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elles arracheront l’homme de recrue à l’apathie
dans laquelle il végette conflamment pendant les
premières années de fon fervice.
Nous aurons plufieurs occafions de parler dans
le cours de cet ouvrage des autres avantages , que
doivent produire les compagnies de remplacement
& de recrues, paflbns donc à la compofition de
toutes les compagnies d’un régiment ; nous dirons
de toutes les compagnies , parce que confiants dans
le principe d’unité que nous avons adopté , nous
croyons que les compagnies d’élite ne doivent
différer des compagnies ordinaires que par le choix
des hommes.
On ne peut qu’adopter dans fon entier le principe
qui efl établi dans l’ordonnance provifoire
du 12, juillet 1784; il confifle à conferver pendant
la paix , le même nombre d’offipiers 6c de
bas-officiers, que pendant la guerre, de à ne faire
porter la différence du pied de paix avec le pied
de guerre , que fur le nombre de foldats de chaque
efeouade.
Qu’on remette un régiment de nouvelle levée
entre les mains d’un corps d’officiers, de bas-
officiers & d’appointés inftruits, il fera avant deux
mois non-feulement en état d’entrer en campagne,
mais même de paroître fur une efplanade 6c d?y
manoeuvrer avec les régiments d’ancienne création.
Chaque compagnie d’infanterie de l’armée Françoise
pourroit, lur le pied de guerre, être commandé
par un capitaine , deux lieutenants 6c quatre
fous-lieutenants.
Elle pourroit être conduite par un fergent-major,
quatre Sergents &. huit caporaux ; elle aüroit de plus
un fourrier-écrivain.
Elle feroit compofée de Seize appointés , de
Soixante - douze Soldats , de trois tambours ou
muficiens, & d’un aide-chirurgien-major. En tout
cent fix hommes.
Chaque compagnie feroit divifée en deux pelotons
, chaque peloton en deux feélions, & chaque
feélion en deux efçouades ; chaque efeouade feroit
donc compofée de douze hommes en y comprenant
l’appointé 6ç le caporal.
La compagnie en bataille formeroit trente-deux
files ou quatre - vingt - Seize hommes ; le peloton
Seize files ou quarante - huit hpmmes ; là feélion
huit files ou vingt - quatre hommes ; l’efcouade
quatre files ou douze hommes ; la demi efeouade
deux files ou fix hommes.
Pendant la paix on pourroit réduire les efçouades
a neuf &. même à fix hommes.
Le capitaine auroit le commandement général
de toute la compagnie ; le lieutenant eh premier
commanderoit le premier peloton ; le lieutenant
en fécond commanderoit le fécond ; le premier
fous-lieutenant la première feélion ,-&c.
Lorfque la compagnie devroit fe former en bataille
, la i r* , la 3* , la 5® & la 7 e efçouades, for-
meroient le premier peloton ; la 2?, la 4% 1* 6e
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& la 8e • formeroient le fécond. Dans la i r e , la
ç* , la 2,® & la 6e efçouades j le caporal occuperoit
le premier rang de la file de droite de fon efeouade.
Dans la 3e , la 7 0, la 4e & la 8e efçouades, le caporal
occuperoit le premier rang de la file de
gauche de fon efeouade. Le fécond appointé feroit
toujours au troifième rang derrière fon caporal ; 6c
le premier appointé occuperoit le premier rang
de la file de droite ou de gauche que le caporal
n’occuperoit pas.
Toutes les fois que la compagnie fe formera
en bataille, les caporaux fe placeront ainfi à la tête
de leurs efçouades, jamais ils ne feront mis à la
tête d’une autre efçpuade de la même compagnie ,
ceux qui manqueront feront remplacés par ceux de
la compagnie ae remplacement de leur bataillon ;
quand la compagnie de remplacement d’un bataillon
fera épuifée de caporaux, on recourra à celle de
l’autre bataillon ; quand il manquera dans le régiment
plus de feize caporaux, ce qui fera très rare,
le fécond appointé prendra dans l’efcouade qui
manquera de caporal la place du caporal manquant
6c il fçra remplacé par un appointé de la
compagnie de remplacement ; il en fera de même
du feue des bas-omciçrs , de touts les officiers 8t
de touts les foldats.
