
j occupe exige que je fois informé par vous de la
vérité. Je vous prie donc de, me mander , monfieur
le maréchal, ce qui s’eft paffé ».
Réponfe de M. le maréchal d ’E str e es.
« Les carabiniers, monfieur le duc, réunifient
tout ce qui peut/ leur attirer des envieux, même
des calomniateurs. Vous defirez d’être informé de
ce qui s eft paffe le 24 j le voici. Les carabiniers
étoient poftés pour couvrir les équipages. J’en-}
voyai dire a Saint - George de marcher ; ce qu’il
fit fur-le-champ. Il parut quelque cavalerie fur
notre gauche ; je fis marcher les carabiniers fur le
moment ; cette cavalerie fe replia dans l e s ' bois ;
quelques - uns des premiers efcadrons des carabiniers
{e défunirent par trop d’ardeur. Nous fîmes
deux charges d’infanterie affez heureufes : à la
troifième, il fallut bien céder au nombre. Je ne
donnai point d’ordre aux carabiniers pour charger
: c’eut été bien le cas cependant, même aux
dépens de ce qui auroit pu en arriver, s’il n’y
avoit point eu deux colonnes d’infanterie dans le
bois. Vous v o y e z , monfieur le duc -, que les carabiniers
n’ont pas eu l’apparence du tort le plus
léger. ( C ) ».
C A R A C O L E . Mouvement d’un cavalier ou
d’une troupe de cavalerie, par lequel ils fe portent
alternativement fur leur droite & fur leur gauche,
en marchant en avant. L’objet de la caracole eft d’inquiéter
l’ennemi, de le mettre en défordre, de lui
cacher la connoiffance du point fur lequel on veut
fondre , de l’engager a fe divifer , & de faifir un
moment favorable pour l’attaquer avec avantage.
Cette efpèce d’attaque eft^ propre fur-tout aux
troupes légères.
CAR ROUSEL . Fete militairè. Elle confiftoit
principalement en l’image d’un combat, représentée
par une troupe de cavaliers divifés en plu-
fieurs quadrilles ; en courfes de c h a r s d e bagues,
de fêtes, &c. Ces jeux étoient donnés par des
princes ou de grands feigneurs , pour quelque
réjouiffance publique, comme aux mariages, aux
entrées des rois. Ils commençoierit par une cavalcade
de plufieurs feigneurs fuperbement vêtus,
armés à la manière des anciens chevaliers , &
divifés en quadrilles. Ils fe rendoient à un lieu désigné
qui étoit fouvent une place publique , &
faifoient des courfes de bague, des joûtes, & autres
exercices militaires. On y ajoutoit quelquefois des
efpèces de chars de triomphe, des machines, des
danfes, &c. & ce fut de-là que ces fêtes reçurent
le nom de carroufel. Les Maures y introduifirent
les chiffres- & les livrées dont ils ornoient leurs
armes & les houffes de leurs chevaux avec plu-
fieürs applications myftérieufes. Les Gots & les
Allemands y ajoutèrent les cimiers , les maffes ou
bouquets de plumes de héron, & les aigrette^ La
plupart des machines furent de l’inyention des
Italiens,
L’ufage de ces jeux eft fort ancien. Tertullien
dans fon-livre des fpe&acles, remonte jufqu’à Cireé
pour l’invention de ces fêtes : il veut qu’elle aitété
la première àinftituer le cirque, & des courfes en
l ’honneur du foleil fon père : de forte que quelques
uns fe font imaginé que ce mot vient de
carrus folis , ou de çarro del foie. Ceci ne peut que
montrer l’abus de l’érudition & des étymologies.
Si on*en veut une ici, il y a plus d’apparence que
le mot carroufel vient des chars &. caroffes qu’on y
conduifoit.
Le père Ménétrier, Jéfuite, a parlé de cette fête
dans fon ouvrage fur les. tournois, joûtes, &c.
