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réduit à faire fa defcente à l'anfe du Choc ; plage
d'une lieue, qui n'eft féparée du Carénage que
par la pointe de la Vigie qui forme cette anfe.
Maître de la Vigie , il couleroit bas ou forceroit
d'amener tous les vaiffeaux qui fe trouveroient
dans la rade j & ce feroît fans perte'de fon côté,
parce que cette péninfule , quoique dominée par
un citadelle bâtie de l'autre côté du port, cou-
vrjroit l'affaillant par fon revers. Celui-ci n'au-
roit befoin que de mortiers : il ne tireroit pas un
coup de canon j il ne hafarderdit pas la vie d'un
homme.
S'il fuffifoït de fermer à l’ennemi l'entrée du
p or t, il feroit inutile de fortifier la Vigie. Sans
cette précaution , on l'empêcheroit bien d’y pénétrer
: mais il faut protéger les vaiffeaux de la
nation. Il faut qu'une petite efcadre puiffe braver
les forces ennemies , les réduire à la bloquer,
profiter de leur abfence ou d'une faute : ce qui
ne fie peut faire fans fortifier le fommet de la
péninfule. On ne doit pas fe difïimuler qu’en
multipliant ainfi les points de défenfe, on augmentera
le befoin d'hommes : mais s'il y a des
.vaiffeaux dans le p or t, leurs matelots & leurs
canonniers feront chargés d elà défenfe de la V igie
, & ils s’y porteront avec d’autant plus de
vigueur, que le falut de l'efcadre en dépendra.
Si le port eft fans bâtimens, la Vigie fera abandonnée;
ou peu défendue. On s'occupe du
foin de défendre le Morne fortifié, où l'on projette
de conftruire une citadelle.
Les anglois s'étoient emparés de Sainte-Lucie
durant la dernière guerre j mais ils l'ont rendue ;
à la France par le traité de paix de 1785.
LU CQ U E S ( république de). Cette république
d'Italie eft fituée au bord de la partie de la Méditer
ranée > qu'on appelle mer de Tofcane, mare Tuf-
cum ou Tyrrhenum ; & du côté de la terre, elle
touche aux états du grand-duc de Tofcane & du
duc de Môdène. Sa longueur eft d’environ 40
milles d’Italie, & fa largeur de iy.
Productions , culture , population, C e pays eft
très fertile. Il eft fi peuplé que , dans une ville
& i j o villages, on compte plus de 120 mille
hommes , dont 20 ou 30 mille peuvent porter
les armes. On ne fauroiîrtrop louer, ni trop admirer
rinduftrie avec laquelle les habitans cultivent
le moindre lambeau de terre & favent en
tirer parti. Le pays eftmontueux , mais la fertilité
de fes vallées eft admirable. Les montagnes
font couvertes de vignes , d'oliviers, de châtaigniers
& de mûriers. La partie de la côte offre
des prairies qui nourriffent une grande quantité
de beftîaux. L'huile & la foie font d'un très-
grand rapport, & forment les deux objets les
plus importans de fon commerce.
Précis de fon kiftoire politique. La ville de Luc-
ques étoit jadis une des principales villes des Etruf-
ques, & 'fut enfuite une colonie romaine. Sous
les goths & les lombards, elle éprouva les me- |
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mes viciffitudes que le refte de la Tofcane. Après
la mort de la'comteffe Mathilde en n i ƒ , le
gouvernement de Lucques devint républicain, fans
fe fouftraire à l'obéiffance des empereurs. En
13163 elle fut foumife à Caftruccio, Caftracani.
En 13 28 , l ’empereur Louis de Bavière l'enleva
aux fils de Caftruccio : il changea à fon gré la
forme du gouvernement i il rélégua les Caftr&~
cani à Pontremoli, & impofa aux lucquois un
fubfide de 150,000 florins. En 13 5 j , Charles IV
les affujettit à la jurifdi&ion civile & criminelle
des pifans, chargés de l'exercer au nom de l'empereur.
En 1369, le cardinal-légat de Bologne ,
établi vicaire de Lucques par l'empereur Charles
IV , vendit aux lucquois la liberté pour cent mille
florins d'or. En 1400 un fimple citoyen, Paul
Guinifi , fe fit fouverain de Lucques qu'il gouverna
jufqu'en 143©. Depuis cette époque, Lucques
a toujours' été une république ariftocratique ; &
les lucquois étant plus jaloux de leur liberté qu’en
état de la défendre, ils ont de tout temps recherché
la proteélion de quelqu’état plus confi-
dérable.
