On a long-temps cru que les feces de la pyramide étoient des triangles équilatéraux
: cette erreur est très-concevable,-puisque, de près, il est bien difficile de
distinguer la différence entre deux lignes de jo o et de 471 coudées; et que, de
loin, c’est-à-dire, à la distance convenable pour voir l’ensemble de ce vaste monument,
la différence est encore moins sensible. L ’angle, à la base, étoit de
5 7 ° 59’ 4o", et, au sommet, de 6 4 ° o ’ 4 o”, au lieu de 60 degrés que supposeroit
un triangle équilatéral.
Ainsi voilà six passages tirés_d’auteurs graves, ayant bien connu l’Égypte, et
qui confirment entièrement la valeur de l’ancienne coudée.
R É S U M É D E C E C H A P I T R E .
J e vais rassembler, en peu de mots, les principaux résultats qui précèdent
La base de la grande pyramide est de 230”,902, et la hauteur oblique, de
1 8 4 ”,722 : ces deux nombres sont entre eux comme 5 est à 4 - La base fait 500 coudées
Egyptiennes et 750 pieds Égyptiens; elle équivaut exactement a 4 oo jtyk
belady, ou coudées actuellement en usage au Kaire et dans tout le pays ; elle égale
60 qasab, mesure du côté du feddân des Égyptiens modernes.
Cette base est exactement la 4 8 o .' partie du degré terrestre, propre à la latitude
moyenne de l’Ëgypte. La hauteur de la pyramide en est la 600.c partie. Or l’antiquité
a connu un stade de six cents au degré, très-célèbre sous le nom de stade
olympique, et dont les Grecs ont fait usage. Strabon, d’un autre côté, nous apprend
que la grande pyramide avoit un stade de haut. Il paroît donc que les Égyptiens
possédoient une mesure très-exacte du degré terrestre ; et, comme il s’agit du degré
propre à l’Égypte, et qu’on sait par quelques auteurs qu’ils avoient fait une mesure
de la terre, il est infiniment probable que c’est là en effet cette mefure qui leur
appartient.
Ils ont pris la 600.' partie de ce degré pour leur stade ou mesure itinéraire de
100 orgyies ou 600 pieds. Enfin ils ont employé ce stade comme un type pour
construire la grande pyramide et conserver à la postérité leur mesure de la terré
et l’unité métrique.
La cinquième partie de la base, ou, ce qui revient au même, la différence de la
base à la hauteur, étoit une mesure de 100 coudées, autrement le côté de l’aroure,
mesure essentielle en Égypte, et qui servoit au partage des terres. Le côté de la pyramide
renrermoit cinq de ces mesures; la hauteur en contenoit quatre, autrement
4oo coudées, ce qui est le propre du stade.
La surfece du triangle contenoit dix tironees ; et celle de la base, vingt>cinq aroures.
Le périmètre de la pyramide valoit une demi-minute du degré terrestre, et le
tour du monument, répété cent vingt fois, équivaloit à-ce degré.
Les principales dimensions de la grande pyramide et des cinq autres sont également
multiples des mesures précédentes.
Pline a rapporté exactement les dimensions des trois principales pyramides.
Diodore et Hérodote se sont bornés le plus souvent à des nombres ronds.
Enfin plusieurs auteurs Arabes, et parmi eux A ’bd el-Latyf, l’un des plus re-
commandables, ont pleinement confirmé notre sentiment, 1 sur le nombre de
$'00 coudées que renfermoit la base dé la grande pyramide ; 2.0 sur là hauteur du
monument, d’où résulte nécessairement la longueur de l’apothème, c’est-à-dire
du stade. - ■ '
C ’est ainsi que ces constructions extraordinaires et presque inexplicables renferment
en elles des résultats importais et de's faits dignes de méditation. Leur
époque est un mystère ; mais leur but n’est plus incertain, quoique d’ailleurs oh ne
puisse affirmer qu’elles avoient une destination unique. Hérodote y avoit lu des
inscriptions que le temps a dévorées : mais ce qui reste écrit dans les lignes pour
ainsi dire éternelles de la grande pyramide, nous dédommage bien de ces inscrip7
lions; et, s’il est Vrai quë scs auteurs aient ignoré la science des hiéroglyphes, ainsi
qu’on en a jugé par l’absence totale de ces caractères, nous prenons du moins une
haute idée de l’état des connoissances des Égyptiens à l’époque de la construction
de l’édifice, et nous devons reconnoître qu’ils étoient versés à-la-fois dans la géométrie
et dans l’astronomie pratiques. Ces pyramides, auxquelles les modernes et
les anciens ont assigné tant d’objets différens, attribuées à la vanité par les uns, à la
superstition par les autres, et saluées par tous les âges du nom de merveilles du
monde, ont peut-être servi de tombeaux, comme l’ont dit tant d’écrivains ; mais
ce sont des tombeaux de princes qui ont voulu ou permis qu’elles attestassent à la
postérité les lumières de l’Ëgypte savante. Elles ont rempli leur destination; car
elles nous ont conservé le type certain de la grandeur du globe terrestre et l’inappréciable
notion de l’invariabilité du pôle.
Cette haute idée de conserver ainsi les mesures nationales dans quelque monument
inaltérable etoit digne d être imitée par les peuples modernes, et par la
France sur-tout, à qui l’univers savant doit une mesure de la terre et un système
métrique si parfaits. Quel plus beau livré pourroit-on léguer à la postérité, si l’on y
consacroit tous les grands résultats où les sciences exactes sont parvenues de nos
jours ! C ’est dans cette heureuse alliance des sciences et des arts, dont les Égyptiens
semblent seuls avoir eu le secret, que réside peut-être la gloire la plus solide pour
une nation civilisée.
Je crois devoir rapporter ici textuellement les mesures de hauteur de toutes les
marches de la grande pyramide : la connoissance la plus précise de cet élément capital
est indispensable dans la question ; et c’est celle qui a manqué jusqu’ici à toutes les
personnes qui l’ont^voulu résoudre. Il importe donc qu’il ne reste aucun nuage
sur la valeur exacte de cette dimension ; c’est pourquoi j’ai rapporté la mesure
que j ai prise avec M. Cécile, bien qu’elle soit moins rigoureuse dans les détails
que celle de MM. Le Père et Coutelle. Nous n’avons mesuré les degrés qu’à
6 lignes près ; mais les différences, tantôt positives et tantôt négatives, se sont
compensées à cause du nombre considérable de mesures, comme on sait qu’il