
On prenoit les huit meilleurs foldats de la file,
pour .les placer a la tête & à la queue, afin de
les rendre également fortes. Les huit autres étoient
places au milieu.
Les foldats de chaque file étoient défignés par
premier 8c fécond ; ce que les anciens Grecs ap-
pelloient protojiate 8c épijlaie : il y en avoit deux
qui avoient chacun deux noms ; le premier , ou
protojiate, étoit auffi nommé locague • le fécond,
ou Xèpiflate, portoit de plus le nom de décarque.
Pour établir plus d’union , d’ordre & de difci-
pline , on divifoit chaque file en deux chambrées
dont l’une, compofée des protoftates, avoit pour
chef le locague ; l’autre , compoiee des èpijïates,
avoit pour chef le décarque : mais ÿ dans l’ordre
de bataille , les tms 8c les autres n’avoient pour
chef que le locague.
Lempereur Léon avoit ordonné de plus que,
dans la formation de la file , autant qu’il feroit
poffible, on n’eût pas feulement égard au cou-
rage , mais auffi à la taille, afin que les plus
grands, mis au premier rang, imprïmaffient plus
de terreur ; & fi l’on ne pouvoit accorder la taille
&. le courage, que l’on mît aux premiers &. aux
derniers rangs, les plus.braves ; les autres au centre;
J1 voulut auffi qu’on mêlât les jeunes avec les
vieux , afin d’égalifer la foibleffe par la force, &
l ’mliabileté par l’expérience, tant à la cavalerie
qu’à Finfanter'ie. {Ibid. §. 73 .).
Le même prince, prefcrivit de prépofer à toutes
les troupes les chefs les plus capables de les
commander, les plus fidèles, les mieux intentionnés
pour l’empire, & dans lefquels on auroit
reconnu le plus de bravoure. « Rien n’empêche,
a jo u te - t- il, qu^ffi ne fiaient diftingués par la ris
e t te & par la noblefle de leur extraâion, comme
par celle de l’ame. L’obéiffance des hommes bien
nés eft plus prompte, & Bj richeffe leur fert à
fecourir dans l’occafion ceux qui leur font fubor-
donnés ; fouvent par de légers dons ils peuvent
fe concilier leur bienveillance, & les, difpofer à
combattre dans le danger jufqu’à.la mort».
Ceux des grades les plus éievés dévoient être
le plus honorés par le. général, & comme fes
confeillers ils dévoient être admis à tous les con-
feils fecrets.
Quant aux armes de l’infanterie, les fcutates
portoient l’épée ; le verutum, le bouclier, qui étoit
grand, ovale, & de même couleur dans chaque
tagme, & dans chaque nombre ( ; Je
cafque avec une petite touffe au fommet, & des
flammes aux joues , fur-tout pour les chefs de
file ; la fronde ; les mar^obarbulcs ; le fabre à deux
tranchants , l’un droit comme dans l’épée, l’autre
ondoyant en fer de lance avec fon fourreau de
cuir , ou le fabre à dos épais, & à tranchant courbe,
ou le fabre aux deux tranchants en forme de
hache. ( Maurit. T ad. L. XII. C. 8. S. 5. A fea
Léo Tan. C. VI. §. a j . fi. f i q. ). 3 5 1
Touts les foldats portoient des habits courts,
allant jufqu’aux genoux , que Maurice appelle
vêtements gothiques ou armelaujîes, c’eft-à-dire ,
en langue gothique, fans manches. Ils dévoient
a v o ir , s’il.éto it pofhble , une foubrevefte fur la
cuirafle, des fouliers fans pointe par de vant, &
garnis de quelques petits c lou s , pour 'qu’ils dura
ien t plus longtemps. C e t ufage , dit l’empereur
L é o n , eft u tile , fur-tout dans les routes. Maurice
'le s prefcrivit fui vaut l’ufage gothique c’eft-à-dire
de peau avec fon p o il, ayant des femelles, deux
oreilles feulement, de petits clous pour qu’ils du-
raflent.davantage , 8c lans nez ou pointe : il ordonna
des foubreveftes moins larges que les fayons
bulgares, & prefcrivit les cheveux courts ; ce que
l’empereur Léon fit auffi à fon exemple. (X . XII.
