
plus loin* Comme ils ne ^obtinrent pas, ils demandèrent
qu’il envoyât à la cavalerie qui pré-
cédoit l’armée un ordre dé ne pas combattre, & qu’il
leur permît aüffi d’envoyer-des députés chez lès
Ubiens, difantqüe û leurs .princes & leur fénat les
y autorifoient avec ferment , ils reinpliroient les
conditions; qui-feroient impofées pat Céfar : ils
demandoient trois jotrrs pour terminer cette affaire.
Céfar voyoit qüirtôütes ces chofes ne tendoient
qu’au même objet à ce que , durant undélai de
trois jours-, leur cavalerie abfènte pût le§ rejoindre.
Il dit cependant qu’il n’iroit dans cette journée qù’à.
trois milles plus loin pour avoir-de l’eau ; qu’ils
vinffent le lendemain îé trouver en grand nombre ,
afin qu’il prît connoiffance de leurs demandes. Cependant
il envoya donner -avis aux généraux-' qui
avoientpris? les devants^ avec toute la cavalerie ,
de ne point attaquer l’enhemi ; svilsr étaient
attaqués, >de foutènir -le combat jufqu’à eë qu’il
fe fôt-;-approché a v è c -i’ariiiée'. - r’ - -
« Dès' que les-enne^mis i dit Céfar , -âppercurent
notre cavalerie ; ( elle étoit au ■ nombre*' de cinq
mille ) ; quoiqu’ils ne fuffent pas plus de huit cents
chevaux ,• .parce que ceux\qui Soient allés fourà-
•ger à l’autre bord de-la Meufe ; n’étoient pas revenus
; une attaque fubite jètta :le défordre parmi les
nôtres, qui ne.fs’y attendaient pas, leurs envoyés
ayant quitté dèpüis peu Géfat>-& demandé ce jour
d e trêve. ( Nota-;Céfar donne un peu plus haut la
ïaifon de cette hardieffe. C. 2. « Dans* les moeurs
des Germains, dit-il, rien ne paroît plus honteux
ou plus mou que l’ufage des étriers. Ai'nfi, quelque
peu qu’ils foient, ils ofent aborder une cavalerie
qui a cet ufage, en quelque nombre qu’elle puiffe
ctre ). Les nôtres faifant réfiftance , continue-t-il,
ils fautèrent à pied fuivant leur coutume, ôc perçant
le ventre des chevaux, renverfant un grand
nombre de cavaliers, ils mirent le reffe en fuite ,
Sc les prefsèrent tellement que, frappés de terreur,
Ils ne cefsèrent de fuir qu’en préfence de notre
armée....... > *
Après ce combat, Céfar ne crût pas devoir
entendre les envoyés , & accepter les proportions
«Fun ennemi qui, ayant demandé la paix, avo'it
Infidieufement, & par fràude , attaqué de fon
plein gré. Il jugea qu’attendre le retour de la
•cavalerie ennemie , & ra’ügmeritaïi'on de leurs
troupes , feroit de la plus haute démence ; & ,
connoiffant la foibleffe dés 'Gaulois , & la fupério-
cité que les ennemis avôiënt acquis fur eux par
«n feul combat, il ne crüfpàis klevoir lent donner
un inftant pour fe confülteiv Cette réfolution étant
prife, & l’avis communiqué aux généraux & au
queiîeur, de ne pas différer. d’un feul jour le
combat, il fe préfenta üne circônftance très favorable,
Le lendemain matin, les Germains , em - !
ployant de nouveau la difîimulation & la perfidie',
vinrent en grand nombre, princes & vieillards ,
trouver Celar dans fon camp ; tant , comme ils
je difoient, pour s’excufer de ce que malgré la
convention & leur demande même , ils avoient
la veille engagé le combat, qu’afin, s’il étoit pof-
fible, d’obtenir un'è trêve en trompant encore. Cefar,
joyeux de les voir fe livrer à lu i, ordonna qu’on les
retînt ,• fit fortir du camp toutes fes troupes , &
donna ordre que la cavalerie, qu’il croyoit effrayée
par le dernier combat , füivît la colonne.
. S’étant formé - fur trois lignes , & faifant huit
milles, avec rapidité, il arriva plutôt au camp ennemi
que les Germains ne purent apprendre ce
qui fe paffoit. 'Epouvantés de ces événements
fubits, de la célérité, de notre marche & de Tab-
fence des leurs ; n’ayant le temps ni de fe conful-
te r , ni de prendre les armes , ils ne fçavoient
dans-Teur trouble , s’ils devôient ou fortir contre
les Romains , ou défendre le camp , ou chercher leur
falut dans la fuite.
