
4 p£ P A I
eftimatîor*. Puis donc qutil fè'roir affreux de perpétuer
la guerre , de la pouffer jufqu’à la ruine
entière de l’un des partis, & que, dans la caufe
la plus jufte, on doit penfer enfin à. rétablir la
paix, & tendre fans ceffe à cette fin falutaire ,
il ne relie d’autre moyen que de tranfiger fur toutes
les prétentions, fur tous les griefs de part &
d’autre , & d’anéantir les différends par une
convention la plus équitable qu’il foie poflible.
On n’y prononce point fur la caufe meme de la
guerre, ni fur les CQ'ntroverfes que les divers
aétes d’hoftilité pourroierit exciter : aucune des
parties n’y eft condamnée comme injufte ; il n’en
eft- guère qui voulût le fouffrir : mais on y convient
de ce que chacun doit avoir, pour renoncer.
à fes prétentions. .Aufîi voyons-nous que ,
dans ces traités, on s’engage réciproquement à
une pai?e perpétuelle. La paix fe rapporte à h
guerre qu’elle termine j & cette paix eft réellement
perpétuelle, fi elle ne permet pas dé réveiller
jamais la même guerre , .en reprenant les
armes pour la caufe qui 1-avoit Kail innée-. Ge mot
de perpétuel, inféré dans les traités, les- édits
les ioix & les aétes publics, eft devenu.prefqué.
ridicule, & l’on né doit’pas exercer ici une critique
bien févère.
L ’amniftie eft un oubli parfait du paffé ; & ,
comme la p^ix doit anéantir tous les fujets de
difeorde-, ce doit être le premier article du traité.
On n’y manque pas aujourd’hui. Mais , quand lè
traire oublieroit l’ammftie , relie y.eft néceffaire-
jnent çomprife, par lu nature même de la paix.
. Chacune des ptijffanees quiife font la guerre ,
fe difant fondée en juftice , & perfonrie. ne pouvant
juger de cette prétention , l’état où les choies
fe trouvent au moment du traité, doit paffèr
pour légitime ; & , fi ôn veut le changer , il
faut que le traité le dife expreffément. Par con-
fequent toutes les chofes dont !e traité ne dit tien *
doivent demeurer dans l’état -où elles fe trouvent
lors de la fignature : c’eft auflï une fuite de l’am-
niftie promife, Tous les dommages eaufés pendant
la guerre font pareillement.oubliés ,• & l’ on
n’ a aucune.action pouf ceux, dont la réparation
n’eft pas ftipulée dans le traité : ils font regardés
comme non avenus.
Mais .011 -ne - peut étendre l’effet de la tf an faction
• ôu de l’amniftie, à des chofes. qui. n’ont aucun
rappoit à; la /guerre que termine le traité.
Âinfi; des répétitions fondées fur une dette , bu
fur une injure, antérieure à la guerre, mais qui
n’a eu aucune part aux raifons qui l’ont faite entreprendre
, demeurent en leur entier, & ne
font point abolies par le-traité , à moins qu’il ne
comprenne d’une manière expreffe l’anéantiffe-
ment de toute prétention quelconque. Il en eft
de même des.dettes contractées pendant la guerre
envers desTu jets qui n’y ont aucun, rapport', ou
des injures, faites aufli pendant fa durée, mais
fans relation à révat 4e la guerre*
p A i
Les dettes contractées envers les' particulier*
de deux nations ennemies , , ’où les torts qu’ils
peuvent avoir reçus d’ailleurs, fans rapport à la
guerre y ne font poirat abolis non plus par la cran*
faétion ôc par Ufemniftie1, '-qui fe rapportent uniquement
à 'leur objet $ fa voir , à la guerre , : à fes
caufes ;&:’ à fes effets. Ainfi deux fujets d ep uif-
fancesnennemiës contractant en pays neutre , ou
l’ un y recevant'un tort de l’autre, l’accomplif?
fement du contrat, ou la réparation de l’injure &
du dommage, pourra être demandée après la fignature
du traité.de <paix.
Enfin fi le traité déclare que toutes chofes fe*
ront rétablies ' dans l’état où elles étoient avant
la guerre, cette claufe ne slenréndque des ira*
meubles , &ie'Ile ne peut regarder le's chofe-s moi
bilières ou le butin , dont la : propriété paffé d’abord
à ceux'qui s’ en emparent , &;qui £ont cenfés
abandonnés par l’ancien maître , .à caufe delà difficulté
de les reconnoître, & du peu d’efpérance
de les recouvrer.
