■connue ; on peut assurer seulement qu elle est d’une date postérieure aux ouvrages
de Greaves, et antérieure au Traité d'Édouard Bernard de ponderibus et mensuris,
qui parut pour la première fois en 168 4 - Cet auteur, dont l’ouvrage rassemble
toutes les autorités que 1 on peut citer sur les poids et mesures des anciens, indique
, dans une de ses tables, le rapport donné par Greaves du pied Anglais à
la coudée du Kaire, qu’il définit par cette phrase :
Cubitus ant D erAGA Cahiroe in Ægypto , pro linteis et sericis (i).
L usage auquel elle etoit employée, se trouve ainsi désigné sans aucune équivoque,
et il reste constant que la coudée de om.5 5y 7 dont il est question,
servoit au Kaire à mesurer les toiles de lin et les étoffes de soie : c’étoit par
conséquent l’unité de mesure appelée pïk ou dera bélédi, quoique celle dont
Greaves prit la longueur fût altérée, et plus courte d’environ neuf lignes qu’elle ne
doit l’être en effet, ainsi que nous le verrons bientôt.
Nous observerons ici, à l’appui du témoignage d’Édouard Bernard, que, dans
la supposition où la coudée évaluée par Greaves eût été celle du nilomètre, ce
voyageur n’eût pas manqué d’en avertir formellement : il est même hors de doute
qu’accoutumé à noter jusqu’aux moindres dimensions des monumens anciens qu’il
visitoit, il auroit apporté le plus grand soin à décrire cet édifice, s’il y avoit pénétré.
Le Traite d Edouard Bernard de ponderibus et mensuris ne semble pas avoir été
connu de Richard Cumberland, évêque de Pétersborough, qui publia, en 1686,
un Essai sur la découverte des mesures Hébraïques (a). Ce t auteur suppose que
la coudée usitée en Égypte n’a point varié depuis le temps où les Israélites y
étoient en captivité; hypothèse dont il prétend fonder la preuve sur ce que l’histoire
n a point affirmé positivement le contraire, et, notamment, sur ce que le géographe
de Nubie et quelques autres auteurs A rabes, auxquels se joint le P. Kircher,
affirment que le nilomètre actuellement existant a été érigé par le patriarche
Joseph. Ainsi, en admettant pour base de son système une tradition évidemment
absurde, et qu’on doit reléguer parmi les fables dont les Arabes ont mélangé toutes
leurs histoires, il donne comme l’ancienne coudée nilométrique, celle que Greaves
avoit mesurée, et dont Édouard Bernard venoit récemment d’indiquer l’emploi.
Cette assertion, purement conjecturale, et qu’on doit regarder comme lapremière
source des erreurs dans lesquelles on est tombé depuis sur la valeur de l’ancienne
coudée d’Égypte, fut combattue par Charles Arbuthnot, qui fit paroître, en 1707,
de nouvelles dissertations sur les poids et mesures. Cet auteur admet bien, avec
Cumberland, 1 identité des mesures Hébraïques et Égyptiennes; mais il reje,tte son
opinion sur l’identité de l’ancienne coudée Égyptienne et de la coudée actuelle.
Il adopte en entier le sentiment de Newton, cite ses propres paroles (3) , et
regarde comme 1 ancienne coudée d’Égypte, celle que fournissent les dimensions
de la chambre sépulcrale de la grande pyramide. Il ajoute enfin aux preuves
quil emprunte de Newton, celles qu’il tire du passage -de Héron rapporté au
(1) Eduardi B e r n a r d i ,* mensuris et ponderibus ami- sures and weights; by Richard Cumberland; London, 1686.
guis, lib. I I I , pag. 200 e t 201; Oxonioe, 1688. (3) Caroi:Arbuthnoîii Tabula'ûntiquoru/nmimmorum ,
(2) A n Ess’ay lowards the recovety o f the Jewish mea- mensurarum ctpondcrum, pag. 59 et seq.
commencement
D E L ’ Î L E D ’ É L É P H A N T I N E .
commencement de la section précédente. En faisant servir le pied Italique à la
détermination du pied philéteréen, et, par conséquent, à celle de la coudée dont ce
dernier étoit les deux tiers, il trouve, pour la valeur de celle-ci, 20 pouces
de pied Anglais (1), quantité équivalente à y 30millimètres, laquelle ne diffère que
de om.oo3 seulement de la coudée d’Éléphantine ; et cette différence provient
de ce que, dans l’évaluation précédente, Arbuthnot suppose le pied Romain plus
grand de deux millimètres qu’il n’est réellement, comme on s’en est assuré depuis.
Arbuthnot est le premier qui ait déterminé la coudée Égyptienne par le pied
Italique; mais il n’est pas le seul qui soit parvenu à cette détermination par la
même voie. MM. Picard et A u zou t, dans le sixième volume de l’ancienne collection
de l’Académie des sciences, l’avoient, en quelque sorte, déjà indiquée, en
adoptant le rapport donné par Héron entre le pied Romain et le pied d’Alexandrie.
Enfin Eisenschmidt, dans le Traité des poids et mesures, qu’il publia en
1708 (2), admet, avec tous les auteurs qui l’ont précédé, l’identité des coudées
Égyptienne et Hébraïque , tire leur valeur commune de celle du pied Romain,
et la trouve de om.j3 2 ; quantité trop grande de y millimètres, parce que, dans
cette évaluation, le pied Romain est supposé d’environ 4 millimètres trop long.
Les conjectures hasardées de Cumberland ayant été combattues et détruites par
Eisenschmidt et Arbuthnot, il n’étoit plus possible de confondre la coudée Égyptienne
de Greaves avec la coudée nilométrique. Cependant Fréret lut à l’Académie
des inscriptions, en 1723 (3), un mémoire sur les anciennes mesures de longueur,
dans lequel il avance que le sol de l’Égypte ne s’exhausse point par les inondations
du Nil, et qu’il présente aujourd’hui le même aspect que du temps de Sésostris. Quoique
les lois de l’hydraulique et les "effets naturels du cours des fleuves, observés dans
toutes les contrées de la terre, démentent cette assertion, l’auteur la regarde comme
une conséquence nécessaire de ce que le Nil n’atteint aujourd’hui le terme de
l’inondation en un point déterminé de son cours, qu’après s’êtrè élevé du même
nombre de coudées dont il s’élevoit autrefois au même point. Il tire ainsi d’une
proposition vraie une conséquence fausse, parce que, ses occupations habituelles
l’ayant éloigné de l’étude des sciences physiques, il ignoroit que le fond du Nil
et le sol de la vallée qu’il arrose s’exhaussent simultanément de quantités à-peu-près
égales; ce qui rend nécessairement constante la hauteur des inondations moyennes
au-dessus des terres de cette vallée, malgré leur exhaussement progressif
Cette erreur sur la permanence du sol de l’Égypte au même niveau n’est pas
la seule que Freret ait commise : il regarde la coudée nilométrique actuelle comme
étant restée la même depuis la plus- haute antiquité ; et la confondant avec la
coudée du Kaire mesurée par Greaves, il fait revivre les conjectures de Cumberland,
que des travaux ultérieurs avoient fait oublier.
Quoique le mémoire de Fréret dont il est question ici ait été connu dès
(1) Ibid, pai!, 62. (3) Essai sur les mesures longues des anciens, par
(2) Joan. Casp. Eisenscbmidii, de ponderibus et men- Fréret. Académie des Inscriptions, tome X X I V , pag.
suris veterum Rornanorum , Grce connu, Hebreeorum, Ù'c. et suiv.
sect. I I I , cap. iv> pag; 1 17.
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