Forme de gouvernement. La puiffance légiflative
appartient à un fénat compcfé de 15© patriciens :
ce fénat a pour chef un gonfalonier & neuf con-
feillers, nommés anfiani, qu’ on change tous les
deux mois } pendant leur régence, ils font entretenus
dans le palais aux dépens de l'état. Le
grand confeil fe change tous les deux ans. L'autorité
du gonfalonier fe réduit à faire le premier
les propofitions au fénat.
Il a le titre de prince de la république, & jouît
des honneurs d'un fouverain. La juftice eft admi-
niftrée par cinq auditeurs , dont l'un a le titre de
podefiat & décide les caufes criminelles 5 mais
fes jugemens doivent: être confirmés par le fénat
, fur-tout quand ce font des arrêts de mort.
Cet état a le titre de férénijfime république de
Lucques. Ses armes font deux bandes entre lef-
quelles eft écrit en caractères d'or le mot libertas%
fur un fond d'âzur de lapis lazzuli. On évalue
les revenus ordinaires de la république à quatre
cents mille écus. Elle a cinq cents hommes de
troupes réglées & environ foixante & dix fuiffes,
qui^ fervent de garde au gonfalonier & aux neuf
anziani.
Remarques générales. Si l'on forme un paralIéIo,‘
grame du territoire de Lucques | ce parallélograme
n’aura que huit lieues de longueur fur une largeur
égale : il eft prefque par - tout entrecoupé de
montagnes & circonfcrit dans fon agriculture ,
dans fon commerce , > dans fon induftrie , & on y
trouve au moins cent vingt mille habitans. La
population totale de. l’état eft donc d’environ
1900 perfonnes par lieue quarrée. C 'e ft le double
de ce qu'on en trouve en France, ditM. de
la Lande. Si l'on fépare la partie montueufe de
la république., pour comparer l'étendue de la feule
plaine de Lacques avec le nombre de fes habitais,
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en eh comptera 5,174 par lieue quarrée. Nulle
part en Europe, excepté dans les cantons fuiffes.
de Z ur ich, de Soleure & d’Appenzell, on
ne trouvera une population auffi forte.
A quelles caufes eft-elle due ? Pourquoi ne
voit-on dans l'état de Lucques , ni mendians , ni
pauvres , ni oififs ? Pourquoi chacun y eft-il bien
vêtu, bien nourri, bien logé ? Pourquoi enfin
ce territoire, dont la fertilité ne furpaffe pas celle
d'une infinité de lieux parfemés de quelques rares
habitans, offre-t-il par-tout une culture admirable
& très - variée ? C'eft que le gouvernement
de Lucques offre un modèle de fageffe j
c'eft que lapetiteffe de la république lui permet
de tout v o ir , de tout prévenir, de tout corriger
î c'eft que chaque abus eft à la portée de fa
vigilance j c'eft que chaque fujet ne paye que
cinq livres par tête pour toute efpèce d'impofi-
tions i c'eft que, malgré lawnodicité de fes revenus
, l'état pourvoit à tous les détails de bien
public, à tous les befoins accidentels ; c'eft qu'on
n'y connoît pas celui des armées, des guerres ,
des claffes éminentes , oifives & onéreufes de
citoyens j c'eft que les propriétés foncières y
font très- fubdivifées j c'eft que les diftindlions y
font bannies autant que la fimplicité des moeurs
y eft refpeétée 5 c'eft qu'on n'y éprouva jamais
de difette ; c’eft que le fénat aime fon peuple ,
& le peuple le fénat, qui ne s'écarte point de
cette modération tutélaire, principe confervateur
des ariftocratîes j modération non-feulement de
fentiment, mais encore de réflexion', & devenue
une maxime d'état fondamentale. Depuis deux
fiècles, cette profoérité & ces principes n'ont
pas varié. Tant il eft vrai que l'ariftocratie, peut-
être mauvaife dans une ville, règne avec fuccès
fur un territoire , lorfqu'elle a fu réprimer fa
puiffance par desloix qu'elle ne pourroit enfreindre
fans danger.
