
S il paffoit aufîi quelque rivière dans la v ille ,
qui put former quelque inondation par le moyen
des éclufes, il faudroit faire enforte que les eaux ,
en cette occafion, enveloppaient en tout ou en
P^rtle. citadelle,, fuppofé néanmoins qu’on ne
put faigner ces inondations.
^ * egard de la figure qu’on donne aux citadelles
, la régulière eft la plus ordinaire, quand le
terrein le permet. Ce lle de Mayence eft un quarré,
celle de Perpignan eft un hexagone, & celles de
Strasbourg , de Lille , de Ba rcelone, de Pampe-
lune , de Turin, d'A n vers, & c . un pentagone qui'
eft la figure la plus convenable.
Pour n etre pas obligé de démolir beaucoup de
murailles & de maifons de la v i l le , un côté de
polygone fuflît du côté de la ville p ou r retenir les
habitants dans leur devoir ; c’eft pourquoi les
communications de la v ille à la citadelle peuvent
aboutir à l’angle flanqué des deux baftions oppo- fés. (Fig. 238. ).
11^ faut que ces communications joignent les
revêtements des baftions des citadelles , comme
vous le v o y e z à celle de Strasbourg , & non comme
a la 2 & 3e figures, parce qu’on pourroit entrer
dans la v ille par les foffés; ce qui ne doit pas être.
C e s communications font faites en batardeau, de
la largeur du fofle qu’elles traverfent. O n y laifle
au m ilieu, au niveau du fond du fofle, un troü de
2 pieds en quarré , pour le paflage des eaux de la
cunette, s il y en a u n e , ou de celles des'foffés ,
s ils font pleins d’e a u , & ce trou eft bouché-par une
ou deux grilles de fer.
O n lailfe au moins un efpace de 40 toifes entre
le chemin-couvert de la citadelle & les maifons de
la v ille , & plus s’il eft poflible. C e t efpace s’appelle
1 efplanade, & fert à pouvoir découvrir de
loin ce qui vient de la ville & de la citadelle. A
l’égard de fa conftrü&iôn, c’eft la même que celle
du pentagone régulier ci-devant.
L a figure 238 eft un deffein des communications
de la citadelle de Strasbourg à la v ille.
La figuré 239 eft celle de Barcelone , & la
figure 240 celle de Pampelune.
A v an t que de finir c e chapitre, il eft bon de
faire remarquer q u e , quand on veu t faire conf-
truire une citadelle à une v i l le , & que la fituation
eft ind éc ife , c’eft-à-dire que le terrein n’oblige pas
à la lituer plutôt d’un côté que d’un autre, il faut
lev er bien exactement le plan de la ville & des
environs , jufqu’à la portée du canon, où quelque
chofé de moins. Après quoi on conftruit fur un morceau
de papier à pa rt, & fur la même échelle que
la v i l le , une citadelle telle qu’il convient de la
faire, enfuite on coupe le papier qui refte b lan c ,
à l’extrémité du glacis de ladite citadelle. C e la
étant fa it , il eft facile de la pofer fur le plan de
la v ille & des environs , aux endroits où l’on juge 1
qu’elle doit ê t r e , & on la rentre dans la v illè , ou
on la fort dans la campagne, fuivant le befoin &
les différents inconvénients qui fe peuvent rencontrer.
C e la donne la facilité de la tranfporter
d’un lieu à un autre , fuivant les différentes idées
qu’on peut a v o ir , ou fuivant les avis qu’on peut
nous donner ; ce qui ne fe peut faire quand on la
; conftruit tout d’un coup fur le même plan de la
ville ; quand enfin, après une mûre délibération ,
on eft convenu do fa fituation, on arrête cette
! citadelle ambulante a vec deux épingles fur le plan
I de la ville . O n en pique enfuite touts les angles &
autres ouvrages. Après quoi on l’ôte , & on la def-
fine pour lors fur le p lan , n’étant pas difficile en-
fuite de la tracer fur le terrein, comme nous l’én-
feignerons dans le premier chapitre de la fécondé
partie.
Tracer une place fur le terrein.
L e plan du terrein à fortifier ayant été exactement
levé , & les ouvrages projettes-fur le papier,
approuvés du p r in c e , il ne s’agit que de lés exécuter
fur le terrein. C ’eft ce qui vous fera facile
à fa ire , en vous fervant dû demi-cercle avec des
pinules ou de la planchette , des cordeaux ou
chaînes , de la toifë , & des piquets , au lieu de
règle & de compas.
