
amenant des fufiliers Ôc des dragons ramaffés de
l ’armée ».
Il y en avoit encore à la bataille de Rocroy.
Je trouve dans un rôle de 1648 , un régiment de
dragons en divers mémoires durant les guerres
civiles de la Fronde. Ce qui eft certain, c’eft qu’il
y eut beaucoup moins de dragons François en ce
temps-là , qu’il n’y en avoit fur la fin du miniftère
du cardinal de Richelieu. Tout ceci prouve, au
moins clairement, que les dragons du maréchal de
la Ferté n’ont pas été les premiers dragons qu’on
ait vu dans les troupes Françoifes.
Mais avant que de defcendre dans un plus grand
détail fur ce qui regarde les dragons, depuis leur
nouvelle multiplication dans les-troupes de France,
je vais dire encore quelque chofe fur leur première
inftitution.
Outre le cavalier Melzo, j’ai trouvé encore un
auteur, homme de guerre du même temps, qui
a parlé de la milice des dragons, tels qu’ils étoient
dans les armées où il avoit fervi. C ’eft Jean-
Jacques Walhaufen, qui s’intitule principal capitaine
des gardes , & capitaine de la louable ville
de Dantzic : il compofa fon ouvrage en allemand,
& il fut depuis traduit en François. Cette traduction
fut imprimée-à Oppenheim,Tan 1615 : l’auteur
paroît avoir fervi dans les troupes de Hollande
, contre les Efpagnols ; car il fait de temps
en »temps l’éloge du - comte Maurice, prince
d’Orange, & appuie quelquefois de l’autorité de
ce prince, les règles qu’il donne de l’art militaire.
Voici ce-qu’il dit des dragons, qu’il appelle drageons.
« C ’e ft, dit-il, une lourde & ridicule armature
; mais cependant en fon lieu fort convenable,
propre & utile partie de la cavalerie inventée,
• afin que confidérant qu’il y a plufieurs exploits
militaires' qui ne peuvent être effeéhiés- par la
cavalerie feule, l’infanterie, ou partie d’icelle,
x monte à cheval avec fes armes requifes fécondant
promptement & fubitement la cavalerie. Or en
voici l’équipage.
Pour dragons, tu choifiras la moitié des mufque-
tiers & l’autre de piquiers, chacun armés de fes
armes pr-opres, comme il eft montré en l’art militaire
de l’infanterie , defquellès iis uferont à la
manière d’infants ; comme aufli ils font plus dépendants
de l’infanterie que la cavalerie : mais
d’autant qu’ils font toujours à cheval, & logez
même aux quartiers de la cavalerie, j ’-en ai voulu
faire mention en-ce lieu.
Ses armes donc font le mufquet ou la pique.. .
il a le moindre cheval qu’on peut avoir, dont aufli
n’eft de trop grand prix ; de forte que s’il eft quef-
tion de mettre pied à terre & le quitter, la perte
n’en eft trop grande ; . . . . il ne fe chargera de
bottes & efperons , car elles lui feroient plutôt
dommageables que profitables, quand il.fera befoin
de mettre pied à terre ; ..............en fon harnois il
aura au côté dextre deux petits permis par lefquels
il y attachera un petit crochet pour y fufpendrejfa
pique en cheminant à cheval. Quand les dragons
vont attaquer l’ennemi, après avoir, comme il eft
dit, mis pied à terre, ils jettent la bride de leurs
chevaux fur le col de celui de leurs voifins , ainfi
qu’ils demeurent toujours joints de file comme ils
avoient marché ; de forte qUe les chevaux fe tiennent
ainfi accouplez par les brides , ne fe pouvant
enfuir, entre tant que les maîtres font en terre ; on
y ordonne quelques-uns qui les gardent ; . . . . cette
forte de cavalerie vient-aufli - bien à propos en
batailles rangées : car étant en pleine bataille
contre l’ennemi, l’avant-garde fe trouvera fort-
bien , ordonnant que les dragons s’avancent fubitement
contre les ordonnances ès troupes contraires ,
foit aux flancs ou à la queue, &c. »
L’auteur décrit ic i, fans doute, l’équipage des
dragons tel qu’il étoit d’abord en Allemagne &
en Hollande. Il leur fait porter des piques & des
moufquets à cheval , & il les repréfente ainfi'dans
fes eftampes. Ces piquiers à cheval n’avoient pas
une fort bonne figure ; & j_e ne m’étonne point de
ce que l’auteur dont je viens de faire l’extrait ,
i traire les dragons en cet équipage d’une lourde &
ridicule armature. Mais je ne crois pas qu’en
France & dans les troupes d’Efpagne, ils ayent
porté des piques à cheval. Le cavalier Melzo dit
qu’on leur donna premièrement des moufquets ;
mais comme la mèche les embarrafloit à cheval,
on les arma d’arquebufes à rouet dans les troupes
des deux nations.
