
foie ; l’un de ces lièges eft pour le parrain qui tient
Pènfant; l’autre demeure vuide, & eft deftiné au
prophète Elie, qui, comme fe l'imaginent les Juifs,
•aflirte invifiblement à toutes les circoncfions. Le
molul apporte les inftrumens néceffaires ; favoir
lin plat,un rafoir, des poudres aftringentes, du ling
e , de la charpie, & de l’huile rofat, & quelquefois
une écuelle avec du fable, pour y mettre le prépuce
coupé. On chante quelque cantique en attendant
la marraine, qui apporte l’enfant fur fes bras
accompagnée d’une troupe de femmes, dont aucune
ne parte la porte de la fynagogue. C ’ert-là que la marraine
donne l’enfant au parrain, & aufîi-tôt tous les
afliftans s’écrient baruth-haba, U bien venu. Le parrain
s’aflïed & ajufte l’enfant fur fes genoux ; Xemohel
prend le rafoir, & dit: Béni foye^-vous, Seigneur,
qui nous ave^ commandé la circoncifon, En prononçant
ces mots il prend avec des pinces d’argent ou
avec fes doigts la groffe peau du prépuce, la coupe,
puis avec fes ongles il déchire une autre peau plus
déliée qui refte : il fucedeux ou trois fois lefang qui
abonde, & le rejette dans une tarte pleine de vin;
enfuite il met fur la plaie du fang-dragon, dé la poudre
de corail, & d’autres drogues pour étancher le
fang; puis il applique des comprefles imbibées d’huile
rofat, & il enveloppe le tout. Il reprend enfuite
la tarte, bénit le vin mêlé de fang, en mouille les lèvres
de l’enfant, en difant ces paroles d’Ezéchiel, ch.
xyj. verf 4. Et j'a i dit: vis en ton fang. Il prononce
une autre bénédiftion pour l’enfant, auquel il im-
pofe le nom qu’on fouhaite. On récite après cela le
pfeaume 128, & l’on reporte l’enfant à la maifon de
fes parens. R. Léon de Modene, des cérèm. des Juifs.
Voye£ autfi le grand diction, de la bible de M. Simon ,
au mot circoncifon; & le dictionnaire de la bible du P.
Cal m et, fur le même mot. -
La circoncifon, dans l’antiquité, n’étoit cérémonie
religieufe que pour les Juifs; mais lorfque d’autres
peuples qui la pratiquoient pour d’autres fins &
d’autres raifons, comme nous l’avons dit, vouloient
embrafler le Judaifme, la réitéroit-on ? DomCalmet
aflïire que quand les Juifs recevoient un profélyte
d’une nation où la circoncifon étoit enufage, comme
un famaritain, un arabe, un égyptien, s’il avoit déjà
reçu la circoncifon, on fe contentoit de lui tirer
quelques gouttes de fang de l’endroit oii l’on donne
la circoncfon, & ce fang s’appelloit le fang de l'alliance.
Il ajoûte que trois témoins aflirtoient à cette
cérémonie, afin de la rendre plus authentique, qu’on
y béniflbit D ieu , & qu’on y récitoit cette priere :
O Dieu ! faites-nous trouver dans la loi les bonnes oeuvres
& votre protection, comme vous ave^ introduit cet
homme dans votre alliance.
Les juifs aportats s’efforçoient d’effacer en eux-
mêmes la marque de la circoncifon. Le texte du premier
livre des Macchabées, ch. j . verf. 16. l’infinue
clairement : Fecerunt fibi proeputia, & recejferunt à
teflamento fancto; & S. Paul, dans la prem. aux Co-
tinth. ch. vij. verf 18. femble craindre que les Juifs
convertis au Chriftianifme n’en ufaflent de même :
Circumcifus aliquis vocatus eji, non adducat proepu-
tium.
S. Jérôme, Rupert & Haimon nient la poflibi-
lijé du fait, & croyent que la marque de la circoncif
o n eft tellement ineffaçable, que rien n’eft capable
de fupprimer cette marque dans la chair du circoncis.
Se.'on eux, ce qu’on lit dans les Macchabées
doit s’entendre des peres qui ne vouloient pas donner
la circoncifon à leurs enfans. S. Jérôme donne
d’ailleurs un»? explication forcée du partage de faint
Paul, qu’on pt'ut voir dans le P. Lami, introduit, à
l'Ecru.faintey liv. 1. ch.j. p. y. mais, ajoûte ce dernier
auteur, fi l’autorité de l ’Ecriture &: de Jofephe,
liv. X I I . ch. vj. des antiq. jud, ne fuffifoit pas, on
pourroit ajouter celle des plus fameux médecins, qui
prétendent qu’on peut effacer les marques de la circoncifon.
