
La chaleur augmentée fymptomatique generale eft
précifément la même chofe que la chaleur fébrile ;
car là chaleur n’eft jarnais augmentée dans tout le
corps en conféquence d’un vice fixé dans un fiege
particulier plus ou moins étendu , que les autres
phénomènes de la fievre ne fe faffent en même tems
remarquer; ou pour exprimer plus précifément cette
proposition , la chaleur générale fymptomatique eft
toujours fébrile ; 8c réciproquement la fievre, &
par tonféquent la chaleur fébrile 8c vraiment maladive,
eft toujours fymptomatique ; car la fievre n’eft
jamais produite immédiatemenr par les caufes évidentes,
mais fuppofe toujours un vice particulier ,
un defordre dans l’exercice 8c la fucceflion des fonc- \
tions , en un mot un inéquilibre, un noyau ou un
noeud à réfoudre, une matière à évacuer, &c. V-)ye{
Fievre. . . ,
Nous avons rapporté dans l’expofitiori des phénomènes
de la chaleur animale, d’apres le d. Martine,
que le terme extrême de la chaleur des animaux
dans les plus fortes fievres n’excédoit pas de beaucoup
leur température ordinaire ; qu’il n’etoit guère
porté aü-de-là du 107 ou 108e degré du thermomètre
de Fahrenheit.
Cé même favant a auflî obfervé fur lui - même
qu’au commencement d’un accès de fievre , lorf-
qu’il étoit tout tremblant & qu’il effuyoit le plus
grand froid, .fa peau étoit cependant de z ou 3 degrés
plus chaude que dans l’état naturel, ce qui eft
fort remarquable.
Le d. Martine nous a auflî raflurés par une expérience
bien fimple contre la crainte des fuites funef-
tes de la chaleur fébrile, que le célébré Boerhaave re-
gardoit comme très-capable de coaguler la ferofite
du fang , fort perfuadé que cet effet peut etre produit
par un degré de chaleur fort peu fupérieur au
100e opinion qui a autorifé le d. Arbuthnôt 8c le
d. Stales à foûtenir que la chaleur naturelle du fang
humain approchoit de fort près du degre de coagulation.
L ’expérience ou les faits par lefquèls le d. (
Martine a détruit ces prétentions, font ceux-ci: il a
trouvé que pour coaguler la ferofité du' fang ou le
blanc d’oeuf, il falloit une chaleur bien fupérieure à
celle que peut fupporter un animal vivant, ces fub-
ftancés reftent fluides jufqu’au 156e degré ou envi-
ron. , ,
Les autres effets généraux attribues communément
à la chaleur fébrile ne font pas plus réels, du
moins plus prouvés que celui dont nous venons de
parler. On imagine communément, 8c ce préjugé eft
fort ancien dans l’art, que la chaleur augmentée ( l’énumération
de ces redoutables effets eft du favant
Boerhaave) diflipe la partie la plus liquide de notre
fang, c’eft-à-dire l’eau, les efprits, les fels, les huiles
les plus fubtiles ; qu’elle feche le refte de la maf-
fe, la condenfe, la réduit en une matière concrète ,
incapable de tranfport 8c de réfolution ; qu’elle dégage
les fels 8c les huiles, les atténue, les rend plus
acres , les exalte, 8c les difpofeà ufer les petits vaif-
feaux 8c à les rompre ; qu’elle feche les fibres, les roi-
dit , 8c les contrafte.
Mais premièrement cette prétendue difllpation de
la partie la plus liquide de nos humeurs par la chaleur
fébrile, ne demande que la plus legere confidération
des fymptomes qui l’accompagnent, pour être abfo-
lument démentie.
