
centurie. Dans l'armée de Crafius il y avoit
, e grands vexilles qui portaient en lettres rouges
le nom de l’armée & du général. L’un d’eux
ayant été jette par le vent dans une rivière , le
conlul fit couper ceux qui étoient de même
longueur , afin qu’il fût plus facile de les porter;
ainfi il y en avoit de différentes grandeurs , &
vraifemblablement suffi: de couleurs differentes.
( Tacit. Annal. L. / , C. 6o. Caf. Bell. gall. L. 11,
C. 25. Liy. L. XV11, C. 13. Tacit. Hiß. L. 1 ,
C. 41. Dio. L. X L , pag. 144* de R. 699. av. j
ƒ . 54. Greg. Naç. contra Julian, p. 7 5 . ) .
Sous 1 empire , les vexilles portèrent le nom du
Prince. Les légions de Mæfie, apprenant la défaite
& la mort d’-Othon , inferivirent le nom de Vëfpa-
fien fur toüts leurs vexilles, & déchirèrent ceux
oh étoit celui de Vetellîus. Les hampes des enfeignes
furent decorees par plufieurs ornements & par
les images des empereurs. Celles de Galba furent
brifees par les légions de Germanie : celles de Vitel-
lius ôtées des enfeignes, ainfi que le nom de ce
prince , par les troupes renfermées dans Crémone.
On voit fur la colonne Trajanne des hampes de
différentes longueurs. Les plus longues ont fix
ou fept pieds ; d’autres ne paroiffent pas en avoir
plus de trois & demi, fee diamètre des plus grands
ornements eft de neuf ou dix pouces. ( Suéton.
Vefpaf. C. 6. Tacit. Hiß. L. II, C. 85. Col. Tra).
Tacit. Hiß. L. I. Tacit, Hiß. L. III. Col. Traj.
PI. 99- )• , 7
Le dragon, emprunté des Dà ces , devint une
enfeigne romaine après les viôoires de Trajan.
Cette figure , fufpendùë au haut d’une hafte ,
étoit d’étoffes légères , couleur de pourpre, ou
de différentes couleurs. Le corps en étoit creux
la tête argentée , la gueule béante, & le corps
enflé par l’air agité, imitoit le mouvement d’un
reptile vivant. ( Gregor, na£. orat. 3. Themiß. orat. 1 .
Ammian. Marcell. L. X V I , C. 10. Claudian. Hon.
Conful. 3. ).
Les poxte-enfeignes ont fur la colonne Trajane
l’habit, la cuiraffe , l’épée & le bouclier des troupes
légères : quelques-uns une parme très petite. ( ph
45 ->46- ). On en voit un ( pl. 46. ) dont la parme
eft ronde. Ils portent une peau, de lion dont le
muffle & la jubé leur couvre la tête ; le refte
pend par derrière fur le dos & les épaules.
Leur nom générai étoit celui defigniferes. Leurs
noms particuliers étoient tirés de i’efpèce de leur
enfeigne , comme aquilifer , ou aquilïger, vexïl-
larius, vcxiWfer , imaginifer , imaginarius f dra-
conarius. Les porte-enfeignes étoient choifis parmi
les foldats les plus forts, parce que les enfeignes
étoient pefantes ; parmi ceux d’une probité reconnue
, parce que la moitié de l’argent diftribué
aux foldats comme récompenfe leur etoit confiée ;
parmi les plus braves, parce qu’ils avoient entre
leurs mains, comme un dépôt facré, l’honneur ,
la gloire , les dieux des légions. Ainfi leur eihr
pioi étoit honorable. Les marbres nous apprennent
qu'on paffoit de celui de quefteur , de tefferairej
d'option ou légat de préfet, & tribun de cohorte ,
a celui de figniferes, Nous y voyons auiïi qu’ils
formoient un corps, & que ceux de chaque légion
avoient un option ou légat. ( Tacit. L. 11. Annal,
C. i j . Dionys. L. V I , pag. 375. Gruter.. v. XC1V.
2. MC1X. 10. CDXXXl. 9. CDXXV. 5 /DLVIII.
7 . DCCLÎ1I. 4. LXXX. 4. Reinef. Cl. VI. 29. ).
Les Romains avoient un refpeét religieux pour
leurs enfeignes : ils leur rendoient une efpèce de
culte ; ils les ornoient de fleurs ; ils répandoient
fur elles des parfums. Ils facrifioient aux dieux
devant elles ; les ferments les plus refpeélés étoient
ceux qu’ils faifoient en leur préfence , & les coupables
y trouvoient un afyle qu’on n’ofoit violer.
