
L’ufage le plus ordinaire de la confrontation e ft ,
en matière criminelle, pour repréfenter à l’acculé
les témoins qui ont dépofé contre lu i, afin qu’ils^ le
reconnoiffent & qu’ils déclarent fi c’eft de lw qu’ils
ont entendu parier dans leur dépofition ; que l’accu-,
fé puiffe fournir contre eux fes reproches, s’il en a ,
& les témoins y répondre. ,
C ’étoit la coutume chez les Hébreux, que les témoins
mettoient leurs mains fur la tete de celui contre
lequel ils avoient dépofé ait fujet de quelque crime
, ce qu’ils pratiquoient ên eonféquencè d’un précepte
du Lévitiqué, ch. xxjv. v. 14. C ’eft de-la que
dans l’hiftoire de Sufanne il eft dit, que les deux
vieillards qui i’âccuférent mirent leurs mains fur fa
tête : cela fervoit de confirmation de leur dépofition
, 8c tenoit lieu chez eux dé la confrontation dont
on ufe aujourd’hui.
Nous lifons dans Dion, liv. L X . que du tems de
l'empereur Claude, un foldat ayant accufé de eonf-
piration Valérius-Afiaticus , il prit à la confrontation
pour Afiaticus un pauvre homme qui étoit tout chauve
; ce qui fait voir que la confrontation étoit âüfli ufi-
tée chez les Romains, & que pour éprouver la fidélité
des témoins, on leur confrontoit quelquefois une
autre perfonne au lieu de l ’accufé.
On en ufa de même dans un concile des Ariens,
oii S. Athànafe fut accufé par une femme de l’avoir
violée. Timothée prêtre fe préfentant à elle, 8c feignant
d’être Athànafé > découvrit la fourberie des
Ariens & l’impofture de cette femme. .
Le recollement des témoins n’étoit point en ufage
chez les Romains ; mais on y pratiquoit la confrontation.
■ Elle a pareillement lieu fuivant le droit canon, 8c.
fe pratique dans les officialités ; comme il réfulte du
chapitré preefentium x x x j . extra de tejlibus & attefia-
tionibus.
On pratiquoit en France la confrontation dès les
premiers tems de la monarchie. En effet on voit dans
Grégoire deTours-, liv. VI. f ° - 3^3 ' <îue Chilperic,
lequel commença à régner en 450» àyârtt interroge
lui-même deux particuliers porteurs dé lettres inju*
rieufes à S. M. manda un évêque qu’on en vouloit
rendre complice , les confronta les uns aux autres,
même à ceux qu’ils chargeôient par leurs réponfes.
Il y a plufieurs anciennes ordonnances qui font
mention de la Confrontation des témoins.
Celle de François I. en 1536, chap. ij. art. 4. en
preferit la forme : mais comme ce n’étoit qu’une loi
particulière pour la Bretagne, nous ne nous arrêterons
qu’à celle de 1539 -, qui eft générale pour tout
le royaume. . . .
Elle ordonne, art. 14. &fuiv. que les témoins feront
recollés 8c confrontés à l’accufé dans le délai
ordonné par juftice,-félon la diftance dés lieux, la
qualité dé la matière & des parties, à moins que
l’affâirë ne fut fi légère, qu’il n’y eût lieu de recevoir
les parties en procès ordinaire ; que dans les
îffâîîêrès ftijettes à confrontation■, les accufés ne feront
élargis pendant leS délais qui feront donnés
pour faire la confrontation ; que quand les témoins
eomparoîtront pour être confrontés, ils feront d’abord
recollés en l’abfence dé l’aceùfé ; 8c que fur ce
qu’ils perfifteront, 8c qui fera à la charge de l’accufé
, ils lui feront aufli-tôt confrontés féparémènt 8c
à paît l’ûh après l’autre ; qüè pour faire la confrontation
t Pâccufé 8c le térhoin comparoîtront devant
le juge, lequel en la préfence l’un de l’autre, leur
fera faire ferment dé dire vérité ; qu’enfuite il demandera
à l’accufé s’il à quelques reproches à fournir
Contre le témoin qui eft préfent, 8c lui enjoindra
de lés dire promptémènt, qü’autrement il n’y fera
plus reçu ; que fi l’accüfé n allégué aucuns reprochés
8c déclare ne le vouloir faire, 8c fé vouloir
arrêter à la dépofition des témoins, ou s’il demande
un délai pour fournir fes reproches , ou enfin s’il a
mis par écrit ceux qu’il auroit allégué fur le champ.
