
pour les tirer de loin , ou s’il s’agiffoit de garder
un défile , & dans quelques autres occafions pareilles.
Quand ils font de garde au Louvre , ils ont
le moufqueton avec l’epée, & la fentinelle a toujours
le moufqueton fur l’épaule : ils l’ont fufpendu
au côté gauche, la croffe en haut, quand ils accompagnent
le roi à cheval , au contraire des mouf-
quetaires, qui portent la croffe en bas. Lorfque
le roi entre dans quelque ville de guerre, ils ont
1 epee nue a la main , &. en quelques autres endroits.
Dans 1 état de la France , de 16 6 1, il eft marqué
que la moitié des gardes portoit la pertuifane,
& l’autre moitié la carabine ; mais cela ne regar-
doit que le fervice de la cour.
La bandoulière qu’ils portent, a rapport à leurs
armes , & je la crois auffi ancienne que leur infti-
tution. La raifon qui me le perfuade, eft que la
bandoulière eft commune à touts ceux qui ont
porté autrefois comme eux le nom d’archer, &
qui le portent encore aujourd’hui, comme les
archers du guet, les archers des maifons-de-ville ,
jufqu’aux gardes-bois. C ’étoit à cette efpèce de
baudrier qu’étoit attaché leur arc, & les gardes
du corps y attachent encore aujourd’hui leur moufqueton
ou leur carabine. Les gardes des princes
qui en ont, portent auffi la bandoulière, par la
même raifon que, dans leur inftitution, ils étoient
auffi archers. Ils, ont ce titre dans les relations
des facres, des entrées, des obsèques des rois,
& dans le temps qu’il étoit en ufage pour eux
auffi bien que pour les gardes du corps. Les gardes
de la manche ne portent plus de bandoulière.
Les archers qui portent encore aujourd’hui ce
nom, ont leur bandoulière chargée ou des armes
du ro i, ou de celles de la v ille, ou de quelque
autrë marque ou devife ; mais la bandoulière des
gardes du corps eft toute unie & fans devife ; le
tond eft d’argent, parce que la couleur blanche
a toujours été la couleur Françoife, foit dans les
drapeaux , foit dans les écharpes ; c’eft pourquoi
la bandoulière de la compagnie Eeoffoife , qui eft
la plus ancienne, eft de blanc ou d’argent plein.
Quand les autres furent inftituées, on ajouta une
autre couleur à chacune pour les diftinguer. La
première & la plus ancienne compagnie Françoife,
dont M. le duc de Villeroy eft aujourd’hui capitaine
, 6c dont le marquis , fon fils aîné, a la
furvivance, a le verd ajouté à l’argent; celle dont
M. le duc d’Harcourt eft capitaine, a le jaune
avec l’argent, & celle de M. le duc de Charoft
a le bleu avec Fargent. Je crois que ces couleurs
n’ont point changé depuis l’inftitution de chaque
compagnie. Les houffes fuivent la couleur des
bandoulières, excepté la compagnie Eeoffoife qui
les porte rouges.
Du Haillan , dans fon livre intitulé , de l'état
des 'affaires de France , dit que , de fon temps,
c ’eft-à-dire, du temps de Charles IX & de Henri I I I ,
il y avoit encore une différence entre les gardes
Ecoffoiles & les gardes Françoifes. « Le roi, dit-if v
j a d’autres compofées de François & d’Ecoffois*
Les Ecoffois, à la différence des François, portent
la cafaque blanche, femée de paprilottes d’argent,
& les François la portent de la couleur du roi ,
avec fes devifes, & les uns les autres portent la
hallebarde fur l’épaule. Les gardes de la manche
ont encore leur cafaque ou hoqueton blanc,quand
ils font en fonction. C e hoqueton repréfente allez
bien l’ancienne cotte d’armes. Les autres gardes
! ont retenu la couleur des livrées du roi dans le
jufte-an-xorps bleu. |
Pour finir cet article , il me relie à parler des
étendards des compagnies des gardes du corps. Ces'
étendards ne font point aujourd’hui portés par
les officiers qui ont le titre d’enfeigne.