Je reviens aux dragons de notre temps tels qu’ils
font en France.
A la paix des Pyrénées, il y avoit deux régiments
François de dragons {ur pied , & je crois
qu’il n’y en avoit point d’autres. L’un étoit le régiment.
de^ dragons du ro i, & l’autre le régiment
de la Ferté.
Celui-ci, fuivant quelques mémoires qu’on m’a
fournis , fut levé par le marquis de la Ferté , dans
fon gouvernement de Lorraine , & formé des
compagnies franches du fleur des Fourneaux , officier
diftingué de ce temps-là , & je trouve dans
un livre intitulé , généalogie de' la maifon de
Seneterre, qu’il fut levé en 1645 , qu’il étoit de
quarante compagnies , & qu’il fervit au fiège &
à la prife de Mardik en 1646. L’auteur ajoute
contre la vérité, & fuivant le préjugé ordinaire,
que ce- fut le premier régiment dq dragons qui ait
paru en France.
Le régiment de dragons du roi fut créé l’an
-1657 * & en voici l’occafion. Le comte de Monté-
çuculi mécontent de la cour Impériale, traita avec
le roi; il s’engagea à lever pour le fervice de fa
majefté deux régiments Allemands, l’un de cavalerie
& l’autre de dragons : on lui fit toucher l’argent
néceflaire pour cette levée , il commença par les
dragons , & en avoit levé quatre compagnies ,
lorfque les miniftres Autrichiens trouvèrent moyen
de le regagner. Comme il étoit aufli honnête
horfime que grand général, il envoya au roi les
quatre compagnies de dragons qu’il avoit déjà
le v é e s , ce qui lui reftoit de l’ argent qu’on lui
avoit fait toucher. A ces quatre compagnies on en
ajouta quelques autres qu’on forma de foldats choifis
dans quelques régiments d’infanterie , & l’on en
compofa un régiment dont M. le comte de Pe-
guilin , aujourd’hui duc de Lauzun, fut fait colonel-
lieutenant. Son régiment étoit alors de huit compagnies.
Je trouve qu’en 1660 l e roi éntretenoit
une compagnie de dragons fous le nom de dragons
d e Bourgogne, qui avoient fervi fous M. le Prince
avant fon retour en France , & dont le capitaine-
étoit M. de Rochefort.
En 16 68 , le roi créa en faveur de M. de
Lauzun la charge de-colonel général des dragons,
& de fon régiment en fit d e u x , dont l’un fut nommé
le régiment Colonel-Général , & l’autre le régiment
R o y a l. Il n’y avoit point d’autrès régiments
de dragons fur p ie d ; mais on projettoit dès-lors
d’en augmenter le nombre.
En 16 6 9 , au mois de m a i, le roi publia la
création du colonel-général, & fit drefler un état-
major pour les dragons, comme on le v o it par
l’ édit de création.
Le roi en différents temps augmenta cette milice
, & régla le nombre de ces régiments à quatorze,
qui ont toujours été confier vés à toutes les réformes,
& que l’on nomme les quatorze vieux.
En l’année 1668 , le roi au. fujet de. la ligue
d’Ausbourg ^augmenta fes troupes &. créa douze
autres régiments de dragons.
En janvier 16 8 9 , M . le cardinal de Furftemberg
en leva deux & les donna au roi.
A u mois d’oéiobre de la même année , le roi en
créa fept , & un an après en créa encore huit.
Ainfi , au mois d’oÛobre de l’an 1690 , fa majefté
avoit .quarante - trois régiments de dragons fur
pied.