Dans tous ces cas il fera procédé à la leéhire de la
dépofition du témoin pour confrontation, après laquelle
il ne fera plus reçu à propofer aucun reproche
; que les confrontations faites 8c parfaites , le
procès fera mis entre les mains du miniftere public
pour prendre des conclufions, &ct
L’ordonnance de 1670 contient un titre exprès
des recollemerts& confrontations, qui eft le quinzième.
Il eft dit que fi l’acciifation mérite d’être inf-
truité, le juge ordonnera que les témoins feront recollés
en leurs dépofitions, 8c fi befoin eft, confrontés
à l’accufé ; l’ordonnance dit f i befoin efi, parce
que fi les témoins fê rétra&oient au recollement 8c
qu’il n’y eût plus de charges contre l’accufé, il feroit
inutile de lui confronter les témoins.
Il eft ordonné que les témoins feront recollés 8c
confrontés ; la dépofition de ceux qui n’auront point
été confrontés, ne fera point de preuve s’ils né font
décédés pendant la contumace. Il en eft de même
S’ils font morts civilement pendant la contumace ,
ou fi à caufe d’une longue abfence, d’une condamnation
aux galeres ou banniffement à tems, ils ne
pouvoient être confrontés, fuivant ce qui eft dit tit.
xvij. art. 22. & 23. Voyez àufji ci-après les articles
C onfrontation figurative & littérale.
Dans les crimes qui peuvent mériter peine afflictive
, le juge peut ordonner le recollement 8c la confrontation
des témoins, fi cela n’a pas été fa it, &
que les dépofitions chargent confidérablement l ’ac-
Cufé.
En voyant le procès, on fait le&ure de la dépofition
des témoins qui vont à la décharge de l’accufé ,
quoiqu’ils n’ayent été ni recollés ni confrontés, pour
y avoir par les juges égard.
Les accüfés qui font décrétés de prife de corps,
doivent tenir prifon pendant le tems de la confrontation
, & on en doit faire mention dans la procédure ,
fi ce n’eft que les cours en jugeant l’appel en ordon-
naffent autrement.
Les confrontations doivent être écrites en un cahier
féparé, 8c chacune en particulier paraphée 8c
fignée du juge dans toutes les pages, par l’accufé &
par le témoin, s’ils favent ou veulent ligner, finon
on doit faire mention de la caufe de leur refus, ù
L’accufé étant mandé après le ferment prêté par
lui 8c par le témoin en préfence l’un de l’autre, le
juge lès interpellera dé déclarer s’ils fè connoiffent.
On fait leâure à l’accufé des premiers articles de
la dépofition du témoin, contenant fon nom, âge,
qualité 8c demeure, là connoiffance qu’il aura dit
avoir des parties, 8c s’il eft leur parent ou allié.
L’accufé èft ênfüite interpellé par le juge de fournir
fur le champ fes reprochés contre le témoin, fi
aucuns il a ; 8c le juge doit l ’avertir qu’il n’y fera
plus reçu après avoir entendu le&ure dé la dépofition,
8c on en doit faire mention.
Les témoins font enquis de là vérité dés reproches
, 8c tout Ce que l’accufé Sc eux difént doit être
rédigé par écrit.
Après que l’accufé à fourni fés reprochés, ou déclare
qu’il n’en veut point fournir, on lui fait lefture
de la dépofition 8c du recollement du témoin, avec
interpellation de déclarer s?ils contiennent vérité,
8c fi l’aëèufé eft celui dont il a entendu parler dans
fés dépofitions 8c recollement, 8c tout cè qui eft dit
de part 8c d’autre doit pateillement être écrit.
L’accufé n’eft plus reçu à fournir de reproches
contre le témoin, après qu’il a entendu leéhire de
fa dépofition ; il peut néanffloihs en tout état de
caufe propofer des reproches, s’ils font juftifiés par
écrit.
