exacts, c’est-à-dire, deux de plus que n’en avoit la coudée septénaire. L’idée
d’appliquer à celle-ci la division de celle-là s’étant donc présentée , l’unité de
mesure primitive, composée de sept palmes naturels, fut, pour l’usage ordinaire,
e t, notamment, pour'en faciliter l’emploi dans la construction des édifices de
pierre ou de charpente, divisée en six palmes fictifs, dont chacun fut sous-divisé
lui-méme en quatre parties égales, auxquelles on conserva le nom de doigts, moins
pour exprimer leur grandeur absolue que pour rappeler leur origine.
Cependant cette division de la coudée , que l’on pourroit en quelque sorte
appeler division civile, ne fut point généralement adoptée. Les prêtres Égyptiens,
religieusement attachés aux usages que la tradition leur avoit transmis , continuèrent
d’employer cette même unité de mesure , divisée , suivant le système
primitif, en sept palmes et en vingt-huit doigts; e t , comme elle servoit entre
leurs mains, sous le nom de coudée sacrée, à mesurer les accroissemens du Nil,
accroissemens sur lesquels reposoit l’espérance du bonheur commun, elle devint
enfin elle-même l’objet d’une espèce de culte.
Au reste, la division d’une même unité de mesure , suivant deux systèmes
différens, n’est point sans exemple dans l’antiquité. L ’on sait que le pied romain,
partagé originairement en seize doigts, le fut dans la suite en douze portions
égales appelées onces ou pouces; es. l’on sait encore qu’il conserva tout-à-la-fois les
deux divisions.
La moitié de la coudée Égyptienne, de vingt-quatre doigts , fournit une nouvelle
unité de mesure portative d’un emploi commode , par la division duodécimale
qu’elle présentoit : c’est le léreth des Hébreux.
Lorsque les longueurs qu’on avoit à mesurer étoient considérables, la superposition
d’une unité de mesure aussi courte que la coudée auroit entraîné beaucoup
de temps et de difficultés : on prévint ce double inconvénient, en formant
avec une canne ou roseau une mesure de six coudées.
L’ancien système métrique des Égyptiens et des Hébreux eut donc pour élémens,
i , ° L e d o i g t , qui étoit la plus p etite des mesures d e lo n g u e u r ...................................o m 0 2 1 p 5 7 .
2 .0 L e p a lm e , comp osé d e qua tre d o ig t s ............................................................................... o . 0 8 7 8 3 .
3 .0 L e z é r e th , d e trois p a lm e s........................... ....................................................................o . 2 6 3 5 .
4*° L a c o u d é e , d e d eu x z é r e th s ............................................................................................ ; . o . 5 2 7 .
5 .0 L a canne ou calame , d e six c o u d é e s ............................................................................... 3. 16 2 .
H y e u t , comme nous aurons occasion de le dire ailleurs, une canne de
sept coudées; mais elle étoit exclusivement destinée à mesurer les surfaces, et
il n’est ici question que des mesures de longueur.
On voit que parmi les mesures portatives des anciens Égyptiens , aucune ne
fut connue sous la dénomination de pied. La coudée servit de base au système
métrique de tous les peuples de l’Orient, tandis que, chez les Grecs, les Romains,
e t , en général, chez tous les peuples occidentaux , on appela pied l’unité de
mesure d’où toutes les autres furent dérivées.
Notre objet n’est point ici de rechercher l’origine de cette dernière unité de
mesure ; il nous suffira de remarquer avec d’Anville (i) que , selon toute apparence,
elle eut pour type la longueur naturelle du pied, c’est-à-dire, la septième
partie de la stature humaine. Si donc les Grecs et les Romains , qui avoient
généralement connoissance de ce rapport, trouvèrent, en Égypte, une unité de
mesure d’une longueur à-peu-près égale à la septième partie de la taille ordinaire
de l’homme, ils durent la faire passer dans leur langue en lui appliquant la dénomination
de pied (2) : ainsi ils traduisirent par ce mot le lêreth des Égyptiens
et des Hébreux, lequel, répété sept fois, donne t mètre 8 4 4 , 011 cinq pieds huit
pouces trois lignes, hauteur à-peu-près équivalente au quadruple de la coudée
naturelle (3).
Tous les historiens de l’antiquité qui ont décrit les pyramides, et dont les
témoignages nous sont parvenus, étoient Grecs ou Romains : ils dévoient par
conséquent indiquer les dimensions de ces monumens en pieds, soit qu’ils employassent
l’espèce de pied particulière à leur pays, soit qu’ils traduisissent par un
mot usité dans leur langue l’expression d’une longueur qui leur avoit paru la plus
approchante de la longueur du pied naturel, ou de l’unité de mesure qu’ils dési-
gnoient sous le nom de pied.
Hérodote ne pouvoit omettre, dans un ouvrage destiné à être lu aux jeux Olympiques,
la description des pyramides, qui, parles merveilles qu’on en racontoit,
devoient présenter à l’imagination des Grecs un objet d’un très-grand intérêt :
aussi annonce-t-il qu’il les a mesurées lui-même , afin qu’on ne révoque point
en doute sa narration.
« La grande pyramide coûta, dit-il, vingt années de travail ; elle est carrée;
» chacune de ses faces a huit plèthres de largeur , sur autant de hauteur ; elle
» est en grande partie de pierres polies, parfaitement bien jointes ensemble, et
» dont il n’y en a pas une qui ait moins de trente pieds (41. »
Ce passage d’Hérodote est important, non-seulement parce qu’on y trouve
une mesure de la pyramide , mais, sur to u t , parce qu’il indique d’une manière
positive l’existence d’un revêtement de pierres polies, dont une partie de la surface
de ce monument étoit couverte.
Philon de Byzance, qui vivoit à Alexandrie environ cent cinquante ans avant
l’ère Chrétienne, confirme ce témoignage. On lit dans le traité qu’il a composé
sur les sept merveilles du monde : « Là hauteur de la plus grande pyramide est
(1) Traite des mesures itinéraires anciennes et mo- d’une langue dans une autre les dénominations de ces difdernes,
par d’A n v ille ,p a g. 2 et suiv. (Imprimerie royale, férentes unités. Ainsi l’on a traduit par boisseau (Bible de
¡ ¡ § ¡8 ! Sa c y , Lévitique, ch. x r x , ,v. 36) le tnodius de la V ü l-
(2) L opinion de d Anville donne ici un très - grand gâte, par lequel on avoit traduit le %j2ç de la version des
poids à la notre. « Les G recs, dit cet illustre critique, Septante, qui étoit lui-même la traduction de Vephah du
»pour s expliquer sur les mesures Égyptiennes; auront texte. Cependant Vephah des Hébreux, le yyç des Grecs,
» employé les termes de leur langue qu’ils croyoient le tnodius des Latins et notre boisseau, sont autant de me-
» mieux correspondre a ces mesures. » ( Mémoire sur le sures de capacités différentes. La plupart des relations des
schine Egyptien. Acad. des inscriptions, tome X X V I , voyageurs modernes présentent des erreurs de ce genre.
Pag* 8 7 .) (3) Voyei ci-dessus, page 14 , l’indication de la taille
Quelques passages des livres Hebreuxoù il est question ordinaire de l’homme, dérivée de la coudée naturelle,
d unités de poids et mesures, fournissent des exemples de (4) Hérodote , liv. I I ; traduction de M. Larcher,
méprises semblables qu’on a commises en faisant passer t. I I , p. 103.