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que c§i venin caché ,. por té par les moitiés * nfeü-
roit pas eu un, grand effet , s’il n avofeété ioutenu
par des chefs qui fe font montrés, $ç. par les
Recours'étrangers que les puiffances liguées avec
l ’empereur ont porté en Efpagne.
En 16 91, Louis XIV fit le fiège de Mons.avant
le temps de i’ouÿertiire Ordinaire des campagnes.
le prince d’Orange vouluyaffembler une armée
*ffez;puiffante pour faire leyer le fiège ; mais M. de
Luxembourg, à qui je roi avoit donné; Je cqm,.
mandement de l’armée d’obfervation , fçut le pla- !
cer fi avantageufement. devant l’ennemi, qu’il le
contraignit de voir prendre la. place fans pouvoir
la fecourir.
Touts les mouvements que M> de Luxembourg
fit faire* à fon armée étoient d’une guerre défensive
judicieufement dirigée, pendant que l’armée
du fo i faifqif le fiège & agiffoit offenfivemenj';
ce qui prouve que les mouyeme'ntjs pour • l’offen-
five & la defenfive peuvent: être pratiqués en
meme temps par une armee, quand ces mouvementé
font bien conduit^.-
Efens cette même année on dey oit ouvrir la
camP^-g11e en Piémont par le fiège de T urin, &
tout étoit prêt; pouf cette expédition; mais les
ordres fde la cour changèrent, & fon ouvrit la
campagne par Jq-fiège de Ça/magnoie*
i L arrivée l’éleveur de Bavière avec un
corps confidérahle de troupes changea la conftitu-
tion de la guerre en ce pays. Elle devint toute
©ffenfive de la part de nos ennemis , quoiqu'ils ne
fuflent Supérieurs qu’en cavalerie;, &. que l’armée
du roi fut; plu$ forte en infanterie,
M. de Çatioat prit continuellement la leçon
de Ses ennemis- jpe régla fes -mouvements que
dur les leurs, en quoi , je ne trouve pas qu’il ait du
etre^Pprouvé ; mais comme la difçùffion de fes
^pn’wments fera faite ailleurs, lorfque la ma-
requerra, je n’en parlerai ici que pour
dire d uW auroient dû être tels , qu’au moins il
?uroit Soutenu , s’il s’-étoit mieux conduit, la guerre
qui fe; fait entre, puiffances égales , au lieu- de .fe
réduire JuUmême à la défenfiye.
- , Je fçais bien qu’après la mort de M. de Lou*
vo is , arrivée au mois de Juillet 11691, les ennemis
de ce minifire perfuadèrent au roi que la guerre
offenfive en Piémont étoit d’une, grande dépenfe
& de peu d’utilité. Je fçais même que le roi envoy
a M. de Chaçfeyfe M. de Çatinat,, pour être
mieux informé-de l’état de cette guerre, pour
concerter avec çe général les moyens d’y feute-
mr une défenfive, èh çqnfervant ce queî’ontavoit
conquis fur M. de Savoie-
Mais tout ce projet pour l’avenir ne devoit
jpas être exécuté d-avance, &■ M, de Catinat
etoit en état par fes forces de foutenir pour le
refte de la campagne , une guerre de Tefpèçe de j
celle qui fe fait entre pu^ances égales., fans, jÿ
commette# pour cela à un événement malheureux,
par-le mauvais fuccqs d’un combat qu’il
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pouvôit éviter, & foutenir cette troifième efpektf
de guerre <, moins fâcheufe que la défenfive.
■x Les amas prodigieux de bled qu’il avoit fait
a Carmagnole , ne pou voient pas lui faire craindre
^on arm^e pût manquer de pain en-deçà du
;ro. ,L.on fçait que. la fertilité du pays ne devoit
pas lui faire appréhender-qu’elle pût manquer de
fourrage.
: Il étoit donc queftion , pour foutenir la guerre
avec égalité , de fçavoir fe placer avantageufe-
ment pour fort infanterie , dans un pays où tout
eft pofte quand on le veut.
