
jgrande influence fur le bonheur ou le malheur des
humains. De-là eft née.l’Aftrologie judiciaire, dans
laquelle les Chaldéens avoient la réputation d’excel-
ler li fort entre les autres nations, que'tous céùx qui
s’y diftinguoient, s’appelloièrit Chaldéens , quelle
que fut leur patrie. "Ges charlatans s’étoient fait un
art de prédire l’avenir par l’infpeôion dix Cours des
aftres , où ils feignoient de lire l’enchaînemérit des
deftinées humaines. La crédulité des peuples fàifoit
toute leur fcience ; car quelle liaifon pouvoient-ils
appercevoir entre les mouvemens réglés des aftres
& les événemens libres de la volonté ? L’avide cu-
riofité des hommes pour percer dans l’avertir & pour
prévoir ce qui doit leur arriver, eftune maladie aufli
ancienne que le monde même. Mais elle a exercé
principalement fon empire chez tous les peuples de
l’Orient, dont On fait que l’imagination s’allume
aifément. On ne faùroit croire jufqu’à quel excès
elle y a été portée par les rufes & les artifices des
prêtres. L’Aftrologie judicaire eft le puiffant frein
avec lequel ori a de tout tems gouverné l’efprit des
Orientaux. Sextus Empiricus déclame avec beaucoup
de force & d’éloquence contre cet art frivole,
fi funefte au bonheur du genre humain , par les
maux qu’il produit néceffairement. En effet , les
Chaldéens retréciffoient i’ efprit des peuples , & les
tenoient indignement courbés fous u n joug de f e r ,
que leur impofoit leur fuperftition ; il ne leur étoit
pas permis de faire la moindre démarche ,fans avoir :
Auparavant confulté les augures & les arufpices.
Quelque crédules que fuffent les peuples , iî n’é-
toit pas poflible que l’impofture de ces charlatans
de Chaldée ne trahît & ne décelât très-fouvent la
vanité de l’Aftrologie judiciaire. Sous le confulat
de M. Popillius, & d e Cneius Calpurnius , il fut ordonné
aux Chaldéens , par un édit du préteur Cor.
Hifpallus , de fortir de Rome & de toute l’Italie
dans l’efpace de dix jours ; & la raifon qu’on en
donnoit, c’eft qu’ils abufoient de la prétendue con-
aioiffance qu’ils fe vantoient d’avoir du cours des
aftres , pour tromper desefpritsfoibles & crédules,
ch leur pèrfuadant que tels & tels évenemens de
leur vie étoient écrits dans le ciel. Alexandre lui-
même , qui d’abord avoit été prévenu d’une grande
eftime pour les Chaldéens, la leur vendit bien cher
par le grand mépris qu’il leur porta , depuis que le
philofophe Anaxarque lui eut fait connoître toute la
.vanité de l’Aftrologie judiciaire.
Quoique l’Aftronomie ait été fort en honneur
chez les Chaldéens, & qu’ils Payent cultivée avec
beaucoup de foin, il ne paroît pourtant pas qu’elle
eût fait parmi eux des progrès confidérables, Quels
Aftronomes , que des gens qui croyoient que les
éclipfes de lune provenoient de ce que cet aftre
tournoit vers nous la partie de fon difque qui étoit
opaque ? car ils croyoient l’autre lumineufe par elle-
même , indépendamment du foleil : où avoient-ils
pris aufîi que le globe terreftre feroit confumé par
les flammes, lors de la conjonction des aftres dans le
figne de PEcrevifle , & qu’il feroit inondé fi cette
conjonction -arrivoit dans le figne du Capricorne ?
Cependant ces Chaldéens ont étéeftimés comme de
grands aftronomes ; & il n’y a pas même long-tems
qu’on eft revenu de cette admiration prodigieufe
qu’on avoit conçue pour leur grand fa voir dansPAf-
tronomie ; admiration qui n’étoit fondée que fur ce
qu’ ils font féparés de nous par une longue fuite de
fiecles. Tout éloignement eft en droit de nous en
âmpofer.
