
la cloifcn un parement uni , qui venant à fe durcir
, fera le même effet que la pierre ; on pourra
même , fi l’on v e u t , au bout de quelque temps,
pour une plus grande imitation , y figurer des
j oints.
Les fondements qui fe font encore à fec fur un
terrein de bonne confiflance & qui ne préfente
aucun obftacle confidérable à furmonter, le conf-
truifent fans beaucoup de myftère. On prépare le
terrein comme on l’a vu dans le chapitre précédent
, & après avoir creufé la tranchée de la largeur
& de la profondeur déterminée par les profils
, on lui donne un talus allant du devant au
derrière, proportionné à l’épaiffeur que doivent
avoir les fondements, afin que le revêtement fou-
tienne mieux la pouffée des terres. Par exemple,
fur 1 2 pieds d’épaiffeur on donnera 6 pouces de
talus j ainfi des autres , dont le talus fera toujours
à-peu-près la vingt-quatrième partie de l’épaiffeur;
on établit la première aifife de gros libages plats
pofés en bain de bon mortier , ( quoique bien
des gens aiment mieux le pofer à fe c , leur entredeux
garni de mortier. ) Sur cette première afîife
pn en .élève une autre dont les alignements font
co'mpofés de boutiffes & de panereffes en . liate
fon alternative , les boutiffes ayant au moins
18 pouces de queue, étant d’une groffeur raifon-
Bable, principalement fur le devant ; car pour le
derrière, on fe contente d’y pofer les plus gros
quartiers de pierre ; le milieu fe remplit de moël-
lon à bain de mortier ; quand il eft brut, les
intervalles fe garniffent par de petits moellons
enfoncés dans les joints le plus avant qu’on peut
& bien arrafés ; on continue de même pour les
autres aflifes , obfervant, tant qu’il fe peut , de
conduire l’ouvrage de niveau fur toute fa longueur.
On fait obferver aux maçons des retraites
. du côté du foffé , de manière que le prolongement
du talus de la muraille qu’on veut élever
ne porte point à faux ; & afin qu’ils puiffent
mieux fe conformer au profil qui en aura été
f a i t , il eft à propos de leur en donner un def-
fin en grand, exactement cotté, pour qu’ils fçachent
la hauteur & la largeur des retraites , cette partie
de l’ouvrage étant de conféquence.
Quoique le bon fond fe trouve ordinairement
lutôt fur les tarreins élevés que dans les autres
as & aquatiques , il s’en rencontre pourtant d’ex-
eellents dans ces derniers, comme font ceux de
gravier, de marne , de glaifè ; d’autres d’une certaine
terre bleuâtre qui eft le plus fouvent de
bonne confiftance ; j’y comprendrai même le fable
bouillant, qui eft fort bon quand on fçait s’y conduire
avec adreffe ; on établit des fondements fur
touts ces terreins avec affez de confiance , c’eft
pourquoi je ne m’y arrêterai pas.
On eft quelquefois contraint de creufer fi avant
pour trouver le bon fond, qu’on ne peut élever
les fondements jufqu’au rez-de-ehauffée fans des
décentes* extraordinaires. En ce cas , Philibert de
Lorme, Scamozzi, & plufieurs autres àrehite£te$
après eux, propofent de faire des piliers de dif-
tance en diftance pour y élever des .décharges,
afin qu’à peu de frais l’on puiffe gagner le rezr
de-chauffée.
Comme le terrein fur lequel on voudront fonder
les piles, peut fe trouver d’inégale réfiftance , il
feroit à craindre que par la fuite le terrein de
deffous quelques piles venant à s’affaiffer , ne
causât une grande rupture aux arcades , par con-
féquent aux murs qui feroient élevés deflus. Pour
prévenir cet inconvénient, on a cru que le meilleur
moyen étoit de faire entre les piles des
arcades renverfées ; afin que fi une des piles
étoit moins affurée que les autres , elle fe trouvât
arcboutée par les arcades voifines, qui ne pouvant
céder à caufe quelles font foutenues par
les t.erres qui font au-deffous , il n’eft pas poffible
que la pile puiffe changer de fituation, quand
bien même elle porteroit à faux.
