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C e défaut de population n'ertpêchoit pas que |
le pays des Natchez ne fût excellent. Le climat
en elt fain & tempéré ; le fol fe prête à des^ cul, I
tures riches & variées: le tetrein. eft affez. élevé
pour n'avoir rien à craindre des inondations du
fleuve. Cette contrée eft généralement ouverte,
étendue, arrofée, couverte de jolis coteaux-, d'agréables
prairies, de bois délicieux, jufqu aux
Apalaches. Audi les premiers françois qui la reconnurent
, jugèrent-ils que, malgré l'éloignement
où elle étoit de la mer, ce feroit avec le temps
le centre de la colonie. Cette opinion les y attira
en foule. Ils furent accueillis favorablement, &
foui âgés par les fauvàges dans l'etabliffement des
plantations qu'ils vouloient former. Des échanges
réciproquement utiles commencèrent entre les
deux nations une amitié qui paroiflfoit fincère. Elle
feroit devenue folide ,' fi les liens n‘en avoient
été chaque jour affoiblis par l'avidité des européens.
Ces étrangers n’avoient d’abord demandé
les produélions du pays qu'en négocians. honnêtes.;
Us diâèrent depuis impérieufement les con- I
dirions du commerce. A la fin, ils. ravirent ce
qu'ils étaient las de payer , même à vil prix. Leur
audace s'accrut au point de chafifer le cultivateur
indigène des champs qu'il avoir défrichés.
Cette tyrannie étoir atroce. Pour en arrêter le
cours. les natchez employèrent, mais fans fuccès,
les plus humiliantes fupplications. Dans leur dé-
fefpoir, ils tentèrentd'alTocier à leur relfentiment
les peuples de l’eft , dont les difpofitions leur
.étoient connues fe ils réuflîrent à former , fur la
fin de 17 19 ,. uns ligue prefque univerfelle, dont
le but étoit d'exterminer en un feul- jour la race
entière de leurs oppreffeurs. La négociation fut fi
heureufement conduite, que le fécret n'en fut
pénétré ni par les fauvages, amis des françois,
ni par les françois eux-mêmes. C e qui eft fûr ,_
c'eft que , fur deux cents vingt .françois qui
étoient alors dans cet établiffement, il y ep put
deux cents de raaffacrés ; les femmes enceintes,
gu qui .avoient dès enfans en bas âge , n'eurent
pas une dellinée plus heureufej & les autres.,
reliées prifonnières, furent expofées à la brutalité
des affaffins de leurs fils & de leurs époux.
Au, bruit de cet événement, la colonie entière
fe crut perdue. Elle ne pouvoit oppofer à la foule
d'ennemis qui la menaçoient de toutes parts, que
quelques paliffades à demi-pourries, qu'un petit
nombre de vagabonds mal arm,és fe finis, discipline.
Perrier, en qui réfidoit l'autorite, n avoit pas
une meilleure opinion de la fituation des chofes.
Cependant il montra de l’affurartce, & cette audace
lui tint lieu de forces.. Les fauvages ne 1«
crurent pas feulement .en état de .fe défendre,
maisencorede les’ attaquer, Poqt écarter les foupr
«çons qu'on pouvoit sÿoir conçus çontr eux 3 ou
dans l'efpoit d'obtenir leu.- grâce,, .plufieurs de
ce s nations joignirent leurs guerriers aux fipns,
pour allurer fa vengeance.
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U eut fallu, pour réuffir, d'autres troupes que
des alliés mal intentionnés & des foldats qui let-
voient par force. Cette'milice .marcha vers le
pays des natchez avec une lenteur qui n.etott
pas d’un fort bon augure ; elle attaqua leurs forts
avec une molleffe qui ne promettent aucun fuc-
cès. Heureufement les affiéges offrirent de relâcher
tous les prifonniers qu'ils avoiçnr en leur
puiffance, fi l'on çonfentoit à fe retirer ; & c.ette
propofition fut acceptée avec une joie extreme.
Mais Perrier, ayant reçu quelques fecours d Europe
, recommença les hollilités dans les premiers
jours de l’an 1731. A la vue de ce nouveau péril ,
la diviiion fe mit parmi les natchez , Oc cette
méfintelligence entraîna la ruine de la nation entière.
Quelques foibles corps de ces fauvages turent
paffés au fil de l'épée ; un grand nombre
-furent envoyés efclaves à Saint Dommgue. C e qui
avoit échappé à la fervitude fe à la mort, fe réfugia
chez les chicachas.