L’envie de paffer pour les plus anciens peuples
du monde, eft une manie qui a été commune à toutes
les nations. On diroit qu’elles s’imaginent valoir
d’autant mieux, qu’elles peuvent remonter plus
haut dams l’antiquité. On ne fauroit croire combien
de rêveries & d’abfurdités ont été débitées à ce fit'1*
jet. Les Chaldéens, par exemple, prétendoient qu’ait
tems où Alexandre vainqueur de Darius prit Babylone
, il s’étoit écoulé quatre cents foixante & dix
mille années , à compter depuis le tems où l’Aftro-
nomie fleurifloit dans la Chaldée. Cette longue fup-
putation d’années n’a pqint fa preuve dans l’hiftoi-
r e , mais feulement dans l’imagination échauffée des
Chaldéens^ En effet, Callifthène, à qui le précepteur
d’Alexandre avoit ménagé une entrée à- la cour de
ce prince , & qui fuivoit Ce conquérant'dans fes expéditions
militaires , envoya à ce même Ariftote des
obfervations qu’il avoit trouvées à Babylone. Or
ces obfervations ne remontoient pas au-delà de mille
neuf cent trois ans ; & ces mille neuf cents trois ans,
fi on les fait commencer à l’année 4383 de là période
Julienne, où Babylone fut prife, iront, en rétrogradant
, fe terminer à l’année 1480 de la même période.
Il s’en faut bien que le tems marqué par ces
obfervations remonte julqu’au déluge, fi l’on s’attache
au fyftème chronologique de Moyfe , tel qu’il
fe trouve dans la verfion des Septante. Si'les Chaldéens
avoient eu des obfervations plus anciennes ,
comment fe peut-il faire que Ptolomée , cet Aftro-
nome fi exa&, n’en ait point fait mention, & que la
premiere dont il parle tombe à la première année de
Merdochai roi de Babylone, laquelle fe trouve être
dans la vingt-feptieme année de l’ere de Nabonaf-
far ? Il réfulte de-là que cette prétendue antiquité ,
que les Chaldéens dohnoient à leurs obfervations ,
ne mérite pas plus notre croyance que le témoignage
de Porphyre , qui lui fert de fondement. Il y a
plus : Epigene ne craint point d’avancer que les observations
aftronomiques,qui fe trouvoient inferi-
tes fur des briques cuites qu’on voyoit à Babylone,
ne remontoient pas au-delà de 720 ans ; & comme
fi ce tems eût été encore trop long, Bérofe & Cri-
todème renferment tout ce tems dans l’efpace de
480 ans.
Après c e la , qui ne riroit de voir les Chaldéens
nous préfenter gravement leurs obfervations aftro-
nomiques , & nous les apporter en preuve de leur
grande antiquité ; tandis que leurs propres auteurs
leur donnent le démenti, en les renfermant dans un
fi court efpace de tems ? Ils ont apparemment cru,
fuivant la remarque de Laftance , qu’il leur étoit libre
de mentir , en imaginant des obfervations de
470000 ans ; parce qu’ils étoient bien fûrs qu’en s’enfonçant
fi fort dans l’antiquité, il ne feroit pas pof-
fible de les atteindre. Mais ils n’ont pas fait attention
que tous ces calculs n’operent dans les efprits
une vraie perfuafion, qu’autant qu’on y attache des
faits dont la réalité ne foit point fufpefte.
Toute chronologie qui ne tient point à des faits ,
n’eft point hiftorique, & par conféquent ne prouve
rien en faveur de l’antiquité d’une nation. Quand
une fois le cours des aftres m’eft connu, je puis prévoir
, en conféquence de leur marche affujettié à des
mouvemens uniformes & réguliers, dans quel tems
& de quelle maniéré ils figureront enfemble , foit
dans leur oppofition , foit dans leur conjonction. Je
puis également me replier furies temspaffés, où
m’avancer fur ceux qui ne font pas encore arrivés ;
& franchiffant les bornes du tems où le Créateur a
renfermé le monde, marquer dans un tems imaginaire
les inftans précis où tels.&: tels aftres feroient
éclipfes. 5e puis1, à l’aide d un calcul qui ne s’épui-
fera jamais, tant que mon efprit voudra le continuer
, faire un fyftème d’obfcrvations pour des tems
qui n’ont jamais exiftéou même qui n’exifteront ja-i
mais. Mais de ce fyftème d’obfervations, purement
arbitraire, il n’en réfultera jamais que le inonde ait
toûjours exifté, ou qu’il doive toûjours durer. Tel
eft le cas où fe trouvent par rapport à nous les antiens
Chaldéens, touchant ces obfervations qui lie
comprenoient pas moins que 470000 ans. Si je
voyois une fuite de faits attachés à ces obfervations
, & qu’ils rempfifl'ent tout ce long efpace de
tems, je ne pourrois. m’empêcher de reconnoître un
monde réellement fubfiftant dans toute cette longue
durée de fiecles •; mais parce que je n’y vois que des
calculs qui ne traînent après eux aucune révolution
dans les chofes humaines, je ne puis les regarder
oufe comme les rêveries d’un calculateur Voye^
C hro n o lo g ie , & ï Hifl, philqf.de Brucker.
