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particulière , ne change rien à-fon crime. Il enfreint
les droits de la fociété ; il miéprife les loix civiles ,
qui doivent feules être fes vengeurs. Il les méprife
Ôl les brave encore , s’il v a , comme duellifte ,
provoquer fon ennemi particulier ; mais du moins
il n’eft alors ni lâche ni ajfajjîn.
La guerre fe faifant en commun, & de nation à
•nation, toutes les agreilions légitimes y doivent
être faites en général, & fans diftin&ion de personnes
: toute agreffion particulière 4 dirigée fecré-
tement contre un individu , quel qu’il foit, eft tra-
hifon, perfidie , lâche affaffinat ; & le fouverain
ou le chef n’eft , dans une guerre aâuelle, qu’un
individu comme touts ceux qui font en commun
cette guerre. L’attentat de Scævola fut un véritable
crime, un affaffinat lâche en lui-même, puifqu’il
attaquoit avec trahifon-un individu défarmé. Il eft,
fans doute , permis de tuer à la guerre un ennemi
par-tout où l’on peut le trouver : mais c’eft en
général, & non tel ou tel que l’on a défigné
comme fa viélimé. Les fix cents Lacédémoniens ,
que l’on cite ic i , n’avoient pas des poignards cachés
dans leur fein. Ils entrèrent, les armes à la main ,
dans un camp de cinq cents mille hommes ; ils marchèrent
à la tente du ro i, non pour l’attaquer lui
feul perfonnellement ; ( ce n’étoit pas là l’efprit
vertueux de Lacédémone ) ; mais touts les Perfes
ênfemble , & lui le premier. S’ils fuffent entrés
dans le camp ennemi , furtivement , déguifés ,
cachant leurs armes, à deffein de tuer le roi feu l,
ce n’aüroient point été fix cents guerriers , fix
cents Spartiates , mais autant de meurtriers. Les
exemples de Marcellus & de Cérialis ne font pas
mieux choifis : l’un , marchant à la tête de quelques
troupes, fut enfermé par les Numides dans une
vallée , & tué dans le combat : l’autre, furpris
dans fon camp , par les Germains , auroit pu être
enveloppé dans le carnage qu’ils firent des Romains,
s’ils feulent trouvé dans fa tente : mais ni les uns
ni les autres n’avoient un deffein prémédité de
tuer le conful.
D e même Eléazar , s’attachant à l’éléphant qu’il
croyoit être celui d Antfochus, ne viola le droit
des gens en aucune manière. Cétort dans une bataille
, & il-l’attaqüoit à force ouverte, au milieu
de fes troupes. Dans le combat, tout homme eft
ennemi, tout eft légitime ; hors du combat, tout
rentre dans l’ordre locial , & l’homicidè eft un
crime.
Quoique je blâme l’attentat de Scævola , je
diftingue l’aâion du fentiment qui la produifit :
elle fut lâche, & l’homme courageux , jufqu’à braver
une mort certaine. C ’eft aufîi tout ce que
Cicéron loue en lui ; c’eft le courage & non pas
l’affaffinat. « M o i, d it-il, homme confulaire, après
tant d'aétions glorieufes , je craindrois la mort !
moi iur-tout qui fuis de la même ville d’où Q. Mu-
tius alla dans le camp de Porfenna , & certain de
périr , tenta de le tuer ». Valèze Maxime l’approuve
par la même caufe^ & , fi l’on v eu t, je louerai 1
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avec lui l’intention de Vajfafjin ,* il croyoit fervir fa
patrie ; mais le courage &. l’intention ne voilent
point a mes yeux ce que Taéfion renferme d’odieux
& de lâche. Scævola fut un républicain fanatique
: il efpéroit que la mort du roi feroit lever
le fiége de Rome & termineroit la guerre : il
s’abufoit , ainfi que le feroient fes imitateurs.