C. 8. § . | . );.
Les principaux foldats de la file(br/ÀÉ*7o<)> ou
pour le moins les deux premiers, avoient, autant
qu’il étoit poffible ,, des armures entières, avec de
petites flammes aux deux épaules de l’armure ; touts
les foldats avoient des gantelets, des braflards 8c
des grèves de ter ou de b o is , fur tout aux premiers
& aux derniers rangs. L ’empereur Maurice- prof-
çrivit les g rè v e s , parce qu’elles étoient pefantes
8c incommodes.
Les pfiles avoient des arcs 8c de grandes troqffes
contenants trente ou quarante flèches, qu’ils .portoient
fur les épaules, des carquois de bois o u bien
de petites- troufles contenant de petites flèche*
deftinées à être lancées, avec les arcs , à une grande
diftance, 8c qui font inutiles à l’ennemi ; des ja velots
pour ceux qui ne fçavoient pas tirer de l’arc ;
de petits boucliers ronds, des frondes, des épées
ou fabres avec leurs fourreauxide cuir.
L a cavalerie étoit divifée en "tagines ou bandes ;
les bandes- en décarchies ou décuries , 8c celles-ci
formées par chambrées de cinq ou de dix hommes :
ainfi les décuries formoient une ou deux chambrées.
La décurie étoit commandée par un décarque ; la
demi-décurie, par un pentarque. ( Léo. Ta&. C. JF.
§ . 2. 6» feq. Mauriu Ta&. L. 1. C. 3 .) .
La'centurie étoit compofée de décuries , & commandée.
par un centarque ou hecatontarqüe. Le premier
des centarques étoit nommé ilarque , 8c avoit
rang après le tribun.
L a bande ou tagme étoit formée, de centuries, &
commandée par un com te, qu’on nommoit auffi
tribun.
La mérie o u ïe dronge étoit compofé de bandes
ou tagmes, & fon ch e f, nommé drongaire ou du c,
& plus anciennement chiliarque.
Le méros étoit une turme compofée de trois
meries ou dronges, & commandée par un mèrarque,
auquel on .donnoit auffi. le nom -d'hypojlratège.
A v an t l’empereur Léon ce nom n’étoit attribué
qu’au général en fécond ? mais parceque le prince
étoit toujours regardé comme hyperjlratège ou chef
général des troupes, & que chaque thème ou département
de l’empire avoit fon Jlratège particulier,
on nomma celles-ci hypojlratèges ; 8t on donna le
nom de Jlratège à celui que le prince nommoit pour
être chef de l’armée.
Lorfque l’armée s’affembloit, le général regloit
le nombre des files qui dévoient compofer la droite
&. la gau che, enfuite la formation des tagmes ou
bandes.
Les files dévoient être de quatre, c in q , huit,
dix ou feize , fuivant les circonftances ; chaque
file compofoit une chambrée; 8c Léon confeille,
dans fa Tactique, ide mettre enfemble, fur-toütdans
l ’ordre de bataille, les frères 8c les amis , afin que ,
joints par l’habitude, 8c combattant les uns pour
les autres, leur valeur devienne plus utile.
Il y avoit dans chaque décurie cinq hommes
choifis; fçavoir ; le décarque, le pentarque, le
tétrarque 8c les deux ferrefiles. Les plus braves de
ceux-ci dévoient être placés à la tête , les fuivants
à la q u e u e , 8c les autres au milieu, en entremêlant
les nouveaux avec les . anciens.
Les hommes choifis de la file dé vo ien t, ainfi
que les centarques , être fo r t s , s’il étoit poffible ,
& fçachànt. tirer de l’arc. (C. 12. §• 4 °- )• v
JL’empereur Léon fixe en général à quatre
hommes la hauteur de la ca va le rie, parce q u e ,
d it- il, les chevaux n’ont aucune .preffion, 8c que
les derniers rangs, foit d’archers , foit de piquiers,
n’aident pas les premiers comme dans l’infanterie :
au-delà du quatrième ran g , la pique eft inutile ,
& les archers, obligés de lancer leurs flèches paraboliquement,
font très peu utiles, comme l’expérience
le fait voir ; mais le nombre des cavaliers
capables de combattre au premier ran g , n’étant
pas quelquefois fuffifants, il faut y fuppléer par
le nombre. Alors la haufeur fera de f ix aux tagmes
du centre , de fept à la gauche , ou font les plus
b raves , après ceux du centre ; cfe huit a la droite,
& le refte de neuf ou dix.
L e même prince ordonna, que la cavalerie de
fécondé ligne ,• étant compofée de bonnes troupes,
auroit cinq hommes de hauteur ; que les v a le ts ,
commis aux bagages, en auroient dix ; que les
coureurs 8c les embufcades feroient fur huit ou dix
au plus, fi c’étoient des troupes médiocres; 8cfur
cinq au moins fi elles étoient bonnes.