Les abandonner étoit un crime que la mort feule
pouvoit expier. ( Herodian. L. I V . Vèget. L. I l.
C. 11. Suéton. Claud. P lin. L. XIII. C. 4. Jofeph.
Betl.jud. L. VI. C. 6. Liv. L. XXVI. C. 48. Tacit.
annal. L. XV. C. 16.. Tertulian. adv. gent. C. 16«
Tacit. annal. L. I. C. 39. Ammian. Marc. L. XXV*
C. 10. Ôvid.fafl. L. 111. ).
Des enfeignes Françoifes.
Les capitulaires, fous la fécondé race de nos
rois, nous apprennent que les comtes qui condui-
foient à l’armée les troupes de leurs gouvernements
avoient chacun leur gonfanon, c’eft-à-dire, leur
étendard. «Que nos intendans , dit Charles-le-
Chauve , dans un de fes capitulaires , donnent
ordre & faffent enforte que chaque évêque, chaque
abbé, chaque abbeffe faffent marcher leurs vaffaux
avec tout leur équipage de guerre, & avec les gon-
fannoniers , cum guntfdnnonarion. Le nom dé gon-
falonier eft encore en ufage en Italie , & on le
donne à celui qui porte l’étendard du faint fiège
dans la milice.
Outre ces gonfanons des comtes qui comman-
doient chacun les troupes de leur canton , il y
avoit un étendard roy al, qui, dans les armées j
étoit celui du corps où le roi étoit en perfonne.
Car il eft marqué dans l’hiftoire qu’à la bataille -de
Soiffons, où Charles - le - Simple vainquit Robert'
qui s’étoit faifi de la couronne : il eft, dis-je , marqué
que Robert portoit lui-même fon étendard,
&. qu’un feigneur nommé Fulbert portoit celui de
Charles.
Les étendards , fous la troifième race , furent
nommés bannières & pennons. Il y avoit deux
fortes de bannières, fçavoir celles des paroiffes
fous Iefquelles les habitants des villes & de la banlieue,
& touts ceux qui étoient de la commune
marchoient à l’armée ; & cela commença à fe faire-
delà forte, après l’inftitution de la milice appellée
les communes & des maifons de ville , fous le règne
de Philippe I e r , quatrième roi d*e la troifième race,
ainfi que je l’ai expofé ailleurs.
Les autres étoient les bannières des chevaliers,’
qu’on appella banncrcts ; ces bannières étoient atta*
chéesau bout &. à côté d'une lance, comme les
guidons ou drapeaux de notre temps ; elles étoient
quarrées , &. cette figure les diftiriguoit des pennons
qui étoient fourchus ou plus étroits à l’extrémité
que vers la lance.
Les pennons étoient. pour les chevaliers non
bannerets , appelles bacheliers ; & c’étoit fous ces
étendards qu'ils conduifoient ceux de leurs vaffaux
qu’ils amenoient aux armées quand ils en
avoient. Lés bannerets avoient quelquefois un
pennon outre leur bannière ; les bannières & les
pennons étoient aux armes, des chevaliers. Nos
anciens hiftoriens , & fur-tout Froiffart, les blafon-
nent fouvent dans leurs hiftoires, quand ils en
parlenr ; les pennons fe rangeoient d’ordinaire fous
les bannières des bannerets. On exprimoit le
aombre des troupes par celui des bannières & des
pennons. C ’eft ainfi que Froiffart nous fait le
.dénombrement des troupes d’Edouard III, & de
celles de Philippe de Valois. Lorlque leurs deux
armées furent fur le point d’en venir à la bataille
du duc de Guerles , il dit ; «avoit vingt-deux bannières
& foixante pennons » . .. La fécondé bataille
avoit le duc de Brabant...« Si avoit le duc de Brabant
jufqu’à vingt-quatre bannières & quatre-vingts
pennons ». La tierce bataille & la plus groffe avoit
Je roi d’Angleterre avec lui. . .# . .« Si avoit le roi
vingt &. huit bannierés & quatre-vingts pennons »...
Et puis parlant de l’armée de France : « Il y eu t,
d it- il, fix-vingts bannières , &c. ». Il paroît, par
cette fupputation, que fous chaque bannière il y
avoit tantôt trois, tantôt quatre , tantôt cinq pennons
, & c’eft la preuve de toutes les particularités
que je rapporte ici. Voici encore quelques
autres preuves que M. du Cange a raffejnblées
dans fon gloffaire.