C'étoit le peuple le plus intrépide de ces contrées.
On connoiflfoit fes liaifons intimes avec les
mglois. Sa vertu chérie étoit l'hofpitalite. lo u r
■ otites ces raifons , on craignit de lu; ptopofer
l'abord de livrer ceux des natchez , auxquels U
ivoit accordé afyle. Mais le fucçffleur de 1 er-
-ier Bienville , fe crut autorifé g les demander,
ha réponfe des chicachas fut celle de l’indignation
fe du courage. Des deux côtés , on courut aux
armes en 1736. Les françois furent battus en rate
campagne, & repouffés avec perte fous les palit-
fades de leur e*memi. Encouragés quatre ans apres
par les fecours qu’ils avoient reçus du Canada ,
iis voulurent tenter de nouveau la fortune. Ils
fuccomboient encore, lorfque des circonftances
favorables les réconcilièrent avec fes fauvages.
Depuis cette époque , la tranquillité de la Loui-
fiane ne fut plus troublée. On va voir a quel
degré de profpérjté cette longue paixavoit eleve la
colonie.
Ce qu’ étoit devenue la colonie de la^ Louifîane »
le traité de paix de 1765 l'a. cedee a l Efpagne , &
ce quelle eft aujourd’hui. Les cotes de la Louiftane3
toutes fituées fur le golfe du Mexique , font généralement
baflgs & ^ouvertes d'un fable aride.
Elles font inhabitées & inhabitables. On n a jamais
fongé à y élever aucune fortification.
Quoique les françois duffent fouhaiter de s'approcher
du Mexique, ils n'avoient forme aucun
établiflfejïient fur la cote qui eft à l’oueft du Mil-
lîflîpi. On craignoit fans doute q’onenfer l bipa-
gne s qui n'auroit pas fouffert patiemment ce voi-
fînage.
A l’eft du fleuve , on voit le fort la Mobile ,
élevé fut les bords d’une rivière qui prend B
fource dans les Apalaches. U fervoit à contenir
dans l ’alliance des françois, les chaétas, les a 1-
mabous, d’autres peuplades moins nombreules;,
fe à s'affurer de leurs pelleteries. Les efpsgn“ »
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f e penfacole tiroient de cet etabliffeméat quelques
denrées, quelques marchandifes.
L'embouchure du Mifliffipi offre un grand nom
bre de paffes qui n’ont point de Habilite. 1 lu
fieurs font quelquefois à fec. Il y en a qui ne peu
"vent recevoir que des canots ou des. chaloupes
Celle del'e ft, la feulea.ujourdhui frequentee.par
des navires , eft très - tortueufe , n offre qu une.
voie infiniment étroite , & n’a qu’onze ou dottze
pieds d'eau dans les plus hautes marees. Le petit
fo r t , nommé ■ Balife, qui defendoit autrefois i
l'embouchure de la rivière , a perdu toute fon
•utilité, depuis que fon canal s e l comble, fe
que les bâtimens naviguent hors de la portée du
La Nouvelle-Orléans, fituee | trente lieues de
l'Océan eft le' premier établiffement qui fe pre-
fente. Cette v ille , dellinée à être l'entrepôt de
toutes les lraifonsfliie la métropole & la colonie
formeraient'entrelles, fut bâtie fur le bordorien-
' tal du fleuve , autour d'un croiflant accelhble a
tous les-navires >. & où ils jouiffent d'une furete
entière.. On en jeta les fondemens erc 1 7 ^ » ma,s
ce ne fut qu'en 1721 qu elle prit quelque con-
' fiftance 3 qu'elle* déviât la capitale de la Loui-
ftane. Jamais- elle n'a compté plus de feize cents
habitans, partie libres, & partie efclaves. Les
cabanes- qui hcouvroientoriginairement, ont ete
fuccefllvement remplacées par des maifoivs commodes,
mais bâties de bois fur brique , parce que
le fol n’avoit pas affez de- folidité pour foutemr
des édifices plus pefans*- ,
La ville s’élève dans une lire qui a. foixante
' lieues de long fur une largeur médiocre. Cette
ifle , dont la plus grande partie n'eff pas' fufeep
tible de culture, eft formée par l'Océan, par
le MiffifSpi, par lè lac Pontchartrain & par lej
Manchac , ou la rivière d’ Iberville canal que le
Mifliflîpi s'eft creufé' pour y verfer le, fuperflu de
fes eaux dans la faifon de fa- trop grande abondance.