Sçachant par vo tre plan où l’on doit placer
l’angle flanqué de vos baftions, il faut le marquer
fur le terrein , en y faifant planter de longs piquets
appellés jalons ; de même qu’à touts les
angles de vo tre fortification, lefquels vous ferez
femblables & égaux à celui de votre plan , par le
m o y e n , comme j’ai d i t , du d em i-ce rc le ou de
la planchette; & à mefure que vous planterez des
piquets ou ja lon s , vous ferez fuivre par des travailleurs
qui feront fur le terrein une trace avec
un piquet d’un jalon à l’autre ; & enfin vous tracerez
ainfi bien exactement tout le contour du
corps de la place , la contrefcarpe, les demi-
lunes , contre-gardes , tenailles , réduits, & c . Pour
cet effet vous n’avez befoin d’avoir marqué fur
vôtre plan qui fera en grand , que la ligne du
cordon , les talus & les épaiffeurs de vos murs n’y
étant point néceflaires. Pour plus grande facilité ,
la longueur de vos faces , flancs , courtines, & c . ,
fera notée bien exactement fur votre p lan , de
même que la valeur des angles , fi vous vous
fe ryez du demi-cercle , & vous les ferez femblables
fur le terrein. C ’eft de toutes les méthodes la plus
fa c i le , & un peu de pratique & d’attention met
au fait en peu de temps.
L e refte fe fait comme vous le pouvez voir au
devis qui eft à la fin de cette partie ; on y ex-^
plique tout ce qui doit s’obferver à la conftruCtion
des ouvrages de fortification.
Pour ne pas laiffer les perfoimes qui aiment à
travailler , dans l’embarras de pouvoir trouver
l’épaifleur des murs qu’il eft néçeffaire de fair.e
aux fortifications, je vais leur donner une méthode
qui approche très fort des meilleurs calculs-qui
ayent été faits jufqu’à préfent.
D e touts les revêtements des fortifications, les
moins bons font ceux du gazonnage ; car , malgré I
les palifladés qu’on y met , tant en fraife qu’en J
berme , les premières batteries de l’ennemi mettent |
l’un & l’autre en fi mauvais é ta t , que quelque
attention que l’on puiffe avoir d’en réparer les
défordres , il eft en état d’y monter par-tout. Ce
défaut eft encore plus çonfidérable lorfque les
foffés font fecs , que lorfqu’ils font remplis d’eau
de la hauteur d’un h om m e, parce que dans le
premier cas on eft réduit à capituler après la perte
du chemin - c o u v e r t , ou autrement on rifqueroit
d’être emporté d’a ffau t, au lieu que dans le fécond
on peut attendre que l’afliégé ait commencé à faire
le paflage du fofl'é.
C e la eft bien différent aux revêtements de maçonnerie
, même quand ils ne feroient qu’à demi:
car il faut que l’ennemi çpnftruife des batteries fur
le chemin-couvert pour y fair.e brèche , ou qii’il
y attache le mineur ; ce, qui demande du temps ,
& par conféquent prolonge la durée du fiège.
Néanmoins ce revêtement n’eft pas exempt de
défauts,, comme nous l’avons fait remarquer à la
co r fe â ion d u fÿ ftèm e de.Neuf-Brifack,
Méthode pour trouver Vépaijfzur des murs qui doivent
. fùutenir des t,erres.
Soit la hauteur ~BE d’un terrein qu’on veu t rev
ê t i r , ( fig. 2 4 1 . ) , laquelle eft de 24 pieds , il
faut içavôir quel talus on v eu t donner au mur ,
fuppofé que ce foit le fixième , qui eft l e . plus
ordinaire aux ouvrages, de fortification. L e mur
ayant 24 pieds de h a u t , le ta lu s .E F fera de 4
p ie d s ; il faut chercher la fuperficie du triangle
reâ angle BE F , en multipliant le côté B Ë , 24 par
la moitié de E F qui eft 2 , v iendra 48 pieds pour
la fuperficie du triangle du talut.
Enfuite il faut imaginer un triangle tel que
A B E pour les terres,que le mur doit foutemr* C e
triangle a 24 pieds des deux cptés A B , B E , la
ligne A E étant toujours diagonale d’un quarré.
