de frapper un but grand comme un écu à cinquante
pas. Si on veut réduire cet éloge & d’autres
femblables à leur jufte valeur , il faut d’abord .
obferver que tout ce qui eft nouveau excite plus
d’admiration ; eniuite, que touts les peuples, jaloux
de briller aux yeux d’un é tran g e r lu i préfentant
ce qu’ils ont de plus parfait. Veulent-ils montrer
leur adrefîe à manier une arme , ils font choix
de ceux qui excellent. Jugeons des autres par nous-
mêmes. Si nous voulions faire voir à un tahitien,
l’ufage du tufil , nous produirions devant lui le
meilleur tireur, & il diroit dans l'on île , que les
François font furs de frapper un but allez pjptit,
à trois cents pas de diftance. Concluons qu’il y
a chez touts les peuples quelques hommes qui emploient
avec beaucoup d’adreffe les armes dont on
y tait usage , &. que touts les autres s’en fervent
av.-c différents degrés de jufteffe, fuivant le plus
ou le moins d’exercice 8t d’aptitude naturelle.
Les nègres du Sénégal ont une cotte de mailles ,
faite à-peu-près comme une dalmatique , & par-
dellous une autre efpèce d’arme défenfive,. dont |
l ’origine eft lupe- ftitieufe : ce font des ta i mans ou
amulettes. Comme ils ont lans doute éprouvé que
la vertu occulte qu’ils le sr attribuent , eft une jMS
mère , ils en ont multiplié le nombre à tel point
qu’ils en wnt couverts, & que ce préfervatif,
imaginaire en fon principe, a louvent un effet réel.
Les habitans des îles Canaries , éloignés du commerce
des autres peuples, fe rapprochant de l’ori- I
gine des arts : ils n’ont pour armes que les pieTes •
& le'bâton durci au feu. Les Maures ont l’arc & la
flèche ,ia longue pique, & le long couteau attaché
à la ceinture;
Ces premiers commencements qui exiftent de
nos joursnous,les retrouvons chez les plus anciens
peuples dont l’hiftoire nous ait confervé le lou-
venii. LesTüthiopiens, couverts de peaux de lion
& de léopard, avoient de grands arcs faits de
tige de palmiers, longs de quatre coudées, ou
cinq pieds huit pouces quatre lignes, & de grandes
flèches de rofeau, dont la pointe étoit dè pierre.
Ils portoient auffi des lances armées de cornes de
chèvre, & desmaffues garnies de,fer. Ce peuple
peu civilifé conlerva long - temps fes anciennes
armes : ceux qui pafsèrent en Grèce avec l’armée
de Xerxès n’en avoient pas d’autres. Les premiers
Egyptiens portoient l’arc & la maffue, & fe cou-
vroient de peaux d’animaux. Telles étoient les
armes de leur guerrier, qui fut le modèle de;l’Hercule
grec : elles lui convenoient mieux fans doute ,.
ainfi que la deftru&ion des monftres fauvages ,
qu’au fils d’Alcmène, qui vivoit peu avant la
guerre de T ro ie , dans un temps ou les arts & les
armes de tout genre étoient'connus dans la Grèce.
{ Diodor. Sic. L . I. p. aov). Chez les Phéniciens ,
Ou fous, qui eut des différents ou des guerres avec
ion frère Upfouranius, fut le premier à fe couvrir
de la peau des bêtes qu’il prenoit à la chaffe,
peut-être comme arme défenfive. ( Sanchoniath»
art. V. § . 18. ).
Tel eft, pour ainfi dire, le premier âge des
àrmes, celui qui précède la connoiffance des métaux
, & l’art de les mettre en oeuvre. On n’y trouve
que les offenfives prifes de la nature brelqu’iimmédiatement,
comme la pierre, le bâton, la maflue ,
ou celles qu’on peut armer de pointes courtes
faites avec des os d’animaux, & les défenf?ves
que fourniffent les peaux des Bêtes fauvages. Les
autres armes dont l’invention 6c le travail luppo'ent
l’exercice de plufieurs autres arts, prirent naiffance
par degrés dans le foyer général de nos lumières ,
la Phénicie St l’Egypte. Elles y étoient connues
depuis plufieurs âges au temps de Moyle.
Les .Egyptiens qui, fuivant Xénophon , étcient
dans l’armée de Crcefus, avoient de grands boucliers
qui les couvraient jufqu’aux pieds , de petites
haches , de grandes & fortes piques.