En effet Gelfe & Galien ont traité exprès
cette matière ; & Bartholin, demorb. biblic. cite Ægi-
nete & Fallope>qui ont enfeignéle fecret de couvrir
les marques de cette opération. Buxtorf le fils , dans
fa lettre à Bartholin, confirme ce fait par l’autorité
même des Juifs.
Quoi qu’il en foit, la circoncifon telle qu’on la re-
cevoit, avoit pour effet naturel de diftinguer les
Juifs des autres peuples: mais outre cela elle avoit
divers effets moraux ; elle fervoit à rappeller aux
Juifs qu’ils defcendoient du pere des croyans, du
pere du Meflie’ félon la chair ; elle fervoit à les rendre
imitateurs de la foi de ce grand homme, & à
croire au Meflie qui lui avoit été promis ; elle étoit
un fymbole de la circoncifon du coeur, félon Moyfe,
deuteron. xxx. verf G. 6c même félon Philon., de cir-
cumcifone, elle obligéoit le circoncis à l’obfervation
de toute la loi, Galat. ch. v. verf. 3 . enfin elle étoit la
figure du.baptême. Mais malgré les éloges exceflifs
que lui donnent les rabbins, M. Fleuri, dans les
moeurs des Ifraélites, obferve que les Juifs n’avoient
point de fentiment unanime fur la néceflité de la circoncifonj
les uns la regardant comme un devoir ef-
fentiel, les autres comme un fimple devoir de bien-
féance.
Les Théologiens la confiderent comme lin facre-
ment de l’ancienne lo i, en ce qu’elle étoit un figne
de l’alliance de Dieu avec la poftérité d’Abraham :
Propter hoc, dit S. Thomas, in lib. IV. fentent, difi.
1. qucefi.j. art. 2. ad. jv . quoefl. quia in Abraham fides
primé habuil quaf notabilem quantitatem, ut propter
fidei religionem ab aliis fepararetur ; ideo ei fgnaculum,
fv e facramentum fidei determinatum fu it, fcilicet cir-
cumcifo. Mais quelle grâce ce facrement conféroit-il,
& comment la conféroit-il?
S. Auguftin a prétendu que la circoncif on remettait
le péché originel aux enfans. Voici fes paroles,
lib. IF . de nuptiis & concupifcent. cap. ij. E x qub in f
tituta e f circumcifo in populo Dei, quod erat tune fgnaculum
jufitioe fidei adfignificationem purgationis vale-
bat, & parvulis originalis veterifque peccati. C ’eft ce
qu’il répété dans fes livres contre Pélage & Cælef-
tius, contre Julien & contre la lettre de Petilien.
S. Grégoire le grand n’eft pas moins formel dans fes
traités de morale fur Job : Quod apud nos valet gratia
baptifmatis, dit-il ,.liv. IV. ch. iij. hoc egit apudvete-
res vel pro parvulis fola fides , vel pro majoribus yirtus
facrificii , vel pro iis qui ex Abrahoe flirpe prodierunt
myfterium circumcifionis. Le vénérable Bede, S. Ful-
gence, S. Profper, embraffent la même do&rine,
ainfi que plufieurs théologiens diftingués, tels que le
maître des fentences , qui dit expreflément : Fuitcir-
cumcifonis facramentum idem conferens remedium contra
peccatum, quod nunc baptifmusproefiat. Alexandre
de Halès, Scot, Durand, S. Bonaventure & Eftius,
penfent de même : ces deux derniers ont même été
jufqu’à avancer que la circoncfon confèroit la grâce
ex opéré operato, comme parle l’école, c’eft-à-dire de
la même maniéré que la confèrent les facremens de la
loi nouvelle.
Quelque refpe&ables que foient toutes ces autorités,
elle ne font cependant pas infaillibles ; & le
fentiment le plus commun des Théologiens eft, après
S. Thomas, que la circoncifon n’avoit point été inf-
tituée pour fervir de remede au péché originel. i°.
