
tions convenables à la conformation de l’animal
auquel elle eft deftinée. 11 faut que le capitaine de
cavalerie connoiffe encore les qualités & les vices
des chevaux , tant pour n’être pas trompé dans
l’achat de ceux qu’il deftine à fon ufage, que de
ceux qu’il peut fe trouver dans le cas d’acheter pour
fon régiment. La connoiffance des fourrages & des
avoines lui eft encore indifpenfable : il confervera
fouvent des chevaux au roi, s’il fe rend habile dans
cette partie importante. Puifque les bas-officiers de
cavalerie, les brigadiers, par exemple, ( Voyeç
Brigadier , feéfion IV , ) , doivent connoître
1 art hippiatrique , le capitaine de cavalerie doit en
avoir pénétré les fecrets. Ce qui fuit eft une règle
que les militaires doivent regarder comme générale.
Nous devons pofféder , non - feulement les
connoiflances néceffaires au rang que nous occupons
, mais même toutes celles qui font propres à
touts nos fubalternes. Ainfile caporal doitfçavoir ce
qui concerne les caporaux, &. ce qui appartient
auX « f i k fergent doit, par la même raifon,
connoître tout ce qui eft relatif à fon grade , &. tout
ce que doivent fçavoir & faire les caporaux & les
foldats, &c. Quant aux militaires qui font animés
par le defir de marcher à grands pas dans la carrière
des honneurs & des grades, ils doivent ajouter
aux connoiflances dont nous venons de parler celles
• qui appartiennent au grade qui les précède im-
xnédiatement dans l’ordre militaire. Ainfi le capitaine
fage & prévoyant , apprendra tout ce qui
regarde un major , & cette connoiffance qu’il aura
acquife lui fera certainement utile. Le hafard le
mettra peut - être dans le cas de commander fon
regiment, ou de faire les fondions de major. S’il ;
les remplit avec Supériorité,fes chefs s’emprefler ont !
de le citer dans les occafions, & travailleront avec
zele à fon avancement. Souvenons-nous toujours
qpz nous manquons plus fouvent à Voccajion de parvenir
que Voccajion ne nous manque.
Le capitaine qui aura acquis les connoiflances
que nous venons d’énoncer n’aura plus qu’un
écueil à craindre : c’eft l’amour vif que l’on conçoit
pour les fciences & pour les arts, quand on a goûté
les plaifirs purs qu’ils procurent. Oui, quand nous
avons fait quelques pas vers leur fanduaire, nous
oublions trop fouvent que les devoirs de notre
état, tout minutieux qu’ils paroiffent, font les
plus facrés & les pins importants, & que nous
ne devons rechercher dans les fciences que ce qui
peut nous rendre pins propres au pofte que nous
occupons. Loin de nous cependant l’idée qu’un
capitaine ne doive s’occuper que de l’art militaire.
B peut, il doit même, pour donner du reffort, de
l’aérivité, & de l’agrément à fon efprit, chercher
dans la littérature , dans les beaux arts , ou dans
les fciences, des délaffements agréables. Mais,
fut-il occupé à réfoudre un problème important,
fa palette fut-elle chargée des couleurs les plus
fraîches, fe trouva-t-il dans l’accès d’un enthdu-
fiafme heureux \ fi le tambour l’appelle au quartier,
il doit jetter la plume , le compas, le pin-
çeau , ÔL aller commander avec plaifir quelques
temps de l’exercice ", vifiter les effets de fes foldats,
ou^ calculer la dépenfe que les chefs de fes chambrées
auront faites pendant la durée d’un prêt ;
en un mot, Subordonner l’agréable à l’utile.
Connoiffance du coeur humain. Outre les connoiflances
dont nous venons de parler, les capitaines
doivent acquérir celle du coeur humain.
Ceux qui la pofféderont fçauront la manière de
tirer un parti avantageux des paflions qui mènent
les hommes. ( V oyeç le paragraphe II de la fec-
tion Ire de l’article G én éra l. ).
Connoiffance de foi-même. Les capitaines doivent
aufli fe connoître eux-mêmes. Qui ne fe connoît
pas-eft fans celle expofé à commettre des fautes
I groffieres , à fe laifler emporter par fes goûts ,
conduire par la prévention , & aveugler par
1 amour propre. ( Voyeç le paragraphe Ier de la
feérion l re de l’article G énéral.).
