
Louis, en fon voyage du Levant ; ordonna que
vingt-quatre Ecoffoifes euflent la garde de l'on
corps j li ce que dit encore Jean Leiley évêque
de Roflë , dans fonhiftoire d’Ecoffe, étoit .pareillement
certain , fçavoir , que ce fut Charles V
qui inftitua la garde Écofl'oilë , & qu’elle fut feulement
augmentée par Charles V I I , cette augmentation
feroit le premier changement remarquable
qui fût arrivé dans cette compagnie ; mais
j ’ai dit que le premier fait eft fans fondement,
quoiqu’il foit rapporté par quelques auteurs Ecof-
fois ; que le fécond a de la vrailëmblance fans
certitude ; & qu’il paroît plus raifonnable de s’en
tenir au témoignage de Louis X I I , que j’ai rapporté,
où il attribue à Charles VII tant l’inftitution
des vingt-quatre gentilshommes de la manche ,
que celles de toute la compagnie Ecoffoife.
Selon la remontrance des Ecoffois, ce fut le
même Charles V I I , j , , .q* ui aux ving°t -q1u a. tre ss.ardes
oe ia mancne , en ajouta un vingt-cinquième ,
avec le titre de premier gendarme ou homme-
d’armes de France.
Ce titre de premier homme d’armes de France’
eft fort firTgulier. La plainte ou remontrance des
gardes Ecoffoifes affurant que ce fut Charles VII
qui créa cette charge , qu’il ajouta ce premier
homme- d’armes.de France aux vingt quatrequ’on
appelle aujourd’hui gardes de la manche , ne nous,
dit point fur quoi ce titre étoit fondé, ni quelles
étoient les fonctions de cet officier, ni quelfutle
motif du Roi Charles V I I en l’incorporant dans
cette troupe des gardes Ecofloifes. Notre hiftoire
ne nous en inftruit point non plus. Voici ce que
j.e puis conjecturer là-deffus.
Charles V I I , dans la.réforme qu’il fit de la
milice Françoife, fut l’inftituteur des quinze compagnies
d’hommes-d’armes, appellées les compagnies
d’ordonnance ; & parmi ces compagnies ,.
celles des gendarmes Ecoffois eut le premier rang ,
& elle l’a encore dans la gendarmerie. Il y avoit
dans chaque compagnie d’ordonnance un gendarme
qui portoit le titre de premier homme-
d’arme ; c’eft ce que nous apprend M. de Mont-
gommeri de Corbofon , dans fon traité de l’Ordre
de la Cavalerie Françoife. Le premier gendarme ,
dit-il, qui eft comme l’un des membres de la compagnie
; & plus bas v le premier gendarme doit
être toujours au premier rang.
Le roi Charles VII voulut en avoir auffi un
dans fa compagnie d’archers , pour commander
fous le capitaine , les vingt-quatre autres appelles j
aujourd’hui gardes de la manche : car il eft certain
que ces vingt-quatre étoient, pour ainfi dire, de
la garde immédiate de la perfonne du R o i , &
S fils portoient feuls, comme je le dirai bientôt ,
titre d’archers du corps. Il tira cette efpèce
d'officier de la compagnie des gendarmes Ecoffois
lui conferva fon titre d’homme-d’armes ; & comme
la compagnie des gendarmes Ecoffois étoit la première
de la gendarmerie, & qu’il approcha ce
gendarme de fa perfonne , pour lui donner le
commandement fur les vingt-quatre qui faifoient
fa. principale garde, il l’honora du titre de pre—
mier gendarme de France. C ’eft-là ce qui me
paroît de plus vraifemblable fur ce fujet.
Depuis longtemps cette charge de premier
homme-d’armes de France eft un titre fans fonctions
; & j ’apprends de celui même qui le porte
aéluellement, qu’il n’eft plus dans le corps, Ôl
qu’il n’a que les appointements de cette charge
fans exercice".
Mais le plus grand changement qui fe foit fait
dans la compagnie Ecofioife , c’eft qu’elle n’eft-
plus Ecoffoiie que de nom, & que depuis très
longtemps les charges. & les places de gardes ne-,
lë donnent qu’a des .François. Ce changement ne
s eft fait que peu-à-peu ; il commença dès le temps
de François Ier, fous lequel Jacques de Lorges,
comte de Montgommeri , fut capitaine de la compagnie
Ecoffoife ; Gabriel, de Lorges ,, comte de
Montgommeri, £1$ de Jacques,-fut auffi capitaine
de la même compagnie fous Henri II. Cependant
les gardes Ecoffoifes ne trouvèrent pas-
fort mauvais que cette charge eût été donnée à.
ces deux feigneurs , parce qu’ils les regardoient.
comme Eçoflois d’origine, d’autant que les Mont-
gpmmeri fe prétendoient defceiidus des. comtes.
d’Egland, maifon d’Ecoffe..