Touts ces moyens furent négligés par M. de Ca-
tmat. Campé avantageufement auprès de Carmagnole
, il prit de l'inquiétude d’une marche que
1 ennemi fit en-deçà du Pô , comme pour s’ap-»
procher de Saluces. Il crut qu’il Jui étoit capital
d y arriver avant l’ennemi ; il s’éloigna de (ferma?
gnole par ce mouvement, & en laiffa même en-
fuite former le fiège par un détachement de l’armée
ennemie, dont la plus grande partie étoit
dans le même temps campée dans la plaine de
Revel,
_ Si M. l’éleéleur de Bavière, après avoir pris
Carrnagnqle , étoit yenu camper avec toute fon
! armée dans la plaine de Scarnafis, où elle auroit
en pour .fe fubfiftance tout ce que nous avions
affemble dans. Carmagnole, qui étoit immenfc,
& quen meme-temps M. le duc de Savoie l’eut
joint, en paffant le Pô vis-à-vis de Staffaj-de , il
.eft certain que l’armée du roi auroit eu. bien de
fe peine a repaffer le Pô fi près de rennemi, auquel
elle auroit prêté le flanc, & qu’ell.e ne fe
feroit pa§ retirée à Pignerol farts un échec , ou
tout au moins.fans la perte de fes gros équipages,
en cas qu’elle eût pris fe marche par la montagne.
Cet exemple prouve qu’un général, à qui le
hazard feùl, ou les fautes de fon ennemi, ont
acquis la fupériorité;, doit en profiter fans perte
de temps ; fans .quoi cette fupériorité acquife paç
hazard, ou par une-faute que fôn ennemi aura
faite , mais qui ne fera pas fans remède , n’avance
pas beaucoup les affaires de fon maître.
H Car c’étoit u:ne faute bien grande à M. l’éleéleur
de Bavière d’avoir marché jufqu’à la plaine de
R e v e l, puifque ne pouvant tirer fes vivres que
de Turin , & laiffant l’armée du roi entre Turin
& lu i, il fecommettait continuellement à- avoir
fe§ convois enlevés. ; 1 >. _i
L année i 6p ï produjfit bien des événements, qui
ferv-iront a prouver - de - quelle conféquence il eff
d obferver avec exaéfitude fes règles que j’ai don-»
* portr fe conduire dans les différentes efpèees
de guerres.
Le rpi ouvrit la campagne par le liège de Na-
mùr, qu’il prit malgré lès trayerfes de la fcifon
pluyieufe ,& - malgré, les efforts de M, le prince
d’Orange, qui marcha au fecours de eette place
avec .une puiffanfe armée. .
M. de Luxembourg, avec une armée dobfer-
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dation , fut chargé par le roi de s’oppofer à rentrée
de l’armée de M. le prince d’Orange dans la
Méhaigne. C ’é|ojt une opération de guerre purement
de défenfive. Ce général fe conduifit avec
une capacité infinie dans touts les mouvements
qu’il fut obligé de faire, pour s’oppofer de près
à ceux que JVL le prince d’Orange faifoit devant
lu i, pour fe procurer le moyen d’entrer dans la
Méhaigne avec toute fon armée.
Toutes,fes marches vigilantes, & mefurées avec (
capacité, , furent fi jufi:es , qu’il fut impoflible à
M. le prince d’Orange de pouvoir prendre le
temps de paffer la Méhaigne devant M. de Luxembourg
, quoiqu’infiniment inférieur en infanterie ,
laquelle paroiffoit devoir faire la décifion d’une
affaire où il s’agiffpit de fe donner, par la pro-
teéHon de fon feu, le moyen de porter ,fa cavalerie
de l’autre côté d’un ruiffeau guéabfe en
une infinité d’endroits, & qu’il étoit même facile
à ce prince de couvrir de ponts aux endroits qui
ne fétoient point.
Enfin, M. de Luxembourg fçut fi bien éviter’
d’engager un combat d’infanterie , quoique M.
le prince d’Orange fit touts fes efforts pour l’y
forcer ; il fçut fi bien profiter de1 fa fupériorité en
cayalerie, par les mouvements qu’il fit faire, &
la manière dont il la plaça toujours- hors de portée
de fouffrir du feu de l’infanterie ennemie, &
cependant toujours en état de s’oppofer avec fuc-
cès aux efforts de l’ennemi, qu’il parut toujours
défirer un engagement général, quoique toujours
appliqué à l’éviter.
Cet exemple fait encore fentir combien la fupériorité
du génie de guerre -d’un général, le met
au-deffus de celui qui lui eft oppofé, & qui lui
efl inférieur en vues.