Conhoijfance de fa nation. Le françois diffère
autant de l’aliemand , que l’allemand de l’italien ,
&. que celui-ci diffère de l’anglois : chacun de
ces peuples a fon caraéfère & fon genre de valeur.
Le capitaine qui n’aura pas acquis fur touts ces
objets des connoiflances étendues tombera en des
erreurs préjudiciables au fervice de fon prince.
( Voye^ le paragraphe III de la feâioa Ire de
l’article GÉNÉRAL.).
Connoiffance de fa compagnie. Quoique chaque
nation ait un caraéfère général, quoiqu’on retrouve
prefque toujours dans chaque régiment, dans chaque
compagnie , & dans chaque individu , la teinte „generale
du caraélère national, on remarque cependant
des nuances diftinéles entre les divers corps
qui compofent une armée, entre les différentes
compagnies du même régiment , & entre les foldats
de la même compagnie. Le capitaine s’attachera
à connoître à fond l’éfprit général de la
compagnie qui lui fera confiée ; & , quand il l’aura
faifi, il s’attachera à connoître en détail celui de
touts les hommes qui la compofent. Il étudiera
d’abord fon principal bas-officier : il verra s’il eft
plus fenfible aux récompenfes qu’aux punitions ,
aux diftinétions honorables qu’aux récompenfes
pécuniaires ; s’il a befoin d’être contenu ou excité.
II examinera quels font fes goûts , fes talents, fes
moeurs , fes pallions , fon génie , & fon genre
de courage. Il defcendra enfuite de bas - officier
en bas-officier , de-Soldat en Soldat , jvfqu’à ce
qu'il ait pénétré jufqü’au dernier homme de recrue
de fa compagnie. Cette étude demande des foins
continus, de la patience , & de la Sagacité , mais
que ne peut un zèlefoutenu ? Il eft inutile qué nous
cherchions à prouver la néceflité de ces corinoifi-
fances : il fuffit, pour en être convaincu, d’y avoir
réfléchi un inftant. Pour les acquérir , le capitaine
ver-fà fouvent fa compagnie ; il obfervera fes bas-
officiers & fes foldats , dans les moments où ils
ne croiront pas être fous fes yeux \ il ne s’ea
Rapportera jamais aveuglément aux comptes que
lui rendront fes fergents , ou fes maréchau'x-d#-
logis. Ces bas-officiers font des hommes, & des
hommes prefque toujours peu éclairés j qui, par
conféquent, font fujets à fe laifler conduire par
la prévention, & entraîner par leurs paflions. Il
parlera fouvent à fes foldats ; il les fera parler
plus fouvent encore. 11 examinera leurs aérions ;
il fe rappellera leurs propos ; il raffemblera beaucoup
de faits & d’obfervations ; il les comparera ;
& , de cet examen , il verra bientôt fortir une lumière
vive, qui l’éclairera.
Comme les capitaines font obligés de faire des
recrues pour leurs régiments , ils doivent s’exercer
de bonne heure à juger d’après la conformation
des hommes qui fe préfentent à eux du degré
d’aptitude qu’ils ont au métier de la guerre. Nous
n’adoptons certainement pas touts les principes
que des obfervateurs fyftématiques ont donnés
fur le rapport qu’ils prétendent avoir reconnu entre
la conformation extérieure & les qualités morales
des hommes. Cependant, comme l’officier
qui fe fera exercé à reconnoître cette efpèce
d’analogie jugera avec plus de juftefl'e que celui
qui aura négligé cette étude , il fe trompera moins
fouvent fur les qualités morales des recrues , &
il devinera plus sûrement le degré d’accroiffement
que leurs qualités phyfiques doivent prendre, {foyer
R e c rue s .).
Connoiffance des nations ennemies. Des notions
exactes fur le peuple qui lui eft oppofé pendant la
guerre font encore utiles au capitaine ,* elles peuvent
lui faciliter les opérations qu’il médite : nous le
prouverons en détail dans la feéHon IY du mot
ouvrage en terre.
