
Le roi Henri IV avoit donc cette compagnie de
gendarmes d’ordonnance , mais qui n’étoit pas de
ta garde , comme il avoit une compagnie de chevaux
légers . dont il étoit anffi capitaine , mais
qu’il eut longtemps fans qu’elle fût non plus de
la garde, ainfi que je le dirai dans l’hîftoire des
chevaux-légers de la garde.
Il faut donc bien diitinguer les compagnies des
gendarmes & des chevaux-légers de nos rois , dont
ils étoient capitaines , & leurs compagnies de
gendarmes 8c de chevaux - légers , quand ils en
eurent.
Cette compagnie de monfeigneur le dauphin,
commandée par M. de Souvré , laquelle fut depuis
la compagnie des gendarmes de la garde d’aujourd’hui
, ne tarda guères à l’ê tre, quand le dauphin
fut monté fur le trône.
Elle ne l’étoit point encore en 1610 , & je
rapporterai à cette occafion un autre aéie tiré de
la chambre des comptes, qui donnera lieu à
quelques réflexions importantes fur ce lujet. C ’eft
une ordonnance par laquelle Louis dauphin , devenu
roi , fous le nom de Louis X I I I , attribua
vant payer & délivrer comptant audit fleur de
Saint-Géran, à commencer du i er. janvier dernier,
jufqu’à la fomme de 820 livres tournois pour
chacun quartier, revenant à la fomme de 3280 liv.
par an, que nous lui avons,pour les confldérations
fufdites, ordonné 8c ordonnons par ces préfentes
lignées de notre main , pour ledit état & appoin-
tement de capitaine en chef de la compagnie de
nofdites ordonnances , 8c place d’hommes d’armes
y jointe, en ce compris aufli celui de lous-üeu-
| tenant, dont il jouit de préfent, montant à 345 liv.
par quartier, que nous voulons, ce faifant, être
éteint & lupprimé' , comme nous l’éteignons 8c
fupprimons par lefdites préfentes, 8c rapportant
avec la copie collationnée,, 8cc. Donné à Fontainebleau
à M. de Saint-Géran les appointements de capitaine
en chef de la compagnie des gendarmes.
Louis, 8cc. falut. Encore que les rois nos pré-
déceffeurs ayent accoutumé , à leur avènement
à la couronne, de quitter le titre de capitaine des
compagnies d’ordonnance dont ils étoient pourvus )
avant leurdit avènement, & de remettre la principale
partie d’icelle au lieutenant, & l’autre au
fous-lieutenant, pour en avoir , chacun d’eux, une
particulière en titre de capitaine en chef, 8c jouir
des honneurs, dignités* états 8t appointements y appartenants
; nous avons néanmoins , de particulière
iuclination , comme de plufieurs bonnes confidera-
tions importantes au bien de notre fervice, defiré
conferver entière ,' fous notre nom Sc titre de capitaine
, celle de „deux cents hommes d’armes de
nos ordonnances, dont il a plu au feu roi y de
glorieufe mémoire, notre très honoré fleur & père,
que Dieu abfolve, nous faire cônftituer chef, étant
encore dauphin de Viennois ; au moyen de quoi,
attendant qu’il fe préfente autre occaflon de re-
connoître les fervices de notre très cher 8c bien
amé le fleur de Saint-Géran, fous-lieutenant de
ladite compagnie, félon l’eftime que nous faifons
de fa perfonne & de fon mérite , nous avons ,
par l’avis de la reine régente, notre très honorée
dame & mère , jugé le devoir gratifier de l’appoin-
tement de capitaine en chef de la Compagnie de
nos ordonnances , comme fi la nôtre étoit féparée, I
8c lui pourvoir de partie d’icelle, principalement j
pour lui donner moyen de foutenir la dépenfe J
extraordinaire à laquelle l’oblige la réfidence qu’il i
fait de préfent près de nous avec partie de notre
compagnie. A ces caufes, nous voulons 8c vous
mandons que , par les tréforiers-généraux de nos
guerres , préfents & à venir, & chacun d’eux en I
l ’année de fon exercice vous ayez à faire doréna- |
, le 29 avril 1611 , 8c de ,notre règne le
premier. Signé, LOUIS ; & plus bas , par le roi ;
la reine régente, la mère, préfente. Signé, de
N è u f v i l l e . Regiftrées en la chambre des
comptes. Oui le procureur-général du r o i, pour
jouir , par l’impétrant, de l’effet 8c contenu en
icelles , tant qu’il fera fous-lieutenant de ladite-
compagnie, 8c fans tirer à conféquence pour autre.