L ’épié eft poing à un pannon porprin’
Pris ont és point les roiS efpiés forbis,
Defuere font !i panon de famit,
A tant és les Anglais à penon de fandal.
Après lès pages viennent les pennons des bacheliers
: « après les pennons viennent les bannières des
derrains bannerets deux à deux.
. » Là eftoit meffire Huï de Cauiello, & à pennon
fans bannière meffire Guillaume Draéton.
» Les François' avoient bannières defployées &
armoyées de leurs armés........ Grande beauté eftoit
à voir les bannières & les pennons de fo ÿ e , de
cendal armoyées des armes des feigneurs, venti-
lans au vent & reflamboyer au foleil ».
On voit par tout cela ce que j’ai d it, premièrement
que le pennon étoit l’étendard propre des
chevaliers non bannerets qu’on appelloit bacheliers,
c’eft à-dire, bas chevaliers, ou chevaliers du fécond
ordre. Je ferai toutefois en paffant une remarque
fur cet article au lujet d’un endroit de Froiffart ,
par où il paroît. qu’au moins quelques écuyers
avoient le pennon auffi bien que les chevaliers.
C ’eft au volume 4 , chapitre 18 , où l’auteur r a - *
conte l’expédition du duc de Bourbon en Afrique,
& comment un Sarrafin vint offrir un cartel de
dix de fa nation contre autant de gentilshommes
chrétiens. Ce Sarrafin & fon truchement cheurent
d’aventure , dit Froiffart , fur le pennon d’un
gentil écuier, & pour-lors bon homme d’armes. .
Il eft donc vrai que quelques écuyers avoient
auffi le pennon ; mais peut-être que c’étoit un
privilège particulier & quelque prérogative du
fief , de cet écuyer: de même , comme jé l’ai
remarqué ailleurs, que bien que le hàubér fût une
arme propre des chevaliers, cependant quelques
écuyers avoient le droit de le porter en vertu
de certains fiefs qu’on appelloit fiefs de hauber.
On voit en fécond lieu, par touts ces extraits
de nos anciens romans & de Froiffart que j’ai cité,
la fécondé chofe que j’ai dite, fçavoir que les bannières
avoient quelquefois auffi un pennon dans
les armées.
Troifièmèment, que les bannières étoient d’étoffes
précieufes, comme de famit & de cendal,
c’eft-à-dire, tout de foie. C ’eft.ce que fignifie le
mot famitum ou examitum dans la baffe latinité , Ô£
ccs mots viennent du mot grec sèfipuTos , qui dans
les auteurs Grecs des derniers, fièclès de l’empire,
fignifie une étoffe de foie. Sânqal ou cendal fignifie
a-peu-p'rès la même chofe , & proprement du
fimple taffetas , en italien fefid'ado. ‘ ,
Outre les ufages de l’étendard que j’ai marqué ,
on s’en fervoit dans les armées de ces premiers
temps, pour faire le fignàl du danger où étoit le
prince à qui il appârtenbit , comme il arriva à la
bataille de Bovines , lorlque Philippe Augufte fut
renverfé de fon cheval.'« Alors', dit Phiftorien ,
Gallon de Montignf appella’ du fecours , en baif-
fant plufieurs fois l’étendard royal qu’il portoit».
Pour les ^empereurs , ils faifoient en ce temps-là
porter l’étendard impérial fur un charriot, comme
il eft marqué dans la relation de la même bataille.
Il nie pârqît, par le texte de l’hiftorien, que, quoiqu’il
l’appellë un étendard , ce n’étoit point un
fimple taffetas, mais la figure maffive d’une aigle
au boiit d’une perche , & c’ëtoit une manière ufitée
du temps des anciens empereurs romains. « Othon,
» dit Guillaume le Breton, fit paroître fon éten-
» dard ; c’étoit une perche plantée fur un char, au
» haut de laquelle étoit enfilé un dragon, & , fur,
» ce dragon, étoit une aigle dorée ».
En effet, la bataille étant gagnée, il eft dit que
le char fut rompu , le dragon mis en pièces ; que
l’on arracha , & qu’on rompit les ailes de l’aigle, &
qu’on la porta au roi, qui, y ayant fait rejoindre
les ailes, l'envoya à Frédéric, compétiteur d’Othon
pour l’empire. Apparemment l’étendard de l’empereur
étoit au haut de la perche dont il eft parlé.
Quelques villes d’Italie , étant affociées pour faire la
guerre à leurs voifins, imitèrent en cela les empereurs
, & c ’eft ce qui s’appelle dans les hiftoires
de ce pays-là, il caroccio..
Quand une ville étoit prife d’affaut ou même par