
revenus d%ff faim la recette fans rigueur & même
avec pqliteffe.
T acitep arlant-d e Tibère , forfqu’il confervoit
encore une fage conduite, dit qu’il ne permettoit
pas qu’on exigeât les impôts avec avarice ou avec
. v i o l e n c e « .
Ce .qui .porta principalement la Bohème' a le
foulev.er .contre Frédéric qui gpuvernoit pendant
fon neuvième interrègne , fut la durete &, la' rigueur
avec leiquelles certains Allemands,-minilires
de ce prince , tiroient des peuples de Bohème une
petite contribution, qu’il leur avoit impofee.
Il y a des receveurs qui volent plus pour eux
qu’ils n’exigent pour le fouverain , ou qui prolongent
le recouvrement pour en tirer du falaire,
ou. qui prennent des intérêtS'pour ua peu de temps
d’attente. De tels« hommes font dignes, de châtiments
'T ils doivent tout du moins fouffrir la peine
du tallibn, & payer, par la perte de leurs propres
biens, ce qu’ils ont pris injuftement. C eft ainfi
que le dit Jufte'Lipfe, tur l’autorité de Pline.
Le temps propre pourTe recouvrement de ces
contributions eft quelques jours apres les principales
récoltes, que les paylans auront pu fans
perte vendre une partie des fruits qu ils auront
recueillis.,, pajrce que , Te trouvant alors avec de.
Fargent, ils payeront,- fans attendre quun foldat
à.difcrétion vienne lès incommoder &. leur faire
de la dépenfe dans leurs maifons.
D c i levées dans- le pays conquis. Du changement
des garnirons.
En traitant des révoltes , je prouve que le plus
grand nombre des fujets fait le plus grand tréfor
6L la'plus grande gloire des princes, & que quelque
affurance que vous puiffiez avoir de laffeélion des
peuples du pays conquis , vous ferez toujours
obligé de mettre garniion dans leurs places, &
d’avoir fur leurs frontières des régiments d’une
fidélité reconnue : par conféquent, fi vous n’en
tirez pas un même nombre de troupes, pour les
faire paffer dans les anciennes provinces de votre
fouverain , ces provinces , iur lefquelles vous
devez compter plus que fur les autres, fe dépeupleront
ÿ comme il arrivoit en Elpagne , par. les
garnifons qu’il falloit envoyer en Italie & en
Flandres , tandis qu’il ne venoit jamais de ces
pays à notre prefqu’ilé un nombre de troupes égal
à celui des régiments Efpagncjls qui y-paffoir.
C ’eft pour cela que les Romains avoient-dans
leurs armées autant de troupes auxiliaires d etrangers,
que de foldats de Taneien pays de Rome
H^ans leurs légions. ' . .
Donnez gratuitement les brevets de caprtaine ,
de colonel, & de lieutenant-colonel des premiers
régiments que vous lèverez dans une province
conquife , aux jeunes gens de famille les plus
diftingués , afin de k s attacher par-là , eux & leurs
parents, à votre parti. Il fuffira, par la bonne dif*
eipjine de ces corps, qu’il y air d’anciens officiers,
un major, un aide - major & un- fiibalterne
par compagnie r fur- tout fi l’on permet; de tirer descaporaux
des- vieux corps pour en1 faire des- fer—
gents , ainfi que je l’ai propofé dans' un autre endroit.
On pourra donner la moitié des lieutenances»
à,la nobleffe inférieure, à la première en Qualité,,
en luftre & en biens ; & la moitié des fous-
lieutenances, aux fils des bourgeois les plus honorables
, &. autres honnêtes 'perfonnes : cette’
dernière claffe de gens a ordinairement plus de?
pouvoir fur le peuple que les deux premières *
qui ne font jamais ii nombreufes.
Tout cela fut obfervé parfaitement dans u»
régiment d’infanterie que les Efpagnols levèrent
en Sardaigne en iy iRS’i
i y a des officiers de naiffànce & de mérite
de ce pays conquis qui fe trouve déjà dans le»
troupes, il n’y a pas de: doute qu’il ne faille les
avancer dans ces régiments de nouvelle création y.
comme cela fe pratiqua dans ce régiment de Sardaigne
dont je viens de parler, en ayant fait,
colonel don Jofeph Maffones de Linea , Sarde de
nation ,, homme de la première diftinûion &. d’un
rare mérite r & qui' étoit capitaine dans le. régiment
de Toro.