Les traités anciens,-rappelés & confirmés; dans
le-dernier, font/ partie de. celui-ci, l'comme -s’ ils
y.étoient îefifêrmési^è trànfcrits1 mot à mot; 8c 9
dans les nouveaux articles iquij fé rapportent aux
anciennes cOnventiofis-, l'interprétation» doit fe
faire fuivant les règles données ci-deffiisé
Le traité dé paix oblige les "parties . contraélân*
tes , du moment qu’il eft conclu ,8c' qu’il- a reçu
toute fa f o rm e '&- 'elles- doivent en procurer irïf-
ceflumment l’exécution» Il fa;ut que touces lds hof-
tilités ceffent dès-i l%S;/-à-moins- que' fbn n’ ait
marqué le jour où teyàtâ.doit commencer : mais
ce traité n’oblige leÿTujét’s- qüé lorfqü’ilftleuî "eft
notifié. Il en eft ici'comme ae la trêve. S’il arrive
que dés'gens-de-guerre- commettent dans leurs
fondions, & eri fuivant des règles de leurs devoirs
, des hôlVilités, »âvârft que le traifé'de paix
foit’ parvenu bffieiellénaent à -leur conn&iffance ,
c ’eft un malheur dbüt ils 'ne-- péüvent’être pü ris».;
mais 'lè^fouvéfaftny déjà ''obligé;>à la p'aix\'y doit
■ faire reiftitüér ce' qfii â été 'pris depuis ^qu’elle' éft
-eonclüë ; il n’a aUcun droit-délié fetetïir.
Comme il éfb'difficile qu’il ne fe - trouve pas
quelque ambigirité 'dans un traité | dreffé même
avec tout le foin ou toute la bonne foi poflible
comme on li-Toitr' ordiriàïrëifiën’t dé •méhâgépddes
paflagès bbfcüfs, dont bti pourra'profiter rdâf>s
l’bcCafibn j: cbrhmédl furkfiènt-Aes difficultés dans
‘t’appheatiôn- dé fe§-; cîaufeS aux cas'particuliers',
il?-faut Téuvëht interpréter-les articles.»'Bornons-
nous' à un petit 'nôrnbre ‘de règles • quir conviennent
plus'particuliérement aux traités, dé paix.
i°. En cas de doute , l’interprétation fe fait contré
celui qui a donné la loi'dans lé traité } car
•C’éft' lui , en quelque f a ç o nqu i l’à didé : c?ell
-fafapce y s’il ne s’éft pas énoncé plus clairement'’;
•&Jen étendatit - bu feflefrant;la fignificatiob; des
'termes,-dans:|è fèns: qui lui1 eft le moins favori-
blé » où bn aucun tort * où ©n ne luf
P A I
fait que celui auquel il a bien voulu s’éxpofer.
'Par une interprétation contraire, on rifqueroit de
tourner des termes vagues & ambigus en pièges
pour le contractant le plus foible. .
2°. Le nom des pays cédés par le traité doit
s’entendre', félon rufagë'reçu alôts parmi les personnes
habiles > c a r : on ne préfume point que des
^noraits ou ' des fotsvfoient chargés d’une chofe
suffi importante' "que l’éft' un traité' de paix'; &
les difpofitions d’un contrat doivent fe déterminer
fur ce que les contfaccans oUt eu vraifembla-
blement dans I’efprit, puifque c’eft fur ce qu’ils
•nt'-dans i’efprït . qu'ils contractent.
- 3?. Le traité de paix >nc fe rapporte de luimême
qu’ à la [guerre à laquelle il met fin ; fes
claufes* vagues ..ne doivent entraîner que ce rapport
: ainfi la ftipulation feule dii rétabliffement
des chofes dans leur é ta t, n é fe rapporte point
à des changemens. qui n’ont ,pas. été opérés
par la guerre même. : Cette .claufe générale ne
pourra donc, obliger l’une des-parties à remettre
en liberté un peuple, libre, qui fe fera donné vo-
iontairément à elle pendant la guerre; & comme
un peuple abandonné-par;.fon fouv^rain ., devient
libre ik maître de- pourvoir à fa çonfervation ; fi
ce peuple , dans le cours de.la guerre,,s’efl donné
& fournis. ; volontairement æ l'ennemi. dé fon ancien
fotivérain , fans y être ;contraint par la for.ee
des armes , la promeffe générale de rendre les
conquêtes ne s’étendra .pas • julqu’à lui.
On ne peut fe dégager d’un traité de paix 3 en
difant qu.il ;a été'l'extorqué' par .la' c r a i n t e ou
arraché par. la force. Premièrement, fi cette ex-,
ception étoit: a.dm.ife-., aucun traité de - paix n.e
feroit folide : car il; en. eft peu contre lelquels
on ne pût s’én fer.vir pour .'couvrir la mauvaifetoi.