Quoique le fécond appointé prenne la place du
caporal il ne commande cependant pas l’efcouade,
elle efl aux ordres du premier appointé. C ’efl pour
que chaque officier & chaque bas-officier foit
çonflamment à fa place , que nous avons adopté
cette manière de faire les remplacements.
La compagnie des recrues pourra être commandée
parje même nombre d’officiers que les autres compagnies,
6c conduite parle même nombre de bas-
officiers ; le nombre feul de fes foldats variera fui-
vant les circonflances. Pendant la guerre elle fera
très forte ; pendant la paix elle fera proportionnée
à la perte que le régiment pourra naturellement
faire dans l’année.
Rendons compté des motifs qui nous ont déterr
minés à adopter la formation que nous venons
de propofer ; cela nous donnera l’occafion d’établir
les principes généraux , d’après lefquels nous
croyons qu’on pourroit fe guider dans la compofition
d’une compagnie de l’infanterie Françoife.
Nous n’avons donné qu’un capitaine à chacune
de nos compagnies, parce qu’il né faut qu’un chef à
chaque corps ; quoiqu’il y eut aujourd’hui deux
capitaines dans chaque compagnie, il n’y en a
jamais qu’un qui s’en occupe effentiellement ; Pautrè
prefqué fans emploi végète fans autorité ; ce qui
fait perdre au titre de capitaine une çonfidération
qu’on ne peut trop accroître.
Le capitaine en' fécond fçaehant que le capitaine
commandant recueillera les louanges 6ç obtiendra
les récompenfés qu’auront méritées la tenue , la
difeipline & l’inflr'uélion de la compagnie à laquelle
il eft attaché , va au quartier, paf cè que l’ordonnance
l’y oblige $ yifite les chambrées fans attention
j
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t i o n n e prévient aucun abus, n’en réforme ou
n’en punit aucun. Tant il efl vrai que le François
fait prefque toujours fans goût & par conféquent
affez mal tout ce qui ne peut flatter fon amour propre,
lui procurer de l’avancement, ou être utile à fa
gloire. Lorfque les deux capitaines n’ont pas les
mêmes principes,fi l’un efl févère &.l’autre foible,
bientôt l’efprit de parti fe gliffe dans la compagnie ,
les foldats & les bas-officiers prennent parti pour
l’un ou pour l’autre de leurs chefs ; que devient
alors la difeipline? Tout ce que nous venons de
dire efl fondé fur des abus ; mais comme ces abus
font inhérents au caraâère national , à notre ef-
prit militaire , au coeur humain lui-même , on doit
renoncer à l’efpoir de les extirper ; s’il ne refie
quun capitaine, qui commandera la compagnie pendant
l’abfence ou la maladie de ce chef? Ce.fera
fon lieutenant en premier; comme il aura été
oblige avant d’arriver à cette place de gagner
un très grand nombre de rangs , il aura acquis
toutes les qualités 6c toutes les connoiffances qui
font néceffaires au chef d’une compagnie. ( Voyeç
/ article C a p it a in e . ). Il réfultera même du changement
que nous propofons un avantage frappant
dont nous allons parler.
^ Les ordonnances militaires ont voulu mettre une
diflance confidérable & néceffaire entre les capitaines
commandants & les capitaines en fécond ;
mais l’égalité de titre que portent ces differents
officiers , le délit* naturel à touts les hommes de
donner des preuves de leur autorité , 6c de fë
montrer dans un rang plus élevé que celui qu’ils
occupent diminuent infiniment cette diflance; pour
la rendre moins lenfible encore, & pour faire
connoître leur capacité & leur zèle , quelques
capitaines en fécond changent lorfqu’ils commandent
quelques-uns des petits détails intérieurs que
les ordonnances n’ont pas fixés d’une manière po-
fitive : il fuffit fouvent que le capitaine commandant
ait laiffé entrevoir qu’il vouloit élever tel
foldat au grade de caporal pour que le capitaine
en fécond y en faffe monter un autre ; quand
l’officier qui, en l’abfence du capitaine , commandera
une compagnie ne fera que lieutenant , il
n’ofera pas fe permettre ces changements ; auffi
la compagnie toujours dirigée par le même efprit,
marchera vers la perfeâion d’un pas plus alluré.