Il arrive fouvent qu’en voulant établir des
fondements on rencontre des fources qui incommodent
beaucoup le travail ; il y a des gens qui
prétendent les éteindre en jettant deffus quantité
de cendre mêlée de chaux vive ; d’autres veulent
remplir de vif-argent les trous par ou elles
fortent, afin que par Ton poids il les contraigne
à prendre leur cours d’un autre côté. Je crois
que touts ces expédients ne font bons que dans
la fpéculation , & qu’ils ne réulfiffent guère quand,
on veut les mettre en oeuvre ; le meilleur parti eft
de travailler promptement, & pour ne point être
inondé à un certain point, il faut diriger les
eaux par petites rigoles, que l’on amènera à un
puits fait au - delà de la tranchée, d’où on les
tirera par des machines à meiure quelles viendront
; on leur laiffera le cours libre depuis
cette origine jufqu’à ce puits , bordant les petites
rigoles de chaque côté avec des briques pour
former de petits canaux , que l’on couvrira de
pierres plattes ; ainfi tout le, fond de la tranchée
fera mis à feç ; cependant, pour prévenir que
les fources ne deviennent pas à la fuite nuifibles
aux fondements > il faut prodiguer dans la maçonnerie
des petits aqueducs, afin de leur laiffer
un cours libre du côté qui conviendra le mieux.
Il arrive quelquefois qu’un terrein fur lequel
on veut fonder ne le trouve pas bon, & que
voulant approfondir pour en chercher urt meilleur
, on le rencontre encore plus mauvais ; en
ce cas il vaut mieux ne s’enfoncer que le moins
qu’on pourra, & établir fur toute la longueur des
fondements , un grillage affemblé avec des Ion*
grines & traverfines de 9 à 10 pouces de groffeur ;
le s vuides ou cellules qu’elles forment fe remplif-
fent d’une bonne maçonnerie de brique ou de
moellon. Il y en a qui couvrent le tout d’un plancher
de gros madriers bien arrêté fur le grillage
avec des chevilles de fer enfoncées à tête perdue ;
comme ce plancher paroit une dépenfe affez inu-
«fie, il fuffit d’élever la maçonnerie immédiate- |
tnent fur le grillage, obfervant de faire le parement
de bonne pierre de taille, jufqu’au rez-de-chauffee,
& même plus haut, fi l’ouvrage en mérite la peine*
Comme ces fortes de fondations ne fçauroient
avoir de trop grands empattements, il eft bon de
faire le grillage d’un pied & demi ou deux plus
large que n’euffent été les fondements fi on les
avoit établis dans un bon terrein ; & afin de prévenir
tout accident, il convient d’attacher fur le
.bord du grillage du côté du foffé, un heurtoir de
8 ou 10 pouces au moins, qui, régnant fur toute la
longueur des fondements, empêchera que le pied
du revêtement ne puiffe gliffer , fur.-tout s’ils
étoient aflïs fur un plancher, ce qui n’eft pas fans
exemple. A Bergses-Saint-Vinox, ou le terrein eft
fort mauvais , il eft arrivé que. le revêtement de la
face d’une demi-lune s’eft détaché & a été gliffer
tout d’une pièce jufques dans le milieu du foffé ;
cela s’eft fait avec des circonftances fi fingulières ,
à ce que j’ai appris par les ingénieurs qui étoient
alors dans cette place, que cet accident femble
tenir quelque chofe du merveilleux.
Cette façon de fonder n’eft pas toujours bonne
dans toute forte de terrein, auflà ne l’employe-t-on
guère que dans de petites parties de fondations,
qui , n’étant pas fi bonnes que celles qui leur
font contiguës, ne laiffent pas la liberté d’approfondir
davantage fans de grands inconvénients ;
cependant on peut la rendre excellente dans un
terrein aquatique , fi après avoir pofé les grillages,
on enfonce dans les cellules des pilots de rem-
plage ou de comprefîion fur toute l’étendue des
fondements. Ces pilots doivent être plantés au
nombre d’un' ou deux feulement dans chaque cellule,
diagonalement oppofés ; & pour mieux af-
furer les fondements , on pourra , fi on le juge
néceffaire, battre tout-autour du bord qui répond
au foffé, des pilots de bordage ou de garde pofé
près à près, & le long de ces pilots une file de
palplanches, pour empêcher le courant des eaux
s’il s’en trouve , de dégravoyer la maçonnerie. Le
vuide du grillage autour de la tête des pilots doit
e'tre^ rempli de gros quartiers de pierre, & après
avoir bien arrafé leur fuperficie', on y affeoira la
maçonnerie élevée par aflifes réglées, afin quelle
porte également par-tout
Quoique cette manière de fonder foit bonne, je
crois pourtant qu’on ne feroit pas mal d’y changer
quelque chofe pour la rendre encore plus folide ,
c’eft de commencer par en former des rangées de
pilots (fig. 300 6* 301 ) , tout le long des fondements
; par exemple , pour un relèvement de rempart
, après avoir tracé l’épaiffeur que doivent
avoir les fondements & les contre-forts, on enfoncera,
au refus du mouton, quatre rangées de .
