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clin aire ; fçachant que ce pays abondoit en argent,
en or, en pierres précieufes, en richeffes de tout
genre. Touts les gouverneurs de Les provinces
eurent- ordre de lever tk d’armer les jeunes gens
en état de fervir. Le lieu d’affemblée fut indiqué
dans la Baélriane, & le temps fixé à trois années.
Toutes les villes maritimes dePhoenicie, de Syrie,
de C yp re , fournirent des conftruâeurs & des bois
taillés & préparés pour être alfemblés & tranf-
portés par terre jufqu’à î’Indus. Comme elle n’a-
vpit point d’éléphants <, elle imagina d’en faire des
fimulacres, avec trois mille peaux dg, boeufs noirs ,
& de les faire porter, par des chameaux j mais afin
que fon artifice demeura fecret, elle y fit travailler
dans une efpèce de parc, dont les portes étoient
gardées. Son armée raffemblée dans la Baélriane ,
fu t, dit-on, de trois millions d’hommes en infanterie,
deux cents mille de cavalerie, cent mille
charriots, cent mille chameaux conduits par des
hommes armés d’épées longues de quatre coudées,
& fa flotte de deux mille navires. Staprobate étoit
roi de l’Inde. Inftruit des projets de .Sémiramis , il
affemble fes troupes, fait conftruire quatre mille
bateaux d’une efpèce de rofeau , , qui eft en ce
pays d’une grolfeur extrême , & que l’eau ne corrompt
pas , augmente avec des éléphants fauvages
le nombre des fiens, met toute fa frontière dans
fin état refpeâable, envoie des ambaffadeurs à
la reine d’A ffyr ie, pour lui demander la caufe de
la guerre^ qu’elle venoit porter dans fes états , fans
qu’elle eût reçu de lui la plus légère offenfe. 11 lui
envoyoit en même temps des lettres fcellées,
dans lefquelles il lui repro choit Les diffolutions, &
juroit par le ciel que dès. qu’il l’auroit vaincue, il
la puniroit du fupplice de la croix.
Ces menaces, furent fans effet. Sémiramis , parvenue
à l ’Indus, difpofa,fa. flotte pour le combat,
y mit fes meilleures troupes, la fit fbutenir par le
refie de fon armée répandu fur le rivage, attaqua
la flotte ennemie , en détruifit, après une longue
réfiftance , environ mille navires, & fit un grand
nombre de prifonniers. Cette viâoire mit en fon
pouvoir les îles de l’Indus, les villes fituées fur
les bords, & cent mille captifs.
Staprobate s’étant préfenté à l’autre bord, feignit,
de fe retirer pour engager l’ennemi à palier
le fleuve & lui donner le défavantage d’avoir une
rivière à dos. Sémiramis fait jetter un pont, pour-
fuit les Indiens & les trouve en bataille à peu de
difiânce, l’infanterie derrière les éléphants & la
cavalerie en première ligne.
Les faux éléphants de l’aflyrienne étaient à la
tête de fon armée. Les Indiens furpris en les voyant
fe demandoiënt où leurs ennemis avoient pu raf-
fembler ces animaux : mais ils furent inflruits du
ftratagême par quelques transfuges.
Les chevaux indiens accoutumés à voir des éléphants
s’avancèrent contre eux avec leur audace
ordinaire. Elle fut; bientôt réprimée par l’odeur des
peaux de boeufs, ou plutôt par celle des chameaux
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que touts les chevaux redoutent. Ne pouvant la
fupporter, ils fe difpersèrent & prirent la fuite.
Staprobate fit marcher fon infanterie &. fes éléphants.
C eu x -c i eurent bientôt mis en défordrè
les feints éléphants de Sémiramis, en tournant
leur furie contre les Aflyrieiis, pour qui ces animaux
étoient d’autant plus effroyables qu’ils étoient
moins connus, ils les rompirent, & les mirent en
fuite. On dit que la reine d’Aflyrie combattit Stra-
probate, qu’elle fut bleffée d’une flèche au bras, &
d’un javelot.à l’épaule, mais que voyant fuir fes
troupes , elle .les fuivit.
Ce que le roi de l’Inde avoit prévu arriva. Les
Affyriens n’ayant qu’un feul pont, s’ÿ jettèrent en
foule ; plufieurs y périrent étouffés, écrafés, ou
précipités dans l’eau. D ’autres po.urfuivis de près ,
s’élancèrent dans le fleuve & s’y noyèrent. Les
Affyriens ayant voulu paffer le pont, . Sémiramis
le fit rompre, & ce qui étoit défias périt dans
les eaux. Staprobate eut la fagefie de ne pas fuivre
l’ennemi à la rive droite. Les captifs furent échangés
, & Sémiramis ne ramena en Aflyrie qu’en-
viron le tiers de fon armée.