Le texte de la genefe cité au commencement de cet
article , ne donne la circonc fonayxe comme un figne
d’alliance entre Dieu & fon peuple, & nullement
comme un remede à la tache originelle. 2°VS. Paul
écrivant aux Romains, enfeigne expreflément qu’-
Abraham reçut le figne de la circoncifon^ qui étoit
comme le fceau de la juftice qu’il avoit eue avant
que d etre circoncis : E t fignum actepit clrtutncifonls
j u f itioe fidei , quoe e f in proeputio. Rom, jv . verf. 11.
f . Tous les Peres, avant S. Auguftin, ont foûteiiu
unanimement que la circoncifon n’avoit point la ver-
tii d’effacer le péché originel : Abraham, dit S. Juftin,
dans fon dialogue avec Tryphon, etreumeifionem acte
pit in fignum non ad jufiitiam, quemadrnodum &fcrip-
tttroe & res ipfee nosfateri cogiint. . . . 6* quod genus
muliebre circumcifionis carnalis tapax non eft; fatis id
0fendit in fignum datam circumcifionem ifam , non ut
j u f itioe opus. S. Irenée, liv. IV. ch. xvj.- s’exprime
âinfi : Circumcifionem non quaf jufitioe confummatri-
cem ,fed in figno eam dédit Deits, ut cognofcibile perfe-
veret genus Abrahoe. EtTertulîien dans fon ouvrage
contre les Juifs, ch. ij. Si circumcifo purgat hominem,
D eusAdam incircumçifum cum faceret, cur eum non
circumcid.it; vel pofquant deliquit, f i pur gat circumcif
o ? S. C yprien, liv. /. contre les Juifs , ch. viij. faint
Chryfoftome, homélie xxvij. fur la genef. S. Ambroi-
fe , épît. y 2. S. Epiphane , hérefi yiij. Théodoret,
Théophilatte, OEcuménius, enfin une foule de commentateurs
& de théologièhs, font de ce fentiment :
les principales raifons dont ils l’appuient font i°. que
le péché originel étant commun aux deux fexes, il
n’éût été ni de la fageffe ni de la bonté de Dieu de
priver le fexe féminin du remede à ce péché ': 20.
pourquoi lès Juifs auroient-ils interrompu rufage de
la circoncifon pendant les quarante ans-qü’ils voyagèrent
dans le defert; oh il eft probable que plufieurs
moururent fans l’avoir reçue? pourquoi-eût-il fallu
attendre au huitième jour, les enfans ne pouvoient-
ils pas être furpris par la mort dans cet intervalle ?
30. ni Philon le juif, ni lés rabbins anciens & modernes
qui affeftent d’exalter la circoncifon, ne lui
ont jamais attribué la vertu d’effacer le péché originel.
'
L’autorité de S. Auguftin n’eft donc ici d’aucun
poids : il lifoit ou dans lés Septante ou dans l ’ancienne
vulgate : tout enfant mâle dont la chair n’aura pas
été circoncifc le huitième jour, fera exterminé de fort peuple,
parce qtïil a violé mon alliance. Mais'ces mots ,
le huitième jour, ne fe lifent ni dans l’hébreu1 ni dans
notre vulgate qui eft faite fur l’hébreu.’2°^ S. Auguftin
croyoit que ces mots ,fira extermine de fon peuple,
fignifioient fera condamné à l'enfer; & dans l’ufage de
l’Ecriture, & félon le fentiment commun ’des interprétés
, ils lignifient fitnplemènt, ou être punidh 'mort, i
ou être enlevé de ce monde par une mort précipitée, ou
êtreféparé du corps des Ifraélites , o\X êtreprivé dés grâces
& des prérogatives attachées à l'alliance de Dieu avec
Abraham. 30. C ’eft de cette dernièré alliance qu’il
s’agit uniquement dans ces mots, il aviolé-moh 'alliance
, & non de celle que Dieu avoit faite àveé hos firé-
miefs peres, & que nous avons tous violée dans la
perfonne d’Adam, comme fè le perfuadoit ST-Auguftin
, faute d’attention au texte du ckàp. xyij. de la 'gen.
où le motpactutri, alliance , eft répété jufqu’à hiutdois,
mais toujours relativement aux engagemens qiie Dieti
impofoit à Abraham»
Quoique la circoncifon ne remît pas lèpéché-originel,
elle conféroit quelques gracei,' mais':mbins i
abondantes, moins efficaces que les grâces deda loi
évangélique. Elle ne les conféroit pas néanmoins par
fa propre force , mais par lès mérites & les bônïieâ
difoofitions de ceux qui la recevôient ou- qui l’admi-
niftroient , ex opéré optrantis, comme on parlé'dans
Pécôle, & non pas ex opéré operato, ainfi que cettx dé
laloi nouvelle; c’eft la doRfine du conCilë de Florence
& du concile de Trente. Voyeç la diffêriàt, de
Ddrh Calmet fur les effets de la circoncifon, la \ête
de foit commentaire fur Cèpître aux Romains P
L origine & l’ufage de la circoncifon chez d’autres
peuples que les Hébreux, eft facile à démontrèr ;
>nais tons'l’bhttiréèd’Abràhàm &defesdelcenddns. 1
Ifmael chaffe de la maifon de ce patriarche, la communiqua
au peuple dont il fut le pere, c’eft-à-dire
aux Ifmaelites & aux Arabes ; 8c de ceux-ci elle a
été tranfmife aux Sarrafins, aux Turcs, & à tous les
peuples qui profeffent la dodrine de Mahomet. Les
Phéniciens & les Syriens la pratiquoient auflù San-
choniathon cite par Eufebe, préparât, évangél. liv. I.
