
4 8 A D R
droit. Ce n’étoient pas deux particuliers, ou deux
fouverains , mais des familles entières qui s’affo-
cioient du contentement de l’empereur, pour fe
défendre mutuellement, elles & leurs biens, contre
toute attaque ennemie. Elles avoient acquis le droit
de bâtir des fortereffés. Quand quelques-unes s’é-
teignoient, les autres en paftageoie'nt l’héritage.
Cette inftitùtion , avantageufe dans fon origine ,
devint abufive. Sous prétexte de fe défendre , on
fê liguoit pour attaquer. Il en refulta un grand
nombre de brigandages , que les empereurs &
les princes de l’empire n’arrêtèrent qu’avec peine.
On trouve quelque trace de Y adoption chez les
anciens Gaulois ,. qui pouvoient l’avoir empruntée
des peuples tudefques. ( G’étoit une affiliation qui fe
pratiquoit feulement parmi les grands. Elle fe faifoit
avec des cérémonies militaires. Le père préfentoit
une hache de combat à celui qu’il vouloit adopter
pour fils, comme pour lui faire entendre que c’é-
toit par les armes qu’il devoit fe conferver la fuc-
ceffion à laquelle il lui donnoit droit. (H ) ) .
A -D R O IT E . On nomme à - droite un quart
de tour fait du côté droit fur le fommet de l’angle
des talons. Un demi à - droite eft le demi-quart de
tour. Cette définition fuppofe que les talons font
joints, comme ils le font toujours à préfent. 11 y
a trente ans qu’on les tenoit encore écartés à un
pied de diftànce. On les a rapprochés par degrés à
huit pouces , fix pouces, quatre pouces , non fans
difcuter lequel étoit le plus utile ; & enfin on les
a joints : tant il faut de temps & de patience pour
venir .à ce qu’il y a de mieux, même dans les
plus petites chofes.
A FFABIL ITÉ. Voye^ G énéral , O f f ic ie r .
AGA.Voye^ Jan is sa ir e s .
AG E . L’âge où la nature donne l’effor à la force
de l’homme eft celui auquel il peut commencer le
fer vice militaire. Comme ce développement eft
retardé ou accéléré par le climat & les moeurs ,
Ydge de la milice n’a pas é.té le même chez tçuts
les peuples. On y trouve cependant peu de différence
, parce que fouvent ces deux caufes agiffént
d’une manière oppofée : fi l’un accélère l’effet,
lautre le retarde. Chez les peuples du Nord non
civilifés, le climat s’oppofoit au développement
des forces ; mais un exercice continuel l’accélé-
roit. Au Midi le climat hâtoit la puberté, tandis
qu’une vie oifive & molle rallentiffoit le progrès
de la vigueur. Parmi les nations non policées, le
' commencement du fervice militaire n’eft pas déterminé
par Ydge , mais par la force. Tout homme
y étant guerrier par effence, il l’eft dès qu’il peut
l’être. Comme on n’y connaît que très, peu l’ordre
politique, on fuit la nature. On n’y a point d’art,
point d’apprentiffage. L’exercice des, armes y eft
appris dès.l’enfance. Dès 'que le bras eft allez fort
pour en faire ufage contre l’ennemi, on marche à
la guerre. Mais Tordre des fociétés a demandé
d’autres loix. On y eft laboureur ou artifan, avant
que d’être foldat.
A G E
Le citoyen, détourné de l’exercice d’un autre
art pour être appliqué à celui de la guerre, doit
apprendre l’exercice de fes armes, Tordre des mouvements
, & les devoirs de la difcipline. Il peut
donc être pris avant le temps de la force nécef-
faire pour fupporter les fatigues de la guerre.
Ave c un peu .d’expérience, il feroit poffible de
déterminer, par l’infpeéfion dufujet, le moment
où cet apprentiffàge peut commencer, & de prendre
pour règle à cet égard les forces naturelles, qui
diffèrent dans touts les hommes. Mais l’effet continu
des pallions qui agitent l’homme ën fociété,
auroit rendu cette voie trop abufive : elle intro-
duiroit un trop grand nombre d’acceptions &
d’injuftices, dans le choix des citoyens deftines
au fervice militaire. On a donc pris une mefure
commune qui eft celle de- Ydge, &. qui remplit
fuffifamment , en général, les vues fociales , &
les befoins de la milice.
