
les remercient de ce que pour terminer les difputes
ils ont eu foin de les affembler. Cette forme de convoquer
les conciles de France a fubfifte fous nos rois.
Le premier concile d’Orléans a été convoqué par
Clovis l’an 511 ; le fécond, par Childebert & les
rois fes freres, l’an 5 3 3 ; le concile d’Auvergne , par
Théodebert, l’an 5 3 5 ; le troifieme concile d’Orléans,
par Childebert, l’an 549, pour ne rien dire des autres
quife font tenus fréquemment fous la première
race, & qui ont été indiqués par nos rois. Mais fous
la fécondé race principalement, la puiffance royale a
paru à cet égard dans tout fon éclat : c’eft dans les
conciles tenus fous cette race qu’ont été faits nos capitulaires
; & non-feulement nos rois co n v o q u en t
ces conciles y mais même ils y afliftoient, & étoient
les arbitres & les moteurs de tout ce qui s’y paffoit.
Nous nous contenterons de citer Vaction première
du concile de Rome tenu fous Leon III. contre Félix
évêque d’Urgel, qui prouve que nos rois, pour lors
maîtres de l’Italie, ont pareillement indiqué les conciles
dans ce pays, & que les papes , conformement
aux ordres du prince, y ont affilié. Depuis que la
troifieme race a commencé à régner, les rois ont
continué de jouir de la même prérogative , ils ont
convoqué tous les conciles qui fe font tenus ; enforte
que c’eft une réglé certaine parmi nous, que les évêques
ne peuvent s’affembler ni délibérer entre eux
fur quoi que ce foit, fans la permiffion du prince.
Les papes les plus recommandables par leur faintete
ont reconnu ce droit dans la perfonne de nos rois ;
entr autres S. Grégoire le grand, liv. vij.reg. ep.i 13.
& 114. Dans la première de ces lettres il fupplie la
reine Brunehaut d’ordonner la tenue d’un concile; &
dans la fécondé il fait la mêmepriere aux rois Théo-
doric & Théodebert, afin qu’on puiffe y prendre les
moyens d’abolir la pernicieufe coûtume qui s’étoit
introduite dans le royaume de vendre les ordinations.
Le leéleur peut confulter fur ce droit de nos
rois le chap. x j. [des preuves des libertés de l'églifè gallicane
; & M. de Marca, lib. VI. de concordidfacerdo-
tii & imperii, cap. xvij. & fuiv.
L’autorité des conciles nationaux eft conlidérable
dans l’Eglife ; comme ils en font une partie, ils approchent
beaucoup des conciles oecuméniques, &
c’eft pour cela qu’on leur a donné quelquefois ce
nom. Cette autorité eft plus grande dans le royaume
où ils ont été célébrés, que chez les autres nations
de la Chrétienté. En effet, une nation n’ayant aucun
empire fur une autre nation également libre &
indépendante, elle ne peut l’aftreindre par les lois
& les réglés qu’elle établit. Néanmoins les conciles
nationaux de France ont été en grande vénération
chez les peuples étrangers, & leur ont fouvent fervi
de modèles : c’eft le fruit de la fageffe de l’églife gallicane,
& de l’attachement inviolable qu’elle a témoigné
dans tous les tems pour l’ancienne difeipline.
• Les conciles provinciaux font ceux qui font convoqués
par le métropolitain Ou l’archevêque, & dans
lefqueis il ïaffemble tous lés évêques & autres clercs
de la province. La lettre du clergé de Rome à S. Cy-
prien, & qui eft là vingt-fixieme parmi celles de ce
pere, nous apprend que les prêtres, les diacres, &
autres èlercs ? afliftoient & opirtoient anciennement
à CeS Coficites. Confultis la lettre, epifeopis, pref-
byteris , diaconis, confejfonbus , & ipjis ftantibus lai-
cis. On agite & on décide dans Ces conciles les quef-
tions qui s’élèvent fur la foi ; on y fait des ftatuts
concernant la difeipline, l’adminiftration des biens
OccléfiaftiqUes, la réformation des abus, & la perfection
des moeurs. Ils doivent être convoqués par
les métropolitains , cdnoh.pcx. du concile <VAntioche ;
énfortê qu’il n’eft pas permis aux évêques de la province
dé célébrer un Concile fans le confentement de
l’archevêque. Mais d ’un autre côté, fi celui-ci ne le
convoque pas au moins une fois l’année, il encourt
les peines canoniques. Le canon v j. dufeptiemecon-
cile général, excepte cependant les cas où la néceffi-
té , la violence , ou quelqu’autre raifon légitime ,
l’ont empêché de le faire.