dit que Saturne qui eft nommé Ifraïl par les Phéniciens,
n’ayant qu’un fils nommé Jeud, l’immola fur
un autel qu’il avoit dreffé à fon pere dans le ciel :
& qu’ayant pris la circoncifon, il contraignit tous fes
foldats d’en faire de même. De-là eft venu parmi les
Phéniciens la coûtume qu’avoient les princes d’immoler
1 ur fils dans les plus preffantes néceflîtés de
l’état ; & de-là vient aulfi apparremment l’ufage de
la circoncifon parmi ce peuple. Ce récit eft vifible-
ment l’hiftoire d’Abraham altérée par des fables.,
comme on en rencontre beaucoup de femblables dans
les fragmens de Sanchoniathon, qu’Eufebe nous a
confervés. Les Iduméens, quoique defeendus d’Abraham
& d’Ifaac, ne fe firent circoncire que depuis que
Jean Hircan les eut fubjugués & forcés à recevoir la
circoncifon, comme Jofephe le raconte, antïq. jud.
liv. X I I I . ch. xvij.
Les Turcs ont une maniéré de circoncire différente
de celle des Juifs; car après avoir coupé la peau du
prépuce, ils n’y touchent plus, au lieu que les Juifs
déchirent en plufieurs endroits les bords de la peau
qui relient après la^ circoncifon: c’eft pourquoi les
Juifs circoncis guériffent plus facilement que les
Turcs-; Ceux-ci avant la circoncifon preffent, aulfi la
peau à plufieurs reprifés avec deperites pinces, pour
l ’engourdir & diminuer la douleur : ils la coupent en-
fuite avec un rafoir, puis ils mettent fur la plaie quelques
poudres qui la guérilfent. Mais ;comme ils ne
croyent pas cette'cérémonie néceffaire ait falut, ils
ne la font à leurs enfans,.que quand ceux-ci ont atteint
l’âge de 7 ou 8 ans. On voit dans1 les' mémoires de
l ’Etoile fous l’année 1 r, qu’Amurat IIL'voulant faire
circoncire fon fils aîné âgé d’enyiron quatorze ans,
envoya un ambaffadéur .à Henri IH. pour le prier
d alfifter à cette cérémonie, qui de voit, fe célébrer à
Conftantinople ait mois de Mai de l’année fuivante.
Les ligueurs, & fur-tout leurs prédicateurs ; 'pre-
noienr occafion dé cette ambaffade d’appellér Henri
III. le rot turc, & lui reprochoient qu’il étoit parrain
dit fiisdu grand-feigheur.
Les Përfans ne c-irconcifént leurs enfans qu’à treize
ans, ainfi que lés Arabes, en mémoire d’Ifmaël.qui
ne fut circoncis qu’à cet âge. Ceux de Mada^afcar
coupent la-chair à trois différentes reprifes, & font
beaucoup fouffrir les enfans :; celui des parens qui fe
faifttiè premier du prépuce coupé, l’avale, Kerrera
parlé d’trne efpéce de circoncifion en., ufage chez les
Mexicains, quoiqu’ils n’euffent aucuneconnoiffance
du Judaïfme ni du Mahométifme : elle co'nfiftoit à
couper le prépirce & lès: oreilles aux enfans ïfitôt
qu’ilsétoient nés. En réchappoit-ii beaucoup de cetre
opération?
A l’égard de la -circoncifon. des femmes, elle n’a
jamis-ètéén ufage chez les. anciens Hébreux , non
plus que chez les Juifs modernes, mais feulement
chez leS 'EgyjitienS , & dans, :quelquës endroits de
l’Arabie & de Ja Perfe. iS. Ambroife, lib. II. de Abraham.
cap. xj. avance indéfiniment quelles. Egyptiens
donnent la circoncifon aux hommes & aux femmes
au commencement de ^quinzième année; & 5tra-
boa, liv, X V I I . dit aufli que les femmes égyptiennes
reçoivent la circoncifon. M. Huet dit à ce iùjet des
chofes affez curieufes, dans une note latine fur Ori-
gene que nous tranferirons ici : Circumcifo foemina-
rum fit refeclione r «ç vu/ufîjç (jmo clitoridis') , quoe pars
in Aufiraliûm proefertiin mulieribus ita excrefçit, ut fer-
rofit coercinda.Ita traduntmedici infgmSy Paul us Ægi