
gardes du corps & les gendarmes de la garde n’ ayent
point de cornette » c’elt qu’autrefois ceux des gardes
qui etoierit a l’armée , le raffembloient a v e c tou ts
le s officiers de la maifon du roi & les autres com-
menfaùx fous la cornette blanche , foit du roi ,
foit du général ; & qu’ainfi l’on difoit que les uns
étoient de q ua rtier, & les autres à la cornette.
Je fuis perfuadé que c’eft là l’origine de cette manière
de parler.
Qu an t aux prérogatives & aux fondions militaires
du porte-cornette blanche dans les temps
qu’i i en jo u iffo it , nous n’en apprenons guères
autre chofe par l’hiftoire , finon qu’il portoit cette
cornette dans l’efcadron du roi à un jour de bataille.
Mais j’ai recouvert un papier qu’on a trouvé
parmi ceux de feu M. Vandoeuvre , prédécef-
îeur de M. de la Che fna ye dans cette ch arge, oh
i l y a quelque détail touchant la cornette blanche.
C ’eft un mémoire préfenté au confeil du roi par
M . de Rodes contre M . de Pa lezeau , qui , en
vertu de quelque charge qu’i l . a v o i t , foit dans la
gendarmerie , foit dans la cavalerie , prétendoit
être obéi par la cornette blanche , & lui donner
fes ordres. Celui qui préfenta le. premier ë to if
Claude Pot de Rodes , petit-fils de Guillaume de
Rodes. Je vais mettre ici ce mémoire en entier ,
parce* qu’il n’eft pas long , & qu’il me donnera
lieu de faire des réflexions importantes à ce
fujet.
Le s raifôns que M. de Rodes allègue contre la
prétention de M. de Pa lezeau , font :
u Q u ’ay ant l’honneur de porter la cornette blanche
du r o i , il ne peut rec evo ir commandement ;
d’autre que fa majefté.
Q u e , pour preuve de cela , quand le roi a
une armée fur pied , & qu’il n’y eft pas en per-
fo n n e , fi ledit fieur de Rodes s’y t ro u v e , il n’arbore
pas la cornette ; mais il y combat comme
pa rticulier, ainfi que fit. fon grand père à la bataille
de D reu x , au retour de laquelle il fut fait
chevalier de Saint Michel : & lors'l'e général de
l’armée a une cornette qu’il donne à commander à
qui bon lui femble ; & , en cette qua lité, ledit
fieur de Rodes fit le v o y a g e de Juliers a v e c M.
le maréchal de la C h a ft re , fon oncle fon frère
étant encore v iv an t 8c en poffelfion de la cornette
blanche ; 8c dit qu’il y avoit plus d’ apparence qu’il
dût être commandé d’un général d’armée , que d’un
particulier qui pourroit être aujourd’hui commis
par fa majefté , & demain un autre qui feroit
rendre la cornette moins honorable que celle du
plus petit chevau-léger qui foit en France.
E t fur ce que ledit fieur de Palezeau allègue que
le marquis de Pizani lui a commandé autrefois ,
ay an t été deftiné par le feu roi Henri le Grand pour
orter la cornette b lan ch e, fi quelque occâfion de
. ataille fe fut offerte. A cela je réponds que s’il l’a
fou ffe r t , ç’a été pour le bas âge , auquel étoient
les frères dudit fieur de R o d e s , & , pour ne fçavoir
pas le dû de fa charge , qui l’oblrgeoit à ne recevo
ir commandement que du roi ou de celui qui
porte le commandement de fa part ’, lequel ledit
feigneur r o i , quand il part du gros de fa cornette ,
commande à celui qui a cette charge de croire ce
que celui qu’il nomme lui dira de fa part , n’y
pouvant ê t r e , qui eft ordinairement fon écuyer ;
& ainfi fut-il obfervé à Amiens. Et un é c u y e r ,
nommé B o iffi,.v in t plufieurs fois faire des commandements
à feu mon frère , d’avancer pour
aller au comb a t, comme on en fut fur le point.