Mais, difent les gardes Ecoffoifes dans la remontrance
de 16 12 , que j’ai déjà plusieurs fois,
citée : « Depuis que le comte ( Gabriel ) de
Montgommery , qui a été le dernier capitaine-
d’eftraâion Ecoffoife de cette compagnie, a été
dépoffédé par la mort de Henri II , on a pourvut
des François à cette charge qui ont ouvert la.
porte aux autres qu’Ecoffois , d’avoir des places,
dans cette compagnie, encore que par plufieurs.
années après leur admiffion. ils n’ayent exercé
leurs charges, lefquels ont fi bien multiplié, qu’à
cette heure ils tiennent les deux tiers des places,
de ladite compagnie ; &. parmi icelles plufieurs.
places d’honneur, comme de premier gendarme
de France , des exempts extraordinaires ,. du mâ-~
réchal-'des-logis. Le privilège des clefs , la garde
du choeur de l’églife, le rang de la compagnie:
aux cérémonies ont été rognés ôc pervertis contre
la coutume de cette compagnie* Enfin tout moyen*
eft ôté dorénavant aux Ecoffois d’y entrer, ou à
ceux qui y font d’être avancés, fi ce n’eft à force,
d’argent. La lieutenance, enfeigne , places d’é.~.
xempts & archers fe vendant contre les ordonnances,
depuis quatre ou cinq ans. en-çà , &c. »„.
Il paroît, par cet extrait, que ce fut principalement
fous les règnes de François II , de Charles
IX , de Henri I I I , & de Henri IV qu’il* y eut
beaucoup de changement dans la1 compagnie-
Ecoffoife. On voit en effet par Fhiftoire , qu’eu
i 367, c’eft-à-dire dans les premières années .du,
règne de Charles IX , le capitaine n’étoit ni Ecôf-
fois ni originaire d’Ecoffe ; car alors c’était M..cte
toffe ^ gentilhomme François. Dans quelques
ntanuferits qu’on m’a communiqués là-deffus , on
cite un rôle des gardes Ecoffoifes de cette année
1 567 > où ce gentilhomme eft nommé avec la
qualité de capitaine; mais la plupart des gardes
etoient encore Ecoffois. Selon le joie de 1599 ,
St félon la relation du facre de Henri IV , c’étoit
M. de Chateauvieux qui étoit alors capitaine de
cette compagnie ; mais le lieutenant &. la plupart
des gardes étoient Ecoffois. A in fi, depuis le
comte de Montgommery, fous Henri I I , il n’y
a pas eu de capitaine natif ni originaire d’Ecoflë.
Il eft pareillement confiant qu’en 1612 il y avoit
encore plufieurs officiers & gardes Ecoffois,
puifque c’eft en leur nom que fe fit alors la remontrance.
Cette remontrance avoit été précédée de quelques
négociations au fujet, tant de,1a compagnie
de la garde Ecoffoife,_ que de celle des gendarmes
Ecoffois. Parmi-les additions au mémoire du fieur
de Caftelnau-Mauviftière , ambaffadeur en Ecoffe
du temps, de Henri I I I , on trouve une lettre de
ce feigneur, écrite à Marie Stuart, Reine d’Ecoffe,
datée du 20 de mai 1.584, où. il lui, parle en ces
termes : « Le Roi vôtre fils demande confeil au
R o i , fon bon oncle, de ce qu’il a à faire ; que
la compagnie des gendarmes Ecoffois foit remife
& envoyée en Ecoffe pour quatre ans ; qu’il n’y
ait point de François aux gardes Ecoffoifes, &
qu’un capitaine de la nation y commande comme
anciennement.».
La plainte des Ecoffois dit encore : « que les
remontrances des Ambaffadeurs d’Ecoffe , tant
ordinaires qu’extraordinaires , font intervenues
envers les rois de France pour la confervation de
la compagnie Ecoffoife ; & les Ecoffois ne préfen-
tërent leur requête au commencement du règne
de Louis XIII , qu’après què le roi de la Grande
Bretagne eut commandé à fon ambaffadeur réfi-
dant en France, d’intercéder envers leurs majeftés
à ce que leurs plaintes fuffent ouïes ôt juftice leur
fût rendue.
