Ses, positions se réduisent à trois, la verticale ainsi figurée ï , l’horizontale >— ,
et l’oblique, dans laquelle un double trait, disposé en chevron, a ses deux pointes
constamment dirigées vers la droite, de cette manière, et jamais dans l’autre
sens. Le trait, horizontal et le trait vertical ont constamment aussi leurs pointes
dirigées dans un seul sens, comme l’on voit ci-dessus; ce qui ne les rend capables
par eux-mêmes que d’une seule signification, et diminue beaucoup le nombre et
la simplicité des combinaisons dont ils seroient susceptibles.- On remarque aussi,
a certains intervalles, un trait oblique isolé; mais on ne doit pas le compter
comme un caractère de l’alphabet, parce qu’il paroît n’avoir d’autre emploi que
d indiquer la séparation des mots. Quant à la manière de grouper les caractères,
il est important de remarquer que, dans les inscriptions dont nous parlons, ils se
succèdent sans jamais .se croiser en aucune manière, comme on l’a remarqué dans
des inscriptions de ce genre rencontrées ailleurs. A u surplus, la série suivante,
que j’ai copiée sur l’une des premières colonnes de l’inscription, mettra suffisamment
en état de juger de la forme et de la disposition de ces caractères :
K - Hfe <rr « \ k r< - - ï= w e r r~
Pour peu qu’on vienne à examiner avec quelque attention l’extrême simplicité
des élémens et de la marche de ce système d’écriture, on est surpris que l’on
ait pu en concevoir l’idée dans des temps aussi anciens : c’est assurément, par sa
simplicité, l’une des inventions les plus dignes de remarque dans l’histoire des
langues; et, si j’ose m’exprimer de la sorte, elle est, sous ce rapport, aux différentes
manières que les hommes ont imaginées pour peindre la parole, ce que
1 arithmétique binaire de Leibnitz est aux divers systèmes de numération et de
calcul connus jusqu’ici. Ce ne peut être que le fruit d’une civilisation fort
avancée, et d’une époque où l’usage des conventions étoit déjà devenu très-
familier : c’est, en quelque sorte, le terme opposé de l’écriture hiéroglyphique,
dont le but est d’exprimer les objets et les idées avec le moins de conventions
possible ( i ).
Quoiquil n’existe pas en Egypte d’édifice sur lequel on ait remarqué l’écriture
•cunéiforme, il paroît cependant que quelques-uns des voyageurs qui ont visité.cette
contrée à des époques antérieures, ont trouvé de petits objets portatifs, décorés
de cette sorte de caractères. On en voit même quelques-uns :dans les diverses
collections de Paris, sur des matières minérales qui semblent avoir appartenu
( i ) On voit combien se sont trompes ceux qui ont altérations successives, l’amenant graduellement' à l’état
supposé quelque analogie, d’origine dans ces deux sortes d’écriture syllabique, firent oublier du vulgaire la méthode
d’ecritures. A la vérité, toutes deux paroissent avoir, été de, retracer les objets pour en rappeler le souvenir, tandis
spécialement consacrées aux mystères du culte et des que l’écriture cunéiforme, inventée postérieurement à
sc iences, ainsi qu’aux; objets d’ intérêt national dont la d’autres systèmes, d’écriture syllabique, ne fut, dès son oriconnoissance
etoit renfermée entre un petit nombre d’ini- gine, qu’un moyen de communiquer réservé aux prêtres et
tiés et spécialement parmi les collèges de prêtres. M a is , aux initiés, sur-tout un moyen pour eux de transmettre à
si elles ont entre elles cette ressemblance d’avoir été toutes leurs successeurs les connoissances qu’ils avoient acquises,
•deux des écritures mystérieuses, il y a cette différence leurs découvertes, et les événemens dont il importoit de
importante, que l'une, l’hieroglyphique, ne le devint qu'à conserver le souvenir,
la longue et à mesure que des perfectionnemens et des
exclusivement à l’Egypte : tel est un vase cfalbâtre antique qui existe, je crois,
à la Bibliothèque ,du Roi et quelques petits cylindres en hématite, d’une variété
particulière, qui me paroît avoir été exclusivement travaillée en Égypte, et sur
laquelle on trouve un assez grand nombre de sujets hiéroglyphiques.
§. IV.
A quel Peuple appartient la Construction de ce Monument.
Du rapprochement de ces diverses circonstances, on peut conclure, ce me
semble, i.° que ce monument a été construit par l’ordre et sous la direction
des Perses; z.° qu’indépendamment des inscriptions le sujet du bas-relief est
aussi Persan, ainsi que le costume des figures; 3.0 mais que l’exécution en a été
confiée aux artistes Egyptiens, qui, se laissant guider par leurs anciennes habitudes,'
ont appliqué à ce sujet étranger le style et quelques-uns des ornemens
accessoires qu’ils avoient coutume d’employer dans leurs sujets nationaux.
Le globe ailé n’appartient pas exclusivement aux Egyptiens ; d’autres peuples
de l’Orient ont également connu ce symbole. On le retrouve (à la vérité, moins
nettement figuré qu’ici ) dans d’autres monumens Persans. Quant au bâton à tête
de chacal, c’est la seule fois, je crois, qu’on le trouve ailleurs que dans un sujet
Egyptien ; mais vraisemblablement c’est une licence de l’artiste, qui aura donné
cette forme au bâton sacré que tenoit la figure Persane, lequel devoit être
simplement recourbé en forme de crosse, comme on le remarque fréquemment
dans les bas-reliefs de Persépolis, entre les mains de figures qui portent Je même
costume que celle-ci.
Il seroit assez remarquable que les Perses ayant occupé si long-temps l’Égypte
n’y eussent laissé d’autres monumens que celui-ci , et ne s’y fussent point livrés
à de grands travaux comme les Egyptiens, lorsque tout sembloit les y inviter, eux
qui ont construit dans leur propre pays ( 1 ) des monumens presque aussi considérables
que les plus grands édifices de la Thébaïde. Je crois plus volontiers que
la haine que leur portoient les naturels du pays, aura fait détruire1 tous leurs
ouvrages après leur expulsion de l’Egypte, et que les blocs en auront été employés
ensuite dans d’autres constructions. Le petit monument de l’isthme de Suez aura
probablement été renversé comme les autres ; mais ses débris du moins auront ■
échappé à la destruction, à cause de sa position, qui ne permettoit guère à des
Egyptiens d’en tirer parti. Les Arabes seuls auront pu, à la longue, en détruire
quelques-uns, ou les convertir à leur usage; et il n’est pas sans vraisemblance,
comme nous 1 avons indiqué, que ce monticule en recèle encore plusieurs.
( i ) Voyez les Voyages de le Bruyn et de Niebuhr.