Et fur ce que plufieurs allèguent que tel pourroit
être pourvu de ma charge, qui auroit encore fi
Peu d’expérience, comme étoient mes frères dont
l’aîné fut tué la portant à la bataille d?Y v r i , à
dix-neuf an s , &. le dernier mort à Amiens à vingt-
un , qu’il ne feroit digne de commander à ceux qui
font fous la cornette blanche. A cela je dis que nul
n y peut commander que le r o i , la cornette étant
compofée de princes , maréchaux de France , officiers
de la couronne &. vieux capitaines de gens
d’armes qui n’ont leurs compagnies dans l’armée,
& qui ne fçauroient obéir à d’autre qu’à fa majefté
; mais qu’ayant eu le commandement de
charger, c’eft mon drapeau qui commande à ceux
qui l’accompagnent, & non ma perfonne , auquel
tout ce qui eft deffous, tant ceux qui ont été portés
par terre , que ceux qui ont été rompus des autres
compagnies qui ont combattu , fe viennent rallier
pour faire ferme ou combattre félon qu’il eft jugé
néceffaire.
D ’autres difent qu’il eft néceffaire qu’il y ait
quelqu’un dedans le quartier dë la cornette pour
commander , autrement qu’il y a rriveroit plufieurs
inconvénients , tant aux allarmes , que ppur lès
logements » querelles, & autres défordres qui fur-
viennent dans le quartier.
A cela je réponds que le quartier de la cornette
blanche eft toujours le plus proche bourg du quar-
tierdu roi ,q u e dans ledit quartier, font tous volontaires
tels que je les ai nommés ci - deffus, qui
pourront aller à la guerre , à la p rière , ou par l’e f-
time qu’ils feront d’un homme qu’il plaira au roi
y commettre , pour en mener cent ou deux cents
félon l’occafion , mais non par commandement, &
que du jour qu’il érigera cette charge, & .l’affeâera
à une perfonne pa rticulière, il ruinera le corps de
fa cornette ; & touts volontaires qui arriveront à
l ’armée, prendront parti dans des compagnies de
gens d’armes, chevaiïx-légèrs & régiments félon
l’âge & l’opinion des hommes, 8c les amis qu’ils
aurpnt dedans l’armée. ,
Et de plus, après plufieurs chargés faités, je fuis
obligé de demeurer a v éc ma cornette dans le champ
de bataille mort ou v i f , foit qu’ elle foit gagnée
pour le roi , ou perdue ; parce que c’eft a cette
marque que l’on à recours pour venir apprendre
des nouvelles du r o i , & où fa majefté en v o y é
commander ce qu’elle veut qu’on faffe : & , eh cas
que je fois pris prifonnier, c’eft au toi à payer ma
rançon ; & , s’il y avoit quelqu’un qui me conjUiatid
a t , il m’obligeroit peut-être à me retirer , qui eft
contre mon devoir & mon honneur
Et bien, qu’en ceci je repréfente l’ inconvénient
qui en arrive ra, c’eft pour le refpeéi de l’intérêt
du roi & non pour le mien : car je ne logé jamais
dans le quartier de la cornette blanche, fi ce n’eft
une partie de mon équipage ; mais proche du logis
du r o i , afin qu’à la moindre allarme qui arrivera,
je puiffe aller-au logis de fa majefté prendre ma
co rn e tte , qui a coutume d’être mifc dans la ruelle
d e fon lit.
E t le jour que le roi licentie fon armé e, qu’il
la met en garnifon, qu’il eft fur fon retour &
n’a plus que faire de mon fe rv ic e , je le fupplie
qu’il ait agréable que je l’emporte chez m o i, &
qu’il me foit donné un cheval de fa grande é cu r ie ,
qui fera choift après fon premier & fécond cheval
de b ataille, ainfi qu’il eût fait fi j’euffe combattu :
ce t honneur & bienfait étant dûs & payés de tout
temps à mes prédéçeffeurs qui ont eu ma charge,
du jour que fa majefté a ennemis en campagne,
& qu’il fait la revue de fon armée, à laquelle je
me dois tro u v e r , après avoir reçu le commandement
de fa, majefté.
Et quand l’arrière-ban eft publié , & que ceux
des provinces qui les conduifent arrivent à la
cornette blanche» les maréchaux des logis ne leur
doivent point donner de logis qu’ils ne leur portent
atteftation de m o i, du jour de leur a r r iv é e , afin !
qu’ayant fervi leurs trois mois, ils puiffent fe retirer
chez e u x , a v ec des certificats que je leur
donne de leurs fervices rendus, fur lefquels ils
en obtiennent de M. le fecrétaire d’é ta t , qui a la
charge de la gu e rre, pour leur fervir en ce qu’ils
en auront b e lo in , pour n’êcre point inquiétés par
les juges des provinces.
