menee a découvrir les traces a une lieue de Rahmânyeh, sur la droite du canal
d’Alexandrie; et qu’enfin, traversant le lac d’Abouqyr, on arrive jusqu'à l’ouverture
nommée ma dyeh, par laquelle il communique avec la mer, non loin
des ruines de 1 ancienne Canope et à l’orient de cette ville; on aura parcouru
dans son entier l’ancienne branche Canopique.
Les cent cinquante stades qui, selon Strabon, formoient la distance du Phare
à l’extrémité de la branche Canopique, étant mesurés à vol d’oiseau, ont fait
penser à quelques personnes que la communication du lac d’Edkoii avec la mer
est 1 ancienne bouche Canopique. A l’appui de cette opinion, elles citent la
ormation récente du lac d’Abouqyr, qu’elles voudraient rapporter à l’année 1778
ou 1780 ; à cette époque, une digue en pierre qui retenoit les eaux de lamer,
ayant été rompue, la mer aurait pénétré dans les terres et formé le lac d’Abouqyr.’
Mais le lac dEdkou nest-il pas d’une formation encore plus récente! Le général
Reynier, dans son excellent ouvrage intitulé, de l ’Égypte après la bataille
d'Héliopolis, s’exprime ainsi : « Le lac d’Edkou, nouvellement formé pendant l’inon-
» dation de l’an 9 [n 800-, 801 de l’ère vulgaire], a été causé par l’ouverture
» du canal de Deyrout, ordonnée légèrement par le général Menou; les eaux
» répandues en abondance dans un terrain bas se sont frayé, à travers les dunes,
» une communication avec la mer : après l’inondation, lorsque le niveau des
» eaux douces a baisse, elles nont plus eu d’écoulement par le canal qu’elles
| s o ie n t formé près de la maison carrée; la mer y a pénétré et a formé ce nouas
veau lac. »
La bouche du lac dEdkou est donc moins ancienne que celle d’Abouqyr, lors
même que celle-ci ne daterait que de 1780; mais nous sommes loin de la croire
d une formation aussi récente. La digue en pierre qui la fermoit, prouve qu’avant
l’éruption de 1780 cette communication de la mer avec des terrains plus bas
que son niveau avoit déjà existé. On lit en effet, dans Paul Lucas, que cette
digue avoit été rompue dans une tempête avant 17 16 ; et il est question du lac
et du passage de la Ma’dyeh dans l’Edricy, auteur Arabe qui écrivoit dans le
sixième siecle de 1 hégire ou le douzième siècle de notre ère.
Ce qui me porte encore à croire que l’embouchure du lac d’Abouqyr répond,
plutôt que celle du lac d’Edkou, à l’ancienne bouche Canopique, c’est ce que
rapporte M. Lancret du canal Mogaiyn ou branche Canopique, qui, selon lui,
se termine au lac d’Abouqyr. On reconnoît, en effet, les traces de l’ancien lit
du fleuve dans la partie du lac d’Abouqyr qui s’enfonce à l’est, et dans les terrains
bas et couverts de joncs qui s’étendent au - delà. Cet enfoncement du lac dans
les terres n a pas été assez indiqué sur la carte de la basse Egypte ; il a lieu auprès
d une île sur laquelle on a indiqué des ruines, qui ne peuvent être que celles
de Schedia, distante d Alexandrie de quatre schoenes, selon Strabon, et placée sur
la branche Canopique, vers l’origine du canal qui conduisoit à Alexandrie.
Ajoutons encore que les ruines de Canope se trouvant à trois quarts de lieue
environ à l’ouest du château d’Abouqyr, ce serait trop en éloigner la bouche
Canopique, que de la placer vers la maison carrée dont parle le général Reynier.
Car, | | Ammien Marcellin place Canope à douze milles d’Alexandrie, et Pline
met à la même distance de cette ville la bouche Canopique : on trouve en effet
douze milles du Pharillon à Canope, et douze milles de cette ville à l’extrémité orientale
des ruines d’Alexandrie, hors de l’enceinte des Arabes, tandis que du même
point à l’embouchure du lac d’Edkou il y a en ligne droite près de seize milles, et
que l’on trouverait encore davantage en partant du Pharillon. 2.0 Strabon dit que
le Phare est à cent cinquante stades de la bouche Canopique, et Alexandrie à
cent vingt stades de Canope : or, soit qu’on mesure la distance d’Alexandrie à
Canope en partant du Phare, ou de l’emplacement présumé de l’ancien temple
de Serapis auprès du fort Caflàrelli, on ne trouve en ligne droite que cent dix
stades, et cette quantité se reduiroit a quatre-vingt-quinze, si l’on partoit de
lextremite orientale de 1 enceinte des’Arabes. Strabon ne comptoit donc point
ses distances a vol d oiseau. Cela posé, si nous mesurons les sinuosités de la
route que suivent aujourd’hui les caravanes, nous retrouverons les cent vingt stades
de Strabon depuis 1 emplacement de l’ancien temple de Sérapis dans Alexandrie
jusqu’à Canope, et cent cinquante stades du Phare à l’embouchure du lac d’Abouqyr.
D un autre cote, si 1 on suppose, ce qui paroît très-probable, que la route sur
laquelle Strabon comptoit ces distances de cent vingt et cent cinquante stades,
passoit par Canope, on aura trente stades pour la distance de cette ville à l’embouchure
du fleuve (1), .et cest en eflèt la distance des ruines de Canope à la communication
du Jac d’Abouqyr avec la mer, tandis qu’il y a soixante-quinze stades
des mêmes ruines à la bouche du lac d’Edkou. Je me suis servi du stade Olympique,
afin de prévenir toute objection : un plus petit stade, tel que celui de sept cents
au degré, dont on attribue à Strabon un fréquent emploi, donnerait encore plus de
poids à mon opinion.
Le témoignage de Strabon s’accorde donc parfaitement avec mes observations
et avec le récit de Pline et d’Ainmien Marcellin.
La branche Canopique sappeloit aussi Héracléotique. Diodore et Pline nous
I apprennent, et nous voyons dans Hérodote la cause de cette dénomination : il
existe, dit cet historien, sur le rivage de la mer, à l’embouchure de la branche
Canopique, un temple d’Hercule, asile inviolable pour les esclaves qui s’y réfugient.
II paraît que des maisons successivement élevées autour de ce temple auront
donné naissance à cette ville d’Héraclée dont nous venons de voir qu’il étoit
question dans Strabon. Pline rapporte que quelques personnes donnoient encore
le nom de Naucratique à la branche Canopique, à cause de la ville de Naucratis,
située sur ses bords.
Une portion du cours inférieur que nous assignons à la branche Canopique,
avoit une direction presque parallèle au bord de la mer; et il n’y a rien là de contraire
a 1 état physique des lieux, ni à ce que l’Égypte présente encore sur d’autres
points. Ne voit-on pas la branche de Damiette suivre, pendant une longue partie
(1) L a ville d’Héraclée, que Slrabon place entre ces dans un endroit où l'on trouve des puits, des n o n -
deux points , a pu exister sur le bord de la mer, à ticules de décombres, et quelques fragmens granidix
- huit cents mètres environ au sud d’A b o u q y r , 'tiques.