
de prévoir qu’un confeil de guerre ainfi compofé ,
n’atteignant point les vues de Ta création , fon
inutilité, jointe à fa dépenfe , le feroit bientôt
fupprimer , laiffant dans les efprits la prévention
malheureufe & fauffe, que lds maux qui tourmentent
notre conftitution militaire font incurables, 8c
qu’il eft inutile d’en chercher le remède.
Cependant le remède exifte.. Le corps que cette
conftitution demande eft tout formé il en fait
déjà partie »,&• paroît devoir en être le fondement
& le foutxen. Je m’explique, en priant le le&eur de
fulpendre fon jugement fur le projet que je vais
lui préfenter , juiqu’à fon entier développement.
Il eft parmi nous un corps augufte compofé des
chefs fuprêmes de l’état militaire > la plupart def-
quels ont blanchi dans le commandement des
troupes , & dont plufièurs ont prouvé leurs con-
noiflances 8c leur capacité par des vi&oires : corps
de tout temps illuftré par de grands hommes , où
trop, fouvent * il eft vrai , la faveur qui corrompt
tout dans notre gouvernement.,.porta des perfon-
nages médiocres , mais auquel tout mérite militaire
tranfcendant vient communément aboùtir.
On voit que je parle du tribunal des maréchaux
de France. C ’eft ce fénat guerrier, chargé déjà
du dépôt de l’honneur nationnal , c’eft lui que la
raifon nous, indique pour inftituteur ôc pour con-
fervateur des loix militaires.
Que lui manque-t-il de ce que peut exiger
cette importante deftination ? Les talents, les.lumières
, fur-tout celles de la pratique., la vénération.,
la confiance du foldat 8c du citoyen : il
a tout ce qu’il faut, & pour rendre des loix fages,
6c pour leur imprimer un caraélère refpeâable.
Mais -, par oppofition, il n’a aucun des inconvénients.
que je viens d’obferver dans, le confeil de
guerre propofé par IvL de Saint-Germain.
D ’abord, comme la guerre occupe rarement
plus d’un ou deux maréchaux de France à la fois,
elle ne produira ni interruption dans les fondions
du corps légillatif , ni changement dans la com-
pofitïon de fes membres. Un efprit conftamment
uniforme en dirigera donc toujours les opérations-
En fécond lieu , de qui pourroit-on mieux fe
promettre l’étendue des vues dans l’art militaire
que de. la part de ceux qui ont conduit les armées E
Et de quels hommes doit-on attendre les règles -,
îes principes , les méthodes, les plus propres^pour
la guerre , fi ce n’eft de ceux-là même, qui l’ont
faite pendant toute leur vie?
Troifièmement, un corps compofé de tout ce
que. l’état militaire a de plus, éclatant en réputation
oc en. dignité un corps lié à la fois à la conftitution
militaire. & politique , 6c ,.gour ainfi dire ,
au3çfondements de l’état, peut feul maintenir fon
èxiftence contre les caprices, les erreurs 6c les-
pallions des miniftres , garantir la durée de fes
travaux 6c la fiabilité de la conftitution.
Enfin, le cara&ère de légifiateur, annexé à la
t r a i t é de maréchal de France.*fera pour le.fou.-
verain un motif de plus de ne conférer qu’au mérite
éminent ce fuprême grade de la guerre. Ces
chefs du militaire eux-mêmes trouveront dans leurs
nouvelles occupations une occafion continuelle
d’entretenir 6c de perfëéHonner leurs talents 6c
leurs connoiffances; 6c au lieu d’être réduits à
l’ina&ion ou à une repréfentation futile, du moment
qu’ils- font parvenus à ce faîte des honneurs
guerriers, ils feront alors plus que jamais précieux
à la patrie*.
Il vient pour toilts les hommes un âge qui ne
permet plus de foutenir les fatigues de la guerre*.