L U G A N O , l'un des quatre bailliages ultramontains
que poffède le corps helvétique. En allemand
, on le nomme Lauis. C'eft le plus grand,
le plus riche & le plus important : il a huit lieues
de longueur fur cinq de largeur. Le pays eft fertile
j il offre des vignes, des fruits, des oliviers,
& des mûriers. Les orangers & les cirroniers
même y font affez communs. On y trouve différentes
efpèces de marbre, defquels on tire
grand parti , de même que des vers à foie. Il y
a des lapidaires qui poliffent les criftaux apportés
de là Suiffe. On y compte plus de 70 paroif-
fies & environ dix mille habitans. Le lac de Lugano
lui eft auflî très-utile : il eft affez confidé-
rable, car il a huit lieues de longueur.
Les tufques paroiffent avoir été les premiers
habitans de cette contrée, & on y vit enfuite
les gaulois. Les romains s'en emparèrent : ceux-ci
furent chaffés à leur tour. Enfin, après bien des
; révolutions , les ducs de Milan en furent les maîtres,.
Nous ayons dit à. l'article L o c a r n o com-
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ment elle fut foumife aux cantons fuiffes. Ceux^
ci envoient, chacun à leur tour, un bailli qui
y gouverne pendant deux ans. Son titre eft capi-
taneo, & en temps de guerre il commande les
troupes des quatre bailliages. Son pouvoir eft:
trop abfolu i il eft prefqu'illimité : il juge feul
toutes les affaires civiles & criminelles i il y a cependant
appel devant le fyndicat. Le fecrètaire
baillival, le lieutenant baillival, les fifeaux, & c .
n'ont que la voix confultative c'eft toujours un
abus dangereux. Le lieutenant baillival a une ju-
rifdi&ion particulière en affaires civiles, indépendante
du baillif. On peut le changer, tous les
deux ans j les autres places font à vie & à la no-,
mination des cantons.
Le bailliage eft partagé en quatre pièves, Lugano
, Agno, Riva & Capriafca. Il jouit de beaux
privilèges 5 il a le droit d'établir des Ioix civiles
fous l'approbation cependant du fyndicat , de
taxer les denrées, de fixer la valeur des mon-
noies, de déterminer les précautions de fanté ,
&c. Il a une magiftraturé qui s'étend fur tout le
bailliage, & chaque piève en a une particulière.
On tient annuellement une affemblée générale à
Lugano , Loretto ou Sorengo j chaque commune
y envoie fon confole, & Lugano en envoie deux.
Cette affemblée générale règle les affaires du pays,
& fur-tout les dépenfes publiques. Il y a quelques
communautés qui ont leur propre jurifdic-
tion, qui fourniffent un contingent fixe , .& qui
n'énvoient point de députés à l'affemblée. On
nomme celles-ci terre feparate. Les communes de
Vefcia & Montechio font nommées terre privilège
ate, en ce qu'elles ne contribuent qu'aux dépenfes
militaires & de fanté.
Les habitans font tous de la religion catholique
romaine. La pièye de Capriafca eft du diocèfe de
Milan ; les trois autres de celui de Corne : l'évêque
de Milan entretient dans chacune un vicaire
forain.
Le bourg de Lugano eft affez étendu ; on y
fait un commerce affez grand, fur-tout en foie :
le paffage des marchandises de Suiffe en Italie lui
procure auffi différens avantages. La foire de bétail
qui s'y tient le 13 o&obre , eft importante par
la quantité extraordinaire de bétail qui s'y vend
& qu'on tire de la Suiffe. On y a établi une imprimerie
quia déjà fourni d'excellens ouvrages À
ritalie j elle eft fous la prote&io.n immédiate des
cantons. Voyezles articles C o r p s h e l v é t iq u e ,
L o c a r n o , M je n d r is io & V a l -M a g i o .
LU N E B O U R G , principauté d'Allemagne ,
appartenant à la maifon de Brunfwick.
Nous avons indiqué à l'article B r u n s w ic k les
divers états que poffède en Allemagne la maifon
éle&orale de Brunfwick - Lunebourg , leur population
totale & leurs revenus : nous y avons
donné un précis hiftorique de la maifon de Brunf
wick \; nous y avons parlé de fes titres , de fes
prérogatives & de fes charges^