de Greaves, ont trouvé, comme lui, que Je plan de la chambre étoit un rectangle
dont un des côtés est double de l’autre ; le plus grand, de 32 pieds 4 pouces
de France, et le moindre, de 16 pieds 2 pouces. Admettant la supposition de
Newton sur le nombre des coudées contenues dans chacune de ces dimensions,
et réduisant les anciens pieds et pouces Français en nouvelles mesures, on
obtient pour la longueur de la coudée précisément 325 millimètres.
Nos collègues ont retrouvé dans les dimensions de la galerie inclinée, et dans
celles de plusieurs autres parties intérieures de la pyramide, les mêmes mesures que
Greaves en avoit publiées. Ainsi les conclusions auxquelles Newton fut conduit
par l’examen et la discussion de ces mesures, se déduisent naturellement du nouveau
travail de MM. Le Père et Coutelle; et l’emploi d’une coudée de 324 ou
523 millimètres dans la construction de ce monument reste définitivément constaté :
or cette coudée ne diffère de celle d’ÉIéphantine que de deux ou trois millimètres,
différence qui disparoît en quelque sorte sur la longueur totale d’une unité de
mesure qui n’avoit pas de sous - division inférieure au doigt, ou à la quatrième
partie du palme , équivalente à 19 millimètres environ ; d’où il suit évidemment
qu’à l’époque de la construction des pyramides, c’est-à-dire, pendant
une période antérieure aux temps historiques, la coudée du nilomètre d’Ëléphan-
tine étoit déjà employée en Egypte.
S E C T I O N III.
Premier Système métrique des Egyptiens. — Coudée d ’EIéphantine retrouvée dans
la mesure du côté de la base de la grande Pyramide ; — dans la mesure du
degré terrestre attribuée à Ératosthène.
L es unités de mesure dont se servent les historiens de l’antiquité pour exprimer
les distances itinéraires, et les dimensions des monumens qu’ils ont décrits, reçoivent
communément des dénominations différentes, suivant que la longueur
des lignes auxquelles on les applique est plus ou moins considérable ; mais ,
comme il existe entre ces diverses unités des rapports déterminés, il suffit de
connoître la grandeur absolue de l’une d’entre elles, pour obtenir la grandeur
absolue de toutes les autres.
Si la connoissance du premier système métrique des Égyptiens devoit être
indispensablement puisée dans le témoignage d’écrivains de cette nation, il
faudroit renoncer à l’espérance d’y parvenir, puisque la langue de cet ancien
peuple est aujourd’hui perdue , et que le petit nombre de manuscrits qu’on a
retrouvés écrits en cette langue est demeuré jusqu’à présent inexplicable.
Heureusement une circonstance particulière rend ici superflus les témoignages
positifs qui nous manquent, et dont il est vraisemblable qu’on entreprendroit
inutilement la recherche. C ’est, en effet, comme nous l’avons vu, une opinion
généralement admise , que les Hébreux empruntèrent des Égyptiens les mesures
dont ils fàisoient usage. Le système métrique de ceux-là, conservé dans les livres
et les traditions Hébraïques, est donc également le système métrique de ceux-ci :
ainsi l’on peut, d’après ces livres et ces traditions, définir exactement les différentes
mesures de longueur que les anciens Égyptiens dérivèrent de la coudée.
Avant d’en présenter la série, qui fut originairement composée d’un très-petit
nombre de termes, il convient d’indiquer comment, par l’invention des mesures
portatives, on fut conduit à la former.
Les progrès de la civilisation ayant établi parmi les hommes des relations plus
multipliées, ils reconnurent l’inconvénient d’employer dans leurs conventions
mutuelles une unité de mesure variable suivant les proportions de chaque individu
: ils choisirent donc une certaine valeur de la coudée, e t, l’adoptant généralement
dans toute l’étendue d’un pays soumis aux mêmes lois , ils tarirent la
source des difficultés auxquelles avoit donné lieu l’inégalité de celles qu’ils avoient
employées jusqu’alors. Telle est indubitablement l’origine de la première mesure
portative (1) : elle eut pour type, en Égypte, une coudée de sept palmes , dont
il est probable que l’on régla la longueur sur le palme et la coudée naturelle de
l’individu le plus distingué par l’autorité qu’il exerçoit (2).
