
néceffaires ; qu’il Toit inftruit des avenues par oh
les ennemis pourroient tomber fur le quartier, afin
de diftribuer fes patrouilles, & de placer fagement
fes partis avancés ; qu’il ait connoiffance de la
fituation du fort &. du foible dé fon quartier ; ce
commandant, dis-je , tiendra toutes les nuits les
foldats au pied de leurs armes. Sans ces précautions,
il pourroit bien éprouver ce que, dans ce
fiècle, nous avons vu arriver à un certain .régiment
, q u i, pour les avoir méprifées, fut pris par
les Allemands. Le commandant de ce quartier,
plus attentif à chercher le repos qu’à veiller à la
l'ureté de fes foldats, les âvoit laiftés aller fe coucher
dans les lits des habitants, avant d’avoir fermé
l’entrée aux ennemis.
S’il y a quelque vieux château ou quelque édifice
fort pour fon-affiette, mettez-y une bonne garde ,.
afin qu’il puiffe fervir de retraite aux troupes dir
quartier, & que les ennemis ne s’en emparent
pas, parce que de ce porte, qui commande ou
qui enfile les rues , ils pourroient vous incommoder
beaucoup.
On comprend aflfez qu’il faut mettre une garde
à chaque porte ; j’ajoute feulement que, s’il y en
a un grand nombre , ©n doit faire murer celles
qui font lé moins néceffaires pour le commerce
des habitants. v
On pofte au milieu du lieu le bivac ou la grande
garde, pour accourir où l’on entend-quelque bruit.
Quand les troupes font logées dans les cafernes,
on y établit un piquet.
Il ne faut jamais omettre de faire marcher des
patrouilles dans les rues, quand ce ne feroit que
pour empêcher les querelles .& les vols. Dans les
quartiers où il y a quelque danger, il eft abfolu-
ment néceffaire de mettre la nuit une patrouille
en campagne , & de la faire précéder de temps
en temps par des partis & des efpions, pour
prendre langue.
Il y aura d’un quartier à l’autre des patrouilles
qui changeront fouvent de route , afin que les
ennemis ne les enlèvent pas dans quelque embufcade
, & qu’ils les rencontrent dans leurs marches
pù ils les attendoient le moins.
Les commandants des quartiers auront auparavant
convenu enfemble du mot de guet, qu’ils
donneront chacun des jours fuivants aux patrouilles
, & des divers endroits où chaque, jour
elles fe joindront pour fe communiquer ce quelles/
auront découvert par elles-mêmes & ce qu’elles
auront appris des payfans de la campagne.
Ces patrouilles ne fervent pas feulement pour
'éviter une furprife , mais encore une embufcade ,
que les ennemis pourroient dreffer aux troupes de
vos quartiers, fur leur marche ; elles fervent auffi
à empêcher que les ennemis ne vous inquiètent
par de fauffes alarmes , & qu’ils n’enlèvent les
trovpeaux , les partants, les voitures & les contributions
que les peuples envoyent au quartier.
Au lieu de huit ou dix hommes dont on compofe
la patrouille ordinaire, il fera à propós d’envoyer
quelquefois des patrouilles de deux ou trois cents'
hommes , afin de contenir les ennemis, q u i, par
des partis un peu fupérieurs en nombre, harce-
leroient continuellement ces petites patrouilles,
& , fans beaucoup de peine, en enleveroient de
temps en temps quelques-unes. '
11 eft d’ufage de pofer, pendant le .jour, des
fentinelles'fur les plus hauts clochers &. fur les
tours, d’où l’on découvre de tout côté la campagne
; mais li le quartier eft dans un lieu bas ,
on met le jour des gardes avancées.
On ne doit pas omettre les précautions que je
confeille , quoique les ennemis foient loin , principalement
lorfque le pays , qui eft entre eux ÔC
vos quartiers , n’eft pas porté pour votre fou-
verain. C ’eft ce que j’ai prouvé en traitant des
I furprifes.