Si l’accufé remarque dans la dépofition du témoin
quelque contrariété ou circonftance qui puiffe éclaircir
le fait 8c juftifier fon innocence, il peut requérir
le juge d’interpeller le témoin de les reconnoître ,
fans pouvoir lui - même faire interpellation du témoin
; 8c ces remarques, interpellations, reconnoif-
fances 8c réponfes, font aufli rédigées par écrit.
Quoique l’accufé refufe de répondre aux interpellations
qui lui font faites, on ne laiffe pas de procéder
à la confrontation du témoin.
Si le témoin que l’on veut confronter eft malade,
la confrontation le fait en fa maifon, 8c pour cet effet
on y transféré l ’accufé.
Les experts entendus en information fur ce qui eft
de leur a rt, doivent être confrontés comme les autres
témoins. •
On obferve les mêmes formalités dans les confrontations
qui font faites des accufés ou complices les
uns aux autres. Ils peuvent fournir des reproches les
uns contre les autres : mais cette confrontation ne
doit être faite qu’après celle des témoins.
Lorfque dans un même procès il y a des accufés
laïques prifonniers dans les prifons royales , 8c des
accufés clercs dans les prifons de l’officialité, 8c
qu’il s’agit de les confronter les uns aux autres, on
amene les accufés 8c complices laïques des prifons
royales à l’officialité ; 8c Decombes dit qu’en pareil
cas la confrontation des laïques à l’accufé clerc,
fut faite par les deux juges, c’eft-à-dire par le juge
laïque 8c par l’official conjointement : mais que la
confrontation de l’accufé clerc aux laïques, fut faite
par le juge laïque feul, les accufés étant laïques.
Voyt{ Imbert, liv. I I I . ch. xiij. Decombes, recueil
des procédures de l ’officialité; Bornier, fur les titres xv.
& xvij. de Vordonnance.
C onfron ta t ion des A ccusés les uns aux autres,
voyez ci-devant à la fin du mot C onfron tat
io n .
C onfron ta t ion des C om p l ic e s , voy. ibid.
C onfron tat ion d’é c r itu r e s , voye^ci- dev.
C omparaison d’é c r itu r e s .
C onfron ta t ion d’Ex p e r t s , voye^ ci-devant
vers la fin du mot C o n fr o n ta t io n .
C o n fron ta t ion f ig u r at iv e , eft la confion.
tation que l’on fait d’un témoin à l’accufé, fans néanmoins
lui repréfenter ce témoin. Elle a lieu lorfque
le témoin eft décédé ou abfent pour caufe légitime,
8c fe fait par l ’affirmation tacite de la dépofition du
côté de la partie civile, s’il y en a une, ou à la requête
de la partie publique ; fauf à l’accufé à propofer
fes reproches, s’il en a quelqu’un à oppofer
pour fa juftification, 8c pour atténuer la#dépofition.
On demande donc à l’accufé s’il a connu le témoin
défunt ou abfent, s’il l’eftimoit homme de bien, s’il
veut 8c entend s’en tenir à fâ dépofition ; 8c après
fes réponfes à chaque queftion, qui doivent être
rédigées par écrit avec les reproches, s’il en a pro-
pofé, on lui fait lefture de la dépofition du témoin :
c’eft enfuite à la partie c iv ile , s’il y en a une, ou au
miniftere public, à juftifier s’il fe peut par ades ou
autrement, ce qui étoit des bonnes vie 8c moeurs du
témoin défunt ou abfent, afin de faire tomber les reproches.
Il eft parlé de cette confrontation figurative,
dans le flyle du parlement deTouloufe par Cayron ,1.1 y.
