de l’extraordinaire des guerres de 1564, à quatre-
vingt-trois hommes de guerre à pied, touts François,
faifant partie de cinq cents hommes de guerre ordonnés
pour la fuite & garde du ro i, fous la charge
& conduite du fieur Strozzi leur capitaine. Ainfi
le régiment des Gardes ne fut qu’un détachement
du régiment de Charri, qui , félon Montluc &
Brantôme , étoit de trois mille hommes. Le régiment
des Gardes ayant été caffé par Charles IX ,
Henri III le rétablit, comme j’ai déjà dit. Il fut
dans fon rétabliffement de douze compagnies , &
il étoit encore fur ce pied à la mort de ce prince.
Au plus tard , après la paix de Vervins, il fut
fixé à vingt compagnies, comme on le voit par
le rôle de 1600 ; mais il ne demeura pas longtemps
fur ce pied - là. Dès - lors Henri IV avoit
envie de fe délivrer de la dépenfe d’une partie
de ce régiment. Ainfi Buffet & Sabrin , deux capitaines
aux Gardes, étant morts, le premier à
la fin de l’an 1600, & le fécond en 1601 , leurs
çompagnies furent licenciées,& le régiment réduit.
à dix-huit compagnies. On le voit même par le
compte de l’extraordinaire des guerres de 1604,
réduit à dix-fept.
11 paroît que cela fut ménagé de la forte dans
la vue qu’on» avoit de ramener peu à peu le régiment
au nombre de douze compagnies , comme
il avoit été dans fon rétabliffement par Henri III
& cela à mefure que les compagnies vaqueroient,
pour ne mécontenter perfonne.
Depuis l’an 1604, le régiment demeura à dix-
fept compagnies jufqu’à l’an 1606, que Henri IV
ciéa la compagnie de Maufan , ordonnée pour la .
garde de monleigneur le dauphin. Ainfi il y eut
dix-huit compagnies jufqu’à 1612 , que Louis
XIII remit le régiment à vingt par la création de
diux compagnies.
Le nombre des compagnies ne diminua ni n’augmenta
jufqu’à l’an 1635 , que le même prince y
ajouta dix compagnies. C ’eft ce qui fe voit parles
états , & ce que Dupleix, hiftorien contemporain
, témoigne en ces termes’ : le ro i, dit - i l ,
confidérant que de régiment de fés Gardes, com-
pofé pour la plupart de jeune nobleffe & de Vieux
foldats, eft, le corps le mieux difcipliné & le plus
fort de fon infanterie , en forte qu’il peut être
comparé aux bandes Prétoriennes des anciens empereurs
Romains , &. aux Janiffaires des Turcs,
l ’augmenta de dix compagnies cette année : fi
bien qu’avec les vingt anciennes , il eft à préfent
de trente.
Il demeura depuis ce temps-là fixé à ce nombre
de compagnies , jufques à ce que l’an 1689,
Louis le Grand y ajouta deux compagnies de
grenadiers ; & c’eft l’état ou il eft aujourd’hui.
Il y a eu des changements non-feulement pour
le nombre des compagnies , mais encore pour le
nombre des foldats qui les compofoient. Voici les
principaux. En 1600,fous HenriIV,félon les états,
chaque compagnie étoit de quatre-vingt hommes ; &
il paroît que ce nombre étoit regardé comme l’état,
naturel des compagnies, parce que certàines raifons
ayant obligé diverfes fois à y fairê des augmentations
j on les reduifoit enfuite par les réformes au
nombre de quatre-vingt ; au moins cela fe fit-il deux
fois de fuite fous Henri IV.
x Ce prince, a la fin de l’année 1600, fe préparant
a la guerre avec le duc de Savoie, les compagnies
du régiment des Gardes furent mifes chacune à trois
cents hommes : mais après l’accommodement, elles
furent réduites à quatre-vingt.
En 1606 , le même roi ayant armé pour les
affaires de Sedan , & pour réduire le duc de
Bouillon , les çompagnies furent mifes à cent
vingt hommes, & après la foumillîon du duc de
Bouillon, elles furent encore remifes à quatre»
vingt : elles continuèrent fur ce pied jufqu’en
1610.