Les Hébreux qui avoient aulfi commencé par
Tare & la flèche, & fans doute par les autres armes
primitives, emportèrent celles de l’Egypte dans
la Paleftine , & les trouvèrent en ufage dans
tout ce pays.
.A S I E.
Outre l’arc St la fronde, les tribus dfliraël .&
de Juda portoient la hafte , Tépée, le calque-, St
le bouclier \ elles avoient d’excellents frondeurs
St acontiftes de tout genre.
Les Philiftins avoient la pique, la cul rafle an—
nelée, le cafque de cuivre, & les bottines du rrfme
métal. Ces armes fe répandirent chez touts les
peuples de l’Afie, St enfüite de rEurope , plus eu
moins promptement, fuivant les différents de g s es
de civilifation , & la diftance plus ou moins grande
des temps & des lieux. Le tableau qu'en fait
Hérodote dans fa defeription de l’armée de Xerxès,
peut en donner une jufte idée. '
Les Mèdes , les Hÿrcaniens, Sc ies Perfes portoient
le bonnet foulé, nommé tiare 9 une tunique
ou cotte'de mailles de fe r , qui-avoit des
manches, les bottinesde petites lances , .de grands
arcs, des flèches de roseau , des poignards attachés
à la ceinture St pendants fur la cuiffé droite. Les
Perfes avoient auflî un bouclier d’ofier. recouvert
de cuir, ou d’autre matière, St quelques-uns des
fabres d’or ; ( x-x.ira.tta.ç i'atrxç Herodot.
IX. c. 7 9 .). Ils ont aufli fait ufage de javelots à
courroie. Les Ciffiehs, avec tes mêmes armes B,
avoient des mitres au lieu de tiares.
Les cafques des Affyriens étoient de cuivre y
faits d’une manière propre aux barbares, St difficile
à exprimer. Ils avoient le bouclier, la cui-
■{ rafle de. lin, la lance , le poignard égyptien , la
maffue de boisgarnie de fer. Les Baciriens, âr-
I mes comme les Mèdes, portoient l’arc demie
au , propre à leur pays, St de petites lançes-
i Les Saques , peuple feythique, avoient les. calques
terminés en pointe droite , les bottines , Pâte
icythique , le poignard, la hache, le fabre.
Les Indien^ étoient vêtus d’une efpèce d’étoffe
faite avec des fibres ligneufes. Leurs arcs étoient
de rofeau, leurs flèches de même, St armées de
pointes de fer. Les Ariens avoient l’arc mède , St
les autres armes des Baâriens, ainfi que les Parthes,
les Chorafmiens, les Sogdiens, St les Dadiqués.
LesCafpiens portoient le fayon de peau de chèvre,
l’arc de rofeau, St l’épée perfique.
Les Sarangues, vêtus d’étoffes teintes, avoient
une chauffure qui atteignoit jufqu’au genou,Tare
& la lance des Mèdes. Les Pa¥s portoient le
fayon, l’arc de leur pays, St le poignard, ainfi que
les Utiens , lés Muciens , les Paricaniens : Jes
Arabes , leurs grands arcs recourbés, St pour vête-
mens leurs faÿàns. :
Les Ethiopiens d’Afie, armés à-peu-près, comme
les Indiens, portoient fur la tête la peau du front
d’un cheval avec fes crins , St les oreilles droites :
ils avoient une efpèce de bouclier, fait de peau
de grue. On vient de voir quelles étoient les armes
de ceux d’Afie. Lorfqu’ils maréhoient au combat,
ils fe peignoient la moitié du corps avec le gypfe ,
St l’autre avec le -cinabre. Les Libyens étoient
couverts d’une efpèce d’armure de cuir , St com-
battoient avec de's javelots durcis au feu. Les
Paphlagoniens portoient des cafques de peaux ,
de petits boucliers, des lances de longueur médiocre,
des javelots,5des poignards; des bottines
recouvroient la moitié de la jambe. Les Ligyens ,
Matièniens, Maryândèniens, St Syriens portoient
les armes pâphlagoniennes, ainfi que les Phrygiens,
St les Arméniens.
Les Lydiens avoient l’armure grecque 5 les
Myliens le cafque de peau, de petits boucliers ,
St des javélots durcis au feu. LesThraces, couverts
de tuniques St de fayons, portoient un cafque
de peau de renard, le javelot, la pelte, de petits
pôignards? St des bottines de peaü de chevreau.