L’effet naturel qui doit füivre une pareille atrocité
eft de faire preffer la ville avec plus d’ardeur, &
d exciter dans l’ennemi des fentiments éternels de
haine & de vengeance. Le feul qui montra dans
cette circonftance une véritable grandeur, ce fut le
roi q u i, plus fenfible au courage du meurtrier qu’à
fon injure, lui donna la vie, Quantaufénat, il permit
a Scævola d’aller feul dans le camp pour un grand
deffein; mais fhiftoire ne nous dit pas que ce deffein
lui fut connu, & qu’il y donna fa fanélion. S’il l’accorda
en fecret, & fi par des vues politiques il
refufa de la donner publiquement , ce fut un
fénat à’ajfajjîns. Polybe n’a point loué I’aâion de
Théodote , mais fon audace ,
Quant au fupplice auquel on condamne ordinairement
les meurtriers de ce genre, ils ne prouvent
pas, fans doute, l’énormité du crime; mais ce
dont ils font une preuve évidente , c’eft qu’on le
regarde unanimement comme une aâion non militaire
, qui ne fait point partie de la guerre, qui
h’ÿ eft point admife , & qui mérite d’être punie ,
parce qu’elle eft particulière & non publique. C’eft:
parla même raifon qu’on punit ceux qui font la
guerre fans aveu, qu’on fixe par un cartel le nombre
des hommes qu’il fera permis d’envoyer en parti ,
& que l’on condamne à mort les efpions parce qu’ils
ne font pas du nombre de ceux qui font légitimement
& guerre , & qu’ils s’immifcent dans une querelle
à laquelle ils ne doivent pas prendre part :
les partis de troupes légèfès ne font pas traités de
même , quoique ce foient de véritables efpions.
Plufieurs autres, jurifconfultes & entre autres
Puffendorff , ont décidé comme Grotius qu’il étoit
permis de faire affaffiner un ennemi.
D ’un appui de Thémis , eft-ce là le langage ?
M o i, nourri dans la guerre , aux horreurs du carnage ,
Miniftre rigoureux d’un monarque irrité ,
C ’eft moi qui prête ici ma vnix à l’équité !
Et vous qui nous deviez des entrailles de père ,
Vous , miniftres de paix , dans les temps de colè re,
Vous pouvez applaudir dë lâches attentats-,
Et faire de la guerre un cours d’affaffmats !
A S SAU T . Attaque d’une pièce de fortifie a*
tion , faifant partie d’une place. On dit Yajfaut d’un
réduit, d’un ouvrage à corne, à couronne; d’une
contregarde, d’une demi-lune, du corps de la place ,
&mon pas Y ajfaut d’un camp, d’une place d’un
polie , ôte. ( Voyez P la c e , attaque des places.}.
ASSEMBLÉE. On nomme ainfi la réunion de
plufieurs troupes qui étoient féparées.
Tout chef dont la troupe eft difperfée doit lui
preferire un Weuà'affemblée ou de rendez-vous ,
depuis le chef d’une efeouade jufqu’au général
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«l’armée. Ce lieu varie fuivant la caufe & l’objet
de Yajfemblée. Pendant les marches qui fe font
dans l’intérieur du royaume , & dans lefquelles
une troupe loge toutes les nuits, dans quelque ville
ou village ; le caporal afligne pour le matin ôc
l’heure du départ un lieu de rendez - vous à fon
efeouade-, le fergerit à fa compagnie , le chef du
corps au régiment. Dans les places chaque troupe ,
& chaque divifion & fubdivifion de troupe , doit
avoir fon rendez-vous particulier en cas d’alarme :
celui du rendez-vous général eft ordinairement la
place principale ; ôt l’objet peut - être alors une
attaque ou une incendie : la différence des fignaux
diftingue ces déux cas.
Dans les camps on indique le lieu d’ajfemblee ,
foit particulier , foit général , aux gardes , aux
détachements , aux travailleurs , fourrageurs, en un
m o t, à touts foldats chargés de quelque opération
ou travail pour le fervice du camp, comme récolté
de légumes, diftributions de vivres, tranf-
port de munitions , de bois, & autres objets fem- 1
blables. Les tambours ont une batterie particulière |
qui fert de fignal pour Yajfemblée générale , fort j
d’une troupe, foit d’une armée , foit des détachements
qui doivent être fournis par touts les corps
dont l’armée eft compofée , & affemblés à une !
heure preferite ; tels que font journellement les
gardes d’une place, les grandes gardes & gardes j
ordinaires d’un camp. Dans ces cas déterminés & j
connus, la batterie, qu’on nomme auffi ajfemblée t !
commence par la droite ou par la gauche du camp, j
fuivant qu’il a été ordonné. Il y a une batterie !
particulière pour Yajfemblée des travailleurs.
Les points principaux qui font demandés dans L.
l ’aJJ'emblée des troupes pour les marches de paix !