Lorfque le métropolitain veut convoquer un concile
provincial, il avertit chacun de fes fuffragans de
s’y trouver , & cela par des lettres qu’on appelloit
autrefois tractoires ou tractatoires, du même nom que
les ordonnances qu’on délivroit à ceux qui voya-
geoient par ordre du prince, & en vertu defquelles
on leur fourniffoit libéralement les voitures, les
chevaux, & la commodité de ce que les Romains
appelloient la courfe publique. Depuis on a donne à
ces lettres du métropolitain le nom de lettres évocatoires
, encycliques oit circulaires.
Les évêques de la province convoqués par le métropolitain
font obligés de fe trouver au concile , ca-
con xl. du concile de Laodicée ; & ce concile en donne
une raifon qui mérite d’être remarquée , favoir que
les évêques qui négligent de le faire paroiffent s’ac-
eufer eux-mêmes, c’eft-à-dire avoir été détournés
d’aller au concile par les remords de leur confcience,
qui leur font craindre qu’on n’y découvre les fautes
qu’ils ont commifes, & qu’on ne leur inflige la
peine qui leur eft due. Le canon vj. du concile de
Chalcédoine preferit là même chofe ; & il ajoûte
que ceux qui ne s’y trOuverontpas fubiront l’admonition
de la charité fraternelle. Les conciles d’Afrique
ont été plus féveres, comme il paroît par le canon
xxj. du quatrième concile de Carthage, & le canon x.
du cinquième. Suivant ces canons, ceux qui n’auront
point eu d’obftacle légitime, ou qui n’en auront
point fait mention dans la lettre circulaire, ou enfin
qui n’en auront point rendu compte au primat, font
menacés de l’excommunication épifcopale. Nous
l’appelions épifcopale , parce qu’il ne s’agit point ici
d’une véritable excommunication qui retranche le
coupable de la communion des fideles & du corps
de l’Eglife, ou le prive de la participation des facre-
mens ; mais d’une forte d’excommunication qui étoit
en ufage alors entre les évêques ; de façon que celui
qui l’avoit encourue ne communioit avec aucun
évêque, fi ce n’étoit dans l’étendue de fon diocefe ;
lut. 209. de S. Augufl. n. 8. & pour me fervir des termes
du canon x. du cinquième concile de Carthage ,
il devoit fe contenter de la communion de fon églife*
Nous avons un exemple de cette efpece d’exçommu-
nicationdans la lettre 40 ( nouv. édit. 60e. ) de faint
Léon, adreffée à Anatole de Conftantinople. C e pape
ordonne dans cette lettre que les évêques qui auront
eu part au faux concile d’Ephefe, fe reftreignent
à la communion de leur églife. Nous en trouvons un
autre exemple dans le canon lxxxvij. du code des
canons de l’églife d’Afrique, dans l’affaire de Quod-
vultdeus : Placuit, dit lë canon , omnibus epifeopis
ut nullus ei communicet, donec caufdejus terminum fu mât.
L’églife gallicane a tenu une conduite aufli rigou-
feufe à l’égard des évêques qui manquoient de venir
au concile de leur province, canon xvij. du concile
d'Arles, Van 4^2. Cette févérité s’eft étendue à
ceux qui abandonnoient lé concile' avant qu’il fût
terminé , canon xxxv. du concile d'Agde, Van 5 06»
Ce qui a pareillement été ftatué dans le premier canon
du deuxieme & troifieme concile de Tours. L’Ef-
pagne a embraffé la même difcipline-dâns fes conciles,
& on y a décidé que l’évêque qui étant averti
par fon métropolitain négligeroit de venir au concile
, feroit privé jufqù’à là tenue du concile fuivant de
la communion de tous les évêques, canon vj. du concile
de Tarragone, l'an 5 1 S. Les Caufes qui peuvent
difpenfer un évêque mandé au concile de s’y trouv
e r , font exprimées dans ces différens conciles : telles
fönt Burgente/néceffité, l’âge avancé, l’infirmité
habituelle , la maladie, les ordres du roi qui retiennent
l’évêque dans un autre endroit.