tit. xviij. c’eft ce qu’il appelle acaration figurative ,
félon le langage du pays. Il y a des exemples que la
confrontation figurative s’eft aufli pratiquée en certains
cas dans les autres parlemens, ainfi qu’il fut
obfervé dans le procès de MM. de Cinqmars 8t de
Thou, en 1641 : on fit même dans ce procès une ef-
pece de confrontation figurative. Monfieur, frere du
ro i, ayant une déclaration à faire, avoit obtenu du
roi quil ne feroit point confronté aux accufés. M. le
chancelier reçut fa dépofition avec les mêmes formes
avec lefquelles on a coùtume de prendre la dépofition
des autres témoins ; on prit feulement de
plus la précaution de la relire à Monfieur en préfence
de M. le chancelier 8c de fept ou huit confeillers
d’état ou maîtres des requêtes, qui la fignerent avec
lui, après qu’il eut perfifté avec ferment à ce qu’elle
contenoit ; 8c comme le droit & les ordonnances
veulent que tout témoin foit confronté, le procureur
général crut que dans ce cas il falloit ufer de
quelques formalités pour fuppléer à la confrontation;
8c pour cet effet il requit que la déclaration de Monfieur
lui fut lue après que les accufés auroient déclaré
s’ils avoient des reproches à fournir contre lui,
ce qu’ils pourvoient faire avec plus de liberté en l’ab-
l'ence de Monfieur, qu’en fa préfence ; qu’enfuite les
reproches & réponfes des accufés lui feraient communiques:.
ce qui fut ordonné par arrêt, 8c exécuté
par M. le chancelier.
L’ordonnance de 1670 ne parle pas nommément
de là confrontation figurative ,* mais elle dit, titre xv.
art. 8. que la dépofition des témoins non confrontés
ne fera pas preuve, s’ils ne font décédés pendant
la contumace ; ce qui fuppofe que dans ce cas il y a
quelque formalité qui tient lieu de la confrontation
ordinaire. Et dans le titre xvij. art. uz. & 2$. il eft:
parlé de la confrontation littérale, qui eft la même
chofe que la confrontation figurative. Voyez ci-après
C o nfron tat ion l it t é r a le , 6* Bornier, fur
l ’art. 8. du tit..xv.
C onfron ta t ion l it t é r a l e , eft celle qui eft
faite à l’accufé de la dépofition d’un témoin, qui
après avoir été recollé en fa dépofition, eft décédé
ou mort civilement pendant la contumace de l’accu-
f é : dans ce cas, au lieu de confronter à l’accufé la
perfonne du témoin on lui confronte feulement fa
dépofition, dont on lui fait lefture en la forme ordinaire
pour les confrontations. On en ufe de même
pour les témoins, qui ne peuvent être confrontés à
caufe dune longue âbfencé, d’une condamnation
aux galeres ou banniffement à tems, ou quelque autre
empêchement légitime, pendant le tems de la
Contumace.
Dans cette confrontation littérale, les juges ne doivent
avoir aucun égard aux reproches, s’ils ne font
juftifiés par pièces. Voye£ l ’ordonnance de i6~po, tit.
XVij\ art. 22. &' 23 . & ci-devant CONFRONTATION
FIGURATIVE. (^ )
C o n fron ta t ion de T ém o in s , voyei ci-dev.
C o n fr o n t a t io n . (.A )
C o n fr o n ta t io n en T ourbe ou T u r b e , fe
fait lorfque l ’acciifé foupçonne le témoin de fauffe-
té ; il peut requérir qu’on montre avec lui d’autres
perfonnes au témoin, afin de voir fi le témoin recon-
noîtra l’accufé, ou fi fauffement il accufé l’un pour
l’autre. Il dépend de la prudence du juge de le permettre
quelquefois ; au lieu d’ufer de cette confrontation
par turbe, on préfente feulement une autre perfonne
âu lieu de l’accufé, pour voir fi le témoin le
reconnoîtra. Koye{ Defpeiffes, tom. II. part. I. tit.
viij. n. n .
_ * CONFUS, adj. (’Gram.) il défigne toûjours le
vice d’un arrangement, foit naturel, foit artificiel
de plufieurs objets, & il fe prend au fimple & au figuré:
ainfi il y a de la confufion dans ce cabinet d'hif-
toire naturelle j il y a de la confufion dans fes penfées.
De l’adjeôif confus, on a fait le fubftantif confufion,
La confufion n’eft quelquefois relative qu’à nos facultés
; il en eft de même de prefque toutes les autres
qualités & vices de cette nature. Tout ce qui eft fuf-
ceptible de plus ou de moins, foit aii moral, foit au
phyfique, n’eft ce que nous en aflurons que félon ce
que nous fommes nous-mêmes.
CONFUSION, ( Jurifpr. ) d’actions & de droits ,
eft lorfqu’une même perfonne réunit en elle les droits
‘/ P
pf