En effet quel eft le praticien qui ne doit pas s’âp-
percevoir , dès qu’il renoncera aux illufions de la
Medecine rationnelle , que les fecrétions font ordinairement
fufpendues dans la plus grande ardeur de
la fievre ; que la peau fur-tout 8c la membrane interne
du poumon font dans un état de conftri&ion, de
féchereffe fort propre à fupprimer ou à diminuer la
Jranfpiration, 8c qui la diminue en effet ; 8c que lorfque
la peau 8c les autres organes excrétoires viennent
à fe détendre fur le déclin d’une maladie , les
fueurs 8c les autres évacuations quifuivent ce relâchement
annoncent ordinairement la plus favorable
terminaifon delà maladie, 8c non pas une,foule de
maladies promptes, dangereufes, mortelles, &c. en
un mot que tant que la chaleur de la fievre eft dan-
gereufe;, elle-eft feche ou ne diflipe pas affez , bien
loin de diflîperdes parties utiles, 8c qu’elle ne doit
être au contraire regardée comme de;bon augure
que lorfqu’elle eft accompagnée de diflipation.
Quant à la prétendue alteration des humeurs,qui
dépend du dégagement des fels , de l’exaltation des
huiles, de la vergence à l’alkali, au rance, au muriatique
, aux acrimonies, en un mot à l’érofion 8c à la
rupture des petits vaiffeaux, 8c aux autres effets de
ces acrimonies ; ces prétentions tiennent trop au
fond même de :1a doctrine pathologique moderne
pour être difcutées'dans cet endroit.. Voye% Fievre,
Pa th o lo g ie , V ic e des humeurs , au mot Hum
eu r.
Mais fi le danger de la chaleur exceflive, comme
telle, n’eft prouvé par aucun effet fenfible , il eft
établi au contraire par de fréquentes ôbfervations ,
que ce fymptome peut accompagner un grand nombre
de maladies ordinairement peufuneftes. Voye^
Fievre.
Van-Helmont a combattu avec fa véhémence ordinaire
les préjugés des écoles qui reconnoiffoient
la chaleur pour l’effence de la fievre, en abufant ma-
nifeftement de la doftrine des anciens qui définif-
foient la fievre par l’augmentation de la chaleur, 8c
qui ne la reconnoiffoient prefque qu’à ce ligne ,
avant que l’ufage de déterminer fa préfence & fes
degrés par l’exploration du pouls fe fût introduit dans
l’art. Foye[ Fievre. L’ingénieux réformateur dont
nous venons de parler obferve très-judicieufement
d’après Hyppocrate , dont il reclame l’autorité y
que la chaleur n’eft jamais en foi une maladie, ni
même caufe de maladie ; axiome qui étant bien en»
tendu doit être regardé comme vraiment fondamen-
: ta l, 8c qui mérite la plus grande confidération par
fon application immédiate à la pratique de la Medecine
, d’où il fut fans doute important d’exclure
alors cette foule d’indications précaires tirées de
la vue d’éteindre l’ardeur de la fievre, de prévenir
l’incendie général , la confommation de l’humide
radical, la difllpation des efprits, &c. axiome qu’il
feroit peut-être effentiel de renouveller aujourd’hui
pour modérer du moins , s’il étoit poffible , ce
goût peut-être trop dominant de rafraîchir 8c de
tempérer , qu’un refte d’Hequétifme, la dofrrine
des acrimonies , 8c quelques autres dogmes aufli
hypothétiques > paroiffent avoir répandii dans la
Medecine pratique la plus fuivie, 8c dans le traitement
domeftique des incommodités ; goût que nous
devons originairement au fameux Sydenham, mais
à Sydenham rationnel, qui ne mérite affûrément pas
à ce titre la falutation refpeftueufe dont Boerhaave
honoroit en lui l’obfervateur attentif, le fage em-
pyrique.
On peut donc avancer affez généralement, que ce
n’eft pas proprement la chaleur que le „Médecin a à
combattre dans le traitement des fievres ; 8c que s’il
lui eft permis quelquefois de redouter cette chaleur ,
ce n’eft que comme ligne d’un vice plus à craindre,
8c non pas comme pouvant elle-même produire des
effets funeftes.