La compagnie étant divifée en deux pelotons , il
faut un officier particulier pour commander chacune
de ces^ deux divifions ; les deux lieutenants
feront chargés de ces commandements ; mais pour
qu.ils s en occupent réellement, il faut que touts
les foins roulent fur eux ; que les chefs du corps
& que les infpeéleurs les louent ou les blâment
fuivant le dégré d’inftruélion 6c de tenue qu’auront
acquis leurs pelotons refpeclifs ; 6c que le capitaine
n ait befoin que de les furveiller afin de maintenir
l ’uniformité dans la manière d’agir.
Nous avons mis quatre fous- lieutenants dans
chaque compagnie, parce que ce font les officiers
Art militaire. Tome ],
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qui' font la force des armées ; parce qu’il faut
augmenter le nombre des débouchés propres à la
nobleffe françoife , afin de multiplier cette même
noblefle ; parce qu’il efl intéreflant que les militaires
ne parviennent au commandement- d’une
compagnie qu’après avoir appris longtemps à commander
dans des grades inférieurs; enfin, parce
que nous avons divifé chaque peloton en quatre
feélions.
Lés fous-lieutenants devroient avoir dans leurs
feélions la même autorité que le capitaine dans
la compagnie 6c les. lieutenants dans les pelotons.
Nous parlons; fouvent de cette autorité que l’on
devroit donner aux officiers 6c aux bas-officiers,
parce que l’expérience nous en a toujours démontré
la néçelîité.
Jufqu’au moment 011 l’ordonnance du 12 juillet
1784 a paru, le fervice des lieutenants & des fous-
lieutenants ne çonfiftoit, dans prefque touts les
régiments, qu’à infpecler pendant fept jours de
chaque mois les hommes de garde de leur compagnie,
6c à vifiter les chambrées à l’heure des appels ;
la femaine finie, le lieutenant.pouvoit oublier im-‘
punément pendant vingt-un jours de fuite qu’il
etoit attaché à une compagnie. Ses devoirs fe bor-
noient alors à aller à.la parade 6c à l’exercice;
auffi la plupart, après avoir paffé quatre ou cinq
ans dans une compagnie, n’en connoiffoient point
les bas-officiers, 6c encore moins les foldats; &
ils parvenoient au grade de capitaine fans avoir
acquis les connoiffances même les plus fuperfi-
çielles fur l’admiriiftràtion intérieure d’une troupe >•
des abus auffi grands que ceux dont nous venons
de parler n’ont befoin que d’étre dénoncés.
Un caporal, aidé de deux appointés, pourra
aifément conduire neuf hommes : 6c quand le befoin
l’exigera, on pourra leur en confier un nombre
beaucoup plus confidérable..
Un fergent., aidé par deux caporaux & par
quatre appointés, furveillé par un fous-lieutenant,
pourra avec facilité conduire dix-huit hommes ;
car les caporaux & les appointés n’auront befoin
eux-mêmes, félon les apparences , que d’être légèrement
furveillés..
. Nous avons fixé à quatre-vingt-feize le nombre
des combattans d’une compagnie d’infanterie fran-
Çoife , i° . parce qu’une compagnie moins nombreuse
feroit prefque réduite à rien, quand on en
auroit fouftrait les hommes de garde ou détaché
les.malades ; 2°. 11 on vouloit, dans une compagnie
moins nombreufe, faire une augmentation confidérable
, les' foldats non difçipiinés fe trouvant
prefqu’auffi nombreux que les foldats inftruits ,
pourroient y introduire le défordre , 6c en affoiblir
l’efprit. 30. Si on vouloit faire une augmentation
dans une compagnie plus nombreuie , elle de viendront
un corps que tous les officiers particuliers ne
ferpient pas en état de. conduire , &c. Comment
en effet un capitaine d’infanterie pourra-t’il parvenir
à connoître à fond les qualités morales Sc*
B b h b b