Pour .trouver la fuperficie de ce triangle , li
faut multiplier un de les côtés par la moitié; de
l’autre , viendra 288 , dont il faut prendre la
moitié qui eft 144 , & de cette fomme en retrancher
encore le dixième, qui eft 1 4 , en négligeant
les 4 qui re ften t, vous aurez 130. D e ce nombre
il faut ôter le triangle du talut qu’on a trouvé de
48 , reftera 82 pieds , qu’il faut divifer par la
hauteur BE 24 p ie d s , il viendra au quotient 3
pieds 5 pouces pour l’ épaiffeur B G du mur qu’on
cherchoit.
Ce tte méthode eft générale pour toute forte de
revêtements & de talus , & l’ épaiffeur qu’elle
donne eft en équilibre a v e c la pouffée des terres
qu’ils ont à foutenir. A in fi , en y joignant des contre
forts , ils feront d’un fixièmeau-déffus de cette
même pouffée.
Et quand on n’y voudra point employer de
contre-forts, il fuffira d ’en augmenter l’épaifleur
d’un fixième. Cependant on peut aufîi en augmenter
l’épaiffeur d’un fixième , depuis 9 pieds de
haut jufqu’à 30 feulement, pour rendre ces murs
plus capables de réfifter à l’effort du canon ; car
pour la pouffée des te r re s , cela feroit inutile d’abord
qu’on y joint des contre-forts.
Les contre-forts fe mettent ordinairement éloignés
les uns des autres, de 15 à .18 pieds de milieu
en milieu.
Ce s contre-forts doivent être fondés aufîi bas que
la fondation des murs , & aufîi élevés que le
fommet des revêtements. Leurs proportions fuivent
la règle ci-après.
Sçavoir , pour dix pieds de hauteur , lë contre-
fort doit avoir 4 pieds de lon gu eu r , 3 pieds d’é-
paiffeur à la racine , Si .2 à la queue , laquelle eft
toujours les deux tiers de la racine. La longueur
augmente toujours de 2 p ie d s , à mefure que le
mur s’élève dè 10 p ieds , & l’épaifleur à la racine
d’un pied/
V o ilà les proportions que M. de Vauban leur a
données , mais pour moi je ferois d’avis qu’on leur
donnât la même épaiffeur ;à la queue qu’à fa racine.
Il y auroit un peu plus de maçonnerie , mais
ils n’en foutiendroient que mieux la pouffée des
terres , &. réfifter oient davantage à l’effort du
canon.
Les contre-forts font bons aux murs qui peuvent
être battus .du can on , parce que fi l’on fait brèche
entre deux , ils retiennent ;la terre des côtés , &L
l’empêchent de s’ébouler dans la brèche ; & fi l’on
rencontre , un contr.e-fo'rt, la brèche .eft plus longtemps
à fe faire. .Mais aux murs qui ne peuvent
être battus du c a n o n , comme les contrefcarpes &
les gorges des ouvrages., ils font inutiles. Il vaiit
mieux faire le mur plus épais ; cela ne demande
pas tant de fujétion ni de travail.
J’oufcliois de dire qu’on fait ordinairement un
petit m u r , comme celui L M , qui a 4 pieds de
haut &. 3 pieds d’épaiffeur, lequel eft à -p lom b ,
& foutîent le talut extérieur du parapet au corps
de la place feulement.- Mais je ferois d ’avis de le
fupprimer , & de n’en faire que de>2 à 3 toifes de
chaque côté des angles , où l’on placeroit des guérites
de pierre de taille. Le refte feroit en gazon
fur . Un talut de 6 ou 8 pieds.
Outre que ce feroit une épargne, c’eft que les
boulets qui frappent contre ce m u r , font des éclats
qui bleffent le foldat qui eft derrière le p a ra p e t ,
& l’on à plus de peine à y percer des embral’ures
aux endroits néceflaires.
V o ic i -deux tables toutes calculées pour un
; fixième d e talut ; la première pour les revêtements
q ui foutiennent des-parapets & qui ont des
con tre- fo rtsyô t la fécondé pour ceux qui n’en fou-
tiennerit p o in t, ■ & qui ; n’ont pas de contre-forts ,
tels que font ceux des contrefcarpes & des gorges
des ouvrages.
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