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» d’après el-Masoudy, renferme 180 milliers de feddân : le tribut n’est perçu en
» entier que lorsqu’il y a 480000 cultivateurs continuellement occupés. Mais,
» d’après les derniers recensemens ( au commencement du x.‘ siècle de l’ère
» vulgaire ), on n’a trouvé que 120000 cultivateurs. »
Le feddân actuel étant de 5929 mètres carrés, cette surface de a 80 millions
de feddân équivaut donc à y4253 lieues carrées 4 de vingt-cinq au degré (1).
Aujourd’hui l’on ne compte que 2200 lieues ¿.carrées cultivables, c’est-à-dire, la
2.4° partie seulement, environ (2). Quand on reculeroit dans les déserts et jusqu’aux
Oasis les bornes de l’Egypte, jamais la superficie ne pourroit approcher
même de y 0000 lieues carrées.. Il faut donc crôirè que le feddân dont parle
Ben-Ayâs, étoit bien différent de la mesure actuelle, ou qu’il y a une mesure'
prise pour l’autré.
Je pense que ce n’est pas du feddân qu’il s’agit, mais du qyrât, qui en est la
24.' partie. En effet, ce nombre de feddân est juste vingt-quatre fois trop fort.
Le nombre de 480000 cultivateurs dont parle Ben-Ayâs, appuie cette opinion;
car il faudroit qu’un homme eût pu cultiver 37y feddân, ce qui est absurde:
mais on conçoit qu’il est possible, sur tout en Egypte, d’en cultiver un peu plus
de i y 4 , environ 18 arpens de vingt-deux pieds à la perche ( 3 ). Les 120000 cultivateurs,
à ce dernier compte, devoient cultiver 1800000 feddân; ce qui paroît
répondre aux (0 journées (4) de terrain cultivable qu’on trouva en Égypte du temps
d’el-Masoudy; à cette époque, le pays étoit dans un état déplorable, et peut-
être réduit à m journées de terrain livré réellement à la culture. Ceci nous con-
duiroit naturellement à parler de la population du s o l, soit ancienne, soit
actuelle, et à rechercher quelle a étéja^urface cultivée de l’Égypte dans les diverses
périodes de son existence politique : mais nous devons traiter ce sujet dans un
mémoire particulier, qui fait partie de notre travail sur la géographie de l’Égypte;
nous nous contenterons ici de la remarque suivante.
Ainsi qu’on vient de le voir, il faut compter dans la surface de l’Égypte, donnée
par Ben-Ayâs et el-Masoudy, yy 00000 feddân de la mesure actuelle ; ce nombre
fait 20833333 7 aroures ( 5) : °r tel est, à peu près, le compte qui résulte du
passage d’Hérodote sur la distribution des terres de l’Égypte. Hérodote (6) rapporte
que la basse Égypte fournissoit ,160000 hommes de guerre, qu’on appeloit
(1) Le feddân actuel est égal à 6 | plèthres carrés ; les (3) Paucton ne suppose que 20 arpens pour trois indi-
180 millions de feddân en font 1125 millions. La lieue vidusison calcul n’est bon que pour certains pays de l’Eucarrée
de vingt-cinq au degré, égale à 19 75 1 1 1 1 mètres, rope, mais il est inadmissible pour l’É gypte. V oyez sa
fait 20736 plèthres ; ce qui produit pour les 180 millions Métrologie, pag. 5^7.
de jeddân )42)3 Bcues carrées et demie. (4) On. ignore ce que Masoudy et Ben-Ayâs enten-
(2) D ’An ville estimoit cette étendue à 2100 lieues seu- doient précisément par journée: si l’on regardoit cette
lement, ce qui est trop foible, quoique les limites appa- mesure comme un carré dont le côté est égal à la disrentes
d’aujourd’hui semblent réduire à beaucoup moins tance qu’on parcourt dans la marche d’un jour, celle-ci
la surface cultivable de l’Egypte. II faut bien se garder étant de 6 lieues, la journée feroit 36 lieues superd’en
retrancher les espaces devenus incultes par suite de ficielles, et les 60 journées, 2160 lieues; Ce qui revient
la misère deshabitans, de l’encombrement des canaux, à notre compte de 2200.
ou de 1 irruption des sables. La plupart de ces lieux sont (5) Voye^ le tableau ci-dessus, pag. 691.
inférieurs au niveau des hautes eaux, et susceptibles de (6) Hist. Iib. i l , cap. 167 et 169.
culture sous une administration meilleure.
