
n’y ayant trouvé que des défenfeurs confternés, &
en petit nombre.
Lorfque Lyque de Pharo , propréteur d’Achaïe ,
& Demodoque , général de cavalerie de la même
république , mirent en déroute les troupes d’Élea ,
ils les avoient entermées entre cette partie de l’armée
d’A ch a y e , qui ravageoit le pays ; & l’autre
partie , qui s’étoit mife en embufcade près de la
place.
Si les environs de la place font li fort à découvert
, qu’il ne foit pas polïible de mettre en embufcade
un nombre luffifant de troupes , votre cavalerie
peut fervir $ embufcade à votre infanterie, pour
attirer & battre la garnifon d’une place. C ’eft ce que
je fais voir en traitant des occafons oit il faiit tâcher
d'en venir à un combat.
Si vous avez allez de troupes, & que vous ayez
lieu de croire que le gouverneur fera affez mal
avifé pour dégarnir fa place de troupes par une
nombreufe fortie * vous pouvez mettre plus près de
l’autre côté de la place une fécondé embufcade , qui
portera les préparatifs néceffaires pour une furprife,
foit pour donner l’efcalade, foit pour appliquer
le pétard à la place, tandis que les ennemis s’en
font éloignés, pour aller charger un parti plus
conlidérable de vos troupes, qui a paru plus loin.
Jofué furprit ainfi la place de Haï.
On peut aufli ufer de la même rufe à l’égard
d ’un lieu où il n’y a pas de troupes réglées , & donr
les habitants, fans expérience, donnent aifément
dans toutes fortes de ftratagêmes de guerre.
Il eft bon quelques jours auparavant la grande
embufcade , d’en avoir formé de peu confidérables,
ou d’avoir fait de petites courfes fur le pays ennemi;
afin que le gouverneur, fe perfuadant toujours
qu’il n’y a que peu de monde, fe détermine plus
facilement à détacher une partie de la garnifon.
De cette manière les Efpagnols, en 1597,
réuflirent à faire donner dans une embufcade une
partie de la garnifon Françoife de Boulogne en
Picardie.
Quand je dis que la grande embufcade doit être
précédée par de petites, j’entends qu’elles doivent
être un peu éloignées : car fi elles étoient fort
proches, les ennemis , par leurs patrouilles continuelles
, & par leurs gardes avancées, vous empêcheraient
de faire le coup que j’ai propofé au commencement
de ce chapitre , & que je crois le plus
capable de porter le gouverneur à détacher les
troupes de la place.
Dans l’expédition de mes trois plans de bataille ;
je traite , avec toute l’étendue néceffaire, des
troupes que , dans un jour de bataille , il faut cacher
entre les lignes , ou mettre par avance plus
loin en embufcade ; je fais voir à quel ufage elles
font deftinées, & de quelle importance il eft d’ufer
de cette pratique.
Afin que l’armée ennemie, ou du moins un détachement
de cette ârmée, donne dans votre embufcade,
marchez, avec votre armée, vers les ennemis
jufques où vous n’aurez pas lieu de craindre!
d’être découvert par leurs partis, ou par leurs
gardes avancées : là , faites halte avec tout le
filence polïible , & détachez une bonne partie de
votre cavalerie, qui, fans s’arrêter, enfonce le
flanc ennemi qui regarde votre embufcade ; & après
le premier carnage qu’elle aura fait, fans donner
le temps aux ennemis de la charger avec trop de
troupes, elle fe retirera vers le gros de votre armée
; afin que fi les ennemis inconfidérément
viennent à la fuivre, ils tombent dans votre embufcade.
C ’eft de cette forte que le duc Claude, général
des troupes de Recarede I , défit, près de Carcaf-
fonne, l’armée de Gontrand, commandée par Bofe
& Auftrobalde.
Afin que le général ennemi ne prenne pas beaucoup
de précautions contre les embufcades que
vous pouvez former , il faut dans diverfes occafions
avoir fait femblant de le craindre.
