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iemblants. S’il.eft entreprenant,prenez devant lui
un pofte mauvais en apparence, 6c qu’en vous
Retirant vous pouvez changer en une polition avan-
tageufe. Si vos troupes font manoeuvrièrës, comme
l ’armée d’Amilcar ; préfentez - vous à lui dans
une difpofitio'h..foible& dangerèufe. 11 voudra en
profiter , comme le fit Spendius. Feignez une
retraite précipitée : il vous' pourfuivra , l’ardeur
mettra fes troupes en cléibrdre. Alors, faifant face ,
6c changeant rapidement vos difpolitions, marchez
à lu i ,' lûr de la victoire. Vous pouvez auffi l’engager
à quitter un pofte avantageux en lui montrant
peu de troupes. Mithridate , inférieur en
nombre, évitoit le combat que cherchoit Pompée,
6c le coriduifoit çà ôc là , ravageant par-tout pour
lui enlever les vivres. Pompée, fatigué de ces
çourfès: inutiles, 6c fçachant que l’Arménie étoit
fans troupes , y entra pour attirer fennemi : en
effet il f y fui vit. Le roi craignoit qu’en fon abfence
çette province ne fe livrât aux Romains. 11 vint
camper devant Pompée fur une colline, 6c s’y
tint dansl’ina&ion yefpérant que le général romain
fë détermineroit à la retraite faute de vivres.
Quant à lui, fon camp en étoit abondamment
pourvu.
Il y avoit au deflous de la colline une plaine
oii.il envoyoit quelques partis de cavalerie, qui
' chargement touts ceux des ennemis , 6c favori-
foient les transfuges. La difette qu’éprouvoit l’armée
. de Pompée, les en faifoit fortir en grand nombre,
ÔC 1’ab.ondàn.ee qui regnoit dans celui de Mithridate
les y attiroit. Pompée, n’ofant pas l’attaquer,
alla prendre, à peu de diftance, un autre camp
çntouré de forêts qui le mettaient plus à l’abri de
Ïacayalçrie ôc des archers ennemis. Dans l’intervalle
y il plaça en embufcade une grande partie
de fes troupes. Puis s’avançant, peu accompagné,
q la vue du camp de Mithridate , il y répandit
quelque alarme , attira bientôt l’ennemi a fa pour-
fuite , le conduifit oh il le vouloit ; 6c fondant
tout à coup fur lui, la plupart de ceux qui l’avoient
fuivi furent tués ou pris.
Quelque temps après, Pompée , ayant paffé la
rivière d’Aba s, apprit qu’Orofe 6c }es Albains
marchoient à lui. 11 voulut les attirer au combat,
, avant qu’ils euflent pu connoître le nombre de
fss troupes, 6c penfer à la retraite. Ayant donc
placé en première ligne fa cavalerie , il forma
derrière elle fon infanterie un genou en terre,
couverte de fes boucliers, ôc lui ordonna le filence
6ç l’immobilité. O rofe , méprifant cette cavalerie
qu’U croyoit feule, l’attaque, la pourfuivit viver
ment dans fa fuite volontaire. L’infanterie, feler-
yant fpudain, ouvre des paflages entre fes divisions
ôc enveloppe ceux qui pourfuivoient avec
le plus d’ardeur 6c d’imprudence. | Le refie fut
chargé par la cavalerie, q u i, après avoir paffé
pa* les intervalles êc l’arrière de l’infanterie, s’était
formée fur les deux ailes. 11 n’en échappa qu’un
petit nombre, 6c cçpx-là même- périrent dans les
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bois oh ils s’étoient réfugiés : Les Romains y
mirent le feu.
Feindre de la crainte.
11 y a peu de moyens plus, capables d’engagé!'
VMtjiüion que la crainte fimulée. Labiénus l’employa
contre les Trévires. Il hivernoit fur leurs
frontières avec une légion. Les ennemis, nombreux
en infanterie 6c en cavalerie, n’étoient qu’à deux
journées de fes quartiers , lorlqu’ils apprirent que
deux légions, envoyées par Céfar, l’avoient joint.
Ils vinrent camper à la diflance de quinze millès,
6c rélolurent d’attendre les fècours germains. Labiénus
, connoiflant la témérité gauloife , efpéra
qu’elle lui fourniroit une occafion avantageufe de
combattre. 11 faille donc fes. bagages fous l ’efcorte
de cinq cohortes, en prend vingt-cinq avec un
grand corps de cavalerie , ôç va camper à un
mille de l'ennemi : il y avoit entre les deux camps
une rivière dont les rives étoient efcarpées 6c le
paflfage-difficile. Il n’avoit pas deflein de le tenter,
ôc prévoyoit que les ennemis ne l’auroient pas
plus que lui. L’elpérance du fecours qu’ils atten-
aoient s’augmentoit de jour en jour. 11 falloit,
pour les attirer au combat, ufer de flratagême.
