
Les compagnies de chaffeurs à pied font conduites
par un fergent majo.r, un fourrier, quatre
fergents &. huit caporaux.
Elles font compofées de huit appointés, de cent
quatre chaffeurs & de deux tambours.
Les deux dernières compagnies de chaque bataillon
n’ont qu’un tambour.
Les compagnies de chaffeurs à pied font commandées
& conduites pendant la paix par le même
nombre' d’officiers & de bas-officiers que pendant
la guerre ; mais elles n’ont alors que cinquante-
fix chaffeurs & un tambour.
Les compagnies de chaffeurs à pied font partagées
en deux divifions , chaque divifion eft partagée en
deux fubdivifions, & chaque fubdivifion en deux
efcouades ; ainfi chaque efcouade de chaffeurs à
pied eft compofée pendant la guerre d’un caporal,
d’un appointé & de treize chaffeurs, & pendant la
paix d’un caporal, d’un appointé & de fept chaf-
ieurs.
§ . I X.
Observations fur la compofition & fur la force des
compagnies des troupes à cheval.
M. le E. D. B. ayant donné dans fon examen critique
du militaire françoist des idées très lumineules
fur la compofition &fur la formation des compagnies
de cavalerie , nous croyons devoir en donner ici
une courte analyfe.
Les compagnies àQ cavalerie, dit M. le B. D. B.
font beaucoup trop nombreufes à cent foixante &
quatorze, elles emportent un trop grand détail &
mettent les capitaines & les officiers dans le cas
de ne pouvoir jamais connoître leur compagnie à
fonds ; connoiffanoe pourtant abfolument nécev-
faire au bon ordre , à la difcipline & au bien du
ferviçe. En Pruffe même où les officiers font par
tant de raifons bien autrement attachés aux détails
de leur métier qu’ils ne le font en France, les
. compagnies de cavalerie ne font que de cent
hommes ; & fi c’eft affez pour eux, c’eft beaucoup'
trop pour nous. M. le B. D. B. prétend -auffi qu’il
faut différencier la compagnie de l'efcadron. Que
la compagnie eft trop forte à cent loixante-quatorze ;
qu’à ce nombre l’efcadron n’eft pas affez fo r t, &
qu’il doit être porté à deux cents hommes. Les
efcadrons nombreux, dit - i l , font préférables aux
plus petits; i° . parce qu’ils font moins • fu jets à
être débordés, & au contraire plus fufceptibles
de déborder eux-mêmes des efcadrons plus foibles ;
2.°. parce qu’ils peuvent fe divifer & manoeuvrer 1
.avec autant de célérité que les derniers; l’auteur
de Yefjdi, ajoute M. le B. D. B. en déterminant
.la force des efcadrons à quatre-vingt cavaliers pour._
la facilité de la manoeuvre , s’éloigne beaucoup
des principes du grand maître qu’il cite fifouvent.
Le roi de Pruffe a misrfes efcadrons à deux mille
hommes , & l’auteur. que je viens de nommer
s ’a pas fait attention, fans doute, qu’il nous a
dit ailleurs que la cavalerie pruffienne eft la feule
cavalerie manoeuvriere.
Deux officiers de chaque grade dans chaque
compagnie, remarque encore M. le B. D. B. eft un
double emploi qui nuit au bien du fervice ; parce
quen divifant l’intérêt, il le diminue néceffaire-
ment, il eft dans 1 homme de furveiller avec plus
d’exaâitude la difcipline lorfqu’il en répond per*-
fonnellement, que s’il partage les mêmes foins
avec plufieurs autres.
L’auteur que nous citons auroitfait, fans doute ,
quelques obfervations nouvelles, fi au moment
où il écrivoit le troifième capitaine de chaque
compagnie eût été créé. M. le B. D. B. obferve
encore que les détails étant très nombreux dans la
cavalerie , il eft néceffaire qu’il y ait un grand
nombre de bas-officiers ; qu’il eft impoffible que
le fourrier écrivain faffe touts les états qu’on lui
demande ; il voudroit, avec raifon; qu’on fimplifiât
beaucoup toutes les adminiftrations militaires.
M. le B. D, B. prétend enfin qu’il y avcit
plufieurs moyens de relever en France l’étàt de
capitaine fans recourir à celui de trop grofsir les
compagnies.