Je comprends dans les emplois à donner dans,
ces nouveaux régiments les jeunes gens débauchés»
&. fainéants, ceux d’un g,énie entreprenant & hardi,
les amateurs des nouveautés &. des chimères r
ceux qui afpirent avec ardeur au maniement des
affaires, ceux qui. font affez riches pour pouvoir
fe faire un- gros parti'à force d’argent, ou fi
pauvres qu’il l’oit aifé de les- fuborner pour leur
faire embraffer le parti d’ùn autre prince ; énfira
ceux qui ont affez d’habileté & de diflimulation»
pour conduire à propos &. avec fecret une négociation
contre votre fouverain. Je prouverai, dans
mon Traité des révoltes , que de tels hommes, transplantés
dans les anciennes provinces de votre
prince, y font, utiles pour garder ces provinces, &
ièrvent en même temps d’otages pour la tranquillité
de leur pays.
Polybe , parlant d’Anrtibaî » dit qu’il tira des
Metagonites trois mille hommes d’infanterie, qu’il
envoya- à Carthage pour fervir en même temps
d’otages & de fecours.
Il faut aufia tâcher de faire entrer dans ces
régiments les fils de certaines maiions peu affectionnés
à votre prince, & qui ont beaucoup de
crédit dans le pays. ; car fi vous les demandez an
nom de votre prince à leurs pères., ils n’oferont
les refufer, pour ne pas faire paroitre leur aver-
fion ; & fi les pères ont paffé dans, les états du
fouverain ennemi, on n’aura pas beaucoup de
peine de déterminer les fils à accepter un emploi
qui ne leur coûte rièn , dans une profefïion
qui plait à touts les jeunes gens. S’ils y font
une fois engagés, ils Soutiendront dans la fuite»
par habitude U par honneur, les intérêts du prince
qu’ils fervent, comme nous l’avons vu à l’égard
de plufieurs officiers des troupes du roi catholique
qui ont leurs pères parmi les Allemands ; car dès
que les fils viennent à hériter, on voit dès-lors
qu’on rompt dans ces familles toutes fortes d’engagements
que les pères avoient contra&és avec les
Autrichiens.
Nonobftant ce que je viens dé dire, je ne you-
arois pas donner des brevets en blanc, pour la
levée de ces nouveaux corps, à des perfonnes en
qui je n aurois pas une pleine confiance,parce qu’ils
pourroient les compofer entièrement d’hommes
attaches au parti ennemi , & entreprendre par
leur, moyen un coup de furprife. Ainfi, ne vous
laiffez pas aveugler par les propofitions avanta-
geufes qu on pourroit vous faire pour la levée de
ces corps, ou du moins, que les conditions foient
que chaque compagnie ne fera admife à la payé
que lorfqu’elle fe fera rendue dans une telle place,
°u je fuppofe que les vieilles troupes qui y font en
garnifon fe trouveront toujours fupérieures à celles
de ce nouveau corps qui y entrera. Dès que les
recrues de ces nouveaux régiments formeront le
nombre de quatre ou de fix compagnies, faites-
; marcher pour aller en garnifon dans une province
des anciens états de votre.prince, éloignés
de la frontière du pays conquis. Si le but de ceux
v j u l font la levée de ces corps n’eft pas b on,
*1Sninj 6ront ^ demander que tout le régiment
relte dans le pays fans fe féparer , jufqu’à ce qu’il
ioit entièrement formé & complet, & pour au-
tonfer leurs prétentions , ils fe ferviront du fpé-
cieux prétexte, que de cette manière les recrues
feront plutôt faites & plus promptement difci-
plinees.
jeune Cyrus , ayant defTein de faire un fou-
ïevement contre Artaxerce fon frère, leva une
quantité de troupes , fous prétexte de vouloir
taire la guerre à Tifapherne, qui ne payoit pas
un tribut qu’il devoit à Artaxerce.