CHALDRON ou CHAUDRON, f. m. (Çomm.)
mefure feche d’Angleterre, qui fert pour le charbon,
& qui contient trente-fix boiffeaux en monce
au , fuivant l’étalon du boiffeau qui eft dépofé à
la place de Guildhall à Londres. Voyt{ Mesure.
Le chaldron doit .pefer 2000 à bord des vaiffeaux.
Vingt-un chaldrons de charbon paffent pour la vingtaine.
Foyei C h a r bo n .
, * CH A LE T , f. m. (Economie.) bâtiment plat répandu
dans les montagnes de Griers, uniquement
deftiné à faire des fromages. Veye^ Dictionnaire de
Trévoux & du Commerce.
CHALEUR, f. f. (Phyfiq.) eft une des qualités
premières des corps, & celle qui eft oppofée au
froid. Voye^ Q u a l it é & Fr o id .
Quelques auteurs définiffent la chaleur, un être
phyfique dont on connoît la préfence & dont on
mefure lé degré par la raréfaction de l’a ir , ou de
quelque liqueur renfermée dans un thermomètre.
La chaleur eft proprement une fenfation excitée
èn nous par l ’aCtion du feu , ou bien c’eft l’effet que
lait le feu fur nos organes. Voye^ Sen sat ion &
F eu ,- .
D ’où il s’enfuit que ce* que nous appelions chaleur
eft une perception particulière, ou une modification
de notre, ame, & non pâ$ une chofe qui
exifte formellement dans le corps qui donne lieu
à cette fenfation. La chaleur n’eft paS plus dans lé
ïeu qui brûle le doigt, que la douleur n’eft dans
l ’aiguille qui le pique : en effet, la chaleur dans le
corps qui la donne, n’eft autre chofe que le mouvement
; la chaleur dans famé qui la fent, n’eft qu’une
fenfation particulière ou une difpofition de î ’a-
jne. Voyt^ Per c e p t io n .
- La chaleur, en tant qu’elle eft la fenfation ou l’ef- j
fet que produit en nous un corps chaud, ne doit ’
être confidérée que'relativement à l’organe du tou- .
cher,- puifqu’il n’y a point d’objefqui nous paroiffe
chaud, à moins que fa chaleur n’excede celle de no1-
tre corps ; de forte qu’une même dhôfë peut paroître
chaude & froide à différentes perfonnes , ou à la
même perfonne gn différens tems. Ainfi la fenfation
de chaleur eft proprement une fehfation relative*
Les Philofophes ne. font pas d’accord fur la chaleur
telle qu’elle exifte dans le corps chaud ; c’eft-
à-dire en tant qu’elle conftitue & fait appeller un
corps ehaud, & qu’elle le met en état de nous faire
fentir la fenfation de chaleur. Les uns .prétendent
que c’eft une qualité; d’au tre sq u e c’eft une fub-
ftance ; & quelques-uns, que c’eft une affeétion mé-
chanique.
