observations célestes ainsi exprimées appartiennent à ce peuple. De ce nombre
sont les mesures de l’orbite lunaire, de l’orbite solaire, et de l’orbite de Saturne
attribuées à Petosiris et Necepsos, astronomes Égyptiens, à la vérité d’une époque
récente par rapport à la haute antiquité. Voici à ce sujet le passage de Pline, où
cet écrivain, parlant de l’audace des hommes qui ont entrepris de mesurer les
espaces célestes, et la distance de la terre au soleil, ajoute (i):
« Le diamètre ayant sepî parties, et la circonférence vingt-deux, ils se servent
33 de ce principe pour calculer l’étendue de l’univers, comme si par \e perpendicule
y> on pouvoit connoître exactement la mesure du ciel (a). Nous savons, par le
» calcul Égyptien que Necepsos et Petosiris nous ont transmis, que, dans l’orbite
» lunaire (la moindre de toutes, comme on l’a dit), chaque partie occupe un peu
» plus de 33 stades ; dans celle de Saturne, qui est la plus grande, le double;
» dans celle du Soleil, que nous' avons dit tenir le milieu, la moitié de ces deux
y> mesures ; calcul qui est borné, et où il semble qu’ils dnt eu une espèce de
» honte d’exprimer la distance entière, puisqu’en ajoutant à la distance de Saturne
33 celle qui le sépare du zodiaque, on arrive à une quantité innombrable. y>
L historien de 1 astronomie (3) a supposé que singulas: partes signifioit un degré
de 360 à la circonférence ; supposition tout-à-fait arbitraire : il n’est donc pas
surprenant que ces déterminations lui paroissent absurdes. Ce que nous avons dit
de la division du cercle chez les anciens, selon nous suivie en Égypte, fournit
une explication simple de ce passage, du moins quant à l’orbite lunaire ; nous ne
dirons rien dé ce qui regarde les orbites attribuées au Soleil et à Saturne.
Baüly paraît croire que chaque degré, ou 360.' de l’orbite lunaire, étoit estimé
effectivement de 33 stades parles astronomes Égyptiens. Mais à qui persuadera-
t-on que les mêmes hommes qui çonnoissoient le vrai système du monde, qui
avoient découvert le mouvement réel de Mercure et de Vénus, inconnu au
relte de l’antiquhé, déterminé avec assez d’exactitude le diamètre du soleil, et
mesure enfin avec précision la circonférence terrestre ; que ces mêmes hommes,
dis-je, ne comptoient que 1890 stades de la terre à la lune (4), cest-à-dire, moins
qu’ils n’en comptoient de Syène à Tentyris, ou d’Abydus à Philæ ! C’est dans une
pareille supposition qu est 1 absurdité, et non dans le calcul Égyptien [Ægyptia ratio],
dont Pline nous a transmis le résultat d’une manière si incomplète.,
La circonférence du cercle se divisoit, dans l’antiquité, en 60 scrupules ou sexa-
gésimes^[è|iiwiçïl»*|'(y). La minute, ou mfüm, étoit 60 fois au cfegré; la seconde,
ou 60 fois à la minute ; la tierce, ou 60 fois à la seconde. Le scrupule
valoit 6 parties ou degrés ; et la coudée astronomique, 2 : ainsi le
(1) . . . . Qunntas tnim dimtnens haleat sept!mas, tantas vallo, innumeratilis multiplicatio efficitur. { Plin. H is l.
habere circulurn duo et vicesimas; tanquam plan} à per- nat. lib. i l , cap. 23. )
pendiculo mensura coeli constet. Ægyptia ratio, qu a n t (2 ) Le traducteur Français de Pline s’exprime ainsi :
Petosiris et Necepsos ostendêre, singulas partes, in lunari » C o m m e si cette vaste opération n’exigeoit qu’un plomb
circulo (ut dictum est) mini/no , triginta tribus stadïis paulo »»à niveler. »
arup/iM patere colligit / in Saturai amplissimo, duplmn : (3) Bailly, Histoire de l ’astronomie anc. pag. 169.
m Sous, quem medium esse diximus, utriusque men- f j ) Quatre-vingt-deux lieues, suivant Bailly. t . .