Par ce moyen, Jugurtha réuffit à engager dans un
mauvais pas Aulus Ion ennemi. Hercule Bentivo-
g lio, chef des Florentins, fit donner dans une embufcade,
& mit en déroute Jean-Paul Manfroni,
commandant des Vénitiens, ayant feint auparavant
de l’appréhender, pour tâcher, par la confiance%
d’augmenter la négligence 6c la préemption de
Manfroni.
Si ce général ennemi eft d’un génie arrogant ^
intrépide, vindicatif, prenèz-vous y tout autrement
: affeâez de témoigner que vous méprifez fit
conduite ; faites fur-tout paraître ce mépris quelques
jours auparavant l’expédition que je viens de pro-
pofer ; afin d’éprouver fi le reuentiment qu’il aura
de voir que vous avez furpris une aile de fon armée
, ne le portera pas à pourfuivre , fans beau»
coup de prétention , votre détachement.
Le prince d’O range, dans fôn Annibal & S ci-
pion, obferve que les hommes téméraires & violents
donnent facilement dans les embufcades. Po-
ly b e , en rappellant l’exemple de Flaminius, qui,
irrité du mépris avec lequel les Gaulois le trairaient
, fe détermina à en venir à un combat, dit,
« que la témérité, la férocité , la violence, la pré-
fomption & le fafte, donnent aifément la vi&oire
aux ennemis, & font ordinairement la perte des
armées ; parce que les hommes qui ont ces défauts
font expofés à donner dans toutes les embûches ,
& dans toutes les rufes de leurs ennemis. ».
Louis Melzo dit que les embufcades compofées
d’un grand nombre de troupes, font fort difficiles :
j’en conviens ; mais, pour cela, on ne doit pas les
regarder comme impoffibles. Dans la guerre, les
entreprifes les plus difficiles font celles qui réuf-
fiffent le mieux. Hérodote rapporte qu’Hercule
Ibanius, chef d’une armée de Carie , s’étant mis en
embufcade dans le bois de Mylaffa, trouva le moyen
d’y demeurer caché jufqu’à ce que l’armée Perfienne
de Darius Hyftafpe donnât dans Vembufcade, où elle
fut battue.
J’ai
J’ai parlé de la manière d’affurer la retraite à un
détachement de cavalerie que vous aurez mis en
embufcade fort loin, & qui eft plus foible que le corps
de troupes qui peut venir au fécours de celles qui
ont été furprifes. A ces avis, j’ajoute que, fi, outre
les troupes battues dans votre embufcade, les ennemis
en ont d’autres , quand elles feraient d'un tiers
inférieures en nombre aux vôtres, vous devez in-
ceffamment vous retirer , dès que vous avez réufli
dans l'embufcade. J’en ai donné les raifons , en traitant
des furprifes.
Cette règle fouffre pourtant une exception ; fça-
v oir , lorfque l’armée ennemie en a été entièrement
défaite, puifqu’alors vous devez pourfuivre votre
vi&oire, pour la rendre la plus complette qu’elle
peut l’être.
En traitant des occafions où il faut tâcher d’en
venir à un combat, je parle au long des foins qu’il
faut prendre pour attirer les ennemis à un combat
défavantageux pour eux, foit en leur cachant
le nombre de vos troupes , foit e.n vous prévalant
de leur défendre , de leur ignorance ou de leur
confiance , foit en ménageant les avantages que
le terrein vous offre ; en un mot, j’y propofe des ex-
pédiens pour engager les ennemis à combattre avec
quelque rifque ou avec quelque défavantage qu’ils
ne connoiffent pas; ce qui a un rapport effentiel
avec les furprifes ou avec les embufcades.
En traitant des marches , je vous préviens aufli
de ne pas tomber vous-même dans les embufcades,
par des avis que vous donnent des prifonniers, des
déferteurs ennemis, des guides, ou .des efpions en
qui il y a peu à fe fier.
Vous devez aufli éviter que les ennemis, par
de faux ordres de votre cour , ou par des lettres
qu’ils forcent quelqu’un de ceux avec qui vous êtes
en intelligence, de vous écrire , ne vous portent
à vous métré en marche par un chemin où les ennemis
vous attendent dans une embufcade. ( Santa-
■ Crut, T. IL ).
EMPLOI. Office militaire.