Les Thraces d’Afie ou Bithyniens étoient diftin-
gués par de pétits boücliers de cuir de boeuf, St par
deux de ces longs pieux qü’on employoit à la
chaffe des loups. Leurs cafques de cuivre étoient
furmontés d’oreilles St de cornes de boeuf du même
métal, avec des aigrettes. Ils avoient les jambes
couvertes d’une chauffure de gros drap couleur de
pourpré.
Les Myliéns portoient de petités lances., le
cafque de peau, des vêtements attachés avec des
agraffes, St quelques - uns Tare de Lycie ; les
Mofques , des cafques de coton , de petits boucliers
, St de petites lancés armées d’un long fer :
les Tibaréniens, 'les Macrons,St les Mofynoeques
avoient ces mêmes armes.
Le cafque des Mares étoit tiffu à leur manière,
leur bouclier petit & fait de cuir : ils’étoient armés
de javelots'. Les Colques portoient le cafque de
coton, lé petit bouclier de cuir , la lance courte,
& le fabre, de même que les Allarodiens St les
Safpires. Les vêtements 8t les armes des Infulaires
de la mer rouge étoient femblables à ceux des
Mèdes. Toutes ces troupes fervoient à pied.
La cavalerie perfe étoit armée comme l’infanterie
, excepté que quelques-uns avoient des espèces
de cafques de cuivre Ou de fer. Les Perfes
fagartiens, peuple nomade, ne portoient aucune
autre arme de métal que le poignard. Ils fe fervoient
d’une treffe de cuir qui, à fon extrémité 9
portoit des mailles. Lorfqufils l’avoient lancée
fur leur ennemi , & qu’un homme a u un cheval y
étoit èmbarraffé , ils l’attiroient ôt le tuoient.
Les cavaliers baétriens, mèdes , cifliens , caf-
piens, libyens , paricaniens, & indiens étoient
armés comme l’infanterie de leur nation : ces derniers
avoient des chars traînés par des chevaux &
des ânes fauvages. Les Arabes, armés aufli comme
leur infanterie, étoient montés fur des chameaux
dont la vîteffe n’étoit pas inférieure à celle des
chevaux. Cette infanterie & cette cavalerie fai-
foient route par terre. Voyons maintenant les
troupes que portoit la flotte.
Les Phéniciens & les Syriens de la Paleftine
avoient des cafques femblables à ceux des Grecs ,
des cuiraffes de toile, des boucliers fans rebords,
& des javelots.
Les cafques des Egyptiens étoient de plufieurs
doubles coufus enfemble, leurs boucliers concaves
& à. grands rebords. Ils portoient de grandes
piques de marine,& de grandes haches. La plupart
avoient des cuiraffes ôc de grands fabres.
Les rois des Cypriens portoient la mitre ; leurs
troupes, des tuniques & des armes grecques : les
Ciliciens, le cafque qui leur étoit propre , le petit
bouclier de cuir, la tunique de laine, deux javelots
, & une épée femblable au fabre égyptien :
les Pamphiliens , l’armure grecque : les Lyciens ,
la cuiraffe, les bottines, l’arc de cornouiller, les
flèches de rofeau non empennées, des javelots,
des faulx, un poignard ; fur la tête un bonnet orné
de plumes, & fur l’épaule une peau de chèvre.
Les Doriens d’Afie étoient armés comme les
Grecs : les Cariens portoient de plus des faulx &
des poignards. Les Ioniens, les Eoliens, les Infulaires,
les habitants de l’Hellefpont avoient aufli
l’armure grecque.
Dans le combat qui précéda la bataille de Platée,
Mafiftius portoit une cotte de mailles d’or, recouverte
d’une tunique pourpre.
Au temps d’Alexandre , l’infanterie indienne
avoit l’arc de grandeur égale à celle du foldat qui
le portoit. Il l’appuyoit contre terre, & mettant
1 deffus le pied gauche, il le tendoit fortement. La
flèche avoit au moins trois coudées. (4 p. 3 p. ol. ).
Il n’y avoit ni bouclier, ni cuiraffe, ni autre efpèce
d’armure, quelque forte qu’elle fût, que le trait-
| d’un archer indien ne perçât. Ils portoient desfou-
I liers de cuir moins larges que le corps de l’homme,
mais prefqu’égales en hauteur. Quelques-uns
avoient des javelots au lieu d’arc, & touts de