Il ne faudrait pas cependant conclure de cette af-
fertion, que ce feroit une pratique blâmable que
celle de diminuer la violence de la fievre commençante
, par les faignées 8c par la boiffon abondante
des liqueurs aqueufes ; nous prétendons feulement
établir que ces fecours ne doivent être regard^
dans les maladies bien décidées, que comme Amplement
préparatoires ; car fi on les regarde comme curatifs
ou comme rempliffant l’indication principale,
8c qu’on agiffe conféquemment, on voudra emporter
le' fond d’une maladie parleur feul moyen ; c ’eft-
à-dire qu’on embraffera, dans la vûe fage 8c timid
e , ce femble, d’adoucir, de relâcher, de calmer,
la méthode là plus hardie de toutes celles qu’ont
adoptées les Médecins depuis qu’ils ont ceffé d’être
les Amples miniftres de la nature , puifqu’on peut
avancer en effet que la medecine antiphlogiflique eft
de toutes les méthodes curatives la plus violente à
la nature, quoiqu’on ne puiffe pas décider jufqu’à
quel point elle eft dangereufe. Voye^ Méthod e
cu r a t iv e , Ra fraîchissant , T em p é r an t ,
Sa ig n é e . |
La confidération de la chaleur comme ligne, doit
entrer dans l’établiffement régulier du diagnoftic 8c
du prognoftic des maladies aigues. Outre ce que nous
venons d’en remarquer, comme annonçant la fievre
en général, les praticiens la diftinguent par quelques
différences effentielles, indépendantes de fon degré.
Ils obfervent une chaleur humide ou accompagnée de
la moiteur de la peau, 8c une chaleur feche, 8c qui eft
accompagnée ordinairement de Yafpéritéde la peau :
la première eft la chaleur ordinaire du commencement
8c de l’état des maladies aigues ; la fécondé eft
propre au déclin des maladies bien jugées.
Les praticiens diftinguent encore la phaleur fymptomatique
en chaleur douce en chaleur acre ; la première
approche, beaucoup de la chaleur faine ou naturelle
; la fécondé différé de la chaleur purement
exceflive , 8c même de la chaleur feche. Les Médecins
l’obfervent fur-tout dans les fievres malignes
ou de mauvaife efpece, malimoris.. Elle eft.en.géné-
ral un ligne fâcheux. Au refte il eft très-difficile ou
même impoflible d’exprimer ce que les Médecins
entendent par chaleur acre; c’eft-là un de ces lignes
qui n’exiftentque pour le praticien formé par l’habitude
, par l’exercice , par les afres répétés , que
les thermomètres 8c les autres fecours de la Phyfi-
que ne peuvent pas déterminer ; qui échappént au
calcul, &c. 8c c’eft précifément la faculté de faifir
les lignes de cette efpece , & de les évaluer, par le
feul fecours d’un fentiment prefque confus , qui
conftitue cette heureufe routine qui ne caraftérife
pas moins le praticien confommé que la fcience 8c
la réflexion.
L’augmentation particulière de la chaleur eft regardée
par la faine partie des Médecins, comme une efpece
de fievre locale, febris in parte. Cette chaleur
eft un fymptome concomitant de toutes les affe&ions
inflammatoires , foit confirmées , foit paffageres,
comme celles qui font occafionnées par les ligatures,
par les corps irritans ou comprimans appliqués extérieurement
, &c. Cette fievre peut fubfifter un certain
tems , lorfque la partie affefrée n’eft pas bien
étendue, qu’elle eft peu fenfible, ou qu’elle n’exerce
pas une fonction très-effentielle à l’économie de la
v ie , telle que les parties extérieures. Cette fievre
particulière , dis -je , peut fubfifter un certain tems
fans exciter, du moins fenfiblement, la fievre généra
le , lors même que ces affefhons dépendent d’une
caufe interne, comme dans certains paroxyfmes de
goutte, d’ophthalmie ; dans les petits phlegmons, des
éréfipeles légers, &c. Les fievres locales doivent être
regardées dans tous ces cas comme des incommodités
de peu de conféquence. V?yc{ Infl am m at ion
& Maladies externes. On ne doit en excepter
à cet égard que l’inflammation des y e u x , qui peut
devenir funefte à l’organe affefré, quoiqu’elle ne foit
pas accompagnée de la fievre générale. Voye^ O ph-
THàlmie.
