
MEMOIRE SUR LE SYSTEME METRIQUE
Lrétymologie vulgairement reçue du mot stade est ç in f (i), parce qu’HercuIe
s'arrêta, dit-on, après avoir parcouru la mesure d’un stade sans reprendre haleine:
origine digne de celle qui a été donnée à la longueur de l’espace même; savoir,
le pied d’HercuIe répété six cents fois. Quel homme judicieux voudrait aujourd’hui
appuyer sur un pareil fondement une étymologie quelconque, sur-tout celle du
nom d’une mesure aùssi importante que le stade ! Cette mesure fut établie d’après
des bases bien différentes,'puisées dans un type invariable. Je conjecture que le
nom qui lui fut donné en Egypte, exprimoit cette circonstance, puisque je vois
dans diverses langues le mot radical de stade exprimant l’idée d’établir, de constituer.
Si le mot signifîoit une chose. fix é e , qu’y a-t-il de plus conforme avec l’opération
et l’institution que j’attribue aux Egyptiens !
FjP u s, S t a d e Hébraïque, e t Ghalouah, S t a d e A r a b e .
Le stade Hébraïque s’appeloit proprement 0*1 ris ou ïous. Au mot R is, dans le
Lexicon heptaglotton, on trouve : 8 Stade, lieu pour la course, lieu où l’on exerçoit
» à la course les chevaux du roi ; mesure’ égale à la 7.' partie 7 du mille, &c. (2). »
Le Lexique pentaglotte de Schindler explique ainsi la racine DD1 : “ Fouler aux
» pieds...D *1, lieu où les chevaux courent, stade; chemin dressé (carrière) qui a
» 176 coudées, égal à la y.c partie 7 du mille Italique (3). »
Ainsi rous, aussi-bien que stadium et exprimoit en même temps une
mesure itinéraire et un lieu pour les exercices de la course.
Le stade se disoit quelquefois talak. Cette racine signifie courir, aller; p'po, m l ,
d’où tallâk, curriculum (4).
Enfin l’endroit où l’on court, qui a de l’analogie avec le stade des jeux, s’appeloit
aussi derek; on trouve ce mot dans l’Exode (5) : derek -p i, via; d’où t y j b
taryq, en arabe. Cette racine q n veut dire fouler aux pieds, calcavitpedibns ; q n ,
calcatio, itio, vestigium.
Les Arabes appellent ghalouah la mesure du stade; la racine de ce mot est "àtê
S .Lu c , chap. 24, 13 ,& c . J’ai réuni les extraitsde tous les
passages de la Bible où se trouvent des noms de mesure
que les interprètes Grecs ou Latins ont traduits par stade:
il en est de même des textes relatifs au mille, et de plusieurs
de- ceux qui regardent la canne, le palme et la
coudée. Mais je crois inutile de rapporter ici tous ces
passages, qui alongereient beaucoup ce mémoire sans
utilité; en voici seulement l'indication. A ceux qui sont
cités plus haut, il faut joindre Macchab. liv. I l , chap. 1 1 , y. 5 ; chap. 1 2 , y. 9 , 10, 16, 17, 29; Apocal. chap. 14, y. 20 ; chap. 2 1 , y. 16 ; Epist. Paul, ad Corinth. liv. i .cr,
chap. 9 , y. 24. L e mot a été constamment exprimé en
syriaque par estadion et estadotho ; en qobte, par stadion;
en éthiopien, par me’râfj en arabe, par ghalouah. En
persan et en arabe, il est quelquefois traduit par myl.
L e mot Ethiopien me’râf signiñe station j la racine a’raf,
stare, mansto, et aussi pierre milliaire.
(1) ‘Ano 7>iççu.oiuç,diiVo3sius(Eiymolog.ling. Latin,}.
Une autre origine plus absurde est celle qu’on tir e à stando,
des spectateurs qui assistaient aux jeux. 1
(2) D**i ris, chald. D**>N D’*', stadium, curriculum, in
quo equi regii cursu exercebantur. Jer. 3 1 , 40.... Conti-
nebat 70 calai no s mensorios; calamus autem sex cubitos
et palmum. Sec. Talm, continebat septem et dì midi ani par-
tem miliaris...
On trouve encore D1*> > stadium 226 cubitorum, i, q.
D**i ris, vel prò eo. Il y a une faute dans le nombre des
coudées. Lisez 266 -j.