C ’eft alors qu’une fage politique doit rendre utiles
dans les confeils, le génie 6c l’expérience qui ne
font plus propres à l’exécution. Le grand art du
gouvernement eft de mettre, les hommes à leur,
place , 6c de fçavoir tirer parti de touts. Mais,
c’eft le renverfement de l’ordre quand ceux que.
l’état p ay e ,- récompenfe le plus, 6c qui pourroient
mieux le fervir , font, dévoués à l’inutilité.
Suppofons le tribunal des maréchaux de France ^
compofé comme il l’a été à diverfes époques ,
comptant à la fois-, parmi fes membres , un Tu-
renne , un Crequi , un Luxembourg, 6cc. ou bien
un Catinat, un Vauban , un Villars , 6c c. Quels
plus dignes légiflateurs militaires ! Aujourd’hui encore
3 c’eft dans ce corps augufte, plus que partout
ailleurs, que fe trouvent les talents vaftes ,
les lumières fûres y le génie, du grand 6c du vrai.
Enfin , je propoferai de joindre à MM. les ma—-
réchaux, pour les connoiffances de détail, quelques,
officiers généraux infpe&eurs , avec voix conful-
tative feulement ; & je croirai qu’alors il ne reftera
rien à délirer pour la parfaite compofition de ce.
corps légillatif. «.
Nous nous garderons bien de décider entre ces
différents projets. En commençant cette fedion
nous nous fommes impofés la. loi de n’être que
rédadeurs.
Qualités nécejfaires-aux-memb'res du confeil fupremél.
La principale objection que M. de Saint-Germain*
croit qu’on puiffe faire aux confeils de guerre, c’èft:
la difficulté de choifir les fujets pour compofer ces
tribunaux. Il a raifon. En cherchant à lever cette
difficulté dans le moment où il écrivoit, il nous,
enfeigne comment, nous devions- nous conduire fi.
nous voulions la faire difparoître dans d’autres
temps. Jettons un coup d’oeil fur les qualités qu’ib
avoit apperçues dans les officiers qu’il y appelloit,
6c nous connoîtrons celles dont doivent être ornés-
ceux, que nous voudrons y faire entrer-.
Il nomme celui-ci préfidènt du confeil, parce-
qu’il a de l’efprit, des-talents , de l’élévation dans
l’ame, affez de fageffe pour fe conformer aux loix,,
allez de fermeté pour les faire exécuter ; 6c cette
tendre humanité qui eft néceffaire quand on doit,
décider: du fort des autres hommes.
Il admet celui-là dans. \q confeil, parce qu'il a
âe l’efprit, un caradère décidé , une ame forte :
il n’y a , dit-il, que les hommes à grand caractère
qui foient capables de grandes chofes..
La valeur, l’intrépidité , l’étendue des connoiffances
, la fupériorité du génie 6c des lumières ou-
yrent la porte à un troifième.
Un quatrième y eft appellé , parce qu’il a montré
pendant un. grand nombre d’années une valeur
brillante, une adivité foutenue , qu’il a fait ref-
peder les lo ix , maintenu l ’ordre, 6c qu’il a eu
conftamment un caradère . de dignité. & de repréfentation
néceffaire à un homme qui commande.
Celui-ci eft honnête, homme, a du nerf, de la
force dans le caradère „l'amour de l’ordre,, de la
difciplme 6c du bien.
Cet .autre joint au talent 6c aux qualités militaires
des .connoiffances étendues fur le fervite de
nos yoifins ; il eft févère x mais jufte.
Celui-là eft ingénieur habile, artilleur éclairé ;
les militaires de touts les pays rendent hommage
à fes talents.
Un autre joint à l’honneur 8c à la probité de
l’inftrudion, de l’érudition même , & une pratique
Bon interrompue d’un métier qu’il a toujours fait
avec goût 6c avec plaifir.
Raflèmblons ces traits épars, ornons-en les fujets
qu’on deftinera à former le confeil fuprême ; quelque
grade qu’ils aient obtenu , quelque religion qu’ils
profeffent, faifons-les arbitres de notre militaire.
• Pour être confiants à notre plan, 6c bien terminer
cette fedion , nous allons^ encore copier
une phrafe de Y efprit militaire.