Les conciles provinciaux, fuivant le canon v. du
concile de Nicée , fe tenoient deux fois tous les ans ;
une fois au printems , une fois à l’automne. Le premier
devoit fe tenir avant le carême, afin , dit le
concile , que toute animofité étant effacée , on préfente
à Dieu une offrande pure. C e canon a été long-
îems en vigueur ; & il n’étoit pas difficile de l’obfer-
v e r , parce que le nombre des évêques étoit grand
fous chaque métropolitain, enforte qu’ils pouvoient
venir tour-à-tour, leurs confrères réfidant pendant
ce tems-là, & prenant foin de l’églife des abfens. Les
conciles furent négligés dans la fuite : les évêques les
moins zélés craignoient la fatigue & la dépenfe de
ces fréquens voyages ; & vers le viij. fiecle on fe
réduifit à les obliger de tenir au moins un concile par
an; c’eft l’ordonnance du concile de Trulle, qui fut
confirmée par le feptieme & le huitième concile oecuménique.
En Occident les conciles provinciaux furent
rares fous la fécondé race de nos rois , tant à
caufe des affemblées d’état qui fe tenoient deux fois
par an, & où tous les évêques étoient obligés de fe
trouver, qu’à caufe des guerres civiles, des incur-
fions des Normands qui infefterent le royaume depuis
Charles-le-Chauve, & de la divifion des petits
feigneurs qui*fut un nouvel obftacle. Ainfi dans le
onzième & douzième fiecle on ne tint prefque pas
de ces conciles. Néanmoins Innocent III. au concile de
Latran renouvella la regle des conciles annuels, mais
elle fut mal obfervée. Dans le fiecle fuivant un concile
de Valence en Efpagne les ordonna feulement
tous les deux ans , jufqu’à ce qu’enfin le concile de
Bâle réduifit à trois ans l’obligation de les tenir ; ce
que le concile de Trente a confirmé fous les peines
portées par les canons. En France l’édit de Melun ,
celui de 1610, & une déclaration de 1646, ont ordonné
l’exécution du decret du concile de Trente.
Des lois aufli fages ont été fans aucun fruit & n’ont
pu faire revivre la coûtume de célébrer, linon tous
les trois ans, du moins fréquemment, des conciles
provinciaux. De nos jours il ne s’en eft point tenu
d’autre que celui d’Embrun en 17 18 , où un des prélats
les plus diftingués parmi les appellans de la conf-
titution Unigenitus , frit condamné , fufpendu des
fondions d’évêque & de prêtre, & réduit à la communion
laïque.
Les conciles diocéfains, qu’on appelle proprement
fynodes, fuivant l’ufage moderne, font ceux qui font
célébrés par chaque évêque, & compofés des abbés
, des prêtres, diacres , & autres clercs de fon
diocèfe. Le canon vj. du feizieme concile de Tolede
nous apprend la raifon pour laquelle on tient ces
fortes de conciles ; c’eft afin, dit-iî, que l’évêque notifie
à fon clergé & à fes ouailles tout ce qui s’eft
paffé & tout ce qui a été décidé au concile provincial
; & l’évêque qui manque à ce devoir eft privé
de la communion pendant deux mois. Mais quoique
les conciles provinciaux ne foient plus en ufage, néanmoins
on tient encore les fynodes, & on doit.lcs célébrer
tous les ans dans chaque diocèfe ; c’eft-là principalement
que les prélats veillent à réformer ou à
prévenir les abus.
Nous n’en dirons pas davantage, fur les conciles
particuliers. Au refte nous croyons n’avoir rien
avancé dans tout cet article des conciles (telle a été
du moins notre intention), qui ne foit conforme à
l’efprit de la religion, aux maximes du royaume,
& qu’on ne puiffe concilier avec le vrai refpefr dû
au faint fiége. Cet article efi de M . B o u c h a u d ,
docteur aggregé en la faculté de Droit.