(3) Rous c n , contrivit, quassavit. Jerem. 3 1 , 40 , porta equorum, O ’DIDM. Targ..porta regis, NDVUV3 •’ locus
ubi equi decurrunt ; stadium : erat porta per quam rex
egrediebatur cum equitibus, eratque ibi via acquata ad cur-
sum equorum ; et via ista habebat mensuram D’*i, quod est
170 (*) et sex, ftlDN* nsp O ’jp cu biti, et FHT : est septima
pars miliaris Italici cum dimidio septìmae panis.
(4) Stadium, locus ubi currunt equi aut homines, campus,
planities. ( V oyez Lex. heptagl. )
(5) C h a p . 1 4 , v . 17.
(*) Lisez 260.
DES ANCIENS ÉGYPTIENS. y 6 3
ghalâ, qui, entre autres sens, se rend par summo conatu jecit : ghalouah signifie
en effet, non-seulement stade, mais la longueur du pet d'une Jlèche. , stadium;
summus equi cursus unps; sagittoe j actus, quantum projici potest. On voit aussi dans S. Paul
[Épître aux Corinthiens,, version Arabe) lé nom de meydân, pour le nom du
lieu consacré aux courses (jd
Ainsi les mots qui, en hébreu et en arabe, expriment la mesure du stade, ont à
la racine lç sens de marcher, courir, c’est-à-dire, de l’action proprë^à celui qui
parcourt soit le stade itinéraire, soit le stade des jeux. La prétendue origine du
mot Grec signifie tout le contraire. Fera-t-on dériver le stade d’une langue où il
veut dire s ’anêter, ou bien de celles où il signifie cheminer, courir ! Réduite à
ce terme, la question seroit bientôt résolue. Ces rapprochemens confirment que le.
stade provient de l’Orient, et qu’il n’appartient point aux Grecs.
D e l E p i t h e t e d e d o n n é e p a r S t r a b o n à l a g r a n d e e t à l a s e c o n d e P y r a m i d e s
d e J W e m p h i s .
A u chapitre n i, j’ai annoncé des écjaircissemens sur le passage de Strabon qui
donne un stade en hauteur à l’une et à l’autre pyramides (2), quoiqu’elles diffèrent
beaucoup entre elles : elat ya.p çuSiauaf 70 ii-j.04, t inÇolyavot rai a-yÿ/usun. Il faut d’abord
reconnoitre que le mot de indique une mesuré précise, et non une grandeur
vague. Tous les lexiques sont d'accord sur ce point; ils traduisent constamment
çaJWoç par mensuram stadii oeqlcans. Si j’ai été fondé à appliquer à l’apothème
de la grande pyramide la valeur d’un stade, c’est également dans cette dimension
de la seconde qu’il faudrait, pour être conséquent, chercher la longueur d’une mesure
analogue. Or, la base étant de 20/(m,3 5 , et la hauteur verticale, 132 mètres ,(3),
le calcul donne pour l’apothème 166m,<j2 ; il est bien remarquable que cette mesure
ne différé que de 67 centimètres de la longueur du stade de 240000 à la circonférence.
Ce stade.est celui de Cléomède; il équivaut à 360 coudées Egyptiennes.
Il est donné par le petit segment de l’hypoténuse dans le triangle Egyptien ; sa
proportion avec l’apothème de la grande pyramide ou le grand stade Égyptien
est celle de 9 à 10; enfin il renferme juste 600 pieds de Pline. Tous ces rapports
me paraissent concluans. A u reste, M. Gossellin a prouvé que Strabon faisoit aussi
usage du stade dont il s’agit; cjest quand, d’après Patroclë, il donne les dimensions
de l’Inde (4). Ce résultat semble donc expliquer clairement l’épithète de
ço-JWeu : mais il faut avouer qu’il reste quelque incertitude sur la mesure de la
hauteur. L ’angle de la pyramide d’après cette mesure de 1 3 2 mètres, et d’après
celle de la base qui est de 2o4m,3J (y), serait de 52” 15' 32“; mais des fragmens
du revêtement, apportés à Paris parM^Coutelle, donnent, pour cet angle, plus
de 54° t : cette différence ne doit pas surprendre, puisqu’on n’est pas assuré que
la face inférieure de ces morceaux étoit horizontalement située dans l’édifiçe. Les
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(1) Lib. 1 , cap. 9 , y. 24.
(2) Voyez le passage, çi-dessus pag. 520.
(3) Voytr^ ci-dessus, pag. 525.
(4) Strab. Geogr. Iib. i l , pag, ó8 et 70.
(5) Voye^ ci-dessus, pag. 526.
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