Le temps de la jeuneffe eft celui où l’homme
eft le plus capable de s’accoutumer au joug de la
difcipline, Ôc aux exercices militaires. Ceux - ci
exigent de la foupleffë , de la.légèreté-, de la vivacité,
de l’intelligence; L’apprentiffàge en eft
long & pénible ; l’objet-en eft grand. Ceux qui
ont fait des loix à cet .egard, n’ont voulu ni
perdre des années précieufes, ni attendre le temps
où l’efprit a pris d’autres plis , & le corps une roi-
deur invincible : touts ont-choifi Ydge de la première
jeuneffe. Quant à celui de l’exemption, il a
varié l'uivant le climat-, & le s moeurs, mais fur-
tout , fuivant les forces- de chaque fujet. On y a
bien mis un terme dans la, plupart des légiüations ;
mais on voit auffi qu’il a changé fans ceife.
Les Gaulois &• les Germains fervoient depuis
Ydge de la puberté jufqu’à l’extrême vieilleffe,
c’e ft-à- dire, tant que leurs forces lé permettoient ;
parce que leur occupation principale, la feule qui
fût honorable, étoit la guerre. Les Perfes , peuple j
civilifé , habitant d’un beau climat , fixèrent le ;
temps de la milice de vingt ans à cinquante ; il
. étoit défendu de fervir après ce terme. Les Scythes :
prenant le. foldat kYdge de la puberté, lui inter-'
difoient les travaux militaires à celui de foixante :
les grandes courfes qu’ils faifoient à cheval ne.
permettoient gu ères de fervir au-delà.
Les Lacédémoniens , nés foldats, fervoient à-j
peu-près comme les Scythes, depuis la pubërté
jufques vers Ydge de foixante ans. Agéfilas s’excufa
de faire la guerre auxThébains , difant qu’il avoit;
paffé de quarante ans Ydge de puberté , que les
autres citoyens de cet âge n’étoient plus obligés à
fervir ai^-dehors, '& que les rois dévoient avoir
le même privilège. ( Xénoph. Hijl. Grcec. Lutet.
162$ f . p. ƒ68. C. Plutarch. Lutçt. 1624, f . p. 609 B.)
Il n’étoit pas permis de fervir avant Ydge prefcrit
par la lo i, ni de commencer après,celui de quarante,
ans . ( Po.tter. Archaiol. Grcec. Lib. 3 , c. 2,)«
Les Athéniens comme.nçoient à dix-huit ans.
Depuis cet âge ils n’étoient employés qu’à la
garde!
A G E
garde de la ville , & des forts qui défendoîent le.
pays & les frontières, ou dans quelques expéditions
peu importantes, afin qu’ils s’y inftruififfent,
'Apt s’y rendiffent capables de plus grands fervices.
A vingt ans ils prenoient part aux guerres qui fe
faifoient hors de l’Attique , & fervoient jufqu’à
. quarante : c’étoit dans les befoins extraordinaires
que Ton prenoit des foldats après cet dge & avant
: dix-huit. ans. Sur ce qu’on lit dans Demofthène,
{ Olinth. III ) , que Ton en prit de quarante-cinq
pour monter les triremes, Ulpien obferve que ce
fut une innovation, & que la loi fixoit le fervice
de dix - huit à quarante années. Conon enrôla
des citoyens au - deffous de - dix - huit ans ,
Phocion des octogénaires, Alexandre des vétérans
, comme plus aguerris.
Je joindrai ici le fentiment de deux célèbres phi-
lofophes. Ariftote fixe à dix-fept ans Ydge militaire.
( Polit, liv. 8 )- Platon le détermine dans fa République
depuis vingt jufqu’à foixante ans comme
il prétend que les femmes y foient auffi guerrières ,
il prefcrit à celles qui auront eu des enfants ,
de ne fervir que jufqu’à cinquante ans.
L ’ancien ufage des Romains, fuivant Végèce,
étoit d’armer les jeunes gens dès le commencement
de la puberté , & il approuve cet ufage.
« On n’apprend rien, dit-il , fi promptement ,&
fi Bien que ce qu’on apprend de bonne heure.
Les jeunes gens deftinés à la guerre doivent
s’exercer au faut & à la courte , avant que
Ydge les appefantiffe : Salufte dit que la jeuneffe
romaine, dès qu’elle pouvoit fupporter là guerre,
s’y formoit dans les .camps par le travail &
Tufage. IJ vaut mieux qu’un citoyen *, trop
jeune pour aller à la guerre , y foit exercé,
que de- l ’en trouver incapable, quand il a paffé
Ydge convenable. En commençant de bonne heure
il apprendra tout ce qu’il peut fçavoir , &. il
faut beaucoup de temps pour le former».
Appien raconte que Fabius Maximus , envoyé
en Elpagne contre Viriatus , voulut ménager les
foldats qui avoient fervi dans les guerres précédentes
, en Afrique , en Grèce , en Macédoine ,
& nenrolla que des jeunes gens dans le premier
âge de la puberté. ( Appian. lberica ).