Ariftote & les Péripatéticiens définiffent la chaleur,^
une qualité ou un accident qui .réunit ou raf-
femble des chofes homogenes, c’eft - à dire de la
jnêhl’e nature & efpece, & qui defunit où fépare
des chofes hétérogènes, où de,différente nature:
c ’eft ainfi, dit Ariftote, que la même chaleur qui
unit & réduit dans une feule maffe différentes particules
d’o r , qui étoient auparavant féparées les
unes des autres, defunit & fépare les particules
de deux métaux différens * qui étoient auparavant
unis & mêlés, enfemble. Il y a d e i ’erreur non-feulement
dans cette doârine’, mais auflî dans l’exemple
qu’on apporte pour la confirmer ; car la chaleur
quand on la fuppoferoit perpétuelle, ne féparera
jamais une maffe tompolée, par exemple, d’o r ,
d’argent, & de Cuivre ; au contraire, fi l’on met
dans un vaiffeau, fur le feu, des corps de nature
différente, comme de l’o r , de l’argent, ôc du cuivre
, quelque hétérogènes qu’ils foient, la chaleur
du feu les mêlera & n’en fera qu’une mafl'e.
Pour produire le même effet fur différens corps ,
il faut différens degrés de chaleur ■; pour mêler de
l’or & de l’argent, il faut un degré médiocre de
chaleur ; mais pour mêler du mercure & du fou-
f re , il faut le plus haut degré de chaleur qu’on puiffe
donner au feu. Voye[ O r , Ar g e n t , & c. A quoi il
faut ajoûter que le même degré de chaleur produit
des effets contraires : ainfi un feu violent rendra
volatiles les eaux , les huiles, les fé ls , &c. & le
même feu vitrifiera le fable & le fel fixe alkali.
Voye{ V erre.
Les Epicuriens & autres Corpufculaires ne regardent
point la chaleur comme un accident du
feu , mais comme un pouvoir effentiel ou une propriété
du feu , qui dans le fond eft le feu même, &
n’en'eft diftinguée que relativement à notre façon
de concevoir. Suivant ces philofophes, la chaleur
n’eft autre chofe que la fubftance volatile du feu
même, réduite en atomes & émanée des corps ignés
par un écoulement continuel ; de forte que non-feulement
elle échauffe les objets qui font à fa portée ,
mais aufli qu’elle les allume quand ils font de' nature
combuftible ; & qu’a près les avoir réduits en
feu j elle s’en fert à exciter la flamnie.
En effet, difent-ils, ces eorpufcùles s’échappant du
. corps ignée, & reftant quelque tems enfermés dans
la fphere de fa .flamme, conftituent le feu par leur
-mouvement; mais après qu’ils font fortis de cette
-fphere & difperfés en différens endroits, de forte
qu’ils ne tombent plus fous les y e u x , & ne font
plus perceptibles qu’au ta ft , ils acquièrent le nom
de chaleur en tant qu’ ils excitent encore en nous
cette fenfation.' '
Nos derniers & meilleurs auteurs en Philofophie
méchanique, expérimentale, & chimique, penfent
fort diverfement fur la chaleur. La principale quef-
tion qu’ils ife propofent, confifte à favoir fi la chaleur
eft une propriété particulière d’un certain corps
immuable appellé feu ; ou fi elle peut être produite
méchaniquement 'dàns d’autres corps,' ën altérant
leurs parties,
■ La première opinion, qui eft aufli ancienne que
Démocrite & le fyftème des atonies, & qui a frayé
le chemin à celle des Cartéfiens & autres Mécha-
-niftes, â été renouvellée avec fuecès, & expliquée
■ par quelques auteurs modernes, & en particulier
par MM. Homberg \ Lémery, GraVefande, & fur-
tout par le favânt & ingénieux Boerhaave, dans un
cours de leçons qu’il a donné fur le feu , & dont
on trouvera le réfuitat à Y article ¥ e \j .
Selon cet auteur, ce que nous appelions feu eft
I un Corps par lui-même, fu i géneris, qui a été créé
tel dès le commencement, qui ne peut être altéré
en fa nature ili ért lès propriétés, qui ne peut être
produit de nouveau par aucun autre corps, & qui
ne peut être changé en aucun autre, ni ceffer d’être
•feu.
11 prétend qtie ce feu eft répandu également par
tOut-, & qu’il exifte en quantité égale dans toutes
les parties de TéfpaCe: mais qu’il eft parfaitement
caché & imperceptible, & ne fé découvre que par
certains effets qu’il produit, & qui tombent fous
nos fens. .
f Ces effets font la chaleur, la lumière, les couleurs >
la raréfaction f & \o.brûlurtt qui font autant de ûga&*