. C ’eft à la nation , c’eft au fouverain que nous
offrons ce projet : c’eft au miniftre de la guerre
lui-même , dont l’ame élevée 6c vertueufe doit
préférer au furcroît d’une autorité paffagère , le
mérite 6c la gloire de contribuer à l’établiffement
le plus falütaire à la France , le plus indifpenfable
pour elle ; car, comment pouvoir jamais confo-
lider 6c perfedionner notre conftitution militaire ,
tant que fon fort fera lié à toutes les révolutions
de la cour, 6c dépendant de touts les mauvais
choix qui peuvent, être faits ?
§ . I V .
Des confeils déadmuùf ration.■
Les confeils d’adminiftnation , dont M. le comte
de Saint-Germain eft le. c réa teurfurent établis,
dans l’armée françoife , par une ordonnance du,
jsoi,. en date du 2,3 mars» 1776. ,
Compofition des conteAs'd’adminiÿratiom
Lë confeil d’adminiftration de chaque régiment
doit être, compofé du colonel ou meftre-de-camp-
Gommandant, du. colonel ou meftre-de-camp en
fécond, du lieutenant-colonel, du. major ÔC du
plus ancien capitaine*
Comme le confeil doit toujours' être compofé
de cinq perfonnes, les’membres abfents font remplacés
par les plus anciens capitaines préfents.
Le colonel ou meftre-de-camp commandant
eft le chef du confeil d’adminiftration : en
l’abfence de c e lu i - c i c ’eft le colonel ou méftre-
de-camp en fécond ; en un mot , c’eft toujours
l’officier qui commande le régiment, qui eft pré-
fident du confeil.
Tous les membres du confeil ont voix délibé-
rative.
Le confeil fe tient toujours chez le chef du
corps.; il doit s’affembler régulièrement une fois
par femaine ; 6c extraordinairement toutes les fois
que le commandant du corps- le juge néceffaire.
Le quartier-maître-tréforier eft le fecrétaire du
confeil.
Le lieutenant-colonel , 6c en fon abfence , le
major fait’ au confeil le rapport des objets à mettre
en. délibération ; le quartier-maître-tréforier înfcrit
fur un- regiftre deftiné à cet objet, 6c appelle re~
gifire du confeil, le précis du. rapport du major ;
il y copie auffi les décifions du confeil. Les cinq
officiers doivent figner le regiftre à la fin de chaque
féance.
Lorfqu’un régiment eft féparé , dit le manuel de-
l'infanterie 3 chaque commandant de quartier a un>
confeil particulier il eft compofé dudit commandant
8c des deux plus anciens officiers. Ce confeil
eft' chargé de pourvoir aux objets imprévus ; if
eft ■ néanmoins tenu de rendre compte de fes délibérations
au commandant du régiment.
FonSlions. du confeil. d'adminiflration*-
Le confeil d’adminiftration doit- veiller au bon-
ordre 6c à l’économie deé fournitures néceffaires
à un régiment; ordonner , vérifier, approuveras
marchés 6c les dépenfes ; 6c juger de la conduite;
de ceux à qui il a confié quelques détails.
Le confeil peut choifir dans tout lé corps, fês'
officiers qu’il croit les plus propres à- tel on tel
détail; aucun officier ne peutfe.difpenfer de donner
fes foins aux objets.que le confeil lui a confiés..
Les membres du confeil ne peuvent être per—
fonnellement; chargés d’aucun achat..
Le quartier-maître.a tréforier. de chaque régiment
ne peut recevoir des fonds des mains des;
tréfo.riers principaux ou-particuliers , que muni’
d’une autorifation du confeil, dans lequel la fomme'
à recevoir eft énoncée ; lesfomm.es que le quartier-
maître perçoit d’après l’autorifation du confeil ,
font enfermées dans la caille en préfence des'
membres du confeil, qui.en ont Iss clefs ,.6c l’en--
regiftrement en eft fait au premier confeil {uivant
fur un regiftre timbré de recette & de dépenfe.
Tous les membres du confeil lignent "les quittances
finales elles ne font valables que revêtues-
de cette forme.
Au commencement, de chaque mois le confeil'