Il s’y fit cette année-là une augmentation de
quarante hommes par compagnie , & elles furent
de cent vingt *, ce fut au fujet de l’armement que
faifoit Henri I V , lorfque la France perdit ce grand
prince.
Je crois que ce nombre fut confervé jufqu*a
l’année 1615 , qui fut celle du mariage de
Louis XIII , les compagnies furent mifes alors à'
deux cents hommes. On les augmenta l’an 1629
jufqu’à trois cents pour la guerre de Piémont, où
elles fuivirent le roi qui força eft perfonne le pas
de Suze. Après cette expédition & le retour du
roi on les réduifit à deux cents , on les trouve à
trois cents en 1632. Il y eut encore du change-
. ment & une réforme : & puis on les remit à trois
cents l’an 16 35, coranie le remarque l’hiftorien
Dupleix, à l’endroit que j’ai déjà cité. Ce fut à
l’occafion de la guerre que l’on envoya déclarer
au cardinal Infant à Bruxelles, fur le refus qu’il
fit de mettre en liberté l’éle&eur de Trêv es , qui
avoit été furpris par les Efpagnols dans fa capitale.
Par cette augmentation le régiment fe trou-
voit de neuf mille nommes.
En 1659 , au voyage de Louis X IV pour
fon mariage, on mitlur pied huit pertuifanniers,
auxquels on donna des juftaucorps de la livrée du
r o i , & qui faifoient deux rangs à la tête de chaque
compagnie. Depuis ils furent réduits à quatre, &
enfin entièrement abolis. Aujourd’hui chaque compagnie
eft de cent vingt-fix foldats, excepté les
compagnies de grenadiers qui font à cent dix.
Outre les foldats qui font le gros du régiment
des Gardes , il y a eu longtemps des cadets. On
appelloit cadets de jeunes gens qui fe mettoient
volontaires dans les troupes fans recevoir de paye ,
ni être mis fur les rôles , & à qui on ne pouvoit
refuler le congé. Ils fervoient feulement pour apprendre
le métier de la guerre, & fe rendre capables
d’y avoir de l’emploi.
Il y eut des cadets aux Gardes dès le temps
de l’inftitution du régiment fous Charles IX : c’eft
ce que nous apprend Brantôme, en faifant l’éloge
3a régifflêfit des Gardes. 11 n’y »voit guère, dit-il,
de foldats qui ne méritâffent d’etre capitaines, jusqu’aux
jeunes cadets, qui euffeftt combattu jufqu au
dernier foupir , comme les dix» mille Grecs que
Souhaita un jour Marc-Antoine. ,
Il y ën eut aufli un grand nombre fous Henri
I I I /fous Henri I V , fous Louis X I I I , & au
commencement du règne du feu roi : mais ce même
prince, par fon*ordonnance de 1670 , ordonna
que déformais oh ne recevroit que deux cadets
au plus dans chaque compagnie d’infanterie, &
encore à condition qu’ils n’auroient pas plus de
dix-huit ans. Dans la fuite le roi déclara qu’ils ne
feroient plus comptés dans les revues : il y a
longtemps qu’il n’y en a plus dans les régiments
François. Depuis on mit des cadets aux gardes,
du corps, & il y en a eu pendant quelques années.
D ’autres établiffements que le roi fit durant fon
règne, tels que la fécondé compagnie des mouf-
taires , celles des jeunes gentilshommes qu’on
élevoit dans plufieurs places des frontières, celles
des gardes - marines , furent de nouvelles écoles
militaires pour la jeune nobleffe , comme le régiment
des Gardes l’étoit autrefois : depuis la
régence on a remis des cadets dans ce régiment.
Privilèges du régiment des Gardes-Françoifes.