Les carroufels s’introduifirent en France fous le
règne d’Henri IV ; il s’en fit quelques-uns fous
Louis XIV, un entre autres en 1661, qui fut très
brillant. Il étoit compofé de cinq quadrilles, qui
reprefentoient cinq nations différentes : le roi étoit
le^ chef de la quadrille des Romains : Monfieur ,
frère unique du roi , l’étoit de celle des Perfes :
M. le prince de celle des Turcs: M. le duc de
celle des Mofcovites; & le duc de Guife de celle
des Maures. La marche, les courfes, & les autres
exercices y furent très bien exécutés. Ces jeu x , qui
etoient un refte de la chevalerie, ont paffé
d’ufage.
Ils étoient ornés de chars magnifiques, de machines
, de décorations, de devifes, de récits, de
concerts, & de ballets de chevaux ; cette diverfité
formait un fpeâacle magnifique.
_ Comme l’objet de ces fêtes étoit d’inftruire les
princes, & les perfonnes illuftres- en faveur desquelles
elles fe faifoient, ou d’honorer leur mérite ,
lefujet devoit en être ingénieux, militaire, & convenable
aux temps, aux lieux , & aux perfonnes.
Il y avoit dans un véritable carroufel ;
1 °. Le meftre-de-càmp, S1 fes aides.
2°. Les cavaliers qui compofoient chaque quadrille.
30. Leurs cartels, leurs noms, leurs habits, leurs
devifes, leurs armes, leurs machines, leurs pages ,
leurs efclaves, leurs valets-de-pied, leurs eftafiers 9
leurs chevaux, & leurs ornements.
40. Les perfonnes des récits & des machines , &
les muficiens.
50. Les différentes courfes que faifoient les chevaliers,
& pour lefquelles on donnoit les prix.
Le meftre-de-camp conduifoit toute la pompe ,
régloit la marche , faifoit défiler les quadrilles &
leurs équipages, introduifoit dans la carrière &
dans les lices ; plaçoit les cavaliers à leurs poftes,
& indiquoit le lieu des machines.
Les aides-de-camp l’aidoient dans ces fondions ,
n’agiffoient que par fes ordres, & portoient comme
lui des bâtons de commandement.
Le moindre nombre des quadrilles, pour un
véritable carroufel, étoit de quatre , ôl le plus
grand, de douze : elles dévoient être toutes de
nombre pair , afin que les partis fuffent égaux entre
eux pour combattre & pour faire des courfes doubles,
Le nombre des cavaliers dé chaque quadrille étoit
ordinairement de quatre, quelquefois de fix, de
huit, de dix, ou de douze, non compris le chef,
qui étoit la perfonne la plus qualifiée, à moins que
les cavaliers ne fuffent de condition égalé : alors,
on tiroit au fort celui qui devoit l’être pour éviter
les conteftations. Dans les carroufels célèbres ,
c’étoient ordinairement les princes qui étoient les
chefs.
Il y avoit deux fortes de quadrilles, celles des
tenants, & celles des affaillants ; celle des tenants
étoit la plus confidérable*
Les tenants ouvroient le carroufel, & faifoient
les premiers défis par les cartels que les héraults
publioient. Ils étoient nommés tenants , parce
qu’ils avançoient certaines propofitions qu’ils s’en-
gageoient de foutenir les armes à la main contre
touts venants.
Ils compofoient les premières quadrilles.
Les affaillants étoient ceux qui s’offroient pour
repondre aux défis des tenants, & foutenir le contraire
: ils compofoient les quadrilles oppofées.
Le cartel fe faifoit au nom du chef de la quadrille
qui lui donnoit fes livrées.
Les 'cartels contenoient. ordinairement cinq
chofes.
i ° . Le nom & Tadreffe de ceux que les tenants
envoyoient défier.
20. Le fujet que les tenants avoient de défier au
combat ceux qu’ils attaquoient.
3°. Quelques autres propofitions qu’ils vou-
loient foutenir les armés à la main contre touts
venants.
4°. Le lieu & la manière du combat.
5 • Les noms des tenants qui envoyoient le défi
ou le cartel ; & ces noms étoient tirés de l’hiftoire
ou de la fable.