Hermotybies
D E S A N C I E N S É G Y P T I E N S .
Hermotybies et Calasiries, et la haute, 2yoooo; l’auteur parle sans doute d’un temps
de grande population. Ces 4 1 oooo hommes jouissoient chacun de 12 aroures
exemptes d’impôt; ce qui faisoit pour eux seuls 4910000 aroures. En comptant
un homme de guerre sur neuf personnes, il y avoit en tout 4100000 habitans.
Comptant aussi par tête 6 aroures pour les 3280000 individus non militaires,
le produit est 19680000 aroures, et en tout, pour la surface cultivée de l’Égypte,
24600000 aroures : si ce nombre excède le calcul ci-dessus d’un sixième environ,
c’est qu’en effet cette surface a bien diminué d’une sixième partie depuis les temps
anciens, tant par l’invasion des sables que par l’abandon volontaire d’une partie
du sol cultivable. Au reste, soufles empereurs Romains, si l’on en croit Philon (1),
les soldats possédoient encore chacun 12 aroures de terre, ainsi quen jouissoient
avant eux les Hermotybies et les Calasiries. ’ , '
Selon un géographe cité par Paucton sous le nom CHancelida, l’Égypte inférieure
(ou plutôt l’Égypte entière) contenoit 28 millions d’aroures. Cette
évaluation est assez bien d’accord avec le résultat précédent de 24 millions
600 mille aroures ; mais elle est sur-tout précieuse, en ce qu’elle s’oppose à ce
qu’on augmente tant soit peu la mesure de la coudée Égyptienne, que j’ai fixée
à om,4618.
En rapprochant le passage de Ben-Ayâs et celui d’Hérodote, on trouve un
résultat remarquable sur la proportion du nombre d’hommes ( soit cultivateurs,
soit hommes de guerre ) que fournissoient de leur temps la basse Égypte et le pays
supérieur. Suivant l’auteur Grec, ce rapport ¡étoit comme 160000 est à 2y 0000 ;
et suivant Ben-Ayâs, on trouva dans le dénombrement y0000 cultivateurs dans
le bas pays, et 70000 dans le Sa’yd.
Ces deux rapports très-approchés nous apprennent que telle a été, à. des
époques bien différentes, la population relative de ces deux contrées! Aujourd’hui
le terrain cultivable n’est plus dans cette proportion ; le rapport est devenu
inverse : il en est de même de la population actuelle, ou du moins du nombre
des lieux habités, lequel est d’un tiers à peu près plus fort au-dessous du Kaire
qu’au-dessus ; on voit même que, sous Ben-Ayâs, le Sayd étoit déjà moins habité
relativement.
Ainsi, quand même le nombre de 410000 hommes de guerre^dont parle
Hérodote, seroit exagéré, le rapport de la population, de 1 etendue, et sâns doute
aussi de la fertilité des deux contrées dont il s agit, auroit ete reéUemènt tel quil
le donne ; et il en résulte une conséquence intéressante, savoir, qu’à l’époque
reculée'où Thèbes étoit la capitale et où l’Égypte florissoit de tout? "sa splendeur,
le haut pays jouissoit de grandes ressources, telles que jamais le pays inférieur
n’en a possédé de pareilles.
Étienne de Byzance, d’après Caton „rapporte que la superficie de Thèbes occu-
poit .3700 aroures: c’est aussi ce .qu apprend un passage de Didyme. Quelque
grandeur que l’on donne à cette mesure, on trouvera dans les ruinés actuelles de
Thèbes bien plus que 3700 aroures; sans une correction quelconque faite a ce
(1) Phil. Jud. D e plant. Noce.
A. I Tt"