Dans le temps que la lance étoit l’arme ordinaire
dans les combats, rien ne pouvoit empêcher l’en—
feigne ou le guidon d’une compagnie de gendarmerie
ou de gardes du corps de porter fon étendard
, d’autant que cet étendard même n’étoit
qu’une lance qui ne l’embarraffoit pas beaucoup-
plus que les autres lances n’embarraffoient ceux
qui les portoient ; car il y avoit fouvent auffi des
banderoles au bout de ces lances ; mais , depuis
que l’ufage des lances a été aboli, & qu’on ne
combat plus à cheval qu’avec l’épée & le piftolet,
l’enfeigne, dans les troupes de la maifon du roi 9
portant fon é ten d a rdn e pourroit guères fe fervir
de l’épée , & encore moins du piftolet; & je crois
que c’eft la raifon pour laquelle il ne le porte
point qu’on le met aujourd’hui entre les mains
d’nn fimple garde du corps, lequel a cette com-
miffion & une penfion qui y eft attachée , avec
la qualité de porte-étendard. 11 le porte au milieu
du premier rang , tandis que F enfeigne combat à
la tête.
L ’étendard des trois compagnies Françoifes des
gardes du corps eft une pièce de taffetas quarrée 9
qui eft attachée au bout & à côté d’une lance ;
ceux de la compagnie Eeoffoife font de même ,
excepté celui de la brigade commandée par le
premier enfeigne. Cet étendard eft un peu plus
long que large, & fendu par le bout. Je ne fçaurois
deviner la raifon de cette différence , fi ce n’eft:
que telle étoit la figure de leur étendard dans leur
inftitution , & qu’ils ont voulu garder cette marque
d’ancienneté dans le premier enfeigne.
Là couleur de l’étendard fuit celle de la bandoulière
; ainfi celui de la compagnie Eeoffoife eft
tout blanc ; celui de la compagnie de Villeroy eft
verd ; celui de la compagnie d’Harcourt eft jaune ,
& celui de la compagnie de Charoft eft bleu. La
devife en broderie d’or eft un foleil éclairant le
monde, & , pour ame, ces mots : nec pluribus
impar.
On ajoute à chaque étendard une écharpe d’une
aune de taffetas blanc, qu’on attache au-deffous
du fer de la lance : c’eft afin de marquer que c’eft
un étendard François , & qu’il foit vu de plus
loin pour le ralliement après une charge. Touts
les étend ardsjles troupes du roi en ont de meme.
Je traiterai encore ici en peu de mots une quef-
tion qui me fut propofée il y a. quelque temps ; fça-
voir, fi les gardes du corps font, dans leur origine ,
une garde à cheval. La raifon qu’on m’allégua pour
en douter , étoit que leur garde au Louvre fe faifoit
à pied. Il ne me fut pas difficile de répondre à
cette queftion , en difant que, dans leur inftitution,
ils étoient, comme aujourd’hui, une garde à pied
ôc à cheval pour garder le roi, quand il fortoit. La
raifon e f t , i° . qu’ils furent inftitués pour être là
garde du prince par-tout où il fe trouvoit, en
campagne comme au Louvre ; 2°. que , quand le
roi alloit à l’armée, ils l’y fuivoient à cheval. Cela
fe peut prouver par divers endroits .de notre histoire
> mais il fuffit de citer Philippe de Comines
q ui, parlant de la bataille de Fornoüe, dit que
le roi Charles VIII y fit mettre à pied fes archers,
au lieu que nous voyons que les gardes à pied
fervent auffi à pied dans les armées, foit que le
roi y foit préfent, foit qu’il n’y foit pas. Ainfi font
les gardes Françoifes & les gardes Suiffes , &
ainfi ont fait de tout temps les Cent-Suiffes .dans
les cérémonies & à la guerre. Enfin un auteur
qui écrivoit du temps de Henri I I , traitant des
gardes du corps de ce temps-là & de ceux des
règnes précédents, les appelle une garde à cheval.
« Les rois de France, dit-il, fe font fait une garde
à cheval de quatre cents hommes, qu’on appelle
archers de la garde, parce que, dans leur inftitution
, ils avoient l’arc pour arme. Nos rois leur
entretenoient des chevaux comme aujourd’hui, ou
ils leur donnoient de quoi les entretenir n ; ajoutez
qu’ils n’ont point de drapeaux , mais des étendards
qui font la marque de la cavalerie. De plus , la
première compagnie Françoife, ainfi que je l’ai
dit ci-deffus, fut inftituée par Louis XL, & formée
des deux cents archers à cheval, qui auparavant
étoient à la fuite des cent gentilshommes du roi.