pilots, une fur l’alignement extérieur, l’autre fur
•l’intérieur, & deux dans le milieu; en forte que
les pilots foient féparés les uns des autres d’environ
deux pieds. On en plantera deux fous les
angles des contre-forts, & deux autres entre la
queue & la racine , comme on le remarque dans
le premier profil, où les têtes de ces pilots font
ponâuées : après les avoir recepés à niveau , on
appliquera deffus des racinaux ou longrines/&
fur ces longrines un rang de traverfines pour
former un grillage., dont chaque croilée fera bien
clouée & arrêtée fur la tête du pilot qui lui
répond , & félon cette manière le grillage fera
incomparablement plus ferme que dans la pratique
précédente : après cela on enfoncera des pilots de
remplage, & l’on pourra élever la maçonnerie en
toute fureté.
Quand on enfoncera des pilots, il faut avoir
égard d’employer toujours les plus longs & les
plus forts fur les bords des fondements, puifque fi
l ’ouvrage a quelque danger à craindre par la fuite,
ce fera plutôt de ce côté-là qu’il manquera que
dans le milieu : pour travailler avec précaution , il
y a bien de petites attentions à faire fur la manière
de piloter, & pour ne rien omettre, voici
comment on pourra s’appercevoir de quelle longueur
& de quelle groffeur on doit employer les
pilots, félon le terrein où l’on aura à travailler.
Après avoir mefuré un p ilo t, il faut l’enfoncer
jufqu’au refus du mouton , en forte qu’on puiffe
connoître à quelle profondeur le fond fait une affez
grande réfiftance pour s’oppofer fortement à la
pointe ainfi, fçachant de combien il fera enfoncé
, on verra à-peu-près la longueur qu’il faudra
donner ; je dis à-peu-près, devant les faire un
peu plus longs que celui qui aura fervi de fonde,
puifqu’il fe peut rencontrer des endroits où le terrein
réfiftant moins, ils pourront aller plus avant.
La longueur des pilots étant déterminée, il faut,
pour y proportionner leur groffeur, qu’ils ayent de
diamètre environ la douzième partie de leur longueur,
c’eft - à - dire, que ceux qui auront douze
pieds, doivent avoir environ douze pouces de dia*.
mètre. Mais cette règle ne doit avoir lieu que pour
les petits pilots, depuis 6 pieds de longueur jufqu’à
12. : car quand ils en ont 18 ou 20, il Tuffit de leur
donner 14 pouces de diamètre , autrement il fau-
droit employer des arbres trop recherchés, ce
qui augmenteroit confidérablement la dépenfe.
On fçait que pour enfoncer les pilots, on les
fait en pointe de diamant ; il faudra prendre garde
dé ne pas faire cette pointe trop longue ni trop
courte : car fi elle eft trop courte , elle ne s’enfoncera
pas aifément, & fi elle eft trop longue, elle
fe trouvera affoiblie, de manière que pour peu
qu’elle rencontre des parties qui lui réfiftent, elle
s’émouffera ; le mieux eft de lui donner pour longueur
une fois & demie ou deux fois au plus le
diamètre du pilot. Quand le terrein dans lequel
on les enfonce ne réfifte pas beaucoup ,on fe contente
de brûler cette pointe pour la durcir ; on en
fait de même à la tête pour empêcher que les
coups de mouton ne l’éclatent. Mais fi l’on s’ap-
perçoit qu’il fe rencontre dans le terrein des
l u ij