Sous Ninias. & fes fuccefleurs l’hiftoire ne marque
aucune expédition militaire. Quelques peuple.»
d’Afie difoient que Teutame, vingtième roi depuis
Ninjas , avoit envoyé au fecours de Troie
vingt mille hommes & deux cents chars fous là
conduite de Memnon ; que ce général défit les
Grecs en plufieurs combats , & périt dans une
embufcade que lui drefsèrent les Theffaliens.
Sous le règne de Sardanapale , Arbace le Mède ,
ayant obtenu avec peine la permiffion de le voir y
le trouva au milieu de fon férail, en habits de
femme, & paré comme elles. Il filoit de la lainè
pourpre, & diftribuoit à fes compagnes la taché
qu’elles dévoient faire. Arbace , indigné que des
bras accoutumés à manier le fer fuffent conduits
par ces mains qui ne connoiffoient que le fufeau,
fe joignit au Babylonien Béléris , & touts deux de
concert , excitant une révolte , engagèrent les
Arabes dans leur parti.
Sardanapale inftruit de ces mouvements promît
deux cents talents' d’or à celui qui tueroit Arbace
ou Béléris , & le double à celui qui le livreroit
vivant : profcription digne d’un roi foible , qui,
pour fe mettre en fureté , met un prix à l’affaflinat.
Soit que le prince eut un général plus habile
que fes adverfaires, ou que les forcesqu’ils avoient
pu raflembler fuffent infuflifantes , ils perdirent
trois batailles, & le roi fe croyant en fureté reprit
au milieu de fes femmes fa vie ordinaire.
Cependant Arbace & Béléris ayant engagé fe<-
crétement les Baâxiens à les féconder, furprirent
de nuit Sardanapale dans fon camp , l’en chaf-
sèrentlui & fes troupes, qu’ils pourfuivirent jufqu’à
Ninive. Le roi s’étant chargé de la défenfe de
fa capitale, donna le commandement de l’armée
à Salemenus, qui fut battu deux fois. La ville
fut bientôt bloquée, &. réfifta durant deux ans.
mais foit qu’elle ait manqué de vivres , ou que
la révolte étant devenue générvalé , ait porté au
défefpoir ce prince efféminé , on dit qu’il fit élever
un vafte bûcher dans une cour de fon palais, &
conftruire au milieu une. fa-Me où il s’enferma, &
livra aux flammes fes. tréfors , fes eunuques, fes
femmes & lui-même. Auffi-tôt Arbace & Béléris
-entrèrent dans la ville * traitèrent les habitants avec
douceur , mais n’y laifsèrent fubfifter ni remparts
ni édifices. Ainfi fut renverfé ce puiffant empire,
& transféré aux Mèdes & aux Babyloniens. ( An
du monde 312.8, tfv. J. C. 876.).
PALE STINE , HÉBREUX, M O A B ITE S , &c.
Les rois d’Egypte , d’A fly r ie , de Médie , de
•de Perfe furent louvent en guerre avec les peuples ■
de la Paleftine. L’écriture en parle fréquemment, .
mais fous des noms différents de ceux que leur
ont- donné les hiftoriens grecs , de forte qu’on
ne peut les reconnaître qu’à des fimilitudes foule
n t incertaines.
’ Un roi d’Elam , nommé Chodorlaomor: , le
même qui .avoit détruit en partie les Zamzummin-s-,
hommes d’une taille gigantefque , habitants du
pays de Moàb, s’ëtoit fournis cinq rois de la vallée
de Siddim. Ceux-ci s’étant révoltés, Chodorlaomor
affembla fes alliés , Marphed , Ariock , &.
Targal, fournis fur fa route quelques autres petits
peuples , attaqua; les cinq rois, défit leur armée,
emmena la plus grande partie du peuple en captivité
, après avoir ravagé tout le p ay s , & livré
-au pillage Sodome & Gomorre.
Loth , neveu d’Àbraham, fut pris avec touts
Les biens & toute fa famille. Dès qu’Abraham l’eut
appris, il raffembla trois cents dix-huit des fiens ,
& les joignant à ceux que lui donnèrent fes trois
amis Amorrhéens , Efeol, A n er, & Mambré ,
atteignit les Elamites vers une des fources du-Jourdain
, nommée Dan, les attaqua de nuit, les uns
endormis , les autres plongés dans l’ivreffe. Une
partie fut tuée, l’autre prit' la fuite», & fut poursuivie
jufqu’à Saba , fur la gauche de Damas, &
Loth délivré avec fon bétail & toute fa famille.