Le 19 juillet 1611. Signé, B ivelons.
Sur cet aéle, on peut faire les réflexions fui-
vantes :
i° . Que les rois, prédéceffeurs de Louis X I I I ,
avoient coutume de quitter le titre de capitaine
dés compagnies d’ordonnance, à la tête defquelles
ils étoient, à leur avènement à la couronne, &
que ce prince dérogea à cette coutume en faveur
de fa compagnie de gendarmes ; d’où il s’enfuit que
les compagnies des gendarmes 8c des chevaux-légers,
dont Henri IV étoit capitaine durant fon règne,
n’étoient pas celles qu’il avoit en qualité de prince
du fang 8c de roi de Navarre, avant que de monter
fur le trône de France.
2°. Nous apprenons encore par cet a&e que
la compagnie d’ordonnance , dont le prince étoit
capitaine avant que d’être ro i, fe partageoit en
deux, quand il la quittoit ; que le lieutenant en
avoit une partie, 8c le fous-lieutenant une autre,
8c qu’il s’en faifoit deux compagnies d’ordonnance,
dont la première avoit pour capitaine le lieutenant,
8c la fécondé le fous-lieutenant ; ce qui étoit d’autant
plus aifé à faire, que les princes du fang avoient
pour l’ordinaire des compagnies de deux cents
hommes, 8c qu’il en reftoit cent à chacun des deux
officiers : o r , alors les compagnies de cent hommes
d’armes où des chevaux-légers, étoient communément
de cinquante hommes 8c au-deffous.
30. Q u e , dès cette année 1611, au mois de
juillet, là compagnie des gendarmes commença à
faire les fondions 8c le fervice de garder la perfonne
du roi , puifque le prince ne fe la confervoit
que pour ce deffein.
En effet, M . de Souvré , commandant de cette
compagnie , qui n’avoit jufques alors porté que
le titre de lieutenant, prit vers ce temps-là le
titre de capitaine-lieutenant, comme on le voit
par les proviflons de cette charge pour M. de Saint-
Géran , que j’ai rapportées ci-deflus, 8c de laquelle
il fut pourvu par la démiffion de M. de Souvré,
en 1615, lorfque ce feigneur fut fait maréchal
de France. Ce fut donc peu de temps après l’avé-
n s ment du roi Louis XIII a la couronne de F rance,
que la compagnie des gendarmes , qui avoit été
créée par Henri IV, en qualité de compagnie d’ordonnance
, pour le dauphin, fut érigée en compagnie
de la garde du ro i, 8c que ce prince s’en
fit capitaine.
Il me paroît que tout ce que je viens de dire
fur ce fujet, eft folidement établi 8c prouvé par
des pièces dont l’autorité ne peut être conteftée.
II femble qu’en qualité de compagnie de gendarmes
, celle-ci doit avoir la première place dans
les troupes de la maifon du roi, puifque, de tout
temps, en France 8c chez toutes les nations de
l’Europe , ,1a gendarmerie a paffé deyant la cavalerie
légère, qui eft l’efpèce de milice à laquelle
les gardes-du-corps appartenoient dans le temps
de leur inftitution , en vertu de leur armure 8c de
leur qualité d’archers. En effet, quoique la compagnie
des chevaux-légers foit plus ancienne, 8c
fe trouve comprife dans les états de la maifon 8c
de la garde du roi quelques années avant la compagnie
des gendarmes, celle-ci a paffé devant en
qualité de compagnie d’hommes d’armes. Suivant
cet ùfage, les gendarmes de la garde tenoient le
premier rang, & avoient le pas fur les gardes-du-
corps fous lè règne de Louis X I I I , 8c pendant les
premières années du règne de Louis X IV : mais
ce prince ayant pris la réfolution d’augmenter les
compagnies de fes gardes , qui n’étoient alors que
de cent maîtres chaciiiîe, 8c d’en faire un corps
de troupes réglées , leur donna en même-temps
le rang qu’elles tiennent aujourd’h ui, 8ç voici
comment cela fe fit :
Sa majefté étant à Vincennes , fit une revue
des troupes de fa maifon, où les gendarmes, qui
avoient toujours eu la droite fur les gardes-du-
corps , eurent ordre de palier à la gauche. La
volonté du roi 8c la grande ancienneté des quatre
compagnies de la maifon du roi, furent alors 8c ont
été depuis leur titre de préféance.