suroe dimidium. Quæ computatio plurimùm habetpudoris, ( j j Voyeç chap. i , pag. 503.
quoniam ad Saturni circulurn, addito signiferi ipsius interscrupule
valoit^ coudées. Il y avoft aussi des*divisions du degré, de la minute, de
la seconde, analogues, à celles.de la circonférence ; c’est-à-dire qu’il y avoit des divisions
valant 3 minutes et 3 tierces. En effet, 3 minutes répondent au petit schcene
Égyptien, et trois tierces à l’ampelos ( 1). Il est possible qu’il y eût également une
division de 3 secondes, correspondante à 3 plèthres ou 60 ampelos. Je regarde Ici
les mots de singulas partes comme devant s’entendre de divisions de cette dernière-
espèce, égales à 3 secondes, et par conséquent à la i:200.‘ partie du degré : chacune
de ces fractions étant,félon Pline, de 33 stades, iis ’ensuivroit que le cercle
entier de l’orbite lunaire valoit 14256000 stades ; par conséquent, le rayon,
2268000. Comme ilsentre 24 stades Égyptiens de six cents au degré dans la
lieue commune, il en résulte une valeur de 94500 lieues.
Cette valeur excède d’environ la distance moyenne de la terre à la lune, laquelle
est de 86324 lieues dans les tables les plus récentes. Malgré cette différence,
la détermination qu’avoient faite Jes observateurs d’Égypte est encore digne d’attention
pour l’astronomie de ces temps reculés. On ignore d’ailleurs absolument
par quelle méthode ils y étoient parvenus. Il n’est pas permis dè croire qu’ils aient
fait usage de celle qui suppose des observateurs très-éloignés ;mais, s’il a été fait
une observation aux deux extrémités de l’Égypte, un arc de 7 degrés environ étoit
trop petit pour ne pas introduire dans le calcul de la parallaxe une erreur de q #
Si 1 on s’est servi des éclipses de lune pour calculer la parallaxe (laquelle est sensiblement
égale au demi-diamètre de l’ombre augmenté du diamèn-e du soleil),
il y avoit également dans cette méthode une assez grande incertitude (2).
La solution que nous proposons: a l’avantage de n’employer que des données
propres à 1 Égypte ; savoir, la division du cercle .chez ce peuple ; le stade Égyptien
de six cents au degré; enfin l’étendue même de son territoire, condition nécessaire,
puisqu’il est question d’observations Égyptiennes. Elle ne passe pas les bornes
de la vraisemblance, comme seroit un rapport d’une exactitude trop marquée
entre des observations imparfaites et les résultats les plus certains de la science
moderne. Au reste, si l’on supposoit ici le stade de Ptolémée, ou celui d’Ératos-
thène, ou enfin celui d’Aristote, l’erreur de l’observation seroit considérable : or les
règles de la critique, ainsi que l’a judicieusement remarqué M. Gossgllin dans des
cas analogues, ne permettent pas de s’arrêter de préférence à un résultat très-erroné.
Posidonius estimoit la distance de la terre à la lune de 2 millions de stades, vicies
ccntum milita stadiorum, dit Pline (3). Cette détermination approche beaucoup dé
la vérité ; elle équivaut à 83333 lieues, en employant le même stade Égyptien de
six cénts. Remarquons ici que cette mesure attribuée à Posidonius fait voir combien
il seroit absurde d’interpréter le passage de Pline cité ci-dessus, en supposant
33 stades pour chaque degré ou 360.° de l’orbite lunaire.
Censorin et le même Pline, d’après Pythagore et d’autres auteurs, comptent
(1) Voye^ le tableau général des mesures. au diamètre du soleil, Cléomède nous a transmis Pobser-
(2) Le demi-diamètre de l’ombre se déduit facilement vation Egyptienne, qui est assez exacte. (Voy. ci-dessous
de l’observation de la durée de l’éclipse. On s a it, àu pag. 6 7 7 , et aussi le ch. x i l , $. n i . )
reste, par Diogène-Laërce et Aristote, que les Egyptiens (3) Plin. His t. nat. lib. i l , cap. 1.
avoient des tables d’éclipses-de lune et de soleil. Quant