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8°. Qu’il n’en partît chaque jour qu'un certain'
nombre.
• 90. Que les maréchaufféesfuffent à l ’époque du
départ & du retour des femeftres , plus vigilantes
que dans tout autre moment ; qu’elles oblîgeaffent
les foldats à ne point s’écarter , fans de bonnes
raifons , de la route qu’ils, devroient tenir pour
. .aller au lieu de leur, deftination.
io°. Qu’en arrivant, dans''le lieu de fa réfidence
le.foldat fem e ftr ie r lût obligé d’aller dépofer fes
armes & fa cartouche entre les mains de l’officier
de la maréchauffée le plus voifin.
. i i °. Que cet officier tînt une note exaéle de
touts les foldats femeftriers répandus dans fon
diftriél.
12°. Que touts les femeftriers fuffent obligés
d ’aller un' dimanche de chaque mois, paffer devant
l’officier de la maréchauffée une efpèce de
revue de préfence & peut - être de tenue militaire.
13°. Que les femeftriers ne puffent s’éloigner
de plus de.fix lieues de leur demeure fans être
munis d’une permiffion lignée par l’officier de la
maréchauffée.
140. Si les officiers de la maréchauffée étoient
trop .occupés pour remplir ces détails , ou fi leurs
réfidences trop éloignées obligeoit les fo ld a t s à
des courfes trop longues, on pourroit charger des
mêmes foins un officier aéluellement fervant, ou
un officier qui habiteroit le même endroit que le
fo ld a t femeftrier ; cet officier choift par le foldat
lui-même , feroit fon chef & fon répondant pendant
la durée du femeftre.
1 <5°. ;Si le foldat s’abfentoit fans la permiffion
de l ’officier , qui feroit fon capitaine femeftrier ,
pu s’il, tenoit une conduite, peu digne d’un bon
militaire , le capitaine femeftrier l’en puniroit par
la prifon & le rénverroit même à fon régiment s’iL
le croyoir néceffaire. C ’eft encore à cet officier
que les régiments s’adrefferoient pour fçavoir ce
que feroit devenu celui de leurs foldats qui feroit
fous fa direélion.
i6°. Perfonne ne pourroit donner de prolongation
au foldat femeftrier , parce qu’on voudroit
voir toute l’armée raffemblée pendant les trois
mois d’inftruétion.
170. Les foldats que des maladies ou d’autres ,
raifons d’un très grand poids auroient forcés à
refter chez eux, feroient obligés, quoiqu’ils euffent |
obtenu des prolongations , à remplacer , après j
que leur engagement feroit fini, le temps qu’ils
auroient été forcés de refter éloignés de leurs
drapeaux.
,i8°. Les foldats fémeftriers'qui ne rejoindroient
pas à la fin de leur, congé feroient punis avec
beaucoup de févérité , d’abord par la perte de leur
part de p a y e , puis par la prifon , enfin par les
peines infligées aux déferteurs.
19°.-Chaque brigade de maréchauffée feroit
-obligée de faire vers l’époque du départ des fe-
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meftners, une tournée exaéte de fon diftri& pout
les forcer à partir.
20°. Les femeftriers feroient obligés de rapporter
un certificat de t r a v a i l , figné par le ma-
giftrat de l’endroit de leur réfidehce ; un certificat
de bonne vie & moeurs , donné par leur curé :
l’officier de la maréchauffée , le juge royal & le
,capitaine-fémeftrier devroient figner ces deux certificats.
Le foldat qui 11e rapporteroit pas ces deux at-
teftations feroit privé de fa paye , & tout efpoir
aux congés lui feroit fermé.
2 i° . La paye des foldats femeftriers feroit mifie
en maffe. Elle feroit répartie de la manière fui-
vante. Le foldat femeftrier en auroit la moitié. La
moitié reliante feroit partagée en deux portions
égales, dont une appartiendront aux foldats qui
n’auroient pas eu de congé , & l’autre divifée fur
toute la compagnie , feroit répartie en augmentation
de prêt pour les quatre-vingt dix jours de
travail.
. Motivons le réglement que nous venons d’adopter.