T elles font les connoiflances qui font néceflaires
aux capitaines, & par conféquent aux officiers particuliers
, puifqu’ils font touts deftinés , comme
nous l’avons déjà dit, à devenir capitaines , &
qu’ils font très fouvent dans le cas d’en remplir
les fonéfions. '
S E C T I O N I I I .
Des qualités phyfiques néceffaires aux capitaines.
De la fantè, de la force , de la vue, & de la
taille. Pofféder les connoiflances néceffaires à l’état
dans lequel notre naiffance , notre goût , ou le
hafard nous a placés, c’eft beaucoup fans doute ;
mais ce n’eft pas tout. Chacune d.s claffes de la
fociété exigent que fes membres réunifient des
qualités morales & phyfiques différentes, ou au
moins différemment modifiées.
Si uiiepuiffancen’admettoit pour officiers dans fes
armees que des hommes qui auroient reçu de la nature
une taille haute & bien conformée, une figure
agréable & heureufe , elle fe priveroit d’un grand
nombre de fujets capables de lui rendre de grands
Services; mais, fi elle admettoit indiftinétement dans
fes troupes des jeunes gens dont la vue feroit délicate
ou baffe , dont le tempérament feroit foible , &
la fanté chancelante, elle verroit fouvent une partie
de fes foldats commandée par des officiers qui ne
pourroient les conduire, leur donner l’exemple de la
,confiance dans les travaux , leur apprendre à faire
de longues marches, à fupporter la faim , la foif,
le froid , & le chaud. Tout chef de corps qui s’informe
de la taille & de la ftature du fujet qu’on lui
préfente avant de demander s’il eft fort &. vigoureux,
s’il a une bonne vue, & une fanté robufte ,
n’eft pas fait pour commander des militaires ; il eft
propre tout au plus à conduire un régiment fur une
efplanade, ou à le faire parader fur la place d’armes
d’une de nos villes de guerre.
( Nous avons en France des provinces où les
hommes font très-petits. Un colonel écrivit à un
de fes capitaines , qui étoit breton , de lui amener
une douzaine d’hommes de cinq pieds fix pouces
au moins. Le capitaine lui répondit qu’il n’y avoit
pas un homme de cette taille dans toute la pro-
, vince ; mais que , s’il vouloit des foldats braves ou
forts, "il lui en ameneroit beaucoup plus qu’il n’en
demandoit).
De la naiffance du capitaine. Parmi les questions
qui font relatives au choix des officiers Subalternes
, une des plus importantes eft fans douto
celle qui fuit : -
La nobleffe françoife doit-elle obtenir feule le»
emplois d’officiers Subalternes , ou doit - on permettre
aux officiers particuliers du royaume qui
jouiffent des prérogatives des nobles , & d’uns
fortune honnête , d’afpirer à ces emplois ?
M. le B. D. B. , dans fon examen critique du
militaire françois, a confacré un chapitre entier
à la difeuffion de cette queftion intéreffante , ÔC
il finit par dire qu’il eft néceffaire de donner aux
gentilshommes Seuls touts les emplois militaires.
L’ordonnance qui fixe les preuves que doiventfaire
les perfonnes. qui Sollicitent l’agrément de Servir
en qualité d’officier , Semble avoir fixé- définitivement
ce qu’on doit penfer fur cet objet : cependant.....
faifons des voeux pour qu’une guerre
longue & cruelle ne nous force pas d’abroger cette
loi ; faifons des voeux pour que la nobleffe françoife
n’ait jamais befoin d’être renouvellée ; faifons
des voeux pour que les hommes à qui le commerce,
l’agriculture, ou les arts auront procuré une fortune
confidérable tournent leur ambition vers quelque
autre objet capable de la fatisfaire & d’entretenir
leur aérivité ; faifons des voeux, enfin , pour que
les Faberts , lés Cheverts, &. touts les françois
qui leur reffemblent, ou qui leur reffembleront,
doivent le jour à des parents illuftres.
De Vâge du capitaine. Quelque peu compliqués
que Soient les devoirs des capitaines, ils demandent
cependant une raifon formée par l’expérience , un
jugement fain, & une ame au-deffus de la plus
grande partie des paflions tumultueufes auxquelles
l’ardente jeuneffe s’abandonne. Quand l’ancienneté
O o o i j