Il affemble les chefs de fes troupes , 6c annonce
publiquement que , puifque les Germains approchent,
il ne remettra pas ion fort 6c celui de fon
armée à l'évènement dôuteux'd’un combat, 6c qu’il
décampera le lendemain au point du jour. Le camp
des Trévires étoit fi proche., qu’aufîi - tôt cette
nouvelle y fut répandue , portée fans doute par
quelqu’un des cavalièrs-gauloïs qui iervoient dans
l’armée romaine Ôcfavorifoient leurs compatriotes.
G’étoit pour cette raiion, autant que pour obferver
la contenance des ennemis, que le général romain
étoit venu camper fi près d’eux. Pendant la n u it,
il affemble les tribuns militaires ôc les -principaux
centurions, leur fait part de fon deffein ; 6c, pour
mieux offrir aux ennemis l’apparence de la crainte,
ordonne que l’on décampe avec plus de bruit ôc
de tumulte qu’à l’ordinaire. Il rendit ainfi fon départ
femblable à une fuite : avant .le jour l’ennemi fça-
voit toutes ces circonfiances.
A peine l’arrière - garde étoit fortie des retranchements
que les Gaulois fe çonfultent, s’animént,
fe difent qu’il ne faut pas laiffer échapper la proie
qu’i l ont efpérée. Perfuadés que les Romains cèdent
à la terreur, il leur paroît trop long d’atténdre
le fecours des Germains , 6c qu’il ne conviendroit
pas à la magnanimité de leur nation de n’ofer attaquer
avec tant de forces une troupe, .foible, fugitive,
6c embarralfée de fes bagages. 11 n’héfitent
pas à paffer la rivière 6c engager le combat en un
terrein défavantageux.
Labiénus avoit efpéré de les y attirer, 6c avançoit
lentement. Il envoya fes bagages un peu en avant,
les fit placer fur une éminence, y mit quelques
turmes pour les garder, 6c haranguant fes légions
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tn peu de mots, 'les forma en bataille avec la
cavalerie fur les ailes ; aufiî-tôt l’armée romaine
jette des cris & lance les piles. L’ennemi voyant
1 fondre fur k i , contre fon attente, les troupes
f) 5u>il croy ° h en fuite, ne put foutenir le choc
il s’enfuit lui-même dans les bois voifins.
Ici Labiénus imitait fon maître. Céfar s’étant
approché de Cicéron, que les Gaulois tenoîent en-
fermé , apprit qu’ils marchoient à lui au nombre
de foixante mille. Il arrivoit à une vallée qu’ar-
rofoit un ruifleau, lorfqu’il apperçut cette grande
armee ; la fienne étoit à peine de fept mille
hommes. Il eût été dangereux de combattre avec
li peu de troupes en un lieu défavantageux.
Cicéron étant délivré , la célérité n’étoit plus
nécelfaire. Céfar s’arrête, ôc fe retranche dans la
. pofition la plus favorable. Son armée occupoit
peu d’efpace , fur-tout n’aÿant point de bagage :
cependant il la refferra, autant qu’il fut poiiible ,
afin que les ennemis en conçuffent le plus grand
mépris. En même temps il fit reconnoîtr.e les
chemins par lefquels on pouvoit pafler la vallée.
même jour il y eut auprès de l ’eau quelques
escarmouches ; mais les deux armées fe tinrent
dans leur camp : les Gaulois attendoient celles
^f/ieufs trouPes tîui n’avoient pas joint encore.
.Céfar, en feignant de craindre , efpéroit d’attirer
lennemi de fon côté, ou du moins de prendre
connoifïance des chemins, ôc de pafler la vallée
oc le ruifleau avec moins de danger
- Au point du jour la cavalerie gauloife approche
du camp, ôc engage le combat. Céfar ordonne
a la lienne de c e d e r ,& de fe retirer dans fon
camp. En^ même temps il fait élever le parapet
ae touts cotés, boucher les portes, courir çà ôc
là , de manière à marquer la plus grande crainte.