J’avertis pourtant que vos gardés ne doivent pas
être fi abfolument nombreufes, qu’en peu de jours
les troupes foient trop fatiguées ; ce qui feroit
caufe que, pour chercher le repos, elles ne feroient
plus fur leurs gardes : d’ailleurs des foldats qui
ne peuvent pas réfifter à un trop grand travail,
tombent bientôt malades'; ce qui augmente alors
la fatigue des autres, parce qu’outre les gardes,
les patrouilles & les rondes qu’il y a dans les
quartiers, il faut continuellement faire des détachements
pour les courfes & le recouvrement des
contributions. La bonne règle eft que le foldat ait
quarante - huit heures de repos après vingt-quatre
heures de travail ; il faut néanmoins avoir attention
que les gardes foient allez fortes pour foutenir le
©hoc dès qu’on donne l'alarme, jufqu’à ce qu’elles
ayent été renforcées par les troupes q u i, par
avance doivent être deftinées, par un ordre
fecret, ipour accourir à chaque pofte e ç cas d’alarme.
Au rëfte, les officiers ne doivent pas, fur ce
que je viens de dire , prétendre exempter leurs
foldats &. fe difpenfer eux-mêmes du travail né-
ceffaire pour la fureté & Je bon ordre du quartier.
Il eft de la fageffe du commandant de réfifter
à propos aux inftances des colonels, qui s’inté-
reffent toujours trop pour le foulagement de leurs
régiments.
Les précautions que le gouverneur d’une place
nouvellement conquife doit prendre, & dont j’ai
parlé en traitant des fiches ~3 conviennent auffi à
un commandant de quartier , lorfque la fidélité
des. habitants eft fufpe&e. J’ajoute ici qu’il eft
important que les commandants de vos quartiers
ayent dans ceux des ennemis des efpions , qui
leur donnent avis des mouvements qui s’y font ,
& des troupes qui arrivent de nouveau fur la
frontière ou qui s’en éloignent ; ce qui fervira ,
d’une part, pour vous tenir fur vos gardes, & de
l’autre , pour tenter quelque entreprife, à laquelle
il vous fera plus aifé de réuffir, pendant qu’une
grande partie des troupes ennemies s’eft ecartçç
pour faire des incurfions ou pour quelque autre
expédition.
Lorfque le pays n’eft pas affectionné pour votre
prince , les foldats n’iront point féparément dormir
dans les différentes maifons des habitants ; mais on
deftinera pour les troupes quelques édifices, où
l’on fera tranfporter les lits que ces mêmes habitants
dévoient fournir, afin que,les foldats foient
affemblés la nuit dans ces. édifices, qui ferviront
alors comme de cafernes.
Toutes les fois qu’on logera les officiers ou les
foldats dans les maifons particulières, on- aura
attention de ne pas mettre des hommes turbulents
& débauchés dans celles où il y a des filles & des
femmes d’honneur, principalement fi leurs pères
ou leurs maris font jaloux.
Les fergents & les capitaines , par rapport à
leurs compagnies ; le commandant & le major du
quartier, par rapport à toutes les troupes, auront
la lifte de la rue & de la maifon où chaque officier
& chaque foldat font logés, afin de pouvoir les
affembler à la fourdine, fans qu’il foit befoin de
tambours, parce que fi les efpions ou les partis
que les ennemis peuvent avoir dans ce voifinage,
entendoient le bruit des caiffes, qui la nuit fe font
ouir de loin , ils lés avertiroient que vous vous
préparez à quelque entreprife.
Je crois, qu’il faudrait donner à chaque quartier
deux ou trois pièces de canon , & même davantage
, que l’on tireroit de l’artillerie de l’armée ou
des places voifines ; elles ferviroient non-feulement
pour 1$ défènle , mais encore pour pouvoir, en
très peu dé temps, donner avis à touts les quartiers
que l’un d’eux eft attaqué. Pour cela , on
convient auparavant du nombre des coups de
canons qui doit diftinguer chaque quartier, afin
que les autres accourent au fecours , dès que ceux
qui font à la drcjite & à la gauche de celui qui
eft invefti auront répété le même fignal qu’il
aura fait/
Quand même ces coups de canon ne pourroient
pas être ouis d’un quartier à l’autre , ils feront
entendus des patrouilles dont j’ai parlé un peu
plus haut, qui en donneront avis à leur quartier.