- Ces cartels pouvoient être en profe ou en vers ;
& , comme l’objet des défis étoit d’acquérir de la
gloire & de fe faire connoître, ils étoient accompagnés
de quelques bravades. On exceptoit les
princes des défis & des cartels.
Comine les fujets des carroufels étoient historiques,
fabuleux, & emblématiques., les tenants &
les affaillants y prenoient ordinairement des noms
conformes au fujet qu’ils vouloient rëpréfenter ;
par exemples , ceux qui reprefentoient les Romains,
prenoient le nom de Jules-Cæfar, Au-
gufte, &c.
On empruntoit auffi des noms de Roman
comme les chevaliers du ly s , du foleil, de la rofe ,
&c. Quelquefois ces noms étoient d’invention,
comme Florimond, Lifandre, &c.
Ils dévoient convenir aux devifes des cavaliers ,
& la quadrille porter un nom national ou celui de
fon chef. Les habits, livrées, armes, machines,
efclaves, oc cartels dévoient être uniformes dans
chaque quadrille.
Les pages étoient ordinairement à cheval ; ils
portoient les lances & les devifes.
Lés valets-de-pied •& les eftafiers conduifoient
les chevaux de main, ôc fe tenoient auprès des
machines. Onlesdéguifoit en turcs, en maures , en
efclaves, en fauvages, en arméniens, en finges , en
ours, fuivant le fujet & la volonté du chef de la
quadrille.
Les récits, la mufique, & la plupart des machines
qui fervoient à la pompe d’un carroufel,
étoient l’invention des Italiens , qui ont toujours
excellé dans ce genre d’ornements & dans leur
application.
Les perfonnes des récits & des machines étoient
des efpèces d’a&'eurs qui repréfentoient divers
rôles,félon le fujet : il y avoit aiiffi quelquefois
des vefs allégoriques en l’hopneur de ceux à qui
on dédioit ces fêtes.
La mufique exécutée dans ces jeux étoit de deux
fortes ; l’une militaire, c’eft-à-dire fière ôc guerrière
; l’autre douce ôt agréable. La première étoit
à la tête de chaque quadrille, pour animer les
cavaliers, & pour annoncer leur v enue, leur
entrée dans la carrière qu’on nommoit C om p a rfe „
& leurs courfes ; l’autre accompagnoit les récits,
les machines, & la pompe.
Dans l ’harmonie guerrière, on employoit les
trompettes , les tambours, les timbailes, les hautbois
, & les fifres.
Dans celle qui accompagnoit les chars, c’étoient
des violons & des flûtes. On faifoit auffi au
fon des inftruments des danfes ôl des ballets 4e
chevaux.
Le dernier carroufel qu*on ait vu eft celui qu’on
fit à Berlin en 1750 : il fut très bien exécuté , & les
frères du roi de Pruffe y firent paroître beaucoup,
d’adreffe & de grâce.
Il y avoit > dans un carroufel des juges pour les
prix : on les choififfoit parmi d’anciens chevaliers
qui s’étoient rendus célèbres dans ces exercices.
[J.].
C A R T E BLANCHE. Permiffion donnée à un
général d’agir fuivant fa volonté, fes lumières, &
les circonftances , fans ordre de fon chef. Le ro i,
étant chef de fes armées , quoiqu’abfent, donne
carte blanche à ceux de fes généraux dans lefquels il
reconnoît une prudence coniommée & des talents
fupérieurs. Le général de l'armée peut donner carte
blanche à un officier général commandant d’une-
divifion. Lorfqu’un général a touts les talents &
toutes les qualités que demande fon emploi; le
fouverain doit lui donner cette permiffion, afin
que rien ne retarde & n’embarraffe fes opérations.
Il feroit peut-être même néceffaire que touts
les généraux l’euffent : un des grands avantages
qu’a un roi capable de commander fes armées eft
celui de faire tout ce qu’il v eut, ôl quand il le veut ;
l ’occafion n’attend pas les ordres. Il eft auffi très
utile par la même raifon que le roi foit préfent à
ion armée, quoiqu’il n’ait pas les talents nécef-
faires pour la commander : alors du moins les
ordres viennent de plus près ; l’intrigue ôl la ja