-Les Gaulois, attirés par ces demonflrations ,
pallent la vallee , fe forment en un lieu peu favo-
rable, approchent du parapet d’oh les Romains
s^etoient retirés, jettent de toutes parts des traits
au-dedans des retranchements, & font crier par 1
v ! \ herm tS 5Ue I fl <luelclue Gaulois qu Romain
veut pafler a eux avant la troifième heure (n eu f
11 Ie Peut en fureté, mais non pas après,
iorlquils virent les portes fermées par des aflifes
ga on , pleins de mépris ppur l’armée romaine,
Jes uns tentèrent d’abattre le parapet avec les
mains, dautres de combler Je foffé. Tout-à-coup
^.eiar lortant par toutes les portes , & lâchant fa
cavalerie , les Gaulois, furpris s’enfuirent iettant
Jetirs armes,, aucùn ne s’arrêta pour combattre,
K .1 et) petit un grand nombre. Céfar craignit
lui des 1ParCe qU’U S ïv0it enîre &
rfun a S & deS mara!s- * > « * • * » . content
un avantage qui ne lui cpfitoit pas un feul
homme, d joignit Cicéron le même jour,
n gen, r,aux moâe™ « n’ont point négligé cette
va[ntme°ur d f / ’ ^ n " 3p?iUi Be" rand d ^ u e fd î “
C e roi fuvirif !jUel edre '■> le pourfuivoiein.
* ‘■ ' ù - p - t - ,
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redoutant fes ennemis, craignant ceux même qu’il
avoit favorifés, rejette pat eux, contraint, comme
une bête féiroce , à chercher un refuge dans les
forêts, s’éfoit enfin joint à Dom Fernand. Celui-ci,
fidèle par inltinéf, avoit rallié deux mille hommes
d’armes (huit mille hommes) , feuls débris de l’armée
vaincue, & foible elpérance. Pour les diffiper plutôt
, & plus furement, il les falloit engager à une
, aftion défavântageufe.
i Du Guefclin ordonne â Carlortnet de prendre
deux cents chevaux , de marcher à Dom Pèdre, &t
d engager le combat. Le ro i, averti par fès coureurs,
envoyé deux cents chevaux en avant, & luit avec
le telle de fa troupe. Carlonnet l’appèreevant fe
retire lentement. Dom Pèdre, toujours v iolent,
irrite par fon infortune, animé par un avantage
que la troupe avoit eu depuis peu contre ce même
général dans une embufcade, cède à fa fougue ,
& le fuît. Olivier du Guefclin , conduit en apparence
par le halard, liitvient avec .cinq cents
hommes, & protège la retraite. Carlonnet, feignant
deferaflurer,rallentit fa marche , & charge même
lès plus avances. Dom Pèdre, excité de plus en plus
par cette efpèce d’audace , ne doute pas qu’il va
du moins fe venger fur ce corps trop foible pour
lui réfiller, qui déjà paroît s’ébranler, & près de
prendre la fuite. Craignant qu’il ne lui échappe,
il s’abandonne à bride abattue, avec ce qui peut
le fuiyre. Dans ce moment de défordre, Bertrand
& le Bègue de Villaine tombent fur fes deux flancs
avec fix cents cheyaux. L e tpi, Fernand, & deux
cents hommes échappèrent feuls.à la faveur des bois.
L’apparence de la crainte a quelquefois en-
gage ÛB® -.armee a quitter un pofte avantageux.
Le même Bertrand du Guefclin nous çn a laifle
un exemple. Quoiqu’inférieur en nombre, il vouloit
ouvrir la première campagne du règne de
Charles V , par une viéloire. Le roi de Navarre ,
fécondé par les Anglois, avoit renouvelle fa pré*
tention fur la Bourgogne, la Champagne & la
Brie. Jean de G railly , captai de Buch , général
habile, eommandoit fon armée. Il s’étoit campé
avantageufement fur un côtçau qui dominoit une
plaine arrofée par l’Eure ; fa gauçhe s’étendoit
vers la rivière : un bpis • taillis, dans lequel il
avoit jetté cent hommes d’armes , protégeoit fa
gauche : derrière lui étoit la montagne fituée
entre Evreux, ôc Çpçherel. Il avoit l’avantage de
tirer, fes vivres des fertiles campagnes d’Evreux
6c des environs.
Réfolu à garder ce pofte, il avoit laifle libre le
\ pont de Çocherel. Bertrand le pafle, campe dans
•la plaine, envoie , fuivant l’ufage, un héraut demander
la bataille , ÔC propofe ^ux chevaliers
ennemis de 1 rompre quelques lances avec ceux
de fon arm|e. Le captai répondit, quant à la
bataille, qu’il fçavoit ce qu’il devoit faire ôc
que le moment d’une aElion générale n’étoit pas
propre au fpeélacle des combats finguliers.
^çrs la fin du jour les François ayant fourragé