C e la doit faire juger au roi 8c à M M . de fon
co n fe il, que s’il y avoit quelqu’un qui eût commandement
fur m o i, ce feroit à lui à donner ces
certificats & non à m o i, dont mes prédéçeffeurs
font en poffeffion de temps immémorial.
Q u i me fait très humblement (upplier fa majefté
d’appuyer mes raifons, 8c me permettre que cette
charge qui a jufqu’ici tant apporté de luftre 8c
d’honneur à ceux de mon n om , n’y puiffe être
altérée ni amoindrie, mais demeurant dans les
prérogatives & fondions ordinaires , je les puiffe
imiter en l’afteâion & fidélité qu’ils ont de tout
temps rendue aux rois fes prédéçeffeurs. E t afin
que les cho'fes ne foient point mifes en contef-
ta tion , il lui plaife commander à M . de la Ville -
aux-Clercs m’en expédier un règlement. ».
V o ic i ce qu’on en peut recueillir touchant les
prérogatives 8c les fondions militaires du cornette
blanche, quand cette charge étoit en exercice dans
les armées.
i ° . Q u e la cornette blanche étoit dans le corps
où le roi combattoit; que ce corps étoit com-
pofé de princes, de maréchaux de France, d’officiers
de la couronne, de vieu x capitaines, de
gendarmes qui n’avoient point leurs compagnie*
dans l'armée ; 8c cela s’accorde parfaitement avec
les extraits que j’ai faits ci-deffus de d’A u b ig n é ,
de du T i l le t , de M ontgomme ri-Cp rb efon , de
la Popeliniere & de Comines.
2°. Q u e la cornette blanche du roi ne fe dé-
p lo yo it point dans une armée » quand il n’y étoit
pas en perfon n e; qu’alors le cornette blanche y
ie rvo it comme particulier 8c fans faire les fonctions
de fa charge ; que le général de l’arm é e ,
en ce c a s , donnoit fa propre cornette b lan ch e,
& qui n’étoit pas celle du r o i , à qui il jugeoit à
prop o s; ce qui n’empêchoit pas que quantité de
feigneurs 8c gentilshommes volontaires ne fe rang
e a ien t fous la cornette b lanche du général, comme
ils faifoient fous celle du roi. E t ce fait eft prouvé
par l ’extrait que j’ai fait de l’hiftoice de d’Au b igné ,
où i l eft parlé de la bataille de Cou tra s, en laquelle
le duc de Joyeu fe commandoit l’armée
r o y a le , 8c avoit fa cornette b lan che, fous laquelle
étoit une infinité de nobleffe.
3°. Q u e nul autre que le roi ne commandoit
le corps de la cornette b lan che, & que quand
il s’en détachoit pour aller en quelque autre endroit
de l’armé e, i l commettoit dans cet interv
alle un officier pour donner les ordres de fa p a rt ,
8c que cet officier étoit ordinairement fon écu y e r.
4° . Q u e durant un campement, fi le roi vou -
loit faire quelque détachement du corps de la
cornette b lanche, il commettoit un officier con-
fidérable & eftimé qui venoit au corps de la cornette
blanche, non pas porter commandement de
faire le détachement fous fes o rdre s, mais prier
de la part du roi qu’on l’agréât, lui offic ier, pour
le commander.
5°. Q u e le quartier de la troupe qui comp o-
foit la cornette b lan che, étoit toujours le pluô
proche de celui du roi.
6°. Q u e le porte-cornette blanche ne logeoit
pas dans ce quartier, mais dans celui du roi &
proche du logis du r o i , & que la cornette blanche
étoit toujours placée dans la ruelle du lit du roi
à l’armée : mais que quand l’armée étoit licen -
t ié e , le porte-cornette blanche avoit le droit &
la permiilion de l’emporter chez lui. C e la slentend
du temps que la guerre duroit : car par un autre
mémoire que j’ai tiré du même endroit que celui-ci
m’eft y e n u , il eft dit que la cornette blanche doit
être ferrée dans les coffres de la garde-robe.
7 ° . Q u e c’étoit principalement à la cornette
blanche, que fe de voit faire le ralliement , foit
durant la b ata ille , foit après une dé route, foit
après la v i& o ir e , foit pour la retraite, foit pour
recommencer le combat.
8°. Q u e le porte-cornette blanche d e vo it demeurer
dans le champ de bataille, mort ou v i f ,
foit que la bataille fût perdue., foit qu’elle fût
gagnée ; parce | que c’étoit à cette cornette que
l’on a vo it recours pour ayoïr des nouvelles du