Tandis que leur frémiffement & leurs mouvements
confus annonçoient leur crainte ; nos fol-
dats, animés par la perfidie-de la veille , pénétrèrent
dans le camp. Ceux qui purent s’armer
à la hâte ; -firent quelque réfiftance, & combattirent
entre les charriots & les bagages. Les femmes
&* les enfants , ( car ils étoient fortis de leurs demeures
, & avoient paffé lei Rhin avec tontes leurs
familles ) ,’ commencèrent à fuir çà & là. Céfar
les-fit; pourfuivre par la cavalerie. Les Germains,
entendant; les> cris-de ceux des leurs qu’on tuoit
derrière eu x , jettent leurs armes, abandonnent
leurs enfeignes , s’élancent hors de leur camp. Parvenus
au confluent de la Meufe & du Rhin , &
défefpérant de fuir plus loin , les uns furent tués
en grand- nombre , le refte fe précipita dans le
fleuve , & y périt accablé par la crainte, la fatigue
, & la force du courant ». ( Coef Bell. galh
L .4 . C. 9 , /ƒ. Oudendorp. 40. pag. 178 & fu iv .).
Cet exemple n’étoit point nouveau dans Rome.’
Une armée des Sàbins, s’étant avancée , jufqu’à
l’Anrene, ( le TÉverone ) , s’y répandit en pillant,
& brûlant les bourgs. Aulus Pofthumius marcha
contre eux avec toute la cavalerie. 'Le eonful
P. Servilius fuivit avec une troupe d’infanterie
d’élite. La cavalerie entoura ceux qui étoient dif-*
perfés.; La légion des Sabins ne réfifta point à l’infanterie
romaine. Fatigués tant de leur marche
que* du pillage de la nuit , la plupart répandus
dans .les mailons de campagne , oii ils s’étoient
remplis d’aliments & de v in , eurent à peine la
forée de fuir.
On trouve dans toute l’hiftoîre un grand nombre
d’exemples femblables , tels que celui d’Harald
Halfager, roi de Norwège, que fes troupes, enrichies
des dépouilles du Northumberland, abandonnèrent
pour les mettre en sûreté, & livrèrent
à Harald , roi d’Angleterre : celui de l’armée de
Childebert I , qui, revenant d’Efpagne chargé d’un
riche butin, fut défaite aux Pyrénées par Teude ,
roi des Goths , & Teudifèle , fon général ; fi
l’on .n’aime mieux croire les. anciens hiftoriens
de France, qui difent que les troupes de Çhildebeji
revinrent viélorieufes, rapportant en triomphejâ
tunique de Saint Vincent, avec laquelle Sarrar
l golîè s’étoit rachetée du pillage. Paul Warnefrid
attribue aufli la viâoire à Childebert. ( De gejl.
' Longob. C. X X L Grot. Goth. Hijlor. 8°. pag. £13 )•
On attaque, avec avantage , une armée qui
inarche avec un grand nombre de prifonniers.
. Outre l’embarras qu’ils lui caufent, elle doit craindre
qu’étant délivrés, ils ne prennent des armes , &
ne fe joignent à l’armée qui l’affaillit. Le eonful
Volumnius, apprenant que les Samnites rava-
geoient la Campanie , s’y rendit avec les légions.
Il vit lui-même , dans les campagnes de Calæne ,
les traces de leur paflagé. 11 apprit des habitants
que l’armée ennemie étoit fi chargée de butin , &
fi embarraffée de captifs, qu’il lui feroit impoffible
de fe former pour le combat ; que fés chefs difoient
hautement qu’il falloir retourner au plutôt dans
le Samnium , pour y dépofer leurs richeffes ,
revenir enluite , & ne pas expofer au combat
une armée que les dépouilles rendoient fi pefante.
Volumnius, ufant dé prudence , envoya des
cavaliers,, avec ordre de lui amener quelques-uns
des déprédateurs qui erroient encore dans la campagne.
II. apprit d’eux que l’ennemi, campé fur le
..iVulturne, devoit partir pour le Saninium à la
Atroifième veille, ( minuit ). Alors , il s’approcha
Ides ennemis, non pas fi près qu’ils puffent avoir
. connoiffance de fon arrivée, mais affez pour les
défaire lorfqu’ils fortiroient de leur camp. Etant
arrive un peu avant le jour, il envoya quelques
. hommes qui fçavoient la langue ofque , pour
examiner leurs difpofitions. Ceux-ci , fe mêlant
aux ennemis dans la confufion de la^nuit, apprirent
que les enfeignes étoient peu accompagnées ; ils
virent fortir le butin avec une foible & chétive
efeorte, & obfervèrent que chacun ne s’oceupoit
que de fes affaires j qu’il n’y avoit dans toute cette
armee ni accord, ni ordre, ni commandement.
