K . Ligne de charriots de bagages.
^ g ne des charriots qui portoient les femmes.
A1M. Chars armés de faulx.
N. Char d Abradate à quatre timons & huit
chevaux.
O. Troupe de chameaux qui épouvanta la cavalerie
de Cræfus.
P» Première place des chameaux.
Q* Terrein qu’occupoient les réferves de mille
chevaux & mille hommes d’infanterie chacune.
R. Réferves Q qui fe font portées furies deux
flancs de l’ennemi.
M ° n comPaf6 cet ordre de bataille, qui eft
exactement celui que décrit Xénophon , f i , dis-je ,
©n le compare à ce que le chevalier Folard nous'
en raconte , on fera furpris de tout ce qu’y ajoute
la fécondé imagination. ( Tom. 3 , pag. 190. ). 11
mt que Cyrus craignoit, il eft vrai , d’être tourné
pris à dos, mais non pas d’être enfermé entre
deux grandes armées. Ses charriots de guerre ne
marchoient point fur une feule ligne , puifqu’il y
en avoit les deux tiers qui couvroient fes flancs,
bes armes à la légère ne formoient pas feulement
une troifième ligne , mais une troifième & une
quatrième. Les flancs de fon armée n’étoient point
couverts d’une longue file de charriots de bagages,
marchant a la queue les uns des autres. Ce n’étoit
point la première ligne de charriots de guerre, mais
la dernière, qui étoit compofée de charriots à tours.
Le prince Perfe n’avoit point l’intention de réduire
les ennemis à ne combattre qu’où il voudroit ; mais
celle de livrer bataille dans la plaine où il avoit
campé ainfi qu’eux la nuit précédente , & il le fit.
Le même auteur parle d’un camp enfermé qui
formoit un quarré long ; mais il s’agit feulement
ici d’un ordre de bataille & nullement d’un camp.
M. de Maizeroi parle de la marche. & de l’ordre
de bataille des Perfes aVec beaucoup plus d’exactitude.
( Cours de taEl. tom. J , pag. 122 & fuiv. ).
Cependant il lui eft échappé quelques légères inad-
vertences. Il dit, {pag. 123, note a ) , que l ’armée
de Cyrus ne formoit qu’une feule colonne , tant quelle
étoit dans la plaine. Mais Xénophon d it, au contraire
, que les bagages y marchoient fur plufieurs
colonnes, stoâAkî- oçpLcûflèç. Alors l’infanterie marchant
derrière , pouvoit, s’il en étoit befoin , paffer
entre ces colonnes, & aller fe former en avant.
Lorfque le terrein fe rétréciffoit, & les obligeoit
de ferrer fur le centre, les intervalles difparoif-
fbient ou devenoient trop petits , & l’infanterie
marchoit fur les flancs, afin que dans le cas d’une
attaque fubite , elle pût aller le mettre en bataille à
la tête des bagages.
M. de Maizeroi dit que Cyrus ordonna au commandant
des charriots de les lancer rapidement
contre l’ennemi ; dès qu’il lé verroit venir à lui
de front, de ne pas attendre qu’il fût trop près,
afin de prendre plus de champ, & d’être alluré
qu’il viendroit à fon fecours. Ce n’eft pas là le
fens de l’auteur Grec & des paroles de Cyrus.
« Je viens a votre fecours , dit-il au commandant
des chars de fa gauche , ( c’eft-à-dire , vous donner
vos inftruéfions ). Dès que vous nous verrez charger
le flanc de l’ennemi , tâchez de percer fa
ligne ». ( L. V i l , pag. 175. E. ).
Dans M. de Maizeroi, ( pag. 130. ) Cyrus dit ,
vous enverrez l’efcadron des chameaux contre le
dernier corps de l’aile des ennemis ; u & dans le
Grec : la cavalerie des ennemis e j l, comme vous
voyeç, a l extrémité de leur aile , èiffiv 01 s yju.'rot
envoyéç contre elle la troupe des chameaux.
M. de Maizeroi paroit croire que les deux ailes
de l’armee de Cræfus fe portèrent fur les flancs
des Perfes par un quart de converfion. {p. 131 ).