Cet ufage pouvoit fubfifter avant & fous les
premiers rois. Lorfque la cité s’aggrandit, & que
le cens du peuple devint néceffaire, Servius Tullius
.'^»a (vers lan de Rome 178) , le fervice militaire
de dix-fept a quarante-fix ans : ceux qui n’avoient
pas atteint ce dernier terme, furent nommés Ju-
mores, & ceux qui Tavoient paffé , Seniores ( Au-
lugell. L. 10. C. 28. —— Dionys. Halic. L. IV.— Tit.
Liv. L. I \
% G étoit l’âge que demandoient touts les anciens
auteurs militaires, parce qu’en deçà les jeunes
gens font femblables à des fruits précoces, & au-
T j i » H H font roidis & fans vigueur.
(A U * ab ahx L . C. 10 ). L’hiftoire romaine
f)ff d ? s la.,fmte plufieurs exemples, tant de
Art militaire% Tome 1»
A G E 49
Tobfervatîon de cette lo i , que des befoins qui obli-
geoient d’y contrevenir. M. Manlius , qui l’auva le
Capitole , avoit fervi dès l’âge de feize ans. ( AureU
vi£l. vir. illufi. 24 ).
Après la bataille de Cannes, ( l’an de Rome 538),
Maximus Junius Pera , & Tiberius Sempronius
Gracchus , infcrivirent les jeunes gens de dix-fept
ans , & quelques-uns au-deffous. ( Tit. Liv. L. 22 ,
C. 77 ). L’an 541 , les confuls Q . Fulvius Flavus,
& Appius Claudius Pulcher,ne pouvant faire les
levées néceffaires pour completter les anciennes
légions & former les nouvelles , le fénat envoya
des triumvirs dans toutes les villes & bourgs ,• à
cinquante milles de Rome, avec ordre d’infcrire
touts ceux qui auroient la force de porter les
armes , quoiqu’ils n’euffent pas l’âge militaire. L’an
572 , L. Æmilius , ayant trop peu de troupes pour
réfifter aux Ligures qui entouroient fon camp , demanda
du fecours à Rome. Le fénat ordonna que
Q . Pétilius leveroit deux légions tumultuaires
de citoyens romains, & inl'criroit touts ceux qui
avoient moins de cinquante ans. ( Liv. L. 40, C. 26 ).
Dans la guerre contre Perfée , roi de Macédoine ,
Tan 582, touts ceux qui avoient moins de cinquante
ans furent affujettis à la milice. (Z . 42,0. j f ) . Deux
ans après , les confuls Q. Marcius , & Cn. Ser-
vilius Cæpion fe plaignirent au fénat que les jeunes
gens appellés à l’enrollement ne répondoient pas.
Les tribuns du peuple défendirent fa caufe , &
proposèrent de remettre aux prêteurs le foin de la
levée. Le fénat y confentit. Alors l ’ancienne loi fut
renouvellée : aucun citoyen, au-deffus de quarante-
fix ans , ne fut contraint à s’infcrire , & Tenrolle-
ment fut prompt. ( L. 42 , C. 14 ). L ’an 632 , C .
Gracchus, voulant plaire au peuple , .confirma
l’ancienne loi de Servius, par une loi nouvelle, qui
ftatuoit que nul citoyen, au-deffous de dix-fept ans,
ne feroit infcrit. ( Plut. Grac. 837. A . — Alex. ab.
al. L. 1. C. 20 ). Ce renouvellement prouve que
l’exécution de l’ancienne loi étoit fouvent négligée,
& qu’on y contrevenoit fans un befoin très urgent.
Ceux qui avoient rempli le nombre d’années
prefcrit pour le fervice militaire, s’enrolloient quelquefois
, mais volontairement. L’ufage étoit de les
employer à garder la ville : on ne les expofoit aux
fatigues d’une expédition que dans une extrême né-
ceffité. Les confuls pouvoient rappeller ces vétérans
fans Tordre du fénat ; mais auffi fans les contraindre.
On recevoit ceux qui s’offroient , & ils n’étoient
pas confondus avec les autres foldats : ils étoient
diftingués par le titre d’évocati.
Sous les empereurs, lés anciennes loix tombèrent
en défuétude, parce que leur volonté devint la
loi fuprême. Adrien commença le fervice militaire
à Ydge de quinze ans. Il ordonna de ne pas recevoir
des foldats trop jeunes, & de les congédier
à quarante-fix ans, fuivant l’ancien ufage. ,Ce règlement
fut peut-être exécuté pendant îon règne ;
mais il fut bientôt oublié. (Spart. Adrian. C. 2
6* jq. ) Sous Antonin P ie , un jeune homme de