Maurice nomme optimales les tagmes de la fécondé
ligne. Il les met fur cinq de hauteur, 8c y
joint deux armati ou valets armés, qu’il leur
donné auffi lorfqu’on les place en première ligne.
S’il y a des pagani, ajoute-t-il, ils feront formés
fuivant leur u lage, mais plus utiles comme coureu
r s , ou aux embufcades; 8c on joindra aux
alliés fotderaù tout ce qu’ils peuvent avoir de valets
en état de combattre.
L e nombre moyen des cavaliers de chaque
bande devoit être de trois cents. Il étoit fixé à
deux cents pour les plus petites armes , à quatre
cents pour les plus grandes.
Les bandes étant formées on y mettoit des chefs
nommés comtes , 8c on en compofoit les mènes ou
dronges, auxquelles on prépofoit des drongaires
capables de fe r v lr , courageux , pru dents, fages,
8 c , s’il étoit poffible , nobles 8c riches.
D e s dronges on formoit les méros ou turmes,
dont les chefs, nommés mérarques ou turtnarques
étoient à la nomination du prince. C e to it le
général qui nommoit aux autres emplois. Les
turmarques dévoient réunir a toutes les qualités des
drongaires , celle d’être lettrés, 8c principalement
celui du centre , qui d e v o it, dans le b e fo in , remplacer
en tout le général. (Léo. Ta£t. C,JV§• 4 1 *
Maurit. L. 1. C. 4 ,) .
T ro is ou quatre turmes formoient tout le corps
de la ca va le rie, c’eft-à-dire , pour ce tem p s, le
corps principal de l’armée. ( Maurit. Léo. ibid. Constantin.
Porphyr. p. 9 & 10. ).
L a tagme ou bande ne devoit pas être de plus
de quatre cents, excepté celles des optimates. L e
dronge de plus de trois m ille , 8c la turme de
plus de fix ou fept mille.
Lorfque le nombre des troupes étoit plus g rand,’
on plaçoit le refte en fécondé lig n e , en r é le rv e ,
à la garde des flancs ou de l’arriere ,^ en embulr
cade , ou on l’employoit à inquiéter l’ennemi fur
fes flancs.
Il étoit preferit de ne pas faire les turmes oC
les dronges plus grandes, de peur que cet^ auê*
mentation ne diminuât l’obciffance , 8c ne fut une
caufe de détordre.- I l l’ étoit auffi de ne pas faire
toutes les bandes ég a le s, afin q u e , fi 1 ennemi
avoit connoiffance de leur* n omb re, elle ne lui
donnât pas celle du nombre de 1 armee.
Les armes du cavalier étoient la cuirafle com-
plette ( xâçiKtct Tthéut, ) , c’eft-a-dire une armure
couvrant le corps depuis la tête jufqu’aux talons ,
attachée a vec des. courroies 8c des anneaux.
Elle étoit de mailles autant qu’il fe p o u v o it , ou
de plaques de corne , ou de cuir de buffle feche ,
ou de nerfs doublés d’un feûtre fimple ou double ,
8c avoit de petites flammes fijr les épaules. On y
joignoit un gorgerin de m ailles , garni de feutre
en dedans, de toile en dehors. L a cuirafle etoit
recouverte, par une fou b revefte, cafaque ou tunique
de gros feûtre , 8c même , s’il etoit poffible ,
par une elpèce de cotte d’armes nommée x.Xurxnov.
C es foubreveftes étoient dé toile , de laine ou
d’autres matières. 11 étoit ordonné de les faire
larges, 8c couvrant les g en ou x, afin qu’elles n’em-
pêchaffent pas le cavalier de manier fes armes,
de .conduire fon ch e v a l, 8c qu’elles fuffent de plus
belle apparence. O n donnoit auffi dès, feutres ou
redingotes à manches larges, pour couvrir l’armure
dans les temps pluvieux ou de brouillard , dans les
reconnoiffances, gardes ou fa&ion , empêcher que
l’ennemi ne découvrit les troupes, 8c garantir des
coups de flèches. Lorfqu’on ne s’en lervoit p a s ,
l’armure étoit renfermée dans un étui de cuir.
(Léo. C. F\ § . 4. 6* feq.).
L e bouclier ron d , ou o v a le , de différentes
grandeurs 8c matières.
L e cafque de fer poli , ayant au fommet de
T t i j