Ce combat eft le plus- ancien dont rhiftoire dés
.Hébreux fafle mention. Leurs guerres n’y commencent
que vers leur fej.oür & leur captivité dans
LEgypte. ' •/ -,
Ce pays ne voyoit pas fans inquiétude les
Ifraélites s’accroître. Ils avaient donné des preuves
•de réfolution dans quelques occafions, telle que
l ’expédition des Ephraïmites contre les Cathitës ,
•habitànts d’un canton de Canaan. S’ils ne réuffirent
pas-dans leur projet d’enlever le bétail à ce peuple
-Philiftin, Ils montrèrent du moins qu’ils étoient
-capables d’entreprendre ; & fuivant le témoignage
de Jofeph , Moyfe , avant la délivrance de fon
peuple, avoit donné des marques éclatantes de
La valeur & de fon intelligence dans la guerre.
Les Ethiopiens ayant fait une incurfion dans la
haute Egypte , la ravagèrent, & défirent l’armée
envoyée contre eux. Ils marchoient à la capitale,
lorfque Pharaon ayant donné le commandement
■ de fon armée.à Moyfe , celui-ci fe hâta de les
.prévenir. „On pouvoit aller à eux en remontant
le N i l, comme c’fétoit l’ufage des Egyptiens, ou
prendre un chemin plus dire«ft à travers les terres.
Moyfe choifit celui-ci pour les furprendre. Un
obftâcle s’y oppofôit : c’étoit le grand nombre de
ferpens qui paroiffoient interdire cette route. Mais,
comme les Ibis * oifeaux du pays , en font les ennemis
& les deftrudeurs , Moyfe en fit raflembler
un grand nombre qui étant mis en liberté aux
-lieux infeftés-par les ferpents, rendirent fa marche
fure. Il; fur prit donc les Ethiopiens;, les d é fit,
-les pourfuivit, prit plufieurs de leurs v ille s , &
les'obligea de fe retirer dans celle de Saba, dont
-il forma le fiège. Elle étoit fituée dans une île , &
outre le fleuve , les digues faites pour le contenir
empêchoienti -l’approche des murailles. Les Ethiopiens
n’ofoient en for tir. Ainfi l’armée Egyptienne
ireftoit oifive dans fon camp , & Moyfe fouffroit
avec impatience de n’y voir aucun terme. Un
évérfl'ment imprévu/ finit lés inquiétudes. Une
fille du roi d’Ethiopie, nommée Tharbis , eut de
fréquentes occafions de le voir du haut des remparts.
Le courage avec lequel il combattoit, &
l’éclat de fa beauté , joint à celui de fes viéloires,
le rendit l’objet de toutes fes affeéfions. Elle lui
fit offrir en fecret fa main , & Moyfe promit de
-^accepter dés que la ville lui feroit livrée. Elle
le fut bientôt ; & le vainqueur ayant févi contre
fes ennemis, & rempli fon engagement, ramena
fes troupes viéîorieufes. Ce fuccès augmenta la
crainte &. la jaloufie des Egyptiens.
La tyrannie de Pharaon s’étant portée aux plus
grands excès , Moyfe indigné de fon ingratitude*
&. du cours continuel de fes injuftices , en délivra
• fa nation. L’Egypte fut frappée de plufieurs calamités,
fes premiers nés égorgés , fes moiflons
-'détruites , Les richeffes enlevées. Les Ifraélites
en Sortirent de nuit au nombre de fix cents mille
combattants avec leurs familles & une multitude
d’étrangers , qui à leur exemple Le dérobèrent à
l’efclavàge. On peut croire , d’après l’expreffion
du texte hébreu, qu’ils marchèrent en cinq Vivifions
ou colonnes.' Ils ne furent pas conduits vers
le pays des Philiftins , de crainte qu’une guerre
trop l'ubite ne je.ttât le découragemént parmi ce
peuple abattu par fes malheurs ; mais ils marchèrent
à l’extrémité de la mer rouge , vers l’Arabie Pé-
trée , & campèrent au bord de la mer. ( An du-
■ monde 2:473 , av‘ L. C 1531. ).
Pharaon les pourfuivit à la tête de fa cavalerie
1' & de fix cents chars. Il les joignit auprès .du rivage,
& ’ pofa fon camp à leur vue , mais ne les attaqua
point encore , croyant fans doute qu’ayant la mer
- devant eux , ils ne pouvoient lui échapper. Le
peuple épouvanté n e vit plus que la mort Vans
- jeê5 déferts. I l regretta fon eiclayage , &- le plaignit