En effet , dans cette occafion , M. le prince ^
d’Orange étoit infiniment fupérieur en infanterie
à M. de 'Luxembourg, & il patoiffoit qu’il n’é-
tpit quaftion pour ce prince que de s’affurer le paf-
fage de. la Méhaigne , afin de pouvoir fous la
proteélion de fon ,feü , déboucher fa cavalerie ,
& la former en dedans de cette rivière, malgré
les charges de la cavalerie de ,M. de Luxembourg.
Cependant ce général, par fe manière de
fe placer, fçut réduire fon ennemi à rimpoflibi-
lité d’engager un combat d’infantèrié, & à la
îrifte néceflité d’être le témoin ocçulaire de la
prife de Namur.
Ainfi, dans cette occafion, d’une aélion pü-
..rement de défenfive, M. de Luxembourg empêcha
l’ennemi de profiter de l’avantage qu’il de-
l voit vraifemblablement attendre de fa fupérip-
rité en infanterie , qui paroiffoit devoir faire la
décifion d’une aéfion , dont le commencement
devoit le regarder uniquement. Par fes mouvements
d’une capacité çonfommée , ce généra] fe
conduifit dans la défenfive , comme s’il eut délire
de trouver lés oçcafions de fe porter à l’of-
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.fenfire J quoique fon unique but fût de faire
prendre paifiblement Namur au roh
En cétte même année 1692 m fe donna ejt
Flandre le feineux combat de Steinherque, dont
fe fuççès, . quoiqu’heureux , ne laiffa pas de faire
blâmer M. de Luxembourg d’un peu trop de
confiancp.
Après fe prife cfe Namur, ce général n’étoit
chargé qu<2nd.e-la confervation des conquêtes , Sf.
d’empêcher que M. le prince d’Orange ne fe
laifit ffe, Cpqrtray , où.M. de Luxembourg vou-
l,oit prendre fes quartiers de fourrages. Pour cet
effet, il; fe tenoit tou jours, affez près de l’ennemi,
fy- fe plaçoit de manière qu’il pût toujours le devancer
.de quelques marches , Jorfqu’ii voudroit
exécuter fon deffein de venir achever la campagne
entre l’Efçaut & fe Lys. < ;
Tout fe monde,31 fçu que M. de Luxembourg
ayoit; un efpion dans .la fecrétairerle de M. le
prince d’Orange , & que cet efpion découvert
fut forcé par ,çe prince de mander à M. de Luxembourg
, que les ennemis dévoient faire le lendemain
un grand'fourrage de fon côté. M. le
prince d’Orange vouloir, par ce faux avis, que
M.‘ de Luxembourg ne prît point d’inquiétude des
tr.oupes qu’il pourroit, par d’autres efpions ou par
fes partis, apprendre qui marcheroient du cô.t,é
de fon armée , & qu’il ne les confidérât que
comme une groffe efcprte commandée pour couvrir
les fourrageurs.
En effet, M* de Luxembourg ne fit pas beaucoup
de cas des premiers avis de la marche des
ennemis, qui, lui furent .donnés par un partifan
qui, .étoit à fe , petjte guerre: ainfi touçe l’arm,ée
ennemie .fe trouva entièrement, fortie des - défilés
qui féparoient les deux armées, & à fe vue du
camp , fans que M. de Luxembourg eût penfe
à faire prendre les armes à fes troupes.
Une briga.aç d’infantjerie qui çouvroit le front
de la cavalerie de la droite , & les dragons même
de la droite furent , attaqués 6c forcés, d’abandonner
leur camp avant que l’armée fut, en bataille.
Le défordre, dans ce commençemen}:, fut fort
grand à fe droite. Cependant la vivacité de M. de
Luxembourg pour former un front, & pour fe
rétablir fur le terrein d’où l’ennemi avoit chaflé
cette brigade d’infanterie, eut un fuccès fi heureux
, 'qu’après un combat fort long & fort rude,
dans lequel l’ennemi pendit infiniment de monde,
ce même ennemi fut pouffé jufques dans les défilés
qu’il avpit paffés , & contraint à une hon-
teufe retraite.
^ Exemple qui juftifie , que non feulement dans
une guerre défensive , mais même dans une aéfion
purement défenfi/e, un général, fupérieur en génie
, fçait fi judicieufement profiter des moindres
fautes de fpn ennemi dans fa conduite pour l’attaque
, qu’il parvient fouvent à changer la nature
de l’aclion , & devient l’attaquant de celui , qui
étoit aggreffeur dans fe commencement del’aû ioiy
M m m m i j