Enfin, quand les officiers des gardes du corps font
faits brigadiers d’armée , c’eft toujours dans la
cavalerie. Les officiers des gardes du corps étant
en fervice , ont toujours eu leur place au plus près
de la perfonne du ro i, auffi bien que les vingt-cinq
gardes de la manche de la compagnie Eeoffoife,
auxquels on donnoitSpécialement le titre d’archers
du corps. Ce titre feul montre ce que je dis. Ils
partageoient cet honneur avec les deux cents gentilshommes
: ceux-ci marchoient immédiatement
devant le ro i, comme on l’a vu par l’ordonnance
de Henri I I I , rapportée ci-deffus ; & les gardes
du corps marchoient immédiatement derrière ce
prince , & de forte qu’il étoit entouré de ces deux
efpèces de gardes. La chofe parle d’elle-même.
Après tout , c’eft Louis le Grand qui a mis les
gardés du corps en plus grand honneur que jamais ;
il n’a pas eu fujet de s’en repentir, eu égard à
la valeur avec laquelle_.il en a été fervi.
Par ordonnance du 1.5 décembre 1775, chacune
des quatre compagnies des garcles-du-corps eft
compofée d’un capitaine, d’un aide-major, de deux
lieutenants commandants d’efeadron , de trois lieutenants
, de dix fous-lieutenants, de deux porte-
étendards , de deux fourriersd e dix maréchaux-
de-logis, de vingt brigadiers, de deux cents quatre-
vingt gardes, d’un timbalier &c de cinq trompettes ,
formant deux efeadrons, & dix efeadrons dans
les quatre compagnies : chacune d’elle a toujours
de fervice auprès dé fa majefté un demi-efeadron
qui eft relevé touts les trois mois.
Il y a de plus pour le fervice de la cour deux
lieutenants aide-majors généraux, un fous-lieutenant
fous-aide-major &. un fourrier-major.
Privilèges des gardes-du-corps.
Comme les quatre compagnies des gardes du
corps approchent de fi près, la perfonne de nos
rois, & qu’il eft de la dignité de fes prin<j*s , que
ceux de leurs fujets qui ont cet honneur, ayent
quelque marque de diftin&ion , ils leur ont accordé
divers privilèges. 11 y en a pour les officiers
& pour les ftmples gardes. Je commencé par les
officiers.
Les capitaines des gardes, non-feulement prêtent
le ferment entre les mains du roi , mais encore
ils le font ayant l’épée au côté. Ce privilège de
prêter ferment entre les mains du r o i, n’eft pas
auffi ancien que l’inftitution des compagnies des
gardes : les capitaines faifoient autrefois le ferment
entre les mains d’un maréchal de France'. Car voici
ce qui eft marqué au lujet du feigneur de Chauvai,
qui fuccéda au feigneur de Graville , dans la charge
de capitaine dans la première compagnie Françoife
fous Louis X I . Les lettres dudit Chauvai font
adreffèes aux maréchaux de France pour prendre
ferment de lui ;- comme par fon attache , André
de Laval fire de Loheac, maréchal de France ,
certifie avoir fait.
Je rapporterai à cette occafiori la formule du
ferment que fait le capitaine des gardes entre les
mains du roi. C ’eft celui que fit M. de Duras en
1672.
Vous jurez & promettez à Dieu de bien & fi-
dellement fervir le roi en la charge de capitaine
des gardes de fon corps, dont fa majefté vous a
pourvu fur la démiffion de MM. de Charoft père
& fils , de tenir la main que les officiers qui font
fous votre charge, s’acquittent fidellement de leur
devoir , de révéler à fa majefté tout ce que vous
fçaurez importer au bien de fon fervice, de veiller
foigneufement à la fureté de fa perfonne, de ne
recevoir penfion d’aucun autre prince que de fa
majefté , & de faire en cette charge tout ce que
bon & fidèle fujet & ferviteur eft ténu & obligé
de faire : & pour marque de la confiance que fa
majefté prend en vous , elle vous met entre '^e$
mains le bâton de commandement.
Les capitaines des gardes font toujours des per