Nous ne pouvons qu’applaudir à toutes ces obfervations.
Eiles font diâées par la connoiffance
du militaire françois , par celle de notre taélique ,
& ne peuvent être faites que par un guerrier auffi,
éclairé que judicieux. C’eft avec plaifir que nous
faififfons cette occafion de rendre à M. le B. D. B.
que nous n’avons pas l’honneur de connoître, un
témoignage public de l’eftime que fes écrits nous
ont infpiré pour fa perfonne (C .) .
C ompagnies (grandes). Voye?v A venturiers.-
COM T E. Ce mot dérivé du latin cornes figni-
fioit dans fon origine celui qui accompagne.
Chez les Germains , dit Tacite , cent jeunes
gens tirés du peuple accompagnent chaque prince»
L’ufage ne permet à aucun jeune homme de porter
les armes , avant que la cité ne l’en ait jugé capable.
Alors , dans Taffemblée du peuple, un des
princes, ou fon père, ou un de fes parents , l’ornent
d’un bouclier & d’une lance. C ’eft pour eux
la toge virile , le premier honneur de la jèuneffe i
avant ce temps ils font regardés comme partie de la
famille , & auffitôt après comme partie de la république.
C’eft une ïlluftre nobleffe où les grandes actions
des pères attirent fur quelques enfants la faveur
du prince. Ils font affociés aux plus robuftes qui ont
déjà été choifis, & fe montrent parmi eux avec
affurance. Les jeunes gens ont des rangs divers,
affignés par celui qu’ils accompagnent. Une grande
émulation règne entre eux , pour occuper la première
place auprès de leur prince, & entre les
princes pour avoir les' compagnons les plus nom~
breux & les plus braves. Leur grandeur & leur
puiffance confiftent à être entourés d’un grand
nombre dé jeunes gens choifis : c’eft honneur en
paix, fiireté en gûerre. Et non - feulement il eft
glorieux pour un prince aux yeux de fa nation^
mais à ceux des cités voifines d’avoir un cortège
fupérieur en courage & en nombre. Ils font demandés
comme envoyés , honorés par des préfents,
& leur renommée terminent fouvent les guerres.
Dans le combat , il eft honteux pour le prince
d’être furpaffé en valeur, honteux pour les compagnons
de ne pas égaler la valeur du prince.
Lui fur vivre eft deshonorant & infamant pour
toute la vie : le principal ferment eft de le défendre
, de le conferver , d’accroître fa gloire de
celle des aâions de courage que l’on a faites : les
princes combattent pour la viftoire , les compagnons
pour le prince.
On's’eft anciennement fervi de ce titre chez les
Romains, pour défigner ceux qui approchoient le
. plus fouvent de la perfonne de l’empereur , & qui
î’accompagnoient dans fes voyages.
1 Quelques-uns prétendent avec vraifemblance
que ce titre étoit déjà connu au temps de la république;
& que l’on en qualifioit les tribuns,, les
préfets , &c. qui accompagnoient les proconfuls ,
& autres officiers fupérieurs dans les provinces
de leur département ; mais ce ne fut que fous
l’empire de Coiiftantin que la dignité de comte
commença à défigner une perfonne conftituée en
dignité. Alors , chacun ambitionna ce titre ; &
l ’on créa des comtes pour le fervice de terre , pour
celui de mer, pour les affaires civiles , pour celles
delà religion, &c. ; ainfi dans plufieurs endroits du
-droit romain, on voit des officiers en chef dans toutes
fortes de parties avoir ce titre. On y trouve cornes
arrii; cornes facrarum l'argitiortum ; cornes facri confif-,
_ torii ; cornes curiez ; cornes capellce ; cornes archiatro-
rum ; cornes commerciorum ; cornes vejliarius ; cornes
horreorum ; cornes obfoniorum aut annonce; cornes do-;
me flic or um ; cornes equ'orum regiorum; cornes flabuli,
domorum ; cornes excubitorum ; cçmes notariorum ;
cornes legum , feu profeffor juris ; cornes limitum , aut
m arc arum ; cornes maritimes ; cornes portus Romce ;
cornes patrimonioz, &c.