Ce mouvement étoit-il bien pôffible aux Lydiens
a leurs alliés, peu habiles dans l’art des manoeuvres
, & difpofés fur un front qui pouvoit avoir
près d’une lieue d’étendue ? Xénophon lève cette
difficulté, en nous difant affez clairement qu’ils
marchèrent par le flanc. Cræfus, dit-il, jugeant
que la phalange avec laquelle il marchoit étoit
plus près des ennemis que fes deux ailes développées
, leur fit un fignal pour qu’elles n’avan-
çaflent p as , mais fe tournalfent au lieu où elles
fe trouvoient. ctÀ*.’ êv yfiçct Elles
s arrêtèrent alors en entier , ,7retv1sç, faifant face
a l^armee de Cyrus , t d tk K vpv 'rçctfevj/.ct.
dfmise» Il eft évident qu’après avoir marché par
le flanc, elles firent face à l’ennemi, l’une par un
a-droite & l’autre par un à-gauche. Ce ne fut pas
ce moment qu’elles prirent pour faire un quàrt
de converfion : car, avant qu’il eût été fini, le
centre de Cræfus , qui étoit alors à peu de diftance
des Perfes, auroit pu être attaqué &. battu. On
pourroit dire que ces deux ailes avoient fait
un quart de converfion , avant de marcher par
le flanc. Mais , puifqu’ils eonnoifloient cette manière
de marcher, il eft vraifemblable que Cræfus
la préféra comme beaucoup plus avantageûfe. Elle
demandoit deux fois moins de terrein pour la première
difpofition de l’armée : elle faifoit difpa-
roltre toutes les difficultés & les inconvénients
du mouvement de converfion , très .difficile fur
un grand front dans la plaine la plus unie , &
par les troupes les mieux exercées. Il me paroit
'donc que l’armée de Cræfus fut d’abord formée
fur trois lignes l’une.derrière l’autre; ce qui demandoit
, comme je l’ai d it, deux fois moins de
terrein. La première fut deftinée au centre : les
deux autres faifant l’une à-droite, l’autre à-gauche ,
marchèrent par le flanc, & fe portèrent fur les
flancs de l’armée ennemie , en obfervant de s’en
éloigner affez pour qu’elles ne puffent pas être
attaquées avant que le centre fût à poitée de les
fecourir : c’eft ce que Cyrus fit obferver à Chri-
fante , & fes exprelfions prouvent évidemment
que ce mouvement fut fait comme je viens de
le dire. « Remarques-tu, dit-il à Chryfante , où ils
commencent la courbure ? » ( c’eft - à - dire, où ils I
commencent à prendre la direéfion pour fe porter J
fur notre flanc. Comme ils prenoient un fort grand
tour, Chryfante répond : je le vois & je m’en étonne, J
car ils me paroiffent déployer leurs ailes bien loin
de leur phalange. Il eft clair par ces mots que l’armée
Lydienne n’étoit pas en bataille à l’ordinaire
fur une feule ligne , puifqu’alors fes ailes auroient
été toutes déployées. Cyrus reprit, il efl vrai ;
mais ils s’éloignent aujji de la nôtre, pourquoi ,
demande Chryfante ? C’efl évidemment, répond le
général, de crainte que leurs ailes ne viennent près
de nous, leur phalange étant loin encore, & que nous
ne les attaquions. Voilà une nouvelle preuve de
mon fentiment. Il eft certain que fi ces ailes marchant
par leur flanc avoient tourné trop près de
leur centre, pour prendre la direéfion qui devoit
les porter fur le flanc des Perfes , elles s’en fe-
roient approchées longtemps avant ce même centre.
Il falloit donc s’en éloigner à une affez grande
diftance avant de commencer à tourner, c’eft-à-
dire, à faire la flexion ou courbure que remar-
quoient Cyrus &. Chryfante. Mais, fi ces mêmes
ailes avoient fait un quart de converfion , le flanc
qui auroit tourné , auroit eu à parcourir un efpace
plus grand d’environ un tiers que le centre : celui-ci
auroit donc toujours été plus près de l’ennemi que
le flanc en mouvement dans chaque aile , & lé
difcours de Cyrus n’auroit eu aucun fens. Cette
preuve pourroit fuffire. Mais il faut ajouter encore
les mots fuivants, qui me paroiffent aller jufqu’à
la démonftration. Comment pourront - ils , objeéte
Chryfante, s’entrer fecourir , étant f i loin les uns
des autres ? Cyrus lui répond : il ejl évident que,
des que ces ailes auront monté au-delà des flancs
de notre armée , alors fe tournant comme en pha-
lange j ( c’eft-à-dire, faifant front vers nou s), ils
marcheront à nous enfemble pour nous attaquer touts
à la fois de toutes parts. L’expreflion, dès que ces
ailes auront monté, ne convient qu’au mouvement
direéi fait en marchant par le flanc, & point du
tout au mouvement de converfion. De plus , fi
ce mouvement avoit été fait , les ailes l’ayant
achevé, auroient fait face en phalange au flanc
des Perfes., & n’auroient pas eu befoin de fe tourner
, c’eft-à-dire, faire l’une à droite , &, l’autre
a gauche, comme il eft dit ici qu’elles le dévoient
faire , & plus bas qu’elles le firent.
