Je tropique devoit être, d’après Je calcul, à 23° 4-8 ' (1). Cette observation de
l’obliquité est peut-être la dernière qui se soit faite par les anciens astronomes
d’Egypte, et elle a pu être connue de l’école d’Alexandrie; Ératosthène ayant
observé Alexandrie par les 31 °, en retrancha sans doute 23° 4 8 ', pour avoir la
hauteur de Syène, ainsi que je viens de, l’exposer. La différence est de 7° ,12'
ou de la circonférence ; il en conclut que telle étoit la longueur de l’arc entre
Alexandrie et Syène (2).
Du temps d’Ératosthène (250 ans avant l’ère vulgaire), l’obliquité de l’éclip-
tique étoit de 23° 4 i ' environ. S’il a attribué à Syène cette latitude du tropique,
comme il supposoit Alexandrie par 3 1° o' o", en retranchant 23° 4 j' o" il auroit
conclu 70 15’ o" pour valeur de l’arc terrestre, c’est-à-dire ISS de la circonférence;
ce qui approche de Mais, comme aucun auteur ne rapporte qu’il ait observé
à Syène ni au tropique, il est beaucoup plus vraisemblable qu’il aura usé d’une plus
ancienne observation de l’obliquité de l’écliptique; par exemple, de celle qui date-
roit de 600 ans avant J. C., ainsi qu’on l’a dit, et qui donne pour le tropique
(ou Syène, selon l’idée commune), 230 48'.
Telle est l’opinion qu’on peut se faire de la prétendue mesure du globe,
attribuée communément, mais sans preuve, à Ératosthène ; entreprise audacieuse
et digne d’admiration [improbum ausum] , dit Pline, mais qui avoit été exécutée
bien long-temps avant cet astronome.
Hipparque approchoit encore plus de la vraie position d’Alexandrie, en plaçant
cette ville à 21800 stades de l’équateur. Ce nombre revient à 310 8' 34", sur le
pied de sept cents stades au degré ; la différence avec l’observation moderne de
la latitude d’Alexandrie n’est que de 4‘ 3 1 "■ H se peut que cette observation soit
très-ancienne, et qu’elle n’ait pas été inconnue au bibliothécaire d’Alexandrie.
Si Ératosthène retrancha la latitude de Syène de cette quantité, et en conclut un
arc de , il supposoit Syène, et par suite le tropique, à 23° 56' 34”: or telle
étoit la position vraie du tropique 1600 ans avant J. C . , époque qui est,à peu
près celle d’Héliopolis ; une observation faite à cette époque avoit pu se conserver
jusqu’à Ératosthène et Hipparque.
Dans l’un et l’autre cas, la longueur de l’arc terrestre entre les parallèles
d’Alexandrie et de Syène, égale à 7° 12', étoit déterminée avec assez de précision
pour l’astronomie de ces temps reculés; 4' 18", sur une grandeur de 7° 8'
environ, font, comme je l’ai dit, une différence d’à-peu-près -An, et par conséquent
l’erreur n’est que d’un 7 1 3 . 'par degré.
Quant à la longueur absolue de cet arc terrestre, elle est, en stades Égyptiens
de six cents au degré, égale à 4 2 77, et de 499° stades de sept cents au degré (3).
(1) Erastothène, cité par Strabon, dit : ToV ycf afunttov (2) M. de la Place [Mécanique céleste, tom. I I ) la
Kstià xiToSof étôit ¿viav’fa. xa/nè Qç Ste/-v*C fixe à 155",3, décimales, qui font 49"»993> sexagésim.
ifa-m-ç, cLm.iôç içtr 0 y/ûfjuùv/JÂmç Yifjui&iç.« Le tropique passe J’emploie cette valeur comme moyenne, quoique la dimi-
» nécessairement à Syèn e, puisque, le jour du solstice à nution fut plus lente autrefois qu’elle ne l’est aujour-
» m idi, le style n’y donne pas d’ombre. » ( Strab. Geogr. d’hui.
Iib. 11, pag. 78 , ed. Casaub. ) Voyez ma Description de (3) Cette espèce de stade étoit composée de six cents
Syène et dès Cataractes, A . D . chap. I l , tom. 1.“ fois la longueur du pied naturel. Voyez pag. 609.