Il peut y avoir fur ce territoire une centaine
de poffeffions , où l’on trouve quatre ou
cinq cents blancs & quatre mille noirs, que des
indigoteries occupent principalement. Quelques
propriétaires entreprenans ont tenté-d’y hàturali-
: fer le fucre ; mais de petites gelées, deflruélives
de cette riche production, ont rendu ces effais
infructueux. Les plantations font rarement conti-
' gués. Dés eaux ftagnantes fe marécageufes-Ies le-
- parent le plus fouvent, fur- tout dans la partie in-
1 ferieure de l’ iflè.
Vis-à-vis l’ifle de 14 Nouvelle-Orléans, fe fur
îh rivière occidentale du-Miffiffipifurent étab
lis , en 17Z2, trois cents allemands , relies infortunés
de plufieurs mille-quon avoit arrachés à
four patrie: Leur nombre a triplé - depuis cette
" époque peu éloignée1, parce qu’ ils ont toujours
1 été lès-hommes les plus-laborieux de-la colonie.
Aidés par environ -d’èiixJtaille- efclaves, ils cultil'indigo
pour l'exportation. Ils s'o.ccupoient autrefois
du coton : mais ils l’ont abandonné, depuis
que l'Europe l'a trouve trop court pour fes
fabriques. - . . A
Un peu plus haut, fur la même cote, furent
placés nuit cents acadiens, arrivés à la Louifîane
immédiatement après la paix de iy d 3. Leurs travaux
fe font bornes jufqu ici a 1 éducation des
beftiaux , à la culture des denrées les plus né-
cefiaires. Si leurs facultés alimentent, Ils demanderont
à leur fol des produélions vénales.
.Toutes celles qui enrichiffent le bas de là colonie
, fe terminent à i’ écabliffement de la Pointe--
Coupée, formé à quarante cinq lieues de la Noii-
■ velte-Orléans. Il fournit de plus, la majeure p a r tie
du tabac qui fe confomme dans le' pays, 8c'
beaucoup de bois pourle commerce extérieur. Çes-
travaux occupent cinq ou fix cens-blancs fe douze-'
cens noirs.
Sur toute fa longueur des terres cultivées dansées
divers établiffemens qui appartiennent à la-
baSe-Louifmne, régne une, chauffée dellinée à les-
' garantir des inondations du fleuve. De larges &
profonds foffés, dont'chaque champ eft entouré ,,
affûtent une .iffue aux fluides qui auroient percé
ou furmônté la digue. C e fol e lï entièrement va-
feux. Lorfqu-’il doit être mis en valeur,-on coupe'
■ parle pied les groffès cr,..nes dont il eft «ouvert.-
■ Dès 'qu’ elles font fèches ', on y met'le feu. Alors,.-
pour peu qu’ on fouille la terre , elle ouvre un feiiv
j fécond à toutes les produélions qui demandent un
terrein humide. Le bled n’y profpère pas,- &■ il
' ne pouffe que des épis fans grain.
La plupart des arbres fruitiers ne réunifient pas-
davantage. Us croiffent- fort vite ; ils fleuriffenf
; deux fois,chaque année : mais le fruit;, piqué de
vers,, lèche & tombe généralement avant' d'avoir
, atteint, fa maturité. U n’y a que le pêcher, l’o-'
, ranger & le figuier, dont on ne peupaflez vanter'
la fertilité.
- On trouve une nature differente dans la haute:
Louifîane. A l'e-ll du Miffiffipi , cette région com-
-rmènee un -peu àu-deffus de la rivière dTbèvyille.;
■ Son terrein, anciennement formé , a-ffez' élevé
'pourêtre à l’abri des inondations, & qui n’a que
le degré d’humidité convenable, exige moins' de
f foins, & promet une plus grande variété de pro-
:: duélions: Ainfi le penfèrent les premiers-françois-
I qui parurent dans ces-contrées: Us s’établirent aux
. Natchez-, yeffàyèrent plufieurs- cultures'quî réuf-
^firent toutes , fe fe fixèrent enfin.-à celle du ta-
,-bac-, qui ne-tarda pas à" avoir dans la métropole '
,la réputation donril étoit digne. Le gouverftemenct
î s’attendoit à voir arriver bientôt de cet établiffe-'
- ment l'appravifionnemenr entrer de la monarchie,,
lorfque la tyrannie de fes- agens etf catifa iortrine,-
iDepuis- cette funefté époque, ce-fol inépoifable
ell refté-efl’ friche , jufqu’à ce que laUratidê-Bre- '
tagne en ayant acquis la propriété par les traités^,)