Autorifer une pareille défaite , ce . feroit attaquer
la fur été. commune .& le fa lut des nations :.la
îUiax-ime fèroitv. exécrable , par. les mêmes raifons
qui rendent la foi des traités facrée dans.!-’univers}
d’ ailleurs il fei]pit prefque, toujours - honteux ik
ridicule" d’aïléguer une pareille exception.
Rompre le traité *de paix,,. c left en violer les
engagemens, foit en faifant ce qu’il défend , foit
:Cn ne faifant pas.ce qu’ il preferit. Or , on■ peut
manquer aux engagemens du traité de trojs ma- '
nières différentes, ou -par i .une conduite -..Contraire
à la nature & .à l’efféncé de tout; traité de paix
■ en général, ou par, dés procédés contraires à
l’efpritdu traité, ou enfin en violant exprefféhient
.lin de-fes ;articles, exprès. •
i°. On-agit contre la nature .& l’effence .d’un
traité de paix en général »contre la paix elle^-même 3
/ quand on la trouble fans fujet-, foit en prenant
les, armes ,& recommençant la ; guerre,, quoiq u’on
ne puifle alléguer même, un prétexte un peu plaU'-
fi.ble, foit.cn pffenfant deiggie.té .de coeur celui
avec qui on a fait. U-ppix*. & en 1§ , traitant,,
l*i-i bu fes fijjetç, -3_ djunemanière .incqn^patjblé ajVep
Glçon, polit, 6’ diplomatique, Torn, 111.
P A I 497
l’état de paix, & qu’il ne peut fouffrir fans r:
.manquer à lui-mëme. C'elt encore agir contre la
nature du traité de paix en général, que de reprendre
les armes pour le fujet qui avoit allumé
la guerre, ou par reffendînent -d’une chofe qui
s’eft. paffée dans, le cours des hoftilités.
Prendre les amies pour un fujet nouveau, ce
n’eft pas rompre le traité de paix ; car, bien
que- flon ait promis de vivre en paix , on n’a pas
promis pour cela de fouffrir des torts ou des in-
jufticesi, plutôt que de s’en faire raifon par la
voie des armes- La rupture vient de celui qui ,
par fon injuftice obftinée, rend ce moyen né-
.ceU'aire.' i
Il ,eft important., de bien diftinguer une guerre
nouvelle & la rupture du traité de p a ix , parce
qiie les; droits; acquis parce traité lubfiftent malgré
la guerre nouvelle , au lieu qu’ils font éteints
par ■ la' .rupture du traité qui leur fervoit de fondement.
Celui, qui avoit accordé ces droits, en
•fufpendrl’exercice pendant la guerre , autant qu’il
eft ; en ^ fon pouvoir , & peut même en dépouiller
entièrement fon ennemi, par le droit de là guerre,
comme, il.pçut. lui ôter fes autres biens,
La jufte défenfe de foi-même ne rompt point
le trait’q de-paix : c’eft un droit ’natQrfel',- auquel
on ne peut renoncer} 8$ eu promettant de vivre
en pa ix , on promet feulement de ne point attaquer
fans fujet, de s’abftenir d’injure & de vio-
lenc-e..
- Mais on . demande, fi la violation d’un feul article
du traité peut en opérer la-rupture entière ?
Quelques auteurs diftinguent . ici deis ' articles
qui-;ifont liés enfeipb.ie, connexi, & les articles
divers > divetji , & prononcent que fi lie traité
eft violé dans les articles divers, la paix fubfîfte
à l’égard des autres. Mais le fentiment de Grotius
paroîf fondé fur la nature 8c l’efprit des traités
dé paix. Il dit que « tous les articles d’un
» feu] .8e même, traité font renfermés l’un dans
m l’autre, .enforme de condition , comme fi-l’on
» avoit d it, je ferai telle ou telle chofe, pourvu
que , de' votre côté , vous falfiez ceci ou cela ».
Et il ajoute ; avec raifon, que,« quand on veut
» empêcher que l’engagement ne demeure par là
.»• fâns.. effet, on ajoute cette claufe expreffe :
» q,u’epcore .qu’on vienne à enfreindre quelqu’un
» des articles du traité, les autres ne lai fieront
•m pas .de fubfilter darts toute ’leur force »1 On
peut fans doute ftipuler de cette manière ; ôn
peut encore convenir que la violation d’un article
fie pburra- opérer qiié fa' nullité d e ’ceux qui y
répondent, 8c qui en font l’équivalent. Mais fi
cette claufe ne fe trouve pas expreffément dans
le traité de paix, un feul article violé paroît
! dpniier atteinte qu traité entier. Kojezj. l'article
j T r a i t é s .; : *
!| , I l ; n’eft; pas moins inutile de vouloir diftinguer
j ici les articles de grande importance, & ceux
|| qui foqt .vyojns, griiye^i A la. rigueur, de droio,-.!*
R r r