Ératosthène
Ératosthène a pu prendre cette longueur sur une carte du temps, et en conclure
5000 stades de sa mesure en nombre rond. D ’ailleurs la différence de
position des observatoires ancien et moderne satisfait aisément aux i o stades qui
manquent.
Ce résultat n’oblige donc point de supposer qu’Ératosthène soit l’auteur d’une
mesure du globe. Le passage de Pline, seul, l’a ’fait croire : mais il ne le dit point
expressément ; l’expression de prodidit annonce même qu’Ératosthèhe s’est borné
à publier une mesure de la circonférence terrestre (i).Tl y a, au reste, plusieurs
raisons de croire qu’il ne l’a pas exécutée lui-même.
t. Si de 1 arc entre Alexandrie et Syene, égal a n , et de leur distance égale
a y 000 stades, il eut déduit la mesure de la circonférence terrestre, il l’auroit
conclue de 250000 stades, et non de 252000; dans ce dernier cas, l’arc auroit
été de 5040 stades, et non de 5000 (2).
2. Aucun auteur ne rapporte qu il ait fait ou dirigé une mesure immédiate
sur le terrain, égale a 5000 stades de longueur, ni qu’il se soit transporté à Syène.
3.0 II est tout simple qu’ayant fait ou répété’ l’observation de la latitude
d’Alexandrie, il en ait retranché celle de Syène, autrement l’obliquité de l’éclip-
tique (car c étoit la même chose pour les Grecs de son temps), ce qui lui aura
donné la valeur de cet arc presque égale à de la circonférence terrestre ;
qu’ensuite il ait fait usage d’une ancienne carte (3), et qu’il ait trouvé 5000 des
stades de son temps entre les parallèles de Syène et d’Alexandrie. A 1 o stades
près, iis y sont juste ; 7° 7' 42", réduits en stades sur le pied de sept cents au
degré, donnent 4990, ou exactement 4989,83 (4).
Ératosthène, comme on la dit, plaçoit Alexandrie à 21700 stades de l’équateur
; ce qui suppose une latitude de 310 : or on lit dans Strabon ( 5 ) que ce même
astionome comptoit 16700 stades de lequateur au tropique ; il en résulte une
différence de 5000 stades entre la latitude du tropique et celle d’Alexandrie.
Telle est évidemment, selon moi, l’origine de la distance d’Alexandrie à Syène,
calculée à 5000 stades, et non pas une mesure effectuée sur le terrain par cet
observateur. C etoit donc bien à tort que les critiques supposoient que la mesure
d Ératosthène se rapportoit a la distance effective d un lieu à l’autre ; il ne s’agit
que de la distance des parallèles. II faut encore remarquer qu’il s’agit ici de la
distance du tropique, et non de Syene, a 1 équateur ; preuve qu’Ératosthène confon-
doit Syene avec le tropique. Cest meme un indice de plus^de l’existence d’une
ancienne carte où Ératosthène trouva ces positions toutes déterminées.
Déimaque (6) rapporte une position du tropique à 26500 stades de l’équateur.
j 1) j3*'11’ nac- I>b. I l , cap. 108. V o y a it texte que •nçyi ç (Iib. n , pag. 65 ) . . . . I d ex dimensions
j ai cité ci-dessus, pag. 600. Dans les deux passages sui- terne ab Eratosthène tradita cognosciiur.
vans, Strabon se sert d’expressjons qui confimient cette (2) Voyez pag# 600, sur l’origine du stade de 252000
idée: Xtn%pIyoiç, u an tf txiïvcç éfyai 10 -niç ÿüç ç a é ia y à la circonférence.
enum mvn/M&ttJkiy £ <h%\iay'àç Ji'l.çgcntdimç'iünJiJbHny (3) V oyez ibidem.
( Iib. 1 1, pag. 90, ed. Casaub.) : ce que le.traducteur rend (4) Voyez ma Description de Syène et des Cataractes,
ainsi \Sumpto,deipsiusquidem sententia,quantitatem terrai A . D . tom. I , chap. I I , f . /.
continere stadiorum c c l i i milita, ut et Eratosthenes tra- (5) Strab. Geogr. Iib. II.
dit ; et plus haut, Awjo-tmq xara vh uV ‘EgjtiBcdtntç ytyoplyny (6) Strab. ibid.
A - Pp p p