» la géographie, les mouvemens du soleil, de la lune et des cinq planètes; la cho~
» rograpliie de l’Egypte, le cours du Nil, la description des temples et des lieux
» consacrés, des mesures et de toutes les choses qui servent à l’usage des temples ( i ). «
Je rapprocherai de ce morceau si connu, des passages de la Bible où l’on voit
les traces des méthodes Egyptiennes. Moïse et Josué, en effet, avoient emprunté
de l’Egypte ce qu’ils possédoient de connoissances exactes.
«Choisissez dans chaque tribu trois gommes pour parcourir le pays, en faire
la description, ainsi que le dénombrement du peuple par contrée, et m’apporter
» ensuite ce qu’ils auront décrit (2).
» Us parcoururent le pays et le divisèrent en sept parties, inscrivant à mesure
55 la description sur des rouleaux (3). » .
Joseph raconte aussi, mais plus en détail, le même fait : « Josué voulut qu’on
35 choisît dans chaque tribu des hommes d’une probité éprouvée, pour parcourir
33 tout le pays et en faire connoître l’étendue, sans aucune infidélité..... Il envoya
33 ces hommes pour mesurer la terre, en leur adjoignant des personnes versées
33 dans la géométrie , qui, à cause de leurs connoissances, ne pouvoient ni se
33 tromper ni être induites en erreur; et il leur ordonna de faire i’esthnation des
33 campagnes, en raison de la bonté de la terre (4 ). 33
Cette mesure du pays d’Israël, ordonnée par Josué à l’instar de ce que les
Hébreux avoient vu en Egypte, pourroit passer pour un véritable cadastre. C ’est
ce même travail qui avoit été fait chez les Égyptiens à une époque très-reculée,
et qui est, selon moi, l’origine première de la topographie et de la géographie.
Quel usage exact ou commode pouvoit-on faire des mesures de chaque territoire,
de la description des nomes, de la connoissance de leurs limites et de ces subdivisions
que Strabon décrit, si ce n’est en figurant toutes ces proportions sur des
tables planes préparées à ce dessein, telles que celles dont,parle Apollonius de
Rhodes ! Comment faudroit-il entendre la chorographie et la description du cours
du Nil, que les hiérogrammates devoient posséder, si ce n’est en supposant des
cartes topographiques, des projections plates où étoient tracés les canaux, les
chemins, le Nil, les^viiles et les villages, et où l’on pouvoit trouver tout ce qui
étoit relatif à l’arpentage du pays, aux limites des provinces, aux variations du
fleuve, objet de l’étude constante des collèges de Thèbes, de Memphis et d’Hélio-
p o lisC om m en t aur.oit-on pu projeter tous_ ces canaux qui faisoient la richesse
du pays, en bien connoître la direction, en rectifier et en étendre le cours!
Ce ne sont pas ces, simples projections qu’il faut regarder comme étant celles
qui ont été imaginées du temps de Sésostris; elles remontoient sans doute aux pre-'
miers temps de la monarchie ; mais les cartes géographiques et la cosmographie
y ont pris naissance, et il se peut que, par la suite, Sésostris, ayant visité un très,
grand nombre de pays, et s’étant fait accompagner de géomètres et d’ingénieurs
(1) TSnv ut TE itçyywipixd, xaxvfMva, my! n tHç tuajxo- kpoiç zgnm/xm, etJVrtti ( Clem. Alex. Strotn. Iib. VI,
yctyiaç, Kj yiaifcttpictç, 7»ç « «A/g £ rüç nhwttç, ii cap. 4. )
me/- tuv î nbcwapurair,%à(><fyçp.<f>icir te viç Ajy/ii\v, £ rüi w (2) Josué , cap. 18, y . 4--
Hum <hay&L<pïç'me* n mf vst-'myçy.ÿûç oKtutiç mv iipuv, (3) lb'id. cap. 18 , y . p.
ï) àftipupjivuY aintlçjM&ov tkçJ. 11 pUifay k, m v ivm ç (4) Joseph. Antiq, Jud. lib .V , pag. 14.
Egyptiens, ,
Egyptiens, ait formé des cartes plus étendues que celles qu’on avoit eues jusqu'à
lui.
On peut se demander par quel procédé les Égyptiens traçoient et dessinoient
leurs cartes topographiques. S’il n’existoit aucun monument ancien qui pût mettre
sur la vo ie , une pareille question seroit oiseuse pour le moins ; mais nous possédons
heureusement un monument dé la main même des Égyptiens ; je veux
parler des carrés de réduction déjà cités «plus haut, qui servoient à dessiner les
figures de tout genre et à toute sorte d’échelles, et à les transporter sur la place
qui leur étoit destinée. On en augmentoit ou diminuoit la grandeur par le moyen
même qui, chez les modernes, est d’un usage général. Ce procédé repose sur la
considération des rapports des lignes, fondement de la géométrie. Les artistes
Egyptiens traçoient de ces carreaux sur toutes les surfaces qu’ils avoient à peindre
ou à sculpter ; et les côtés avoient la proportion convenable avec ceux du plan qui
servoit de modèle. On traçoit les lignes en rouge ; et à l’exécution, ces lignes
disparoissoient. Mais, par bonheur, des parties de sculpture quiyestent non achevées
au plafond d’Ombos et en d’autres endroits, ont conservé la trace de cette
méthode Égyptienne ; ni les linéamens des figures, ni les lignes des carreaux;
n’ont été effacés.
Dans les carrières que les Égyptiens ont exploitées, j’ai trouvé-également des
carrés de réduction qui ont servi aux épures des constructeurs. Les plus remarquables
sont celles de Gebel-Aboufedah. Là, j’ai vu sur de grandes surfaces planes,
taillées à dessein, des carreaux tracés en- rouge ; au milieu sont des traits de chapiteaux
de diverses formes, plus ou moins compliquées. Des lignes construites souS
divers angles, et des courbes habilement tracées, composent ces sortes d’épures.
Il n’est pas douteux que ces carreaux et ces traits n’aient été transportés d’un plan
plus en petit sur ces |>arois dressées à l’avance et à la grandeur demandée, pour
enlever ensuite les blocs, et les achever au dehors de la carrière (i).
Il reste encore d’autres monumens de l’ancienne topographie d’Egypte : ces
monumens, quoique d’un genre très-différent, n’en sont pas moins convaincans
et authentiques. Ce sont les distances itinéraires, si conformes aux dernières observations
, et ces nombres de stadesjit exacts, que les Égyptiens ont rapportés à
Hérodote, à Diodore de Sicile et à Strabon .quand ces voyageurs les interrogeoient
sur la distance des lieux (2) : c est la précision de plusieurs mesures de Pline puisées
en Egypte ; enfin celle des anciens itinéraires que les Romains adoptèrent et
traduisirent sans doute, et où le nombre des milles correspond si bien avec les
intervalles que nous connoissons aujourd’hui avec certitude" (3 ). Je demanderai
comment ces mesures, qu’on trouve marquées dans Diodore de Sicile et dans
Hérodote, se trouveroient aussi justes, si les Égyptiens n’eussent pas possédé,
comme le rapporte S. Clément d Alexandrie, une chorographie détaillée, et si
Ion neût eu des mappes où toutes les distances étoient figurées avec exactitude.
(1) Voye^ ci-dessus chap. V,pag. 569, et la Description (3) Voyeç 4 les observations géographiques dans les
de PHeptanomide, A . D . chap. X V I , i . rt section. Mémoires sur les anciennes villes d’Egypte, Antiquités-
(2) V o y ez , chap. i l , le Tableau des distances itinéraires'. Descriptions.