Mais toutes ces inftances n’eurent pas. grand
effet jufqu’au temps de Henri IV , & elles n’en
eurent aucun même alors, en ce qui regardoit la
charge de capitaine des gardes de la compagnie
Ecoffoife.
Les chofes apparemment auroient été remifes fur
l’ancien pied à cet égard , fi François I I , qui avoit
époufé Marie Stuart, Reine d’Ecoffe, eût vécu ;
mais la mort précipitée de. ce prince , le retour de
la reine d’Ecoffe dans fes états , & les malheurs
qui lui arrivèrent, fuient caufe qu’on ne donna
pas beaucoup d’attention à cette affaire. De plus ,
dans la fuite l’héréfie qui s’empara de l’Ecoffe, &
qui mit les efprits des gens du pays dans une dif-
pofition toute contraire à celle où ils étoient depuis
tam de fiècles à l’égard des François, indifpofa
réciproquement la Cour de France envers l’Ecoffe,
& l’on ne crut pas la perfonne de nos Rois, qui
étoient hautement déclarés contre les nouvelles
erreurs, allez en fureté entre les mains de gens
qui en etoient infeélés , ou qui pouvoient avoir
liaifon avec ceux qui l’étoient* C ’eft pourquoi à la
place des Ecoffois qui mouroient ou qui fe reti-
loient , on fubftituoit des François catholiques
auxquels il étoit plus naturel de fe fier.
Il faut encore ajouter que les trois royaumes
ayant été réunis dans la perfonne de Jacques I e r ,
a qui l’on donna le titre de roi de la Grande
Bretagne, les intérêts des Ecoffois étoient devenus
communs avec ceux des Anglois. Or comme l’Angleterre
étoit de temps en temps en guerre avec
la France, l’Ecoffe devenoit auffi ennemie de ce
royaume ; au lieu qu’autrefois , avant la réunion
des trois couronnes, c’étoit un intérêt effentiel
pour la France & pour l’Ecoffe d’être alliées entre
elles, & de fe témoigner une confiance réciproque.
Cependant Henri IV , après la paix de Vervins,
& après avoir réglé fon état & fa maifon , eut
beaucoup de considération pour ]*i compagnie
Ecoffoife. C ’eft ce que nousapprenons par Honfton,
gentilhomme Ecoffois , qui avoit été dix-neuf ans
officier dans cette compagnie : car voici comme
il parle dans un livre intitulé : VEcoffe Françoife ,.
imprimé en 1607, & dédié à Henri, prince de
Galles , fils aîné d u-roi Jacques. Ce Henri mourut
jeune , & laiffa le trône à Charles Ier , fon cadet,
qui portoit alors le titre de duc d’Y orck, & ne
prit celui de prince de Galles qu’en 1615 : voici
dis-j-e , comme parle cet officier dans fon livre
intitulé : l’Ecoffe Françoife.
« Cet invincible roi , Henri I V , à préfent
régnant, leur donne ( aux gardes Ecoffois ) des
avantages , lefquels ils n’avoient jamais reçus du
temps de fes devanciers, ôt fa juftice ne permet
pas que l’ordre en foit altéré ni enfreint. ».
« Ainfi l’on voit 1®. que le capitaine des gardes
Ecoffoifes porte toujours le nom & le titre de premier
capitaine des gardes-du-corps des rois de
France.. . . ce qui a toujours été obfervé depuis'
l’inftitution des autres compagnies Françoifes.
« 2°. Le capitaine des gardes Ecoffoifes commence
toujours l’année, & fert le premier quai-
tier ; & fi d’aventure ledit capitaine fe trouve en
cour , lorfque quelque cérémonie furvient, il peut
prendre le bâton & fe mettre en font rang , encore
qu’il ne foit point en quartier. »,
« 3°. Et au facre des rois ledit capitaine fe
tient le plus près de la perfonne , en fon rang &
place ; & la cérémonie parachevée , la robe lui
appartient ; & cela même , encore que ce ne foit
durant fon q u a r tie r c e qui s’èft toujours obfervé-
jufqu’à préfent. »
« 4°. Le roi fai fan t fon entrée en quelque ville
de fon royaume.. . . les clefs de ladite ville étant
préfentées à fa majefté , font baillées, puis après ,
de la main du r o i, au capitaine dëfdites gardes
Ecoffoifes , & , en fon abfence, à fon lieutenant,
enfeigne ou exempt, nonobft^nt que ladite entré©