Maifon de la Salle, alors fous-lieutenant des
gendarmes de la garde, étant homme de courage
8c d’un mérite diftingué, eût fouffert avec peine
de palier après les lieutenants des gardes-du-corps,
qu’il avoit jufques-là précédés : il avoit des lettres
patentes pour jouir des appointements de capitaine
en chef de la compagnie, de même que touts fes
prédéceffeurs dans l’emploi de fous-lieutenant.
Le roi voulut bien avoir égard à cette circonfl-
tance 8c aux repréfentations de M. de la Salle.
Il fut donc réglé en fa faveur, 8c en faveur de
touts ceux qui lui fuccéderoient dans l’emploi de
fous-lieutenant, qu’en vertu des lettres patentes
fufdites ou femblables, ils porteroient le titre de
capitaine-fous-lieutenant, 8c qu’e$ cette qualité, ils J
an'•oient la préféance 8c le commandement, dans
le fervice de la maifon du ro i, fur les lieutenants
des gardes-du-corps ; chofe qui leur eft particulière ;
8c c’eft un privilège que n’ont pas les fous-lieu-
tenants des chevaux-légers de la garde, ni ceux
des moufquetaires , car, dans les détachements qui
fe font à l’armée, c’e ft , le premier jour, le premier-
fous-lieutenant des gendarmes ; le fécond fous-lieü-
tenant, le fécond jour ; enfuite les lieutenants des
gardes-du-corps, félon le rang des compagnies.
Le commandement vient après aux fous-lieutenants
des chevaux-légers, puis a ceux des moufquetaires ,
8c le tour recommence par les fous-lieutenants des
gendarmes
Autrefois les quatre officiers fupérieurs de la
compagnie des gendarmes partageoient le feivice ,
8c avoient chacun leur quartier ; mais , depuis la
multiplication des charges, le capitaine eft toute
l’année en fon&ion auprès du roi : les autres officiers
8c gendarmes ne fervent que trois mois. La brigade
de quartier doit toujours accompagner le roi dans'
les cérémonies, dans les voyages, 8c lorfqu’il va
coucher d’un lieu en un autre j alors les gendaimes
fuivent derrière le carroffe, 8c l’officier fupérieur ,
commandant la brigade , doit fe tenir à côté de la
portière. Le quartier eft compofé de deux officiers
fupérieurs, d’un aide-major, de deux maréchaux-
des-logis 8c de cinquante gendarmes , y compris
deux brigadiers, deux fous-brigadiers, un porte-
étendard 8c un fous-aide-major. Les officiers fupérieurs,
pendant leur quartier de fervice , doivent
avoir un logement dans le lieu même où eft la
perfonne de fa majefté. Leur fonâion eft de pré-
fenter touts les matins au roi un gendarme en habit
d’ordonnance ; qui vient recevoir fes commandements
, s’il en a quelques-uns à faire à la compagnie
, 8c, touts les foirs, de lui demander l’ordre
ou le mot du guet. Pendant la guerre , il ne refte
auprès du roi qu’un officier fupérieur , ‘ les autres
étant à l’armée avec la cornette ; 8c les cinquante
gendarmes qui demeurent de quartier , ne font
relevés qu’au retour de la campagne.
Le premier changement arrivé dans la compagnie
, eft la multiplication des officiers^ Il y a eu
d’abord dans la compagnie des gendarmes de la
garde :
' Un capitaine-lieutenant.
Un fous-lieutenant.
Un enfeigne.
Un guidon. Cela fe voit par les rôles de la cour
des aides.
En juin 1675 » Ie r° i doubla ces trois derniers
officiers ; enforte qu’il y eut 3
Un capitaine-lieutenant.
Deux fous-lieutenants.
Deux enfeignes.
Deux guidons.
En mars 1683 , le roi tripla ces deux derniers
officiers ; enforte qu’il y eut,
I Un capitaine-lieutenant.