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repondoit à la première heure du premier four ; et en continuant toujours de même
il a vu que a note qui correspondoit à ia première heure de chaque jour étoit
également a ia quarte en montant ou à ia quinte en descendant de celle qui ânnar-
tenoit a la première heure du jour précédent. De cette manière, dans les L t
sons correspondans cliacun à la première heure de chacun des sept jours de la
semaine, il a eu six quartes ascendantes, lesquelles, pouvant être considérées
comme autant de quintes descendantès. pai- le renversement et l’analogie des
octaves, lin ont donné le résultat suivant, qui représente les sept sons naturels
dans 1 ordre ou ils sont produits par ia génération harmonique de la progression
triple, sur laquelle ,1 prétend que iesÉgyptiens avoient fondé leur système musical:
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S a t u r n e , l e S o l e i l , l a L u n e , M a r s , M e r c u r e , J u p i t e r , V é n u s .
s am e d i , d im a n c h e , lu n d i , m a r d i, m e r c r e d i , j e u d i , ? , v e n d r e d i.
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I on voit les planetes précisément dans le même ordre où elles se trouvent
placées dans le bronze de M. le premier président Bon.
Nous ne nous attacherons pas à discuter ici les recherches scientifiques mais
sans doute très-problématiques encore, que l’abbé Roussier a faites sur la musique
• des Egyptiens, et qu’on peut voir dans son ouvrage, parce qu’elles nous paraissent
contraires aux vues sages de leurs législateurs et aux principes qu’ils suivoient
ans les temps dont il s’agit, puisqu’ils avoient défendu par une loi expresse la
trop grande variété 'et multiplicité des sons en musique, ne reconhoissm de
perfection en toutes choses qu’autant que l’effet qui en résultoit étoit produit a vie
le moins de moyens et les plus simples possible.
Les lois dans l’antique Égypte exigeoient qu on sût faire un choix très-éclairé des
sons quon employoit dans le chant, qu’on eût des connoissances très-approfondics
de 1 art, un sentiment exquis, un goût très-délicat, un esprit droit, un jugement très-
-sami et toujours juste. Ce n’a jamais éfé non plus que paries vices contraires à ces
qualités que ia musique a été corrompue. La vanité et la fausse science ont pu seules
faire substituer la difficulté à l’expression et le bruit au bel effet; mais ces prétendons
déraisonnables et ridicules autant que puériles ne pouvpient point avoir lieu dans la
musique antique, laquelle n’étoit autre chose que l’éloquence embellie des charmes
a une mélodie imitative.
Ce n’étoit point par des recherches minutieuses et frivoles que les anciens
Egyptiens avoient établi des rapports entre la musique et l’astronomie : en cela
comme dans toutes leurs ' allégories, ils tâchoient de fonder leurs rappro-
chemens d après une analogie rgsonnable, afin qu’il n’y eût rien d’infructueux,,
meme pour les personnes les moins éclairées. Si quelquefois ils sentoient la
nécessite de s expliquer d’une manière plus figurée 'et plus obscure, c’étoit afin de
1 Avantage et plus iong-templ i’atrention de ceux qu’ils vouloient instruire •
et, pour dérober au vulgaire la connoissance réelle des, choses qui n’étoient pas’
a sa portée, ils y substituoient les idées les'plus propres'* à subjuguer sa raison en
tonnant son esprit. Il n est pas probable que jiarmi les savatiis en Égypte on ait
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jamais1 admis toutes ces extravagances qu’on a follement débitées sur la musique
des astres et des sphères célestes.
Ceux qui ont taxé Pythagore d’avoir cru à cette prétendue musique sidérale, ont
fait injure à ce sage, digne des Égyptiens qui furent ses maîtres, et n’ont pas compris
le langage figuré dans lequel sans doute il s’exprimoit. S’il dit, et probablement
d’après les Égyptiens, que la musique et l’astronomie étoient soeurs, et si Platon,
qui l’a répété, le croyoit aussi comme lui ( i) , ce n’est pas qu’ils pensassent que l’une
et l’autre de ces deux sciences produisoient une harmonie de sons; mais c’est parce
que toutes deux concourent, quoique par des moyens différens, à exciter en nous le
sentiment de l’ordre et à nous faire concevoir l’idée de son admirable beauté ; parce
que l’une enchante les yeux par son harmonie, de même que l’autre charme l’oreille
par la sienne [z) ; parce qu’enfin toutes deux ont quelque chose de mystérieux
qui ravit et élève notre ame vers cette sagesse éternelle qui a fondé sur l’ordre
l’existence de tout ce qui est bien et beau. En un mot, si les Égyptiens établirent
entre ces deux sciences des rapports aussi' philosophiques et aussi étendus, c’est
que ces peuples, qui s’appliquoient sans cesse à diriger toutes leurs connoissances
vers un seul et même but, celui du bonheur social et de la prospérité publique,
avoient découvert le lien qui les unit ensemble et les unes aux autres (3), et qu’ils
cherchoient toujours à les resserrer de plus en plus ; c’étoit là le principal objet
de leurs lois, et en même temps la raison de la défense qu’ils avoient faite de
jamais s’écarter en rien de ce qui étoit établi dans leurs diverses institutions religieuses
et civiles.
La musique, ainsi que l’astronomie, étoit en Égypte au nombre des sciences
sacrées dont l’étude, la connoissance et l’enseignement étoient, dans toutes leurs
parties, réservés aux prêtres exclusivement (4 ). La qualité de chantre y étoit, comme
parmi les lévites chez les Hébreux, un titre qui élevoit celui qui l’avoit acquise
aux premières dignités sacerdotales; mais, pour obtenir cette distinction, il falloir
que ce prêtre eût appris et sût par coeur deux des livres sacrés attribués à Mercure,
l’un qui contenoit des hymnes en l’honneur des dieux, et l’autre où étoient renfermées
des règles de conduite pour les rois (i). Dans les grandes solennités, ce
chantre étoit à la tête des dignitaires du collège sacerdotal ; il portoit pour marque
distinctive de sa dignité un des symboles de la musique.
Selon toute apparence, c’étoit au chantre qu’appartenoit le droit d’instruire
les personnes de la cour (6), puisque c’étoit lui qui étoit tenu d’apprendre et de
savoir par coeur le livre qui contenoit des règles de conduite pour les rois. Clément
d’Alexandrie nous rapporte, et nous lisons dans la Bibliothèque historique
( 1 ) Plat, de Republ. Iib. VII.
(2 ) Jd. ibid.
(3 ) Id. ibid.
( 4) Kircher, QEdipus Ægyptiacus, D e v ita , moribus et
institutis Ægypt. cap. n . Clem. Alexandr. Strom. Iib. v ,
pag. 566.
(5 ) Clem. Alexandr. Strom, Iib; V, pag. 566.
Parmi les Israélites, ceux qui étoient prêtres-chantres
c-t poëtes tout-à-Ia-fois, tenoient le premier rang entre les
lévites, lesquels formoient la première classe de l’État. Les
Eumolpides jouissoient de la même prérogative à Athènes.
Parmi les druides, qui tenoient aussi le premier rang chez
les Gaulois, les bardes ou chantres avoient aussi de très-
grandes prérogatives. II y en avoit toujours un à la cour
des rois qui dirigeoit la musique, et qu’on nommoit Var-
chi barde. V o y e z aussi StraB. Geogr. Iib. IV, pag. 213.
(6) Gasp. Schot. societ. Jes. Benevolo Lectori, apud
Kirch. dEdip. Ægypt, initio.