J’ai donc exprimé ce mouvement par' les flancs
dans le plan que je donne de cette bataille. Comme
il diffère aufli en d’autres pdints de celui qu’a
donné M. de Maizeroi, je dois rendre compte
des raifons qui m’ont éloigné de fon opinion.
L’auteur. Grec ne dit nulle part qu’il y eût de
la cavalerie à la gauche de l’armée Lydienne. S’il
y en avoit eu , Cyrus auroit employé la moitié
de fes chameaux contre elle , & ne les auroit
pas touts envoyés contre la droite de l’ennemi.
Une autre circonftance prouve qu’il n’y en avoit
pas a cette droite. C y ru s , en donnant fes ordres
à Artagerfe , lui fait remarquer la cavalerie des
ennemis, qui eft la dernière troupe de cette aile.
Son expreflion ne fçauroit être plus précife. Il ne
dit point en général , des cavaliers ou de la cavalerie
, mais expreffément, la cavalerie fl.es ennemis
, rav wote/ueav iw e ïs . Il n’eft point dit
aufli qu’il y eût de la cavalerie à la droite & à la
gauche du centre où étoient les Egyptiens. Ainfi
Cræfus, foit que le terrein lui ait paru plus favorable
, ou qu’efpérant d’envelopper la petite
armée de Cyrus , il lui ait paru fuffifant de mettre
fa cavalerie à l’une de fes ailes , paroit l’avoir
portée en entier, ou prefque en entier, à fa droite.
Cyrus envoya contre elle touts fes chameaux ,
& prenant le refte de fa réferve, compofée de
mille chevaux fuivis de mille hommes d’infanterie ^
il alla charger le flanc gauche des Lydiens. Le
défordre qu’il y mit, &. le tumulte qui s’y éleva ,
fer vit de fignal à Artagerfe. 11 oppofa fes chatneaux
à la cavalerie ennemie , fe porta fur fon flanc $
& contenant fa troupe en habile général , il fe
contenta de preffer fur ce flanc mis dans le plus
grand défordre. Ce fut feulement alors , c’eft-à-
dire quand les deux flancs de l’ennemi furent en
confufion , que les chars qui couvroient les flancs
des Perfes partirent. Cette fucceffion de charges
eft clairement énoncée dans le texte. Abradate
& les chars du front s’ébranlèrent prefque en
même - temps, & fans doute avec eux la cavalerie
Perfanne. Ce qu’elle fit alors ne fe préfume
que parce qu’il eft dit dans la fuite qu’elle revint
viâorieufe aù fecours de l’infanterie preffée par
les Egyptiens. Entourés de toutes parts , ils cef*
sèrent de combattre & n’opposèrent plus que leurs
boucliers aux traits qui les accabloient. Cyrus ju-
geoit trop bien de leur courage pour leur propo-
fer de fe rendre à difcrétion. il leur fit demander
s’ils aimoient mieux périr touts pour ceux qui les
trahijfoient que (Pêtre confervés & traités en braves
foldats. On a vu comment ils le furent.
Il a été dit qu’Abradate blâmoit Cyrus de n’avoir
couvert fes flancs que par une ligne de chars ,
& d’autres lui ont fait le même reproche, mais
fans fondement. Ce général connoiffoit toute la
foibleffe des troupes qu’il avoit en tête. Il fe
montre toujours affuré du fuccès de fes moyens ,
& proportionne par-tout la force de fon ordonnance
à celle de fes adverfaires. Aux Egyptiens
il oppofe une partie de fes chars , toute fa phalange
, & touts fes charriots à tours. Quant aux
Lydiens 8c à leurs alliés , il fçavoit bien qu’ils
ne réfifteroient pas à fes chameaux, à une charge
imprévue fur le flanc, & aux chars qui couvroient
fes flancs. Il fçavoit bien encore que, fi contre
Ion attente, leurs ailes euffent été viélorieufes ,
elles n’auroient pas été arrêtées par quelques charriots
de bagages & un petit nombre d’archers qui ,
ainfi qu’il l’ayoit dit, ne pouvoient foutenir ni le
combat de près , ni celui des traits contre la
multitude des ennemis. La précaution que l’on