Les numéros qui font placés à la tête des
articles .& ceux que nous .a v o n s mis au. commencement
de nos motifs d’adoption , épargneront
aux leéleurs l’ennui des répétitions.
1. En France & fur-tout dans la partie du nord du
royaume , o ù toutes les troupes font accumulées ,
le mois d’oélobre eft le plus favorable à l’inftruc-
tion en grand. Pendant le printemps on s’occupe
&■ à redonner aux foldats qui ont paffé l’hiver au
corps , cette fupériorité de tenue & d’inftruélion ,
dont ils fe font éloignés pendant les temps froids
& p l u v i e u x & à coürber de nouveau fous les
îoix de la difcipline èc de l’inftruâion, ceux qui
ont paffé l’hiver au fein de leurs familles : l’été
commence , la campagne eft. couverte de hautes
moiffons , les chaleurs font exceflives : quand on
ne veut pas excéder les foldats & remplir l’ho-,
pital , à peine peut-on les exercer affez fou vent
& affez longtemps pour ne point perdre ce qu’on
a acquis pendant le printemps : feptembre arrive
enfin , la terre eft dépouillée, les manoeuvres commencent
; mais à peine en a-t-on fait cinq ou fix
que l’époque du départ des femeftriers fe fait entrevoir
: plus, on approche de ce moment defiré
plus l’attention diminue , plus le zèle, s’éteint :
un efprit, j’ofe dire , de vertige femble s’être
çmparé de toutes les têtes , officiers généraux,
officiers fupérieurs, officiers particuliers , bas-officiers
,. foldats, touts veulent partir. Dans les petites
garnifons » le 26 de feptembre voit peu de
femeftriers.: dans les grandes places de guerre, il
eft témoin du départ de ceux qui d ifen t avoir
quelques affaires , bu qui ont le plus d’adrefle.
D è s . que les femeftriers font partis, les régiments
ne fongent plus qu’au repos : ainfi le mois d’octobre
, ce mois le plus propre aux grandes manoeuvres
, où les corps ont repris la force que
les chaleurs exceflives de l’été leur ayoient enlevée ;
où
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où l’on a befoin de faire de violents exercices
pour empêcher qùe les fraîcheurs de l’automne
n’interceptent la tranfpiration infenfible ; où les
moiffons ne préfentent aucun obftacle ; où les
légumes abondants offrent aux foldats une nourriture
faine & peu chère ; ce mois pendant lequel
le ciel eft prefque toujours pur & ferein , eft
perdu pour les militaires. Retardez le départ des
fémeftriers jufqu’au premier^de novembre, & vous
verrez naître un ordre de chofes tout-à-fait différent.
Vous aurez deux mois confécutifs pendant
lefquels vous pourrez vous livrer au défir &. au
befoin que vous avez de manoeuvrer* Vous pourrez
former des camps de paix , y faire au moins trente
exercices & quinze marches ou grands mouvements
qui inftruiront plus vos généraux , vos officiers
& vos foldats que plufieurs années d’une école
femblable à celle que vous tenez aujourd’hui.
Ce n ’eft pas uniquement pour dédommager les
foldats de la perte du mois d’oélobre, que nous
avons adopté l’idée de prolonger & de multiplier
les congés de fémeftre, des intérêts plus grands &
plus généraux nous ont déterminés.
Si vous rendez pendant neuf mois les deux tiers
de votre armée à l’agriculture & aux arts, le foldat
redeviendra citoyen ; il s’attachera aux lieux qui
l’auront vu naître ; il fe fouvîendra un jour de
combat, qu’il a des propriétés, des parents ÔL des
amis; les jeunes citadins voyant les militaires prefque
toujours au fein de leurs familles, s’engageront
avec facilité, en .perdant la crainte qu’ils ont aujourd'hui
de ne revoir de longtemps le foyer de
leurs pères ; les régiments auront dans chaque
partie du royaume une foule de recruteurs qui ne
leur coûteront rien ; les foldats fis fortifieront, foit
par leurs travaux, foit par les deux longues routes
qu’ils feront obligés-de faire , foit par les trois
mois du violent exercice auquel on les affujettira ;
ils n’oublieront pas entièrement, comme ils le font
aujourd’hui, le métier qui doit les faire vivre ;
ils reviendront gais, contents; ils répandront enfin
par leurs voyages dans, les provinces de l’intérieur
du royaume, l’argent qui en fort de mille
manières différentes, & qui y rentre avec tant
de peine.