Le moment parut favorable. Le jour paro'iffoit :
^olumnius fait donner le lignai , & Commence
l’attaque. Les Samnites, embarraffés par le butin ,
la plupart fans armes, font incertains s’ils doivent
continuer leur marche, ou rentrer dans leur camp :
mais les Romains y portoient déjà la moit & le
delordre. Dans ce tumulte , quelques captifs s’é-
toient dégagés de leurs liens : les uns délivroient
leurs compagnons ; les autres prenoient les armes
depofees parmi le bagage. Ils marchèrent au chef
des Samnites , Statius Egnatius, diflipèrent une
[ trouPe .de cavalerie qui l’efeortoit , & famé- -
,, nerent au conl'ul. Les premières troupes Sam-
| *Jltes; ^Ppellées par le bruit, tentèrent en vain
e rétablir le combat. Les Romains vainqueurs
tuèrent fix mille hommes, en prirent deux mille
cmq cents; & , ce qui leur fut plus agréable, ils
■ rePrirent , avec tom le butin, fept mille quatre
cen,5 captifs , Rom.ins ou alliés. 4 '
Ce fut amû que le prince Jean Alb e r t, commandant
1 armee de fon père, Cafimir IV , battit les '
I Tartares qui fortoient de Pologne ; & que Ladillas I,
l roi de Hongrie , défit les Cunes , ou Cumaniens ,
| ( tribu tartare ) , qui fe retirôient , après avoir
; ravagé là Tranfilvanie. Il les joignit fur la Tèmes ,
& les trouva marchant comme une troupe de
çhaffeurs , & non comme une armée. Leur che f,
Kopalk ou Ko pulkoi, y perdit la vie ; prefque
to.uts furent pris ou tués.
Si vous avez pu faire paffer dans l’armée ennemie
un affez grand nombre de faux' transfuges, pour
y jetter le défordre pendant Xàblion ; vous pouvez
en efpérer un fuccès heureux, tel que celui
d’Annibal à Cannes, Ôc de Thémiftocle à Sàlamine.
Il faut leur donner une marque oii un m ot, pour
qu’ils foient reconnus par vos troupès pendant
le combat. Ce moyen doit être rare : pour remp
lo yer, il faut bien compter fur la négligence de
fon adverfaire.
Les intelligences avec des officiers füpérieurs
de l’armée ennemie font plus fûrès : ils peuvent
vous fervir en arrivant trop tard, en n’àttaquant
pas, en ordonnant la retraite du corps qu’ils commandent,
en répandant un faux bruit qui jette la
terreur dans leurs troupes, &. autres moyens relatifs.
au génie de la nation qu’ils; commandent, à
fes ufages , & aux circonftances. Vous ferez vos
difpofitions en conféquençe de cé dont ils feront
convenus, & tiendrez des troupes prêtes à profiter
des faux mouvements qu’ils feront. ( Voye? T r a h
ison ).
La circônftance la plus favorable à ce moyen
de vaincre eft l’attaque de nuit. Les fauffes démarches
y font plus faciles. Ta confufion plus
grande : les traîtres, mieux cachés, vous ferviront
une fécondé fois.
D ’autres raifons vous peuvent engager à prendre
ce temps pour chercher Xatfion. S’il y a plus de
négligence pendant la nuit dans l’armée ennemie ;
fi le général aime à dormir ; fi la. nation qu’il
commande eft pareffeufe elle-même, &. ne fort
pas volontiers du fommeil; fi elle aime à boire,
& fe trouve en un.pays abondant, en vins ; fi
étant fujette à la défertion, fon chef rapproche
du camp toutes fes gardes pendant la. nuit ; . f i
elle eft manoeuvrière, & moins propre que la vôtre
aux coups de main & à l’arme blanche : vous
devez tenter une aéfion de nuit, & y joindre , s’il
• fe peut, la furprife.
Profitez de l’avantage que le climat’ peut vous
donner fur un ennemi qui n’y eft pas accoutumé.
Si le fien eft plus .froid que le .votre, attaquez—
le dans les plus grandes chaleurs. S’il eft habitué
a un pays chaud, choififl'ez l’hiver pour l’aâlion.
C e fut au mois de juillet que Marius attaqua les
Cimbres aux plaines de Verceil, & il joignit à cet
avantage celui du vent & du foleil. Les Cimbres
difpofés en ordre quarré, s’avancèrent d’un pas
grave. Pour empêcher le défordre & la divifion
des rangs, de longues chaînes uniffoient ceux qui
1 formoient le premier rang de l’infanterie. '