée fur ce bâton, 6c affurée dans
fa pofition par le bouton , celui qui doit la jetter ,
place la machine fur fon épaule , la traverfe en-
arriere, 6c verticale. Après l’avoir agitée , il la
pouffe en avant de toute fa force : alors la traverfe
venant à frapper l’épaule , s’y arrête, 6c Y arme
part avec une rapidité incroyable. Ces infulaires
en ont une telle habitude , qu’ils manquent rarement
leur but à vingt toifes de diftance. n
Les Zélandois çonnoiffent auffi les armes, défen-
fives : ils ont l’ufage du bouclier. Le capitaine
Cook en a vu un fait jd’écorce d’arbres : la forme
en étoit ovale j il avoit trois pieds de long fur
dix-huit pouces de largeur. De plus, ce navigateur,
6c les gens de fon équipage, ont fouvent rencontré
des arbres où l’on voyoit la place des
boucliers qui en avoient été pris. Ils en ont même
vu qui n étoient que cernés, ôc non encore enr
iÇVés. L’ecorce étoit un peu élevée fur les bords
Art militaire% Tome ƒ,
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à l’endroit de l’entaillure : ces peuples paroiffent
avoir obfervé qu’elle devient plus épaiffe, 6c plus
dure quand on la laiffe fur le tronc après l’avoir
entaillée.
Les infulaires de Middelbourg ont des maffues
de différentes'formes j la plupart fi pefantes, que
les Anglois ne pouvoient pas les foulever d’une
main : elles font le plus fouvent quadrangulaires
à la partie inférieure , arrondies vers la poignée ;
d’autres pointues , d’autres plates : toutes bien
travaillées , parfaitement polies , 6c ornées de
compartiments très réguliers. Elles font faites du
bois de l’efpèce de pin nommé cafuarina. Leurs
lances font du-même bois 6c travaillées avec le
même foin : on le nomme bois de maffue, parce
que les armes déboutés les îles de la mer du fud en
font faites.
La conftruélion de leur arc eft particulière. Il
a environ fix pieds de long , 6c fix ou huit lignes
d’épaiffeur. Quand il n’eft pas tendu , il forme une
légère courbe. La partie convexe porte une profonde
cannelure, où la corde alors eft placée. Ou
le bande en la tirant du côté convexe , c’eft-à-
dire en fens contraire à fa courbure naturelle. La
flèche. eft un bambou long de fix pieds , arme,
d’une pointe de bois dur.
On retrouve à Y île de Pâque la maffue 6c la
lance ; à celle de Palïfer ou Tioukéa, la maffue
longue, le pieu court, 6c arrondi, la pique de huit
à. treize pieds , armée d?une queue dentelée de
raie ; à Î’île Sauvage , à celle de Roter dam , aux
îles hébrides, à celle de Mallicolo les mêmes armes1
mais dans cette dernière il y a des flèches em-
poifonnées. Dans l’île ôYErramaya ils ont de plus
des javelots ; dans celle de Tanna le javelot, ÔC
la fronde.
A f r i q u e .
A l’extrémité méridionale de l’Afrique , les
Hottentots ont la pierre , l’a rc , la zagaie ou javeline
, le rakkum ou javelot , ôc le kïrri qui eft
une arme défenfîve : c’eft un bâton d’environ trois
pieds de long 6c d’un pouce d’épaiffeur , avec
lequel ils parent les coups qu’on leur porte. Les
armes des nations nègres font le ja velot, l’arc , la
zagaie, la lance, l’épée, 6c le fabre. Ces deux-ci
étoient au Mexique 6c au Pérou : elles prouvent
un pas de plus dans les arts. Les Foulis ont un
coutelas fort court qu’ils appellent fong.
Chez les Jalofs , l’infanterie porte l’arc , le carquois
, les flèches dentelées 6c empoifonnées , la
javeline, Ôc le fabre. L’arc eft fait d’un rofeau fort
dur, qui reffemble au bambou : la corde avec les
fibres ligneufes d’une autre efpèce de plante. La
cavalerie a le javelot à pointe dentelée, la zagaie ,
le fabre, le couteau morefque , long d’environ
quatorze pouces , 6c le bouclier rond, d’un .cuir,
fort épais. De loin , l’infanterie lance les flèches
paraboliquejnent , ôc de près en ligne direéle,
i On nous dit que les nègres, en général, font furs