manière, dans des tableaux destinés à être sous les yeux de tout le monde ; et il
paroît que la connoissance en étoit réservée aux seuls initiés dont parle Clément
d’Alexandrie. C ’est sans doute pour ce motif que je n’ai point trouvé dans les
monùmens la figure même du triangle rectangle dont il s’agit ; peut-être aussi le
découvriroit-on par une recherche plus exacte. Quoi qu il en soit, il est visiblement
l’origine de la proposition du carré de 1 hypoténuse. La propriété des
triangles rectangles s’y manifeste dans toute son évidence et sa simplicité ; il n’a
pas été difficile de conclure de celui-là, qu’elle étoit commune à tous.
Supposons le triangle Égyptien, formé par des lignes égales à 300, 4 oo et
500 (1), inscrit à un cercle. L ’hypoténuse sera le diamètre; si de l’angle droit
on abaisse une perpendiculaire sur l’hypoténuse et qu’on la prolonge jusqu’à la
rencontre de la circonférence, cette corde sera représentée par le nombre
480, et les deux segmens de l’hypoténuse par 180 et 320. Du pied dé cette
perpendiculaire, qu’on en mène une autre sur lé petit côté ; sa longueur sera
égale à 144, et le petit segment, formé sur ce même côté, sera égal à 108. Toutes
ces valeurs sont entières et sans aucune fraction, comme on peut s’en assurer en
faisant le calcul ; mais ce n’est pas ce qu’il y a de plus remarquable.
Le grand côté du triangle étant de 500 parties, on peut supposer que ces
parties sont des coudées. Il représentera alors la base de la grande pyramide, et le
grand côté de l’angle droit, son apothème ou 400 coudées, c’est-à-dire, le stade
Égyptien. Maintenant, sid’on cherche, dans mon tableau des mesures, le nombre
de coudées Égyptiennes pompris dans le stade Babylonien et Hébraïque, on trouvera
320, précisément comme au grand segment de l’hypoténuse. Le stade de
Ptolémée a 480 coudées ; c’est le nombre que nous avons trouvé pour la corde
ou double perpendiculaire abaissée de l’angle droit. Doublez-le nombre qui exprime
le petit segment du diamètre, vous avez 360 coudées, valeur du stade
de Cléomède, de 240000 à la circonférence. La perpendiculaire abaissée sur le
petit côté (ou 144) étant doublée, l’on a 288 coudées, longueur du stade d’/ir-
chimède. Enfin, et pour qu’il ne manque aucune espèce de stade à cette énumération
, doublez le petit segment formé sur ce même côté, et vous aurez 216,
valeur précise du petit stade Égyptien, celui d’Hérodote et d’Aristote, mesure
qui a été employée dans l’Inde aussi-bien qu’en Egypte (2).
Quand on considère tous ces rapprochemens si frappans, peut-on se défendre de
l’idée que le triangle Égyptien et ses dérivés sont la source commune de toutes les
espèces de stades connues (3)' Les Égyptiens paroissent n’en avoir adopté que deux
pour le calcul usuel des distances géographiques ou itinéraires : mais ils avoient
connoissance de toutes les autres, qui résultoient immédiatement du triangle
rectangle générateur ; car il faut ajouter ici que par la construction dont j’ai parlé,
c’est-à-dire, en abaissant successivement des perpendiculaires de l’angle droit sur
(1) A u lieu de 3 , 4 et 5- mesure du pied humain, si l’on admet la conjecture que
(2) Voye^ le tableau général des mesures. j’ai donnée plus haut sur son origine ; sa longueur en
(3) Le stade d’Eratosthène ne se trouve pas compris coudées Egyptiennes est de 34.2 y. Voyelle chap. v i n ,
dans cette série; ce qui ne doit pas surprendre, puisqu’ il §. i l .
est d’origine plus récente. II paroît d’ailleurs formé de la
lè
le côté opposé, on forme indéfiniment des triangles qui ont tous la même propriété
que le premier, et dont les côtés sont comme 3 , 4 et y.
En regardant le côté de l’aroure Égyptienne comme l’unité, le carré construit
sur le moyen côté du triangle fait le stade superficiel de 16 aroures, dont j’ai
parlé à l’article des mesures agraires, et celui de l’hypoténuse est une surface de
2 y aroures, celle-là même que renferme la base de la grande pyramide. Le triangle
Égyptien lui-même fait 6 aroures.
On trouve dans le triangle Égyptien, non-seulement la base et l’apothème de
cette pyramide, mais encore la hauteur, par une construction très-simple. Après
l’avoir inscrit au cercle, il faut en inscrire un pareil dans le sens opposé au premier,
et dans la même demi-circonférence. Les deux moyens côtés se couperont en un
point qui est la limite de cette hauteur ( 1 ). La longueur de l’arête se trouve par une
construction analogue, et qui fournit le triangle de la face, égal à 10 aroures.
Le triangle étant toujours inscrit au cercle, que l’on décrive des demi-circonférences
sur les deux côtés de l’angle droit considérés comme diamètres, leurs intersections
avec la grande formeront 2 lunules (2). L’hypoténuse étant de y 00 coudées,
le calcul donne pour la plus petite lunule, 21600 coudées carrées, et pour
la plus grande, 38400 : ces deux superficies sont les mêmes que celles des deux
triangles formés dans le triangle générateur par la perpendiculaire abaissée de
l’angle droit; leur somme fait 60000 coudées ou 6 aroures, comme le triangle
Égyptien. Ainsi la grande lunule représente un nombre de coudées carrées égal
à 6 x 8 ‘ x 1 o ’ ; la petite, 6 5 x 10 a; et la somme, ou le triangle générateur, 6 x to +
ou 6 o m o ’ . C’est parce que ces résultats sont en harmonie avec la division Égyptienne
et avec les rapports des mesures de superficie, que je conjecture qu’ils
n’étoient pas inconnus aux géomètres de Memphis. Peut-être, après ce rapprochement,
doutera-t-on un peu de la découverte d’Hippocrate. Au reste, il n’étoit pas
difficile de conclure de cet exemple la quadrature des lunules dans tous les triangles
rectangles.
Les résultats que présentent les nombres du triangle Égyptien, sont multipliés
et tellement féconds, que l’on doit, dans cette matière, se borner au lieu de
s’étendre. Je n’ignore pas l’abus qu’on a fait de la recherche des propriétés des
nombres, aussi futiles dans leur but que stériles dans leurs conséquences : mais je ne
puis passer sous silence les rapports qu’ont les faits précédens avec l’échelle du
système métrique ; peut-être ils contribueront à fortifier l’origine de la division
duodécimale et sexagésimale que j’ai attribuée à i’Égypte.
1 Les nombres 3, 4 et y du triangle, étant multipliés l’un par l’autre, font 60,
et leur somme fait 12 ; c’est ainsi que, dans l’étoile Égyptienne, chaque angle est
de 120, et la somme de 6o°.
2.0 L ’unité étant supposée le palme, les côtés du triangle seront de 3,; 4 et
y palmes, et ils représenteront la spithame, le pied et le pygon Égyptiens.
L
(1) Le calcul donne 3,12 5, au lieu de j V 39; différence,
xhô à très-peu près.
t (2) Hippocrate de C h io , selon l’opinion généralement
A .
reçue, trouva la quadrature de lunules formées sur les
côtés d’un triangle rectangle quelconque.
Y y y y