En 1698 , après la paix de R ifw ic k , les vingt-
huit derniers régiments de dragons furent réformes.
En l’année 1701 , lorfque la guerre pour la
couronne d’Efpagne commença, le roi fit donner
des commiflions pour lever foixante & douze compagnies
de dragons 9 dont il forma fix régiments
qu’il'd on n a à des meftres-de-camp réformés.
En l’année 1 70 2 , le roi permit à plufieurs officiers
de lever des régiments de dragons à leurs
dépens ; & il y en eut dix de levés.- A in f i , au
mois de mai 170 4 , fa majefté eut trente régiments
de dragons fur p ie d , .de douze compagnies chacun,
.&. de trente-cinq maîtres par chaque compagnie.
L e fécond régiment de Languedoc lev é l’an 1703,
eft compris dans ce nombre. Le r o i , en 1704 ,
le 26 de no v embre, rétablit les quatre régiments
de dragons qui avoient été pris à Hochftet, en four-
nifiapt les hommes, les chevaux & les armes , &
y , mit des officiers réformés. O n leva encore
quatre régiments de dragons en 1705 , & un en
1710 .
A u commencement de 1 7 1 8 , le ro i mit fur
pied un régiment de dragons fous le nom d’O rléans,
& qui, par une ordonnance du 23 d’avril
prit fon rang après le régiment Daüphin : à fa
création il eut pour colonelM. de Lafare Tournac ;
& cet officier ayant été fait maréchal-de-camp
au retour de la campagne d’Efpagne , ce. régiment
pafta à M. de Trenel. Daniel. Mil. Franç. Tom. IL
P- 4 9 6*.)*
L’ordonnance du 8 août 1784 affimile les dragons
à la cavalerie.
DR APEAU. Fayq; Enseignes.
Le drapeau eft l’enfeigne de l’infanterie. Il fut
fubftitué aux bannières , lorfque la . milice Fran-
çoife prit une forme réglée & confiante. Toutes
les troupes européennes ont des drapeaux. Il y
en a un par compagnie dans la plupart des troupes
étrangères.
Les drapeaux fervent en général au ralliement
comme toutes les enfeignes : ils pourroient fervir
aufli à l’alignement : mais ils font trop incommodes
par leur grandeur & leur mobilité. Le moindre
vent les agite tellement qu’il eft très pénible de
les porter, & qu’ils incommodent beaucoup les
foldats qui en font voifins. On ne pouvoit pas
adopter d’enfeigne plus gênante & moins utile :
les plus parfaites, les moins incommodes, celles
qui pouvoient fervir le plus tant au ralliement
qu’à l’alignement, ce font évidemment les
aigles & autres enfeignes romaines.
On donne le nom de drapeau aux enfeignes
ou lignes militaires dont' l’infanterie Françoife eft :
pourvue.
Les drapeaux modernes font compofés de trois
parties ; de la lance, du drapeau proprement dit
& de la cravate.
La lance eft un bâton fait d’un bois léger , elle
a un pouce de diamètre & neuf pieds fix pouces
de longueur ; la partie inférieure de la lance qui
eft appèllée talon, eft revêtue d’un morceau de fer
de fix pouces de longueur ; ce fer eft terminé en
pointe : il fert à ficher le drapeau en terre ; la partie
fupérieure de la lance eft armée d’un morceau de
cuivre doré qui a fix pouces de longueur, &. la
forme d’un fer de lance antique.
Le drapeau eft compofé d’une étoffe de foie
appellée taffetas, il a cinq pieds fix pouces de
longueur fur une largeur égale.
Le drapeau eft attaché à la lance par des clous dorés.
Les cravates des drapeaux font aufli de taffetas ;
elles ont deux pieds trois pouces de long fur une
largeur égale ; elles font nouées au-deffous du fer
de la lance & au-deffus du drapeau.
he^drapcau a été confié pendant longtemps a
de jeunes officiers appellés enfeignes ; ils tenoient
le dernier rang parmi les officiers fuba’ternes.
Aujourd’hui le drapeau eft remis entre les mains
d’un vieux militaire r connu fous le nom de porte-
drapeau ; il eft parvenu à ce rang par fon mérite ;
il eft ordinairement choifi parmi les plus anciens
fergents^majors. Le drapeau , eft fans, doute, in