Ces avis pourront auffi être portés aux divers
quartiers , ü les commandants ont eu la précaution
de fe gagner quelques payfans des villages & des
maifons de campagne des environs. Au défaut de
canons, on peut fe fervir de fufées volantes & de
gros flambeaux d’illumination, comme je le dirai
dans la -fuite.
On m’objeCtera que les ennemis, qui auront
deffein d attaquer un de vos quartiers, détacheront
un parti pour donner l’alarme à un autre, afin que
touts les quartiers aillent au fecours de celui qui
eft fauffement alarmé , & qu’ils ne fecourent pas
celui que les ennemis iront peu -après véritablement
invertir , & où par conféquent ils trouveront
moins de réfiftance. Je réponds qu’©n peut éviter
cet inconvénient, fi le quartier alarmé fufpend le
fignal, pouf demander du fecours, jufqu’à ce
qu’il fe voye certainement invefti, parce que les
troupes de ce quartier pourront fe défendre en
attendant du fecours, fi elles y font retranchées
de la manière que je l’ai dit. En fufpendant ainfi
le fignal, pour demander du fecours, jufqu’à ce
qu’on foit bien affuré du deffein des ennemis, on
évite encore que, par de fauffes alarmes, ils né
mettent vos troupes dans des mouvements continuels.
Les commandants des quartiers deftinés à fe-
côurir réciproquement, conviendront entre eux
de l’endroit où toutes les troupes du fecours
doivent fe rèndre-, fuppofé que l’un des quartiers
foit attaquéi, afin de continuer de-là leur marché
en nombre fupérieur aux ennemis, qui autrement
pourroient battre les troupes du fecovirs à mefure
qu’elles arriveroient féparées les unes des autres.
Ce lieu d’affemblée doit être changé autant de fois
que les ennemis auront obligé les troupes du fecours
de s’y rendre , parce qu’ils pourroient y
former une embufcade, pour défaire vos détachements
à mefure qu’ils arriveroient féparés.
Les troupes d’un quartier, qui découvrent un
parti ennemi, ont à foupçonrier qu’il y a un peu
plus avant une embufcade fupérieure en nombre
à tout le quartier. Dans cette crainte, ne détachez
fur ce parti qu’une' troupe de cavalerie d’un tiers
plus nombreufe : fi elle eft chargée & obligée de
revenir, faites avancer un corps d’infanterie jufqu’à
certaine diftancé feulement, d’où, à la faveur
des murailles" & des haies des jardins, il puiffe
fe retirer en fureté. Louis Melzo, pour prouver
qu’il ne faut pas détacher trop de monde fur un
parti ennemi, donne cette excellente raifon : « s’il
n’y a point d’embufcade, dit-il, quelques hommes
de plus fuffifent pour battre le parti ; & s’il y a
une embufcade fupérieure en nombre à tout lé
quartier, vous rifquerez d’autant plus de monde ,
fans aucun avantage, que votre détachement fera
plus confidérable ».
Lorfque le commandant d’un quartier apprend,
par fes' efpions, ou par les perfonnes avec qui il
eft en intelligence , que -lés ennemis , avec des
troupes fupérieur es en nombre aux fiennes , fe
font mis en embufcade dans un certain endroit
bien défigné, il concerte fecrétement avec les
commandants des quartiers voifins, de quelle
manière ils pourront furprendrc les troupes de
l’embufcade. J’en donne les moyens, eu traitant
des furprifes.
Les quartiers qui fe trouvent féparés des autres
par quelque grande rivière, ont befoin d’une bonne
provifion de munitions & de vivres , parce qu’il
peut arriver que les eaux venant à groffir , on ne
pourra point, pendant plufieurs jours, paffer ni à
gué , ni fur les ponts, ni même fur des bateaux,
&, alors les ennemis profiteroient peut-être de
cette conjoncture pour affembler leurs quartiers,
afin de bloquer ou d’attaquer le v ô tre , q u i, dé-
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