CONCILIABULE, (’Jurifp.) diminutif de concile ,
yoyei Concile. Il fe dit en général de petits con-
Tome I I I ,
elles tèniis par des hérétiques, contre lés réglés Sé
les formalités ordinaires de la difeipline de l ’Eglife»
* C onciliabule , f. m. {Hif, ancV) conciliabu*
lum, endroit d’une province où les préteurs, pro*
confuls, propréteurs * faifoient affembler le peuple
des pays adjacens pour leur rendre la juftice. On y
tenoit aufli des marchés indiqués par les mêmes ma-*
giftrats, & on appelloit ces lieux conciliabula, &
non fora. Par la luite ce droit fut réfervé aux villes
municipales.
* COlSfCL AMATION, f. f. {Hijt. anc.) On appelloit
ainfi le lignai qu’on donnoit aux foldats romains
pour plier bagage & décamper , d’où l’on fit
l’expreffion conclamare vafa : conclamari ad arma
étoit au contraire le lignai de fe tenir prêts à donner ;
les foldats répondôient par des cris à cette conclama-
tion. Conclamen a encore une autre acception dans
les anciens auteurs latins : lorfque quelqu’un étoit
mort, on l ’appelloit trois fois par fon nom ; & pour
lignifier qu’il n’avoit point répondu parce qu’il étoit
décédé , on difoit, conclamatum efi.
C ’eft dans ce fens, pris au figuré , que quelques
auteurs ont dit, de republicâ romand conclamatum eft ;
pour dire la république romaine n’eft plus.
CONCLAVE , f. m. (Hijt. mod. eccléf.) aflemblée
de tous les cardinaux qui font à Rome pour faire
l’éleftion du pape. Voye^ Pape , Election , &c.
. Le conclave n’a commencé qu’en 1270. Clément
IV. étant mort à Viterbe en 1268, les difficultés qui
furvinrent à l’occafion de l’élefrion de fon fuccef-
feur, déterminèrent les cardinaux à fe féparer & à
abandonner Viterbe. Les habitans de cette ville
ayant eu connoiffance de cette réfolution , fermèrent
les portes de la ville par le confeil de S. Bona-
venture, enfermèrent les cardinaux dans le palais ,
& leur firent favoir qu’ils n’en fortiroient point que
l’éleélion ne fût faite. C ’eft de-là qu’eft venu la coutume
de renfermer les cardinaux dans un feul palais
pour l’éleétion d’un pape.
Le conclave eft aufli le lieu où fe fait Péleélion du
pape. C ’eft une partie du palais du Vatican que l’o a
choifit, félon la diverfité des faifons. Il eft cpmpofé
de falles, de chambres, & de corridors qui fe reil-
contrent en cet endroit, & les falles & les chambres
jfont partagées en plufieurs petites cellules pour les
cardinaux ; telle falle contiendra fix chambres , &
autant pour les conclaviftes, & on en laiffe quelques
unes de libres pour y faire du feu, de forte que
les chambres des cardinaux n’ont point de cheminée z
elles font toutes meublées fort modeftement, d’une
même forge verte ou violette:les armes font fur la porte
des chambres, qui font prefque toutes obfcures à
caufe que toutes les fenêtres font murées, à la ré-
ferve du panneau d’en-haut. Il y a plufieurs officiers,
comme médecins, & chaque cardinal a deux conclaviftes
, ou trois s’il eft malade & qu’il le demande.
Ils font ferment de ne point révéler les fecrets du
conclave. On les reconnoît le lendemain de la clôture.
Il y a d’autres ferviteurs avec une cafaque violette
pour les ufages communs. Les conclaviftes ont
tous une robe de chambre conforme. Il y a un guichet
à la porte du conclave que l’on ouvre pour donner
audience. Il y a cinq maîtres de cérémonies qui
joiiiffent de ce bienfait; chaque cardinal leur donne
tous les jours deux piftoles , outre quelque plat de’
régal. Relation du conclave d'Alexandre VII.
Dans l’interregne, le facré collège prétend qu’il
lui eft dû plus de refpeâ: qu’à la perfonne même du
pape, parce qu’étant compofé de toutes les nations
chrétiennes, il repréfente toute la hiérarchie de
l’Eglife.C’eft pour cette raifon que les ambaffadeurs
allant à l’audience du collège mertent un genou en
terre, & ne fe lèvent qu’après que le cardinal doyen
leur a fait figne.
L LT II ij