Il est également probable que la division en sept palmes et en vingt-huit doigts
fut conservée pendant quelque temps sur cette mesure portative : mais il falloit
passer , sans diviseurs intermédiaires, du quatorzième au quart, et du quart à la
moitié de cette coudée ; ce qui rendoit tout-à-fkit incommode l’emploi fréquent
qu’en exigeoient les différens besoins de la société.
Il n’en étoit pas ainsi de la coudée naturelle : on savoit, en effet , qu’elle
contenoit six palmes ou vingt-quatre doigts ; ce qui lui donnoit huit diviseurs
(1) Le mot ammah MQX, qui en hébreu signifie coudée,
ne se retrouve point dans plusieurs des langues qui ont une
origine commune avec la langue Hébraïque. On pourroit
même douter qu’il ait jamais signifié réellement chez les
Hébreux ce qu’expriment le mot G rec myjç et le mot Latin
cubitus , c’est-à-dire, l’avant-bras depuis l’angle extérieur
du coude jusqu’à l’extrémité de la main étendue, si cette
signification ne paroissoit établie par ce passage du Deu-
téronome (chap. I I I ,# . 11 ) : Mons tra tu r lectus ejus f e r -
reus. . . . . novem cubitos habens longitudinis, et quatuor
latitudinis} a d mensuram cubiti virilis manûs; ou, comme
porte littéralement le texte H éb reu , a d cubitum vir i,
V'K r\SN3. Mais une observation qui n’a point encore été
faite, et qui est cependant très-essentielle, parce qu’elle
confirme l’origine Egyptienne de la coudée Hébraïque,
c’est que le mot ammah riEN est certainement Égyptien.
En C op te , mahi A3.h .£ \ signifie et \*avant-bras et la
mesure que nous nommons coudée. Dans la version Copte
des livres de Moïse, faite, comme l’on sait, d’après le grec
des Septante, le passage du Deutéronome que je viens de
citer est rendu ainsi : ç X*-V-Z->X 'TE ’TE'^UJXK «E-W-
^ -U-U-Z^X «HEqOnfÇUtycpEît 0^JW-Zs^X ïïptu-
■U-X. Dans le vocabulaire Copte publié par Kitcher, on
* A .
trouve plusieurs fois le mot JU-Z^X traduit en Arabe par
Vavant-bras, et cela notamment dans le chapitre
qui contient les noms de toutes les parties du corps ( Lin g.
Ægypt. restitu ta , p. 7 7 ) . 11 ne peut donc point rester de
doute que mahi JV-Z^X, ou, avec le préfixe a j. , ammahi
ju ju-Z-^X, ne signifiât dans l’ancienne langue Egyptienne
Vavant-bras et une coudée, . et que ce mot en passant
dans la langue Hébraïque n’y ait conservé cette double
signification.
Peut-être aussi le mot Hébreu çéreth m i [sp ith am a j, qui
semble d’origine étrangère, vient-il primitivement de la
langue Egyptienne : car, dans le Copte, ertô E p T C U , ou
tertô T E p T t U , signifie la même chose ; et l’on sait que
le ç , le d et le t se substituent fréquemment l’un à l’autre
dans les langues de l’Orient. ( N o t e communiquée pa r
M . SlLV ESTR E DE S A C Y . )
(2) Les dénominations de coudée royale et- de p ied
de roi, employées en Orient et chez quelques nations
modernes pour désigner des mesures portatives, nous
semblent rappeler le premier type de ces mesures. Peut-
être aussi ces dénominations viennent-elles de ce que
les étalons des mesures dont il est question étoient déposés
dans le palais des rois.