Si nous avions cru qu’il fût néceffaire de joindre
te poids des autorités à celui du raifonnement,
nous aurions cité Frédéric II. Ce monarque ne
garde cortftarament fous fes drapeaux, que les
hommes qu’il feroit dangereux de remettre en
liberté.
Mais cette multiplication des congés ne nuiroit-
«11e pas à l’inftruélion & à la difcipline militaire ?
1. Nous avons avancé dans l ’article ( C om pa gnie
) qu’un corps d’officiers ôc de bas-officiers
bien inftruit, pourroit mettre dans l’efpace d’un
mois un régiment de recrues en état de manoeuvrer
en campagne, & même fur une efplanade,
& qu’il pourroit les façonner au joug de la difci-
pline ; combien plus facilement, ne pourrçit-il pas
Art militaire* Tome. I,
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dans trois mois porter au plus haut degré de per-
feélion des foldats q u i. ont été déjà inftruits &
difeiplinés. L ’augmentation & la prolongation pro-
pofées ne porteroient donc aucune atteinte à la
difcipline , ni à I’inftruélion. A quoi les grâces
pourroient-elles nuire? Pour le fçavoir, jettons
un coup d’oeil fur les devoirs des foldats en gar-
nifon. Que font-ils pendant les neuf mois de
l’année que nous propofons d’employer en congés ?
ils montent des gardes inutiles & funeftes pour
eux, inutiles, coûteufes &. dangereufes pour l’état;
& enfin inutiles aux citoyens. Prouvons en peu de
mots ces différentes propofitions.
On n’apprend point à veiller en veillant : les
gardes dans une ville de guerre, pendant la paix ,
reffemblent très peu aux gardes que l’on monte
en rafe campagne, & dans une place affiégée ;
il eft d’ailleurs poflible d’enfeigner dans huit jours
à chaque foldat tout ce qui lui eft néceffaire pour
bien faire faêlion.
Les gardes ruinent le tempérament du foldat
( Voyeç G ard e & chaussure m il it a ir e ) ,
lui occafionnent des dépenfes q u i, quoique peu
confidérables en elles-mêmes, lui font cependant
,très fenfibles, parce qu’il eft obligé de vivre
avec une paye très modique.
Le foldat qui eft de garde a befoin d’être chauffé
éclairé; & il dégrade infiniment plus fon armement
& fon habillement pendant une feule nuit
paffée au corps de garde , que pendant quinze
jours paffés dans la chambrée.
Les gardes fréquentes envoyent à l’hôpital, &
fouvent conduifent au tombeau une foule de jeunes
gens, dont le tempérament foible ne peut Emporter
des veilles continuelles.
Quelques patrouilles beaucoup moins nom-
breufes que les gardes actuelles, fuffiroient à la
confervation de la tranquillité, publique, des ma-
gafins, des fortifications &. des bâtiments du roi :
pour être convaincu que les gardes nombreufes
& multipliées ne contribuent que peu à la sûreté
& à la tranquillité des citoyens, on n’a qu’à comparer
une ville de garnifon bien gardée, & une
ville de l’intérieur du royaume dépourvue de
fentinelles & de patrouilles, & on verra que les
difputes & les querelles font plus fréquentes &
plus dangereufes dans les premières que dans les
fécondés. Ce font, dira-t-on fans doute, les trou-
pés qui rendent les gardes néceffaires. Qu’eft-ce
donc que notre difcipline, demanderai-je? mais
en fuppofant que cette objeélion fût fondée, il
n’en feroit pas moins vrai que cinquante ou cent
hommes au plus* garderoient auffi sûrement Metz,
Strasbourg ou Lille, que les trois ou quatre cents
hommes qui fervent de parade chaque jour dans
chacune de ces différentes villes.
Puifque les foldats n’apprennent rien d’u tile,
ne font rien de bon depuis le commencement de
novembre, jufqu’à la fin de juillet; pourquoi ne.
E e e e e