Comme le régim.ent des Gardes - Françoifes
en qualité de Gardes de la perfonne du prince ,
eft le plus confidérable régiment du royaume, il
a le rang devant touts les autres : je regarde
comme fauffe une tradition dont on m’a parlé :
fçavoir, que le régiment de Picardie lui difputa
d’abord la préféanee, & qu’en ce temps-là le roi, c’eft-
à-dire, ou Charles IX ou Henri I I I , pour ter-
>miner la querelle , avoit caffé pour un jour le
régiment de Picardie , afin de lui ôter l’ancienneté,
& la donner au régiment des Gardes. Cet
expédient auroit été fort inutile : car , il auroit
fallu caffer pour la même raifon Champagne ,
Navarre & Piémont, qui certainement font plus
anciens que le régiment des Gardes, comme je
le prouverai dans la fuite. De plus, fi par cette
prétendue caffation, Picardie avoit perdu fon ancienneté
, les trois régiments que je viens de
nommer , auroient, fuivant ce principe, pris le
rang avant Picardie ; ce qui ne s’eft pas fait. Cette
tradition me paroît donc aufli chimérique, qu’une
autre toute femblable au fujet de la préféanee des
gardes du corps à l’égard des gendarmes de la
garde dont j’ai parlé ci - deflus ; le régiment des
Gardes eut donc la préféanee fur touts les régiments
en qualité de régiment deftiné à la garde
du fouverain.
Il a non - feulement la garde du prince , mais
encore il eft de la maifon du roi ; & je vois
qu’on lui attribue cet honneur dans touts les états
de la France qui ont été publiés, où l’on diftingue
les troupes de la maifon du r o i , en cavalerie &
en infanterie ; ce font le régiment des Gardes*
Françoifes , la compagnie des Cent-Suiffes , & le
régiment des Gardes-Suiffes qui compofent cette
infanterie. Lorfque ce régiment eft à l'armée, il
choifit fon pofte, & c’eft ordinairement au centre
de l’infanterie à la première ligne. Le centre
étoit autrefois le pofte d’honneur dans les armées
Romaines; & les légions y étoient toujours dans
la première , la féconde & la troifième lignes, dont
les troupes auxiliaires faifoient les flancs. Les
Gardes-Françoifes choififfent aufli les logements
dans les garnifons, ôc dans les fièges ils le prennent
à la tête des fapes.
Le régiment a fes quartiers danQVa capitale du
royaume , & les compagnies en font partagées
dans les divers fauxbourgs.
Quand on monte la garde aux avenues du
louvre, les Gardes-Françoifes ont toujours la droite
fur les Gardes - Suiffes, & la fentinelle françoife
fur là fentinelle fûiffe : & quand le roi fort ou
rentre , les foldats des deux régiments fe rangeant
en haie , les François font toujours à la droite du
château en fortant, &. les Suiffes à la gauche.
A l’armée, quand il eft queftion de quelque détachement
du régiment des Gardes , ce détachement
fe fait des feules troupes des Gardes-Françoifes
& des Gardes - Suiffes ; on ne mêle point
avec eux de foldats détachés des autres régiments,
ôc ils ont la tête de tout ; ce qui ne s’obferve
qu’à l’égard de ces deux régiments dans l’infanterie.
Le roi en 1669, conferva par fon code le droit
de committimus aux capitaines , lieutenants , fous-
lieutenants , enfeignes, & autres officiers de l’état-
major du régiment des Gardes. Cette affaire fut
follicitée avec foin , & n’étoit pas fans difficulté
par la rigueur avec laquelle on trayailloit alors
à la reformation de la juftice. On produifit des
lettres patentes de Henri IV fur ce fujet , en
date du mois d’août 1^05 , enregiftrées au parlement
en juillet 1606 ; le parlement ne vérifia alors
les lettres qu’en faveur des capitaines , lieutenants,
-çnfeignes & fergents - majors, & non d’autres :
mais fur une juflion expreffe, donnée en juin 1607,
d’étendre la vérification jufques aux fergents &
maréchaux-des-logis inclufivement, & après divers
délais , le tout fut pleinement exécuté en mars
1609. Aujourd’hui le commiffaire & le maréchal-
des-logis ont droit de committimus , mais les fergents
ne l’ont pas. s
Un fergent aux Gardes n’eft relevé de fon pofte
que par un officier , lorfque c’eft un détachement
d’un autre régiment qui relève. Outre ce que j’ai
déjà dit de quelques autres diftinéfions des fergents
aux Gardes-Françoifes , il y en à encore deux qui
font venues depuis peu à ma connoiffance , & qui
ne doivent pas être omifes.
La première , que fi un fergent commet quelque
faute , les autres fergents du corps tiennent en-
tr’euxun confeil de guerre où préfide le plus ancien,
fans que les hauts-officiers y foient admis. Ce fut
T t t ij