6. » Votre droite, Seigneur, s’est signalée et a fait éclater sa forcé : votre
» droite, Seigneur, a frappé l’ennemi.
y. » Et vous avez renversé vos adversaires par la grandeur de votre puissance et
» de votre gloire : vous avez envoyé votre colère, qui les a dévorés comme une paille.
8. » Vous avez excité un vent furieux ; e t, à son souffle, les eaux se sont res-
» serrees, leau qui couloit s’est arrêtée, les abîmes se sont pressés et ont remonté
» au milieu de la mer.
9. » L ennemi a dit : Je les poursuivrai et je les atteindrai; je partagerai leurs
» dépouilles; et je me satisferai pleinement; je tirerai mon épée, et ma main les
» fera mourir.
-io. « Vous avez répandu votre souffle, et la mer les a enveloppés; ils ont
» été submergés sous la violence des eaux comme du plomb.
11. » Qui d’entre les forts est semblable à vous, Seigneur! qui vous est sem-
» blabie, à vous qui êtes tout éclatant de sainteté, terrible et digne de toute louange
» et qui faites des prodiges !
12. » Vous avez étendu votre main, et la terre les a.dévorés.
i 3. » Vous -vous êtes rendu, par votre miséricorde, le conducteur du peuple
» que tous avez racheté, et vous lavez porté, par votre puissance, jusqu’au lieu
» de votre demeure sainte.
• n É’ ” ËË peupJes se sont é,evés et ont été en colère : ceux qui habitoient la
» Palestine, ont été saisis d’une profonde,douleur.,
i J. » Alors les princes d Édom ont été troublés, l’épouvante a surpris les forts
* e Moab, et tous les habitans de Chanaan ont séché de crainte.
16 . » Q uel épouvante et l’effroi tombent sur eux, Seigneur, à cause de la puis-
» sance de votre bras; qu’ils deviennent immobiles comme une pierre-, jusqua ce
» que votre peuple son passé, jusqu’à ce que soit passé ce peuple que vous vous
» etes acquis.
i y. y> Vous les introduirez et vous les établirez, Seigneur, sur la montagne
» devotre héritage, sur cette demeure très-ferme que vous vous êtes préparée vous-
» meme, dans votre sanctuaire, Seigneur, que vos mains ont affermi.
18. » L e Seigneur régnera dans l’éternité et au-delà.
19. » Car Pharaon est entré à cheval dans la mer avec ses chariots et ses
” “ valiers, et Je Seigneur a fait retourner sur eux les eaux de la mer; mais les enfans
» d Israël ont passé à sec au milieu des eaux (1). »
C'est ainsi qu’ils remercioient le ciel de leur délivrance, tandis que Marie,
prophétesse, et les femmes d’Israël, divisées en choeurs, répétoient au son de leurs
tambours :
« Chantons des hymnes au Seigneur, parce qu'il a signalé sa grandeur et sa
» gloii e , et qu il a précipité dans la mer le cheval et le cavalier.
Si quelque esprit minutieux vouloit relever cette expression de la Bible, « Les
» enfans d’Israël marchèrent à Sec au milieu de la mer, ayant l’eau à droite et à
gauche qui leur servoit comme dun mur (2) » , on lui répondroit que c’est
( .) Exod. chap. , j . (2) RxoJ chap g y “ g
une manière poétique d’exprimer qu’ils traversèrent la mer à gué , et que, ne
devant point trop s’écarter à droite ni à gauche, ils étoient retenus par l’eau
dans un certain espace, comme entre deux murs. Les chants d’un poëte ne peuvent
être interprétés plus rigoureusement ; et le cinquième verset du chapitre 1 y , que
nous avons. transcrit plus haut, fait voir que les Egyptiens tombèrent au fond de
la mer, et non pas que les eaux retombèrent sur eux ( 1 ).' '
La tradition a conservé, chez les Arabes Bédouins, le souvenir du passage de
la mer Roüge,.et l’on trouve sur sa rive orientale, à environ dix-huit mille mètres
au sud du point où je suppose que les Israélites la traversèrent, des sources nommées
encore aujourd’hui fontaines de Moïse.
Pococke croit que les Hébreux passèrent la mer vis-à-vis de ces sources; il n’en
donne guère d’autre raison que celle d’une tradition subsistante parmi les Bédouins :
mais, s’il falloit en croire les habitans de ces déserts,’ le passage se seroit toujours
effectué à l’endroit précis où on leur en fait la question.
Le docteur'Shaw le. recule encore plus vers le sud ; il le place en face de la
vallée de l’Égarement. Il est du nombre des écrivains qui croient qu’une mer large
et profonde signale davantage la puissance de Dieu. ^
D ’autres, au-contraire, pensent que les Israélites né traversèrent pas la mer d’un
bord à l’autre, mais qu’étant entrés dans son lit à marée basse, ils se retirèrent vers
la terre à mesure que la mer s’élevoit, continuant leur marche sur une courbe concave,
du côté des eaux; opinion sans fondement, qui prouve combien l’on est
sujet à errer/quand on travaille d’imagination et dans une ignorance absolue des
localités.
Plusieurs personnes’ont plus heureusement expliqué le passage de la mer Rouge,
au moyen des marées. Eusèbe (2) parle d’un-certain Artapanus qui produisoit '
cette opinion'comme ayant été" celle des prêtres deMemphis. L ’historien Joseph,
craignant que son récit du passage de la mer Rougé né parût trbp invraisemblable,
rapporte que la même chose arriva aux Macédoniens, lorsque, sous la conduite
1 d’Alexandre, ils passèrent la mer de. Pamphylie ; et il ajoute : « Je laisse néan-
1 » moins ,à chacun d’en juger comme ilsvoudra. » Cet aveu d’un sacrificateur,
l’un des membres les plus instruits du corps sacerdotal, Juif, est fort précieux, en
ce qu’il fait , connoître quelle étoit alors l’opinion de ce corps : aussi Joseph
a-t-il été repris vivement de cette franchisé par dés gens qui, quoique Chrétiens,
se sont crus obligés de paroître Juifs plus zélés que lui; ce que l’on auroit cru impossible
en lisant cet historien. Parmi les modernes, Niebuhr et le Clerc placent
cet événement à Suez, à cause du gué qui existe devant cette'ville; ils ne pou-
voientpas, comme moi, croire que le passage se fût effectué un peu plus au. nord,
sur un point que la mer n’occupe plus aujourd’hui, parce que les anciennes
limites de la mer Rouge ne leur étoient pas connues, et qu’aucun nivellement
(1) C ’est en prenant à la lettre les expressions des pettés d’Israël, sont des phrases aussi faciles a ramener à
anciens p o ë te s, que l’histoire ..a été mêlée à tant de leur véritable sens que ce vers de Boileau :
fables absurdes; mais c’est moins la faute des poëtes Condé, .dont le seul-nom fait tomber les murailles,
que celle de notre intelligence-Amphion bâtissant Thèbes % c . pitre ,iv.
au son de sa lyre, Jéricho tombant au bruit des trom- (2) Præpàr. evang. Iib. l v , cap. 17.
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