Certaines chaleurs particulières, paffageres, comme
ces feux qu’on fent au v ifage, aux mains 8c dans
quelques autres parties du corps, à l’occafion de ce
qu’on appellecommunément desdigefiions fougueufis,
dans les accès de certaines paflions, dans des attaques
de vapeurs, &c. n’exigent pas non plus communément
les fecours de l’a r t , 8c n’annoncent rien de
funefte.
La chaleur fpontanée paffagere du vifage, du creux
de la main, 8c quelquefois des piés, eft un des fignes
de la fievre heâique commençante. Voye%_ Fievre
h e c t iq u e , au mot He c t iq u e .
Les paroxyfmes violens de paflion hyftérique font
accompagnés quelquefois d’une chaleur brûlante, &
plus durable que celle dont nous venons de parler ,
que les malades reffentent dans différentes parties du
corps , 8c principalement dans le ventre & dans la
poitrine, 8c cela fans fievre générale. Mais ce fymptome
n’indique aucun fecours particulier : il ne doit
pas faire craindre l’inflammation des vifceres ; le pa-
roxyfme qui en eft accompagné, n’exige que le traitement
général. Voye^ Passion h y st ér iq u e .
Le cas le plus grave de chaleur augmentée particulière#
eft fans contredit celui d e là fievre lipirie,
Foye^ L ip ir ie . •
Au refte il eft effentiel de favoir que le rapport des
malades n’eft pas toûjours un: moyen fuffifant pour
. s’affûrer d’une augmentation réelle de chaleur; & que
comme ils peuvent éprouver un fentimenr de froid ,
quoique leur chaleur foit réellement augmentée ,
comme nous l’ avons obfervé plus haut à propos de
l’état appellé le froid de la fievre, ils reffentent aufli
dans d’autres cas une ardeur brûlante dans une partie
dont la chaleur eft réellement 8c très - confidérable-
ment diminuée , comme dans certaines gangrenés
..fecheS:, &c. Foye^ G angrené.
On ne peut regarder que comme une expreflîon
figurée,ie nom d’intempérie chaude que les anciens
d'onnoient à certaines dilpofitions des vifceres. Foyeç
In tempérie. . {b)
CHALEUR , conffdércc médicinalement comme caufe
non natug[Ue &. externe ; CHALEUR de Tatmofpkere ,
. du'climat?*, des faifons, des bains, voye^ Air , ATMOSPHERE,
Cl im a t , Sa is o n , Maladies en d émiques
y. au mot Endémique ; Eau th ermale ,
Fom en t a t io n .
CHALEUR desmédicamens, des alimens, despoifons,
voyei Méd ic am en t , A l im en t , Po ison é chauf fan
t , Q ü a l it é .
CHALEUR (degrés de) des différens animaux. {Hiß.
nat. Zoolog.) Ce que nous allons dire de la chaleur
confidérée fous ce point de vû e , eft tiré d’une differ-
tation dü doéteur Martine, intitulée , Effai fur L'hif-
toire naturelle & expérimentale des différens degrés de
chaleur des corps.
La chaleur des animaux eft fort différente, fuivant
la variété de leurs efpeces 8c celle des faifons. Les
Zoologiftes les ont divifés, avec affez de fondement,
en chauds 8c en froids, c’eft-à-dire refpecli-
vement à nos fens. Nous appelions chauds ceux qui
approchent de notre propre température, tandis que
nous regardons comme froids tous ceux dont la cha-
. leur eft fort au-deffous de la nôtre, 8c qui par con-
féquent affeftent notre toucher de la fenfation de
froid , quoique, fuivant les expériences que j’ai
eu occauon de faire, ils foient tous un peu plus
chauds que le milieu dans lequel ils vivent : il y a
| même plufieurs efpeces d’animaux dont la chaleur ne
furpaffe que fort peu celle de l’air ou de l’eau. Les
• infeftes font un fujet d’étonnement pour nous ; car
- quoiquhls paroiffent les plus tendres 8c les plus délicats
de tous les animaux , ils font cependant ceux
qui peuvent fupporter les plus grands froids fans en
être incommodés : ils fe confer vent dans les faifons
les plus froides, fans autres défenfes que la feuille