& pour le fervice des places font l’ordre & la j
promptitude : Yajfemblée d’une armée à l'ouverture ;
d’une guerre , & de chaque campagne, en demande j
plufieurs autres, qui font relatives à la nature de !
la guerre que Ton projette , & à celle des lieux où j
on la porte. . j
Si la guerre eft offenfive , il faut avoir précé- |
demment difpofé les quartiers, & donné des ordres !
pour | | marche des troupes de leurs quartiers au .
rendez-vous de l’armée , enfor.te qu’elles y arrivent ;
toutes le même jour, s’il fe peut. Ces -mefures j
peuvent être juftes , fi on les règle fur le nombre j"
des jours démarché que doivent faire les troupes, j
en fe rendant dé leurs quartiers au lieu du rendez- i
vous général de l’armée. Ce .grand mouvement, |
fait tout d’un coup , prévient l’ennemi , &. lui j
-donne de là terreur , fentiments qu’ il eft important ’
de lui imprimer profondément, à l’ouverture d’une j
guerre. En ce cas, il faut que toutes les chofes I
néceffaires à l’exécution de l’entrepriie méditée fe j
trouvent en même temps à la fuite de.l’armée,
ou du moins à une diftance quj nè retarde par les
opérations.
Si l’armée s’affemble pour foutenir une guerre
défenfive, on doit la commencer .par Yajfemblée
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de l’infanterie en plufieurs gros corps, foit fous
les places ou dans les places que l’on craint que
l’ennemi n’attaque ; tant pour lui rendre fa première
entreprife plus difficile, que pour faire travailler
cette infanterie à la réparation des ouvrages de la
place , ou à la conftru&ion de nouveaux ouvrages.
On campe cette infanterie fous une place dans
un camp retranché & protégé de la place, s’il y
a commodité & avantage à le faire ; ou on la
loge dans la place même , s’il y a des couverts
fuffifants , ôt que Ton ne juge pas pouvoir prendre
avec fûreté ce camp retranché fous la place.
Il ne faut, en ce cas, mettre de la cavalerie
dans ces places que ce qu’il en faut, tant pour
avoir des partis dehors , être informé par eux des
mouvements de l’ennemi, & les faire fçavoir au
général, que pour la défenfe de la place en cas de
liège.
Tout le refte de la cavalerie doit tenir la campagne
, & non s’enfermer ; de crainte qu’elle ne
foitinveftie par l’armée ennemie : cependant -elle
doit le faire avec la fageffe requife pour fa fûreté
& pour la liberté de fes mouvements , qui peuvent
avojr plufieurs vues ; foit celle d’introduire un
fecours ou un convoi ,foit d’incommoder l’ennemi
dans fes tranfports de munirions & dans iestourrages.
Lorl'que, dans la fuite d’une guerre, on veut
^ffembler l’armée pour ouvrir la campagne, il faut
faire avancer l’infanterie la première,dans les villes
les plus proches du.lieu où Ton a réfolu d’affembler
l’armée, afin quelle n’ait pas beaucoup à marcher
pour s’y rendre. La cavalerie peut être laiffée en
arrière-garde, aux lieux commodes pour fafubfif-
tance, foit en fe c , foit en verd.
Si le général a pour objet de faire u'n fiège à
Touverture de la campagne , pour lequel on fe.fera
précédemment préparé ; ou la place qu’il veut attaquer
eft voifine de plufieurs villes de fon prince',
& l’objet unique ; où il veut donner jaloufie à
plufieurs places qui font également à portée d’être
attaquées , afin de tomber fur la moins pourvue.
Si fon objet d’attaque eft de la première efpèce ,
il doit affembler fon armée en phfieurs corps , également
d’infanterie & de cavalerie, afin qu’ils fe
mettent touts en mouvement vers le même temps,
relativement au. chemin qu’ils ont à faire , pour
arriver touts enfemble fur Te terrein de Tinvefti-
ture , où chaque officier général menant ces corps
aura connoiffancè de celui qu’il doit occuper.
Si la place que le général veut attaquer ne peut
être inveftie par une feule marche de ces corps
féparés, ou qu’il ait à donner jaloufie à plufieurs
places , pour1 tomber fur la moins pourvue , il faut
que Y a ffemblée de fon armée foit générale ; qu’aufîi-
tot qu’elle eft ajfemblée, il le porte vers la place qu’il
ne veut point attaquer , qu’il faffe faire en arrière
• des mouvements de pionniers & de greffe artillerie-,
i comme s’ils regardoient cette place, afin d’y attirer
i toute l’attention de l’ennemi.