Les habifant5 de Sienne qui avoient dans leur
ville lix cents Efpagnols de garnifon , firent fem-
tdant damier contre Dragut, qui, avec Les Turcs,
tavageoit les. côtes d’Italie , & ils chafsèrent les
Llpagnols , parce que François d’Alba , qui en
croit le commandant, avoit permis auxSiennois
de taire, des levées confidérables.
i après la lçvée. de ces régiments, le pays
ont ils lont.fortis fe révolte, vous devez tenir
ces corps proche ou loin de ce pays, félon que
vous etes plus ou moins alluré de la fidélité des
officiers ; & faifant toujours paroitre extérieurement
que vous avez de la confiance en eux, prenez
toutes les précautions néceffaires dont j’ai dit qu’il
:taut uier, lorfqu’on a quelque foupçon fur la fidé-
iite de certains corps.
En examinant, dans un autre endroit de cet
ouvrage , fi par ces levées on peut plus aifément
çmpecher un foulèvement dans le pays conquis,
je me luis fait à moi-même ce dilème : û les
militaire, Tome 11,
hommes qui forment ces nouveaux régiments font
affectionnes a votre prince, ceux qui lui font op-
pofes reftent dans le pays , & fe trouvent par-là
en état d,agir avec plus de liberté. S i, au contraire,
ces derniers compofent ce nouveau corps, vous
ne pourrez pas vous fier beaucoup à eux : donc
il n’eff pas avantageux de faire ces levées de
troupes dans le pays conquis.
Je réponds, qu’en faifant abftraétion de l'inclination
pour l’un ou l’autre prince, ceux qui prendront
parti volontairement feront toujours les plus
débauchés & d un génie fougueux, & s’ils font
une fois hors de leur pay s , de gré ou de force,
ils feront comme les autres ; femblables à un
rétif, qui ne laiffe pas d’aider à tirer quand
il elt attelé avec d’autres qui ne le font pas. A
1 egard du fimple foldat , il s’embarrafle peu
d entrer dans les partis des fouverains , & fans
examiner rien davantage, il fuit les étendards de
celui qui a commencé à lui donner le pain &
le prêt.
Je viens de prouver que les troupes du pays
conquis , qui paflent dans les anciens états de
votre prince, lui fervent d’otages fecrets ; j ’ajoute
quen faifant paffer réciproquement vos vieilles
& vos nouvelles troupes d’un pays à l’autre , elles
fe rendront meilleures , parce que l’éloignement
leur otant la commodité de déferter, & le lou-
venir continuel de la patrie , elles ne penferont
qu’à faire leur devoir dans la profeffion militaire.
Ge fut la , félon Tite-Live , le fentiment d’Anni»
b al, qui croyoit, « que l’Africain devoit être tranfi
planté en Efpagne, & l’Efpagnol en Afrique, pour
en faire de bons foîdats ».
Les deux nations, par cet échange mutuel, s’apprennent
a entendre leurs langues, & fe conforment
aux memes coutumes 3 fans quoi il ne fçau*
roit y avoir une parfaite correfpondance. C ’eft ce
que j’ai déjà fait voir par plufieurs raifons & par
divers exemple5. Polybe, parlant de cet échange
d Efpagnols & d’Africains que fit Annibal, dit i
« que par un fage & prudent confeil, il fit paffer
les troupesEfpagnoles en Afrique, & les Africaines
en Efpagne, pour unir ces deux peuples par des
gages mutuels ».
Par cet échange mutuel de troupes & par les
amitiés qui naiffent du fréquent commerce dans
les deux p ay s , il eft plus aifé d’unir les dëujç
nations par les liens du mariage, ou il feroit à
propos d’engager les familles les plus diftinguées,
de l’un & de l’autre pays, à contraâer des alliances
enfemble. Pour cela le prince devroit
donner quelque forte de récompenfe à ceux qui
les premiers montrent l’exemple afin de porter
les autres à les imiter.
Un des premiers foins de Mérovée, pour s’affermir
dans la Gaule, qu’il venoit de conquérir,
fut de gagner l’affe&ion des peuples qu’il avoit
fournis, & de les unir par des mariages aux familles
des Francs, Par-là, félon l ’expreflion de Forefti,