On donnoit auffi le titre de comte aux avocats,
& aux profeffeurs de jurifprudence qui avoient
fervijdpgt ans.
Mare le titre de comte fe donnoit plus particulièrement
à ceux qui étoient admis dans la familiarité
de l’empereur & qui étoient toujours avec
lu i , foit qu’il reftât dans fon palais , foit qu’il allât
a la guerre, ou dans les provinces de l’empire ;
Spamen dit qu’ils affiftoient aux jugements des
affaires que 1 empereur jugeoit avec des gens de
loi,; cum judicaret in conjilio habuit non arriieosfuos.
& comités folum, fed jurifconfultos.
Ce titre étoit confidérable & ceux qui en étoient
revetus s’en faifoient honneur; on lit dans une
ancienne infeription trouvée à Rome , necejfarius
-duguflorurri , & cornes per omnes expeditiones. Èt
dans un autre , cornes àivi Theodofii Augufli , in
omnibus bellis , atque viEioriis.
En un mot, leurs principales fondions étoient
d’accompagner le prince en touts lieux.
C ’étoit parmi les comtes qu’on choififfoit des
officiers pour aller commander dans les provinces ;
. & en ce cas on ne les appelloit plus comtes de
1 empereur , mais comtes provinciaux, ou comtes
de telles provinces ; dans ce cas non-feulement ils
i gouvernoient ces provinces quant au civil, mais
cooduifoient encore à la guerre les troupes qu’ils
levoient dans leurs cantons.
, te s François lorfqu’ils pafsèrent dans les Gaules ,
n abolirent point la forme du gouvernement des
Romains. Comme les gouverneurs des villes &
des provinces s'appelaient comtes & ducs, ils ne
voulurent point y apporter de changement. Ces
gouverneurs commandoient à la guerre & pendant
la paix , ils rendoient la juftice. Ainfi les comtes
du temps de Charlemagne n’étoient autre chofe
que les juges ordinaires, & tout enfemble les
gouverneurs des villes. Ils étoient au deffous des
ducs & des comtes qui étoient auffi gouverneurs
des provinces. Ces derniers avoient fous eux des
comtes conftitués dans les villes particulières , &
ne cédoient point aux ducs qui n’étoient comme
les comtes que gouverneurs de province. C ’eft ce
que nous voyons non-feulement dans notre histoire
, mais encore dans d’autres & notamment dans
celle d’Efpagne de Mariana, fous le règne du roi
des Vifigoths.
Cette dignité fut autrefois très confidérable en
France. Louis -le - Débonnaire diftingue dans un
des capitulaires trois fortes de vaffaux; ceux du
roi , ceux des évêques & ceux des comtes.
Les comtes affembloient les hommes libres &
lès menoient a la guerre ; & comme c’étoit un
principe fondamental dé la monarchie que ceux
qui etoient fous la puiffance militaire de quel-
quun , fut auffi fous fa jurifdiéiion civile , les
comtes exerçoient cette jurifdiflion fur les-hommes
libres ; c’eft pourquoi les plaids ou affifes du
comte étoient appelles les plaids des hommes libres';
& il en réfulta la maxime que ce n’étoit
que dans les plaids du comte, & non dans ceux
de ;fes officiers , qu’on pouvoit juger les queftions
fur la liberté.
Il ne faut pas croire cependant que les comtes
jugeoient feuls, comme les bachas le font en Turquie
; ils devoientprendre au moins douze hommes
avec eux tant adjoints que notables.
Ces comtes rendirent leur dignité héréditaire fous
les rois de la fécondé race , qui étoient trop foibles
pour le faire obéir ; ils ufurpèrent même la fouve-
rameté lorfque Hugues Capet parvint à la couronne
: fon autorité n’étoit ni affez reconnue, ni
affez affermie pour s’oppofer à ces ufurpations. C e ft
de la qu eft venu le privilège des comtes de porter
une couronne fur leurs armes. Ils la prirent alors,
comme. jouiffant de touts les droits fouverains.
Mais , peu à peu , les rois ont remis ces comtes
fous leur obéiffance & les ont réunis à leur couronne
; ainfi la qualité de comte aujourd’hui eft
bien différente de ce qu’elle étoit autrefois. Ce