On dit en général de tout officier qu’il a obtenu
'de l’emploi. iTel lieutenant - général a obtenu de
Yemploi dans telle province ou dans telle armée
tel capitaine réformé a obtenu de l'emploi, alors
on entend qu’il a été employé fuivant fon grade :
mais, lorfqu’un jeune gentilhomme entre au fer-
v ic e , comme il commence toujours par le grade
le plus fubalterne , on dit alors particuliérement"
qu’il a obtenu un emploi ,. 6c ,' par cette dénomination
, on entend communément' une fous-lieutenance.
. Un jeune gentilhomme qui veut entrer dans la
carrière militaire , fait demander un emploi à un
meftre-de-camp commandant ; s’il obtient la pro-
mefTe d’être nommé à un emploi, & qu’une fous-
• lieutenance foit vacante , le meftre-de-camp fait
un mémoire de nomination. ( V. Mém o ir e . ). Il
le préfente, au miniftre de la guerre qui fait expédier
les lettres de nomination, & le jeune çi-
-Art militaire. T.ome II,
toyen eft reçu à fon emploi ; s’il n’y a pas Remploi
vacant, ou fi le meftre-de-camp a pris des engagements
antérieurs avec quelque autre gentilhomme
, le candidat attend ou qu’il y ait un emp
lo i vacant, ou que fon tour d’être nommé foit
arrivé.’
On répète chaque jour que le patriotifme eft
éteint dans l’armée Françoife , que la défunion
règne dans le s :différents corps qui la compofent,
que l’égoïfme y a fait. autant de progrès, que
par-tout ailleurs ; & que ces vices annoncent 6c
précipitent la décadence de l’étar; plufieurs écrivains
perfuadés de la vérité de ces affertions,
ont effayé, pour guérir ces maux , de remonter
à leur four ce ; la plupart ont dit qu’elle exiftoit
dans la manière dont on nommoit aux lieutenances
colonelles & aux majorités : la certitude
de voir le premier capitaine devenir lieutenant
colonel ou major-, 'peut bien m’engager à avoir
des égards pour lui, & à lui parler avec refpeft ;
elle peut même luiattîrer de ma part des témoignages
d’attachement , mais le troifième , le quatrième
capitaines , & c . , étant très éloignés de la
place de chef, ne participent point à ces fenti-
ments ou à ces démonftrations : quand on rendrait
donc les lieutenances colonelles. & les majorités
aux corps, on ne verrait pas renaître cette union
fi vantée & fi néceffaire. Les officiers qui auroient
gagné la tête du régiment, n’en feroient pas moins
peu liés avec ceux qui les avoifineroient ; peu
connus de ceux qui feraient vers le centre, &
étrangers à ceux qui feroient encore éloignés de
ce point ; ceux qui feroient vers le centre , feraient
comme aujourd’hui indifférents avec les vieux &
froids avec les jeunes; & ces derniers , toujours
ifolés, éviteraient les modernes, fuiroient les anciens
, & relieraient, comme de nos jours, abandonnés
à eux-mêmes. Je conviens cependant qu’il
peut bien fortir de la manière dont on nomme
les lieutenances colonelles & les majorités, quelques
foibles filets de la funefte défunion qu’on
voit dans les armées. -(V . L i e u t e n a n t - c o l
o n e l . ). Mais ce n’eft point encore la véritable
fource c’eft dans l’efprit de notre fiècle
qu’on la trouvera : comme il eft prefqu’impoffible
de la changer, effayons d’en modifier les effets ,
en oppofant à l’efprit d’égoïfme qui divife, l’efprifi
de famille & de parénté, qui réunit.
Au lieu de nommer aux ^emplois vacants des
fujets pris indifféremment dans les provinces du
royaume qui font les plus éloignées les unes des
autres , au lieu de rapprocher des membres qui,
n’ayant aucune connexité , ne forment jamais un
feül corps , attachons-nous à fubordonner~à un
même chef autant de fils , de frères, de parents
& d’amis que nous pourrons en réunir, & nous
verrons , tant pendant la paix que pendant la
guerre, naître un ordre de chofes tout-à-fait différent
de celui dont nous fommes chaque jour les té-
DJ9ins, Oui ^ je n’héfite pas «à le dire * un de$ II